Chapitre 63

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"Je vais donc pouvoir honorer ma promesse...", "probablement", je dis à voix basse, les mains posées à plat sur mes cuisses. Mon corps tout entier tremble à l'idée qu'on puisse être réellement ensemble lui et moi, sur une longue période sans se faire interrompre par un déplorable événement : comme un kidnapping par exemple. J'ai trop longuement attendu ce moment, je voulais tellement vivre dans la quiétude avec Anderson à mes côtés que tout cela me semble être un mirage. J'ai envie de le prendre dans mes bras, je veux être près de lui et pouvoir avoir accès à son corps pour être certaine que ce ne soit pas un rêve. Je veux pouvoir prendre sa main facilement, et toucher ses cheveux ainsi que son cou, ses bras et son visage. J'ai le sentiment que mes mains ne veulent pas m'obéir, et risquent de céder à ces envies déplacées, alors je les enfouis subitement sous mes cuisses. Alan réfléchit longuement, "j'ai tellement attendu ce moment, et j'ai imaginé un nombre incalculable de fois ce que je ferais. Maintenant, je n'en ai aucune idée. Je veux tout à la fois."

Mon souffle se coupe, "j'ai aussi imaginé ce moment, et là je ne sais pas quoi faire. Je crois que je veux des explications pour certaines choses du passé, avant de... de tourner la page et de passer aux choses sérieuses." Il sourit, un sourire taquin, puis il pose son dos contre le canapé et place son bras le long du dossier. Je fais tourner les bagues autour de mes doigts.

"Comment t'as su que les bonbons à la menthe sont mes préférés ?", "j'ai vu des paquets de ces bonbons quand je suis venu chez toi, il y en avait dans la cuisine, et sur la table du salon", "et le paquet qu'il y avait dans le sac quand tu m'as rendu les vêtements à mon frère, c'était volontaire du coup ?", "oui", "et le jour où t'es venu chez moi quand les jeunes de mon quartier t'avaient frappé..." Il ne me laisse pas terminer, "ce n'était pas arrivé dans ton quartier, j'ai mentis. Ça s'est passé plus loin, à 15 minutes en voiture de ton appartement, j'ai pris la route pour venir jusque chez toi." Je me redresse subitement, "non !! Sérieux ? T'as conduit pendant 15 minutes alors que tu pouvais à peine marcher ?? En plus tu m'as menti !" Alan baisse les yeux, je ne pensais pas que ça le mettrais mal à l'aise. "Et pourquoi t'as fait ça ? À ce moment-là on... on n'était pas vraiment ami", "parce que je me voyais pas être ailleurs que chez toi." Je plisse les yeux, cherchant à le cerner ou le comprendre, "tu savais pourtant que je n'allais pas te soigner, ni te sauter dans les bras. Pourquoi t'as fait ça ?" Il hausse les épaules et glisse sa main dans ses cheveux, "je savais juste que j'avais envie d'être avec toi à ce moment, je ne me suis pas posé de question", "ça ne t'as pas fait du mal ce que je t'ai dit à ce moment-là ?", "un peu... mais plus tard j'ai compris que tu le pensais pas, j'ai su différencier les moments où tu étais sincère, et ceux où tu ne l'étais pas", "je suis désolé de t'avoir dit ça, je m'en suis voulu la seconde même", "c'est pas grave..."

Je le lorgne du coin de l'œil, "je suis désolée, je le regrette." Nous nous regardons une bonne minute, je ne sais quoi dire, ni quoi faire, mais mes mains commencent doucement à me brûler. Sans me poser de question, je lève le bras pour atteindre la face d'Alan, et je promène mes doigts sur sa peau. Son attention est sur moi, mais je l'ignore, je suis trop occupé à contempler sa beauté. Mon estomac s'écrase, et une tornade de frisson m'envahit au moment où nos yeux se retrouvent. Mon index est posé contre sa joue. Ses billes sur moi n'ont jamais été si profondes, ce moment est terriblement intense. C'est comme si nous venions de nous embrasser, sauf que ce n'est pas le cas. Mon doigt chemine le long de son visage, puis atteint sa gorge. Je trace la fine cicatrice qui longe son cou, celle que Mimi lui a faite. Je me souviens de ce jour comme si c'était hier. "On est supposé aller doucement non ?", "mh", je marmonne en faisant couler mes doigts contre sa mâchoire. Mes deux mains sont contre son visage, "j'ai toujours eu peur de toucher ton visage, tu sais pourquoi ?", "pourquoi ?", "parce que j'avais l'impression que t'allais me mettre un coup de tête. Tu dois apprendre à mettre moins de rage dans tes yeux Alan, surtout quand tu es face aux personnes que tu prétends aimer." Son regard qui était noir il y a quelques secondes s'est adouci. "En plus ça te fera des rides", je souris et il m'imite aveuglément.

Sa précieuse cibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant