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LES HARCELEURS DU DEUXIÈME ÉTAGE


La jalousie

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— Tetchô, qu'est-ce que tu fais ?
— Rien, je mange.
— Devant la fenêtre ? Tu cherches le voisin ?
— Il a laissé un mot sur sa fenêtre et j'essaye de comprendre ce qu'il veut dire.
— Pourquoi ?
— Je comprends pas ce qui est écrit, je pense que c'est un message code pour le voisin d'en-dessous.
— Hmm...
Jonô s'éloigna, sans que Tetchô n'y fasse attention. Il se tenait debout devant la fenêtre de son salon, un bol de ramens à la main, occupé à regarder la fenêtre du voisin en face de chez lui. Il avait remarqué que depuis quelques semaines, son voisin avait pris l'habitude de laisser des mots sur sa fenêtre, et Tetchô avait fini par comprendre qu'il discutait avec Dazai, le jeune homme qui habitait à l'étage inférieur et qui passait son temps à crier. Et Tetchô prenait un malin plaisir à surprendre leur conversation, même s'il ne pouvait en voir qu'une partie. Il ne connaissait pas son voisin d'en face, il savait seulement qu'il adorait regarder ses séances de musculation, ce qui ne le dérangeait pas plus que cela. À sa place, il aimerait se regarder aussi.
Tout à l'heure, il s'était rendu compte que son voisin avait accroché une feuille sur sa fenêtre, sur laquelle était marqué « —>O 🌙 ? ». Autant dire que Tetchô était assez perplexe devant ce message...
— Il y a une flèche pointée vers un cercle, une lune et un point d'interrogation. Tu comprends quelque chose ?
— Non et je n'en ai rien à faire.
Tetchô se tourna avec surprise vers son petit ami. Jôno avait toujours mauvais caractère, mais aujourd'hui il semblait plus irrité que d'habitude. Pourtant ce matin il allait bien, et vu la nuit mouvementée qu'ils avaient eue, Tetchô avait du mal à lui trouver des raisons pour faire la tête. Lui il planait sur un petit nuage depuis le début de la journée, la nuit que lui avait offerte Jôno lui avait redonné de l'énergie pour toute la semaine au moins !
— Tu fais la tête, demanda-t-il sans comprendre.
— Pas du tout, dit Jôno d'un ton sec.
Il était assis sur leur canapé, ses jambes étaient croisées, ses bras aussi, et sa mâchoire était contractée. Il était évident qu'il était en colère.
— Tu veux des ramens, tenta alors Tetchô.
— Non, Tetchô personne n'aime les ramens au miel à part toi.
— C'est super bon pourtant, répliqua Tetchô en prenant une bouchée de ramens avec indifférence. Pourquoi tu fais la tête ?
— Je fais pas la tête.
— Je te trouve assez aigri là.
— Peut-être parce que mon mec passe plus de temps à mater chez le voisin en étant torse nu, plutôt qu'être avec moi.
Tetchô haussa les sourcils, avant de sourire. Il ne chercha pas à comprendre comment Jôno savait qu'il ne portait pas de t-shirt, et se rapprocha de lui pour s'asseoir à ses côtés.
— T'es jaloux, demanda-t-il avec amusement.
— Pas du tout.
— Chéri je le connais même pas.
— Et alors ? Ça fait deux semaines que tu regardes chez lui.
— Comment tu le sais ?
Jôno tourna vivement la tête vers lui, ses yeux s'assombrir et son visage prit une expression meurtrière.
— C'est tout ce que tu trouves à répondre ?! Comment je le sais ?! Je te signale que je suis aveugle, pas sourd ! J'entends très bien ta respiration, et puis je sens ta présence !
— Je suis juste curieux, répondit Tetchô, dans l'espoir d'apaiser son petit ami.
Mais Jôno s'empara d'un coussin et frappa son visage avec, et Tetchô comprit que s'il ne trouvait pas un moyen de le rassurer rapidement, il se retrouverait bientôt dans un cercueil.
— Vas-y, va le baiser alors, cria-t-il avec colère.
— Je peux pas, je suis en couple, répondit Tetchô en riant.
— Tu te fous de moi ?! Tu peux pas parce que tu m'aimes, pas parce qu'on est en couple, cria Jôno en le frappant une nouvelle fois.
— Ah je t'aime ? Désolé j'avais oublié...
Un nouveau coussin s'écrasa sur le visage de Tetchô, avant que Jôno ne se lève et parte avec fureur. Tetchô le regarda faire en continuant de rire, partagé entre l'idée de le suivre pour l'embêter, rester ici pour le laisser bouder dans son coin, ou aller le rassurer en lui disant qu'il était le seul à compter.
   Il avait l'habitude de la jalousie de Jôno, et il la trouvait toujours très amusante. Il était en couple avec lui depuis plusieurs années et il lui montrait autant que possible son amour. Il lui offrait des fleurs pour qu'il en sente le parfum, que l'odeur les imprègne et qu'il puisse reconnaître Tetchô grâce à la rose qu'il portait. Il sortait avec lui, ils se baladaient ensemble et Tetchô n'avait jamais peur de lui prendre la main, plutôt que de le laisser tenir son bras pour marcher. Il lui disait qu'il l'aimait, qu'il voulait le voir, le tenir dans ses bras, qu'il pensait à lui. Ils étaient heureux ensemble, et Jôno n'avait pas de quoi être jaloux.
   Le reste du monde n'intéressait pas Tetchô, et dans une semaine il aurait sûrement oublié le visage de son voisin. C'était ainsi pour tous ceux qu'il rencontrait, il les oubliait dès le lendemain. Seul Jôno était immédiatement resté dans sa mémoire, et cela ne changerait jamais.
   Lui rappeler ne lui ferait pas de mal. Tetchô posa son bol de ramen au miel (qui étaient délicieux, contrairement à ce que disait Jôno), et partit rejoindre son petit ami. Il s'était réfugié dans la salle de bain, et était visiblement très occupé à fouiller dans les placards.
   — Je cherche une décolo, dit Jôno, comme s'il avait pressenti la question qu'allait poser Tetchô.
   — Pourquoi ?
   — Pour la renverser sur la tête du voisin et de son ami qui passe son temps chez lui.
   — C'est un peu excessif.
   — Pas du tout. Au départ je voulais leur jeter de l'huile avec une allumette enflammée, dit Jôno avec sérieux. Ça leur apprendra à mater mon mec.
   — T'as pas besoin de faire ça tu sais ?
   — Ils ressemblent à quoi, demanda Jôno d'un air irrité. Ils sont grands ? Musclés ? Qu'est-ce qu'ils ont d'intéressant ?
   — Si je me souviens bien... Le voisin d'en face est petit, roux, et musclé. Il est même super bien foutu. L'autre est plus grand, pâle et il a toujours l'air fatigué.
   — Il a pas l'air assez beau pour que je le brûle, c'est pas une menace. Je me contenterais de l'autre alors.
   — Bébé, notre voisin flirt avec Dazai, il doit plus rien en avoir à faire de moi.
   Jôno ne répondit pas. Il ouvrit un tube de savon et sentit l'odeur pour essayer de reconnaître celle de la décoloration, et pendant un instant, Tetchô se demanda s'il n'était pas sérieusement en train de chercher de quoi ruiner les cheveux de leur voisin. Il avait l'air vraiment agacé, et Jôno était du genre à ne pas hésiter à éliminer les adversaires alors... Tout était possible avec lui.
   — Jôno, c'est toi que j'aime, dit-il en refermant le placard dans lequel il fouillait.
   — Mais depuis que tu l'as remarqué, tu ne fais plus qu'attention à lui.
   — Oui parce qu'il met des mots débiles sur sa fenêtre, je trouve juste ça drôle.
   — Tu le laisses te mater par la fenêtre.
   — Parce que ça n'a aucune importance, je pense même pas à lui.
   — Mais moi je peux pas te mater, s'écria soudain Jôno d'une voix tremblante de colère et de peur. Lui il peut te voir et t'admirer, alors que moi je sais même pas à quoi tu ressembles !
   — Tu sais à quoi je ressemble.
   — Je suis aveugle Tetchô, je ne peux pas savoir à quoi tu ressembles !
   Jôno se détourna et essaya de partir, mais Tetchô le rattrapa par le bras et le tira vers lui pour l'étreindre. Il n'avait pas pensé que sa jalousie venait de sa cécité, c'était stupide, il aurait dû s'en douter. Jôno ne pouvait pas le voir, pas comme son voisin qui pouvait observer ses séances de musculation. Jôno ne pouvait qu'imaginer cela, tout comme son visage, son corps.
   Il ne parlait jamais de sa cécité, et Tetchô ne cherchait pas non plus à évoquer le sujet. Il s'y était vite habitué, cela ne le dérangeait pas et pour rien au monde il n'échangerait Jôno contre quelqu'un de voyant. Peu importe qu'il soit aveugle, il l'aimait, avec ou sans ses yeux. Jôno ne donnait jamais l'impression de mal vivre son handicap, et il était si habile au quotidien qu'il agissait presque comme un voyant. Ses sens étaient très aiguisés, il entendait des sons que Tetchô peinait à distinguer, et il pouvait ressentir plus de choses facilement. Il pouvait presque marcher seul dans la rue dans se cogner à des passants, ou sans louper un feu rouge, et quand ils allaient au restaurant il n'avait pas besoin de menu pour savoir ce qu'il y avait à la carte.
   Il semblait toujours à l'aise avec sa non voyance... Tetchô n'avait jamais imaginé une seule seconde qu'il puisse mal vivre le fait de ne pas le voir.
   — Jôno... Me voir c'est pas si important.
   — Bien sûr que si.
   — Non. Oui, nos voisins peuvent me voir, mais toi tu me connais bien mieux qu'eux. Eux ils ne verront jamais tous les détails que tu vois chez moi, ils ne verront jamais les rides que tu sens en caressant mon visage, les veines qui parcourent ma peau ou alors tous les grains de beauté que tu comptes en passant tes doigts sur moi.
   — Mais je...
   — Tu me vois d'une manière différente, et c'est cette manière que j'aime. Tu me vois avec des mains, avec tes baisers, ton odorat, tes sens. Tu me vois avec ton cœur et il n'y a rien de mieux que ça. C'est toi que j'aime, les autres comptent pas Jôno.
   Jôno ne répondit pas et détourna la tête, mais Tetchô eut le temps de voir des larmes briller dans ses yeux. Perdues devant ses iris opalins, elles avaient l'air de minuscules cristaux qui brillaient sur un voile irisé.
   — Bon alors je veux bien ne pas détruire les cheveux du rouquin...
   — On a pas le temps pour ça, on a mieux à faire.
   — Comme quoi ?
   — Puisque toi aussi tu veux me voir, je propose qu'on fasse une... séance d'exploration. Tes mains vont apprendre à mieux me connaître, dit Tetchô en posant les mains de Jôno sur sa poitrine.
   — Ah oui, ça pourrait m'aider à te visualiser.
   — Tu peux tout toucher si ça peut t'aider.
   — Oui là je visualise bien, dit Jôno en souriant.
   Tetchô attira son petit ami contre lui et l'embrassa avec envie, laissant Jôno serrer sa poitrine dans ses mains.
   — Tu sens les ramens et le miel, je déteste ça, dit Jôno entre deux baisers.
   — Si tu veux je peux avaler autre chose, proposa Tetchô en posant ses mains sur ses fesses.
   — Ça t'a pas suffit cette nuit ?
   — Je pensais que si jusqu'à ce que tu commences à me toucher.
   Jôno lui sourit et glissa sa main dans son jogging pour la poser sur son entrejambe qui commençait à se durcir, ce qui arracha un soupir de plaisir à Tetchô.
   — Bizarrement tu trouves toujours le chemin jusque dans mon pantalon, dit-il en plaquant son petit ami contre le mur.
   — Je vais juste là où c'est le plus chaud...
   — Alors continue de le faire, murmura Tetchô avant de retirer ses vêtements.

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L'os est court mais je le trouve cool quand même, c'est un peu comme le Shin soukoku, simple et efficace 🧍🏻‍♀️
(Je dis ça pour essayer de me convaincre que c'est bien).

Demain ça sera un os sur Fyodor, Chûya et Aku !

À demain :)

Recueil Bungo Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant