Chapitre 23-1

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Aurore tentait de contrôler sa respiration, dissimulée dans l'obscurité. Un garde était brusquement apparu à l'angle d'un couloir, et, prise de panique, elle s'était jetée derrière une pile de coffres en bois poussés contre les murs froids du sous-sol. La peur l'avait étreint avec force alors qu'il il était passé à quelques centimètres d'elle.

Que faisait-elle ici ? C'était à peine si elle avait un plan, sans parler de son état qui était plus qu'inquiétant...

Attendant silencieusement que le silence se fasse, elle agrippait de ses mains tremblantes la surface râpante du caisson, terrorisée à l'idée de se faire prendre. Étonnement, ce n'était pas tellement le fait de se faire arrêter qui lui faisait peur, mais plutôt que cela arrive avant qu'elle ne retrouve Adriel. Elle n'en pouvait plus de cette appréhension qui lui soulevait l'estomac, il fallait qu'elle sache où il était.

Et surtout s'il était encore en vie.  

Ses paupières frémissantes s'abaissèrent alors qu'elle se remémorait son périple à travers ces murs froids et terrifiants. 


Après s'être réceptionnée près du mur, elle s'était rendu compte avec horreur qu'il n'y avait ni portes, ni fenêtres, mais seulement des trous béants, au ras du sol, bardés de tiges en métal. La lumière vacillante qui en provenait dessinait des ombres dansantes sur le sol, et une odeur âcre l'avait immédiatement saisie à la gorge. 

On aurait dit un bâtiment abandonné. Ni gardes, ni animaux, mais seule la végétation envahissante l'entourait. C'était bon signe, et en même temps cela traduisait de l'austérité de cet endroit. Ce n'était pas surveillé, pour la simple et bonne raison qu'ils n'avaient envisagé, à aucun instant, que les détenus s'évadent. 

Après s'être relevée sur ses jambes flageolantes, elle rejoignit rapidement la façade du bâtiment et ses genoux craquèrent lorsqu'elle s'accroupit. Une ouverture, qui semblait mener tout droit en enfer, ainsi creusée à même la pierre, l'appelait presque telle une lumière au fond de l'océan. Ou plutôt, un piège dans la nuit. 

Ses pieds crissèrent sur le sable lorsqu'elle s'en approcha. Finalement, ce n'était pas plus mal qu'il n'y ait personne. Autrement, vu le boucan qu'elle faisait, elle se serait fait remarquer depuis longtemps. 

Contorsionnée, la tête presque passée entre les barreaux, elle plissa les yeux. C'était une pièce uniquement éclairée par une ampoule frémissante suspendue au plafond et une porte, ouverte, donnait sur un couloir sombre. Il n'y avait personne, mais une grande table, couverte de papiers et d'armes en métal, trônait au centre. Elle frissonna, de plus en plus gagnée par l'ambiance lugubre qui se dégageait de ce bâtiment, mais prit sur elle pour poursuivre son exploration ; se baissant, à chaque occasion, pour tenter d'y voir quelque chose. 

À chaque fois, l'espoir, mais aussi la peur, l'étreignait. Des hommes, attachés et couverts de blessures, se succédaient sous ses yeux. Elle en avait même vu un à la peau étrangement pâle manquer tomber de sa chaise, sa tête dodelinant dangereusement sur le côté. Mais nulle trace d'Adriel. Partagée entre le soulagement et l'inquiétude, elle glissait contre la paroi froide du bâtiment et se baissait, encore et encore, tâchant d'oublier l'image terrifiante de ces hommes à moitié morts. Et pour ceux qui paraissaient à peu près en forme, la vie avait depuis longtemps quitté leur regard.

N'y pense pas, se dit-elle en secouant la tête, son coeur battant si fort qu'elle avait peur qu'il explose. 

L'angoisse ne la quittait plus désormais, et, défaite, elle s'apprêtait à rebrousser chemin après avoir constaté qu'il ne restait plus qu'une ouverture, quand elle s'arrêta net. Contrairement aux autres, celle-ci n'avait pas de barreaux. 

La Terre des oubliésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant