Chapitre 21-1

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Les derniers rayons du soleil perçaient à travers les branches basses de l'arbre sous lequel ils étaient assis. Un vieux banc en bois, qui avait visiblement tout vu passer, y compris les gribouillis des enfants et les excréments des oiseaux, les avait accueillis après qu'ils aient quitté la demeure du couple. Ils avaient besoin de faire le point et c'était selon Ethan l'endroit le plus tranquille, et surtout le plus à l'abris des oreilles indiscrètes.

Ils étaient assis face à une maison abandonnée, en haut d'une colline qui offrait une vue imprenable sur le camp et la vallée. De loin, on aurait dit que de la peinture avait éclaboussé les devantures des maisons et des différentes constructions du camp. Plus qu'un village, c'était presque une ville. Aurore avait eu l'occasion de la visiter davantage, avant qu'ils n'arrivent dans ce petit coin de paix, et ils étaient passés devant une école, mais aussi une ferme, le bâtiment de soin ou encore la salle d'entraînement, où de nombreux sports étaient pratiqués. C'était comme si le temps s'était arrêté, ici. 

Elle osait imaginer qu'avant son existence, ou même celle de ses grands-parents, des cités similaires à celles-ci peuplaient la terre. On y avait sûrement les mêmes problèmes que maintenant et les conversations tournaient probablement autour des mêmes sujets. Elle ne supportait pas le système en rigueur, mais elle ne pouvait s'empêcher de saluer l'ingéniosité de ce camp et la constance des efforts de ses habitants. C'était purement remarquable. Elle comprenait pourquoi Ethan et Ashley s'y sentaient bien.

— Je n'aurais jamais pensé que tu étais aussi vicieuse, commenta Ethan en lui faisant un clin d'oeil, sûrement en référence à son petit tour de comédie, tout à l'heure.

Elle se pencha sur sa droite, puis lui fit un clin d'oeil, amusée malgré elle. Elle avait vu sa tête pendant qu'Ashley la prenait dans ses bras. Les yeux exorbités, il semblait réfléchir à quoi faire. ll avait balbutié que tout allait bien se passer, mais sa jambe qui s'agitait spasmodiquement indiquait le contraire. Profitant que le couple soit parti en quête d'un remontant, elle lui avait souri sournoisement. Si elle avait pu, elle aurait rigolé à en perdre la voix. Le regard qu'il lui avait lancé, entre incompréhension et embarras, était mémorable.

— Et moi, je n'en reviens toujours pas que tu n'aies pas compris plus tôt ! s'exclama Ashley en rigolant, le taquinant d'une légère pichenette sur le bras.

— Mais attends, vous êtes trop bizarres, ça me paraissait logique, vu le sujet, qu'elle se mette à pleurer ! se défendit-il, les mains devant lui.

Aurore pouffa, à croire qu'à ses yeux elle n'était bonne qu'à pleurer et se lamenter. Allô, cela faisait longtemps que les femmes devaient se battre pour elles et prouver qu'elles valaient tout autant que les hommes, pensa-t-elle, excédée.

— J'ai eu une semaine pour pleurer, je pense qu'on peut passer à autre chose maintenant, non ? Et puis, ce n'est pas en m'apitoyant sur mon sort que je vais avancer.

Ashley obtempéra avec une moue appréciative. Ethan la fixait toujours, puis finit par sourire en hochant la tête.

— Bien dit. Honnêtement, je te salue, tu es bien plus forte que ce je pensais, rétorqua-t-il en mimant une petite courbette, ses cheveux couleur bronze dans la lumière déclinante tombant en légères bouclettes dans ce geste.

— Il t'a fallu tout ce temps pour t'en apercevoir ? demanda-t-elle d'un ton faussement outré.

Il détourna le regard, puis ricana. Décidant que c'était ridicule de continuer à argumenter davantage, elle se leva et mis ses mains sur ses hanches dans une position autoritaire.

— Bon, de toute façon on n'est pas venus ici pour parler de ma capacité à gérer mes émotions, on a plus important à s'occuper. Ethan, tu penses que si tu retournais voir ton père, il pourrait te donner des informations supplémentaires ? Il fera presque nuit et on n'a toujours pas de ses nouvelles, ajouta-t-elle avec inquiétude, le regard tourné vers le soleil couchant.

La Terre des oubliésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant