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L'ATTENTE

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— Je m'ennuie, gémit Ranpo en se laissant glisser sur sa chaise.
— Je pense qu'on en a plus pour longtemps, dit Poe pour le rassurer.
— J'ai faim, et le distributeur marche même pas !
— Tu veux que j'aille en chercher un autre ?
— Non, j'ai pas envie de bouger...
— C'est normal que ça prenne du temps, c'est toujours long l'attente à l'hôpital, dit Chûya en tournant une page de son livre.
— Pourtant il est tard, il devrait y avoir moins de gens pour l'instant..., dit Atsushi en baillant.
— Mais c'est pas amusant ici, gémit Ranpo.
— On est dans un hôpital, pas à la foire, répliqua Chûya d'un ton sec.
Ranpo soupira et laissa tomber sa tête en arrière.
Cela faisait plus d'une heure qu'il était assis sur cette chaise, dans la salle d'attente de l'hôpital, à patienter pour voir un médecin. Il était environ trois heures du matin, les sirènes des ambulances continuaient de raisonner depuis l'extérieur du bâtiment, des médecins en blouse blanche arpentaient inlassablement des couloirs de l'hôpital, en passant à toute vitesse devant des patients qui s'écroulaient de fatigue. Il y avait de moins en moins de bruit dans la salle d'attente, mais elle était toujours aussi remplie. Et le pire était que la cafétéria avait fermé, et que les distributeurs de nourriture ne marchaient plus. Ranpo était affamé, il allait mourir de faim si ça continuait.
Il releva la tête et regarda ses amis d'un air morne. Poe était assis juste à côté de lui, il avait ses jambes serrées l'une contre l'autre, la tête baissée, et il semblait très occupé à griffonner quelque chose sur un carnet qu'il tenait. À deux sièges de lui, Chûya et Dazai étaient occupés à lire un livre sur le suicide, que Dazai avait apparemment toujours sur lui. Chûya avait étendu sa jambe blessée sur les sièges qui le séparait de Poe, et il s'était adossé contre Dazai, qui avait passé sa main sous son t-shirt et qui le caressait doucement. Et juste à côté d'eux, Atsushi était assis près d'Akutagawa, qui somnolait depuis quelques minutes, et Atsushi semblait hésiter à prendre sa tête pour la poser sur son épaule.
S'ils étaient tous réunit à l'hôpital, c'était tout simplement parce qu'ils avaient eu un... un accident. Comme Atsushi avait changé d'appartement, il avait fallu déplacer ses cartons, même s'il n'en avait pas beaucoup, alors Ranpo et Dazai étaient venu l'aider. Ranpo avait appelé son petit ami, Poe, pour qu'il vienne l'aider, et Dazai avait eu la brillante idée d'appeler Chûya pour « faire la course avec lui ». Chûya étant incapable de résister aux provocations de son petit ami, il s'était immédiatement précipité chez Atsushi pour répondre à son défi. Et il avait ramené Akutagawa avec lui.
Évidemment, Ranpo ayant parfois le même âge mental que Dazai, il avait voulu faire la course avec eux. Alors ils avaient saisi des cartons, ils étaient sortis en courant de l'appartement, ils avaient dévalé à toute vitesse les escaliers et... Ranpo avait loupé une marche. Il avait alors trébuché sur une marche, il était tombé sur Dazai qui se trouvait juste devant lui, Dazai avait lâché son carton dans les airs et avait bousculé Chûya, et Chûya avait percuté le pauvre Akutagawa qui remontait les escaliers. Résultat, Ranpo avait dégringolé les marches et sa tête s'était cognée contre la rambarde de l'escalier, Dazai avait foncé dans un mur, Chûya s'était étalé au sol et le carton qu'avait lâché Dazai lui était tombé sur la cheville, et Akutagawa s'était presque fait assommé. Voilà pourquoi ils se retrouvaient à l'hôpital, à attendre comme des imbéciles pour se faire soigner. Ils n'étaient pas très futés...
   — J'ai faim, répéta Ranpo d'une voix enfantine.
   — Tout ça c'est de la faute de Chûya, dit Dazai d'un ton catégorique.
   — Pardon ?! Et en quoi c'est de ma faute ?!
   — Tu étais sur mon chemin, et t'es tellement petit que je t'avais pas vu.
   — Si j'étais sur ton chemin, c'est parce que t'étais trop lent pour me dépasser.
   — Si t'étais plus grand, je t'aurais vu et je t'aurais pas piétiné, répondit Dazai en levant la tête avec dédain.
   Chûya marmonna un juron et repoussa sèchement Dazai, en retirant sa main de sous son t-shirt.
   — Je m'en vais, ça sert à rien de rester ici, dit-il en récupérant son manteau et son chapeau, qu'il avait retiré.
   — Mais et ta cheville, dit Atsushi avec inquiétude.
   — C'est qu'une cheville cassée, je vais pas en mourir, répliqua sèchement Chûya. Atsushi, débrouille-toi pour ramener Akutagawa chez lui, moi j'ai mieux à faire.
   — Chûya Chûya Chûya, arrête de faire ton petit commandant et reste tranquille, dit Dazai en le tirant contre lui pour le reprendre dans ses bras.
— Lâche-moi tout de suite, dit Chûya avec agacement.
— On est là pour ta cheville, si tu pars ça veut dire qu'on a attendu pour rien !
— On est aussi ici pour Ranpo, ajouta Poe avec gêne.
— Alors partez et nous on reste, pourquoi est-ce que vous êtes tous venu d'abord, s'énerva Chûya.
— Parce que sans moi tu t'ennuierais Chuchu !
— Je m'appelle Chûya, et je risque pas de m'ennuyer sans toi. Dégage, tu me déranges.
   — Mais oui Chuchu, mais oui, dit Dazai en repassant sa main sous son t-shirt.
   Chûya poussa un soupir de frustration, mais il ne chercha pas à lutter davantage et laissa son petit ami le prendre dans ses bras. Quel drôle de couple, il passait vraiment leur temps à se chamailler, et pourtant ils s'aimaient plus que tout. Poe avait du mal à comprendre comment ils pouvaient supporter autant de dispute, car lui il détestait se disputer avec son petit ami. Ranpo laissa tomber sa tête sur l'épaule de Poe et regarda ce qu'il écrivait. C'était le plan de son roman qu'il s'apprêtait à écrire, Ranpo reconnaissait les noms des personnages.
   — Poe je m'ennuie !
   — Tu veux qu'on rentre ?
   — Non je veux de l'attention, gémit Ranpo.
   Poe rougit et rangea aussitôt son carnet pour prendre la main de Ranpo.
   — Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse ?
   — Hmm on fait des devinettes !
   — Mais tu es trop fort à ce jeu...
   — Justement !
   — Si tu veux Ranpo j'ai une blague, lança Dazai.
   — Oh oui !
   — Pète et Répète sont dans un bateau, et Pète tombe à l'eau. Qui reste-t-il ?
   — Répète !
   — Pète et Répète sont dans un bateau, Pète tombe à l'eau, qui reste-t-il ?
   — C'est Répète !
   — Pète et rép-
   — Bon c'est bon on a compris, coupa Chûya avec agacement. Elle est nulle ta blague.
   — Ok alors fais une blague Monsieur je fais mieux que tout le monde !
   — J'ai pas envie.
   — Et si on disait tous une chose qu'on déteste chez son partenaire, proposa alors Dazai. Je commence ! Je déteste ton sens de l'humour ! Ah mais non, il est inexistant...
   — Oh bravo c'est très fin ça, répliqua Chûya en levant les yeux au ciel. Et bien moi je déteste... Hmm... Attends il faut dire une chose ? Il y a tellement de chose que je teste chez toi, il faut que je fasse une sélection...
   — Hilarant vraiment.
   — Bon à moi, s'exclama Ranpo pour couper leur dispute. Je déteste rien chez Poe parce qu'il est parfait !
   Ranpo embrassa son petit ami avec joie, ce qui eut pour effet de faire rougir son visage et ses oreilles.
   — Moi non plus, je déteste rien chez toi, dit-il avec un petit sourire.
   — Pfff vous êtes nuls, critiqua Dazai. Atsushi à toi.
   — Hein ? Mais moi je suis tout seul...
   — Oh pas à nous ! Qu'est-ce que t'aimes pas chez Akutagawa ?
   — Akutagawa ? Je sais pas... Le fait qu'il soit très têtu sûrement, expliqua Atsushi avec gêne.
   — Et maintenant ce qu'on aime le plus chez notre partenaire, décida Ranpo. Atsushi commence !
   — Sa voix, répondit Atsushi en détournant les yeux. Elle est cassée et j'aime bien...
   — Chacun ses goûts, dit Dazai d'un ton plein de jugement. Moi c'est tes cheveux Chuchu !
   — Tes mains, répondit Chûya d'un air impassible.
   — Moi c'est ta manière de réfléchir, dit Poe avec un sourire.
   — C'est vrai que je réfléchis super bien ! Attends il faut que je réfléchisse pour toi...
   Le problème, c'était que Poe avait beaucoup de qualité, il était difficile d'en choisir une seule... Ranpo aimait beaucoup de détails mineurs chez lui. Il aimait son apparence et sa personnalité, mais il aimait aussi le fait que Poe faisait toujours tout pour ne pas le contrarier. Il aimait le voir marcher avec son long manteau sur ses épaules, qui volait derrière lui comme une cape. Il aimait le voir faire des schémas d'enquêtes pour ses propres histoires. Il aimait voir l'admiration briller dans ses yeux lorsqu'il le regardait. Il aimait aussi toute l'attention qu'il accordait à Karl, comme s'il s'agissait de son enfant. Et il aimait le voir rougir à chaque compliment qu'il recevait.
   Comment faire un choix lorsqu'il aimait tout ce qui constituait Poe ?
   — J'aime tout chez toi, c'est trop dur de faire un choix, soupira Ranpo.
   — Dis un détail physique alors, suggéra Dazai.
   — Hmm... J'aime tout aussi, mais je dirais ton sourire.
   — Il n'y a rien qui te déplaît chez moi, demanda Poe avec surprise.
   — Si, tu m'empêches de manger des bonbons et ça me dérange fortement !
   — Mais c'est pour ton bien Ranpo...
   — Ça me dérange quand même.
   — Un médecin vient vers nous, prévint Chûya en refermant son livre.
   — Ah enfin, s'exclama Ranpo en se levant.
   Ce n'était pas trop tôt, il allait bientôt pouvoir rentrer chez lui ! Tout le monde se leva pour se préparer à partir, mais le médecin qui se dirigeait vers eux tourna soudain vers un autre groupe de personnes, réduisant à néant tous leurs espoirs.
   C'était officiel, Ranpo détestait les hôpitaux.

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L'os est court mais j'espère qu'il vous plaît ! Lundi on se retrouve pour le début d'une nouvelle intrigue, qui cette fois se passera dans l'univers du manga ! Elle sera sur le Shin soukoku, avec un peu de soukoku.

À lundi :)

Recueil Bungo Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant