Chapitre 28

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Ma tête est horriblement lourde. Lorsque j'ouvre les yeux, une lumière intense s'abat sur moi et me pousse à couvrir mon visage. "Enra ?" Je guette entre mes doigts, et constate que mon frère, ainsi que Meriem se trouvent là. Les deux ont une mine inquiète, et je m'en veux de les avoir mis dans cette situation. "Je...", Nathan s'approche et caresse ma joue d'un geste tendre, "le lieutenant nous a expliqué, je suis désolé de ne pas avoir été là quand t'en avais besoin." J'amène mon index contre mon front, et constate qu'un tissu rugueux recouvre l'entièreté de mon crâne, couvrant de la même façon mes cheveux. Je me souviens tout à coup des précédents événements, et c'est comme si deux mains se mettaient à serrer fortement ma gorge. Je me relève de façon violente, sans faire attention à la perfusion qui est enfoncée dans la veine de mon avant-bras. Mon frère m'empêche de bouger, il me plaque contre mon lit, tout en me demandant de me calmer. Comment ose t-il me demander de me calmer après ce qui vient d'arriver ? Je le dégage et m'enfonce davantage dans mes draps. "J'ai peur", j'avoue à voix basse, "ça va, je suis là pour toi Enra", il m'assure en empoignant mon bras. "Cette fille est morte par ma faute, elle... elle avait l'air si jeune je..." Je serre ma tête de mes deux mains, parce que la douleur devient ingérable. J'ai envie de hurler à pleins poumons, et de cogner ma tête contre le mur, parce que l'affliction devient insupportable.

Après plusieurs minutes, une infirmière m'enfonce quelque chose dans le bras, cette idiote a dû me piquer à trois reprises pour y parvenir. Je reste calme, sous mes draps blancs en attendant que ça passe. Qu'est-ce que je peux faire d'autre de toute façon ? Mon corps devient mou, mais la douleur ne passe pas. Je ne pense plus à rien, ma seule préoccupation pour l'instant est l'efficacité de ce foutu médicament. Je ne sais pas ce qu'elle m'a injecté, probablement de la morphine ou un tranquillisant, puisque je m'endors une fraction de minutes plus tard.

...

C'est calme, très calme. Je discerne seulement les rires lointain des aides-soignantes dans le couloir. Je dégage lentement la couverture de mon visage et je remarque Anderson, assis sur une chaise dans le coin de la chambre. Il semble surpris, comme s'il s'attendait à ce que je ne me réveille jamais. J'examine la pièce, un néon seul, aux nuances orangé, est allumé, ce qui donne un effet tamisé à la pièce. Les rideaux sont fermés, mais je devine à la lumière qu'il fait nuit à l'extérieur.

Qu'est-ce qu'Alan fait ici ? Est-ce que je l'ai imaginé lorsque j'étais dans mon appartement, ou était il réellement présent ? Sur le meuble à ma gauche, repose un vase remplis de fleurs : c'est le bouquet qu'il m'a montré quelques heures plutôt, enfin, je crois, je n'ai plus aucune notion du temps. "Comment vous vous sentez ?", je pince mes lèvres, "ça va. Qu'est-ce que vous faites ici ?" Il me reluque avec arrogance, comme si j'étais une imbécile. "Je vous rends visite, en bon citoyen." Je m'allonge complètement. Je n'ai pas envie qu'il me voit comme une faible gamine. Le plafond attire toute mon attention, quand je dis, "vous avez récupéré le carton ?", "oui. Il se fait analyser par des experts, ainsi que son contenu, comme d'habitude." Je me penche pour le voir, "vous ne voulez pas m'interroger sur ce qui s'est passé exactement ?" Alan me scanne, "j'ai pensé que vous auriez besoin de repos. Ca peut attendre demain." Je hausse les épaules, et lui tourne le dos. "Vous êtes au courant de ce qu'ils m'ont fait ?" Il hésite un instant avant de dire : "non, désolé." Je souffle, "je crois qu'ils m'ont rasé une partie de la tête." Je ris doucement, avec nervosité. Et mon rire disparaît aussi rapidement qu'un flocon de neige au soleil. Je sens une main sur mon épaule, je la dégage brutalement. "Laissez moi tranquille ! On m'a rasé les cheveux punaise..." Je m'engouffre davantage dans le tissu livide, les sourcils froncés, débordante de rage. Je passe ma main sous mon pansement, très difficilement parce qu'il est serré, et je sens cette zone précise, les points de suture et les fils avec lesquels ils m'ont cousu.

Sa précieuse cibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant