Une douleur irradiant son dos finit par réveiller Aurore. Elle grogna, encore à moitié endormie. Ses yeux avaient fini par se fermer tous seuls après la démonstration d'Adriel. Son corps étant si fatigué et douloureux qu'elle n'avait même pas pris la peine de s'allonger, le sommeil la gagnant âprement.
Un peu groggy, ses yeux s'ouvrirent difficilement. De pâles rayons teintaient joliment les alentours et les fleurs se dressaient avec fierté, fraîchement réchauffées par la douceur matinale. Aurore pouvait entendre les oiseaux chanter et le vent souffler doucement dans les hautes herbes, la matinée venant tout juste de débuter. Elle ferma les yeux de délice. C'était son tout premier réveil en pleine nature et elle en savourait chaque instant, des pépiements des oiseaux, de la brise qui soulevait ses cheveux avec douceur à l'effleurement du soleil sur sa peau aux teintes opalines.
Son enthousiasme retomba bien vite, cependant, car Adriel avait disparu. Le terrain était vaste, plutôt dégagé, et pourtant le jeune homme ne semblait se trouver nulle part. Le souvenir de sa blessure et de son état plus qu'inquiétant se raviva à elle : où aurait-il pu aller, de toute façon ? Il avait à peine pu mettre un pied devant l'autre, hier, sans s'effondrer ! D'accord, elle ne le portait pas particulièrement dans son cœur, mais elle avait besoin de lui pour survivre. Il semblait connaître cette forêt comme sa poche et puis, cerise sur le gâteau : il détenait un atout majeur ! Avec ses pouvoirs, ils étaient invincibles. Du moins, c'était ce qu'elle se figurait. Sans parler de ses instincts de tueur, dont elle avait les frais. Toute seule, elle était mal barrée, mais avec lui ? Ses chances de survie venaient de doubler, voire de tripler.
La tête lui tourna quelque peu lorsqu'elle planta ses pieds dans la terre. Le contraire l'aurait étonnée, vu tout le sang qu'elle avait perdu la veille. Entre ses rations et celles d'Adriel, ils avaient pu manger à leur faim, mais il fallait croire que son corps en redemandait. À juste titre.
Elle avait décidé d'arpenter les environs, à l'affût. Essayant de se convaincre que c'était pour se familiariser avec le terrain, elle finit par lâcher un rire amer : ça ne servait à rien de se mentir à soi-même ; elle cherchait surtout Adriel, voilà tout.
En principe, la petite clairière où ils avaient dormi ne représentait pas de dangers, mais s'il y avait bien une chose qu'elle avait appris à ses dépens, c'est qu'il fallait toujours se montrer vigilant. Elle passa une bonne dizaine de minutes à sillonner les alentours de la clairière, intriguée malgré elle par ces petites choses de la nature qu'elle commençait à reconnaître et à apprécier. Des traces de sabots dans la terre fraîche, des toiles d'araignée presque aussi grandes qu'elle, les fourrés qui s'agitaient sur son passage ou encore les couleurs chatoyantes de la flore qui l'accueillait dans un spectacle saisissant.
Bredouille et quelque peu soucieuse, elle finit par revenir sur ses pas dans un soupir. Pourvu qu'il ne soit pas mort dans un ravin, quelque part, songea-t-elle. Des branches craquèrent sous ses pas tandis qu'elle s'accoutumait à la sensation de ses muscles s'échauffant et au balancement régulier de son corps ; quand le calme la saisit soudainement comme dans un avertissement. Une sensation singulière, dont elle n'aurait su dire si elle était inquiétante ou rassurante, la poussa à se figer, les sens en éveil. Était-elle folle ou bien avait-elle l'impression que quelqu'un l'épiait ? Les muscles bandés par la tension, elle attendit, pas très rassurée.
Aurore n'eut même pas le temps de pousser un cri lorsqu'un coup porté derrière son genou droit la fit tomber lourdement à terre, son bras blessé amortissement douloureusement sa chute. La pointe d'un couteau vint lui picoter la nuque et la peur et la surprise la tétanisèrent. Les feuilles, portées par sa respiration lourde et bruyante, voletèrent au ras du sol.
Sonnée et paniquée, elle haletait.
— Je pourrais te tuer, si je le voulais.
Des frissons de peur, mais aussi de fureur, remontèrent le long de sa colonne. Tâchant de tourner la tête, elle pesta quand la pointe du couteau appuya davantage contre sa peau : elle ne pouvait pas bouger. Un grognement de frustration lui échappa devant sa faiblesse apparente. Elle se retrouvait encore et toujours à la place de la victime, de celle qui était incapable de se défendre. Si elle l'avait pu, elle se serait donné des claques. En revanche, peut-être pourrait-elle utiliser son impuissance apparente à son avantage. Il devait sûrement la prendre pour une incapable, surtout depuis qu'il savait qu'elle avait perdu la mémoire. Autant lui montrer ce qu'elle valait et le remettre à sa place, au passage !
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La Terre des oubliés
Science FictionQue feriez-vous si vous vous réveilliez sans aucuns souvenirs, ni repères ? Aurore s'est posé la même question à son réveil quand son corps ne lui offrait que confusion et souffrance. Et quelles sont ces marques étranges et ce tatouage intrigant qu...