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LES CHRONIQUES DE YOKOHAMA

Le Lotus

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Ryûnosuke leva une petite bouteille de cristal, et fit couler un filet d'huile sur ses bras. Il l'appliqua soigneusement sur sa peau nue, et massa ses muscles avec de doux gestes, les couvrant d'un fini brillant qui luisait sous la lumière du soleil. Sa peau s'imprégna du lotus qui parfumait l'huile. L'odeur du lotus était douce, tendre et poudrée. Elle était délicate, suffisamment légère pour ne pas être entêtante, pour la sentir il fallait se rapprocher de sa peau et longuement humer le parfum qui l'embaumait. Le lotus était mélangé à des pousses de jasmin, ainsi qu'à de l'essence de prune et d'arbre de soie. Ce mélange était floral et frais, mais il avait une touche de sensualité que Ryûnosuke aimait, et qui faisait tout son charme.
Il ne portait pas toujours cette huile, bien qu'il l'appréciait. Elle n'était pas grasse, elle adoucissait sa peau et la faisait briller, mais Ryûnosuke préférait utiliser des huiles aux parfums orientaux, plus boisées et plus discrètes. Il gardait celle-ci pour les grandes occasions, ou bien pour certaines visites qu'il recevait. Il aimait porter cette huile lorsqu'il voyait Atsushi. C'était celle qu'il avait mise lors de leur première rencontre. Ce jour-là, il portait de nombreux kimonos sur lui, des parures d'or, ainsi que des chrysanthèmes jaunes dans sa chevelure de jais. Il n'avait mis que quelques gouttes d'huile sur lui, au creux de son cou, et pourtant, Atsushi avait réussi à les sentir. Il s'était penché vers lui et avait décelé le lotus qui parfumait son corps, malgré les tissus qui l'étouffaient. Et il le sentait chaque fois qu'ils se voyaient.
Il ne savait pourquoi, mais Ryûnosuke aimait qu'Atsushi puisse reconnaître son parfum à travers ses kimonos. Cela était agréable, rassurant, et bien qu'il l'agaçait constamment, Ryûnosuke aimait qu'Atsushi respire son parfum en se penchant discrètement vers lui. Il enduit longuement son corps d'huile, avant d'enfiler un kimono d'un or clair.
Ce matin encore, Atsushi avait rendez-vous avec sa sœur afin de parler de mariage. Leurs rendez-vous duraient depuis une semaine, Atsushi venait passer chaque matinée aux côtés de Gin, et Ryûnosuke les observait se balader au milieu des roseaux des jardins, discuter dans les galeries d'art du palais, et même déjeuner parfois ensemble. Il n'avait pas besoin de les observer, puisque Chûya chaperonnait déjà Gin, mais il ne pouvait s'en empêcher. Il avait besoin de voir comment se comportait Atsushi avec elle, et si Gin lui portait de l'intérêt. Gin ne semblait pas particulièrement avenante avec lui, mais Atsushi était toujours très aimable avec elle. Il souriait beaucoup, mais Gin ne lui renvoyait que peu ses sourires, ce qui satisfaisait Ryûnosuke. Il était rassuré de voir que sa sœur ne changeait pas de comportement avec lui, ce qui signifiait qu'elle ne devait pas l'apprécier plus que cela. En revanche, il était difficile de savoir ce qu'Atsushi pensait de Gin. Ryûnosuke l'avait bien questionné, mais il disait seulement qu'elle était très intelligente, et qu'il avait beaucoup de respect pour elle. Il complimentait souvent son apparence également. Il aimait ses traits, sa peau claire, ses yeux étirés, leur couleur sombre, et la manière dont s'incurvait sa bouche. Ce qui agaçait Ryûnosuke.
   Il ne saurait dire en quoi cela l'agaçait, mais entendre les compliments d'Atsushi pour Gin l'irritait de plus en plus. Était-il obligé d'apprécier tant de choses chez elle ? Et cela signifiait-il qu'il l'aimait ? Ryûnosuke n'arrivait pas à comprendre, et il n'aimait pas du tout l'idée qu'Atsushi aime Gin. Il pouvait accepter qu'ils se marient pour accomplir leurs devoirs mais... L'idée qu'ils aient des sentiments l'un envers l'autre le dérangeait. Il ne savait pourquoi, mais il était incapable d'accepter cela.
   — Ryûnosuke ?
   Le jeune homme se tourna, et vit que Chûya se tenait dans l'encadrement de la porte de salle de bain. Il portait un long kimono de la couleur des feuilles mortes d'automne, et ses cheveux les plus longs, habituellement tressés, tombaient librement sur son épaule gauche. Ses bras étaient croisés sur sa poitrine, et un sourire étirait ses lèvres.
   — Le Prince Atsushi est venu vous rendre visite, il vous attend dans les jardins.
   — Oh. Ne devait-il pas seulement passer ce soir pour le dîner ?
   — Le manque de votre compagnie devait être trop grand pour qu'il attende jusqu'à ce soir, répondit Chûya d'une voix amusée.
   — J'en doute, dit Ryûnosuke en attachant une obis blanche autour de sa taille.
   — Alors peut-être est-il venu en hâte au palais pour vous demander la main de votre sœur ?
   Ryûnosuke fusilla Chûya du regard, et choisit de ne pas répondre. Il voulut sortir de sa salle de bain, mais Chûya lui barra le chemin, et leva la tête vers lui d'un air taquin.
   — Que feriez-vous s'il venait réellement demander la main de Gin ?
   — Si Gin l'accepte, je l'accepte aussi, dit Ryûnosuke d'un air peu enjoué.
   — Mais vous, l'acceptez-vous ?
   — Il n'est pas question de mon mariage, mon avis ne compte pas.
   Ryûnosuke fit un pas sur le côté, mais Chûya l'imita, l'empêchant ainsi d'avancer. Ryûnosuke le regarda avec agacement.
   — Pouvez-vous me laisser sortir ?
   — Que se passe-t-il entre vous et Atsushi, questionna Chûya sans lui répondre.
   — Il ne-
   — Ne me mentez pas, j'ai des yeux et je sais très bien m'en servir.
   — Je n'en doute pas, mais il ne se passe rien entre Atsushi et moi, assura Ryûnosuke. Je ne vois pas pourquoi vous me posez cette question, il est évident que nous entretenons une relation peu amicale.
   — Savez-vous ce que symbolise le camélia ?
   — Comment, demanda Ryûnosuke d'une voix déstabilisée.
   — Les camélias, Ryûnosuke. Les fleurs que vous offre Atsushi lorsqu'il vous rend visite.
   — Je... Non. Les messages floraux ne m'intéressent guère.
   — Je m'y suis intéressé, pour ma part. Les camélias peuvent signifier la perfection, l'élégance, la fidélité.
   — Atsushi pense que je suis un roi parfait, et il a raison, dit Ryûnosuke en essayant de partir.
   — Les camélias signifient aussi la passion, l'amour romantique et le désir, répliqua Chûya en l'empêchant de partir.
   — Atsushi ne doit pas connaître le langage des fleurs, pourquoi perdrait-il son temps à chercher le message qui se cache derrière chaque fleur, pour ensuite choisir celles du désir et les offrir à son futur beau-frère ?!
   — Vous êtes bien plus que cela, Ryûnosuke, vous ne pouvez pas le nier, s'exclama Chûya. Pourquoi pensez-vous qu'il vous offre tous ces présents ?
   — C'est un geste de politesse, tous les princes qui se présentent à moi le font ! Le Prince Edgar m'a offert des chrysanthèmes et cela ne veut pas dire qu'il cherche mon affection, répliqua Ryûnosuke en élevant la voix. Vous-même recevez de nombreux bouquets de fleurs chaque jour !
   — Êtes-vous aveugle à ce point ?!
   — Je ne suis pas aveugle, Chûya, Atsushi n'est qu'un prince respectueux, et il va épouser Gin !
   — Justement ! Une fois qu'il aura épousé votre sœur, cela sera trop tard pour envisager une relation avec lui ! Allez-vous vraiment le laisser partir ? Faire un héritier à votre sœur ? Vivre avec elle, la voir chaque jour, loin de vous ?
   — Et pourquoi ne le laisserais-je pas faire ?
   — Votre cœur refuse ce mariage, et vous le savez très bien ! Pourquoi ne l'écoutez-vous pas ?!
   — Si j'écoutais mon cœur, je vous brûlerais sur la place publique pour punir votre tendance à vous mêler de tout en permanence, menaça Ryûnosuke.
   — Me brûler n'effacera pas vos sentiments, mais agissez comme bon vous semble. Pour l'amour du ciel Ryûnosuke, cessez de nier vos sentiments à l'égard d'Atsushi et agissez pour ne pas le perdre !
   Chûya fit volte-face et s'en alla, libérant le passage de Ryûnosuke. Mais lorsqu'il atteint la porte qui permettait de quitter les appartements, Ryûnosuke sortit de la salle de bain et l'interpella.
   — Et que représentent les œillets, demanda-t-il en s'avançant vers lui.
   — Les œillets, répéta Chûya en se tournant vers lui.
   — Vous savez, ces fleurs aux pétales froissées que vous faites envoyer chaque lundi à un mystérieux inconnu. Ne symbolisent-ils pas la passion et le désir charnel ?
   — Essayez-vous de m'intimider, demanda Chûya en souriant.
   — Non. Je vous suggère simplement de me laisser diriger mes affaires comme je l'entends, et je vous laisserai diriger vos affaires comme vous le souhaitez, dit calmement Ryûnosuke.
   — Vous ne me faites pas peur, dit Chûya d'un air rieur.
   — Vous devriez, je suis votre roi.
   — Vous êtes surtout un enfant capricieux et peureux. Mais puisque vous le désirez, je ne me mêlerai plus de vos affaires, et une fois que Gin sera mariée avec Atsushi, qu'ils s'attèleront à la tâche d'engendrer un héritier, et que vous pleurerez dans votre chambre, je me ferais un plaisir de vous dire « Je vous l'avais bien dit. ». 
   Chûya se détourna et disparut dans le couloir, laissant Ryûnosuke seul. Il était insupportable, et ce qu'il disait était ridicule. Il ferait mieux de s'occuper de la paysanne qu'il courtisait au lieu de se mêler de la vie de Ryûnosuke. Enfin, s'il s'agissait d'une paysanne, Ryûnosuke commençait à douter des attirances de Chûya...
Peu importe, cela ne le regardait pas, et il avait mieux à faire que de perdre son temps avec Chûya. Il quitta ses appartements pour rejoindre Atsushi dans les jardins. Sortir lui ferait du bien, cela lui permettrait de se libérer l'esprit et de se calmer. Cette discussion avec Chûya l'avait agacé, mais elle lui avait aussi laissé un étrange sentiment de confusion. Il ne comprenait pas comment elle avait pu avoir lieue, et il ne comprenait pas pourquoi Chûya lui avait parlé de tout cela... Il n'y avait jamais eu d'ambiguïté dans sa relation avec Atsushi, ils s'étaient toujours agacés depuis leur rencontre, ils trouvaient toujours de nouveaux sujets sur lesquels se disputer et les présents qu'ils s'échangeaient n'étaient que de la pure courtoisie. Certes, Ryûnosuke était contre le mariage de Gin et Atsushi, mais cela n'avait aucun lien avec une quelconque affection qu'il porterait à Atsushi...
Il était un homme, par conséquent toute relation avec lui était exclue...
   Les hommes peuvent ressentir du désir entre eux. Ryûnosuke s'arrêta dans le couloir en repensant à cette phrase que lui avait dite Atsushi, lors du bal où ils avaient dansé ensemble. Il se souvenait très bien de la manière dont Atsushi lui avait dit cela. Il avait été étrange lors de ce bal, il avait semblé plus... Plus... Intéressé. Ryûnosuke ne saurait le décrire, mais ce soir-là, quelque chose avait changé entre lui et Atsushi après qu'ils aient dansé ensemble. Atsushi lui avait affirmé que « le sexe n'arrêtait pas les pensées », il lui avait dit qu'il avait aimé danser avec lui, il était venu dans ses appartements, dans sa chambre et... Il l'avait vu à peine vêtu. Il n'avait pas aperçu son corps directement, mais il avait sûrement vu sa silhouette derrière le paravent qui le cachait, et il l'avait vu vêtu d'un unique kimono de nuit, sans maquillage. Cela était une forme d'intimité, personne n'avait jamais vu Ryûnosuke ainsi, excepté ses femmes de chambre.
   Peut-être était-ce l'euphorie de la soirée qui avait changé Atsushi. Peut-être que le fait de voir Ryûnosuke en femme l'avait amusé et qu'il en avait profité pour le taquiner d'une manière inhabituelle. Peut-être était-ce pour cela qu'il avait abordé des sujets plus privés avec lui... Et peut-être était pour cela que Ryûnosuke en était venu à imaginer quelque chose d'étrange entre eux, lorsqu'ils étaient dans sa chambre.
   L'exaltation de la soirée, leur danse ensemble, puis leur départ dans la chambre de Ryûnosuke... Tout cela avait créé un contexte propice à des débordements d'esprit, cela expliquait pourquoi ils s'étaient permis autant de sous-entendus entre eux et de proximité... Cela n'avait rien à voir avec de quelconques sentiments. Malgré cela...
   Ryûnosuke se souvenait encore de la brûlure qu'il avait sentie dans son ventre lorsqu'Atsushi s'était approché de lui, qu'il lui avait dit qu'il voulait le regarder sans retenue, et que pendant un instant, le temps s'était suspendu entre eux. Ryûnosuke avait ressenti de la chaleur dans le bas de son ventre, qui avait descendu jusque entre ses jambes sans qu'il ne comprenne pourquoi, et il n'avait pu dormir de la nuit. Il n'avait cessé de repenser à ce que lui avait dit Atsushi, aux regards qu'il lui avait lancés et... Il avait compris que les hommes pouvaient effectivement ressentir du désir entre eux. Il avait désiré Atsushi, il avait voulu toucher son corps, goûter ses lèvres et lui appartenir. Il avait senti son entrejambe le démanger toute la nuit mais.... Mais cela ne signifiait rien !
   Le désir était différent de l'amour, cela était deux choses différentes. Ryûnosuke n'avait jamais ressenti de désir auparavant, et le fait que sa première excitation soit due à un prince qu'il détestait était déstabilisant, mais cela ne voulait pas dire qu'il l'aimait !
   Il ne ressentait que de l'indifférence et de l'ennui envers lui. Il détestait ses inlassables compliments, le calme qu'il gardait en toute circonstance, sa tresse blanche qui n'était qu'une pâle réplique de la sienne, sa manière de prononcer son nom avec son accent étranger, ses toilettes blanches qui étaient toujours dénuées de bijoux, ses mains qui étaient aussi douces que le coton, les sourires qui fleurissaient sur ses lèvres et éclairaient son visage, la lumière qui brillait dans ses yeux lorsqu'ils se posaient sur lui, le délicieux parfum d'hibiscus qui embaumait son cou, et... Il le détestait. Il le détestait, et cela ne faisait aucun doute. Le désir qu'il avait ressenti pour lui n'était que passager, et Ryûnosuke n'y penserait plus dans quelque temps. Alors il n'avait aucune raison d'empêcher le mariage d'Atsushi et Gin, et il ne regretterait pas de ne pas les avoir séparés. Pourquoi le regretterait-il ?
   Soulagé d'avoir compris la nature de ses sentiments, Ryûnosuke sortit dans les jardins, et tomba nez à nez avec Atsushi, si bien qu'ils se percutèrent. Atsushi le retint par la taille pour lui éviter une chute et lui offrit un sourire rassurant.
   — Ryûnosuke, je pensais que vous aviez fini par vous perdre dans votre palais !
   Ryûnosuke s'apprêta à répondre, mais l'odeur d'Atsushi envahit sa bouche et ses sens, et il fut un capable de répondre. Atsushi était si proche de lui que son parfum coulait dans sa bouche, comme s'il le goûtait, et Ryûnosuke ne savait comment réagir. Il pourrait reconnaître ce parfum entre mille tant il l'aimait. L'huile que portait Atsushi était à l'hibiscus, et en respirant longuement, Ryûnosuke pouvait sentir une touche de sureau et de vanille, qui adoucissait son parfum et le rendait plus discret. Ryûnosuke avait toujours aimé cette odeur, et la sentir tomber dans sa bouche était délicieux...
   — Quelque chose ne va pas, demanda Atsushi en remarquant son silence.
   Déstabilisé, Ryûnosuke s'empressa de l'écarter de lui et lissa son kimono.
   — Quel est donc cet atroce parfum que vous portez ? Il est entêtant, dit-il d'un ton sec.
   — Moi aussi, je suis heureux de vous voir, répondit Atsushi avec douceur.
   — C'est cela.
   Ryûnosuke ignora le sourire d'Atsushi et s'engagea sur une allée du jardin, après avoir fait signe à ses gardes de rester loin de lui.
   — Étiez-vous occupé, demanda Atsushi en le suivant.
   — Je discutais avec Chûya, une discussion dont je me serais volontiers passé.
   — Serait-ce indiscret de vous demander quel en était le sujet ?
   — Oui.
   Atsushi n'ajouta rien, et se contenta de marcher silencieusement à ses côtés. Ryûnosuke ferma un instant les yeux. Il avait répondu trop sèchement, Atsushi n'avait rien faire pour mériter sa mauvaise humeur. Enfin, il avait éveillé son désir sans le savoir et il courtisait sa sœur, mais il ne pouvait savoir que cela le dérangeait... Ryûnosuke devait retrouver son calme et son indifférence envers Atsushi.
   — Nous parlions du langage des fleurs, finit-il par dire d'une voix plus douce.
   — J'adore le langage des fleurs, répondit alors Atsushi.
   — Vraiment, demanda Ryûnosuke en tournant vivement la tête vers lui.
   — Qu'y a-t-il de plus poétique que de parler au travers de pétales ?
   — Mais... Vous y intéressez-vous ?
   — En effet. Ce n'est pas quelque chose que l'on enseigne aux hommes en général, mais ma mère a toujours aimé cela et m'a transmis son savoir. J'aime étudier les fleurs et les plantes, et j'aime les messages floraux, expliqua Atsushi avec un petit sourire.
   — Je vois... Mais vous ne connaissez pas la signification de toutes les fleurs, n'est-ce pas ?
   — Une part de savoir m'échappera toujours bien entendu, mais je souhaite toujours en apprendre plus. Les magnolias symbolisent la dignité et le respect. Les orchidées blanches représentent l'amour pur, et les orchidées violettes la sagesse. L'arum est associé à la fertilité, les colchiques à la jalousie, les sakuras à la douceur. Les chrysanthèmes qui ornent vos tresses représentent la longévité et la noblesse, et le lotus qui enduit votre corps inspire la pureté, la spiritualité, et la perfection, ce qui, je trouve, vous va à merveille, ajouta Atsushi dans un murmure.
   Ryûnosuke sourit sans s'en rendre compte. Atsushi avait dit tout cela avec douceur, il parlait toujours comme s'il lisait de la poésie, et sa voix était une berceuse qui apaisait le cœur de Ryûnosuke. Il trouvait toujours le moyen de lui adresser des compliments, et Ryûnosuke ne pouvait s'empêcher de sourire en entendant cela. 
   — Je ne savais rien de tout cela, dit-il finalement.
   — Je me ferais une joie de vous offrir chaque jour un bouquet de fleurs différentes, en y laissant un mot sur leur signification, répondit alors Atsushi.
   — Je préfère que vous m'offriez des camélias, je n'ai de place que pour ces fleurs dans mon jardin.
   — Pourtant il y a tant de variété de fleurs ici, dit Atsushi en regardant les étendues d'herbes autour d'eux.
   — Ici oui, mais dans mon jardin, il n'y a que des camélias.
   — Comment cela ?
   — Venez avec moi.
   Ryûnosuke changea de chemin et se dirigea vers la partie du jardin qui était dans la forêt. Il conduisit Atsushi sur un pont de bois, afin de traverser un ruisseau qui encerclait le palais, puis ils s'engagèrent sur un chemin de terre. Ils marchèrent un moment, s'enfonçant dans les pins de la forêt. Ils arrivèrent dans une petite clairière, entourée d'hortensias dont les fleurs fanées commençaient à disparaître, laissant place aux épaisses feuilles de leurs arbustes. Ryûnosuke contourna les arbustes, son jardin apparut alors, caché dans l'ombre des hortensias et des pins. Il n'était pas très grand, il était arrangé de manière à recevoir la lumière du soleil qui passait là où les pins s'écartaient. Il s'agissait d'un parterre de camélias rouges, certaines fleurs étaient plus grandes que d'autres, car plantées depuis plus longtemps, et d'autres n'étaient encore que des bourgeons.
   — Ryûnosuke, s'exclama Atsushi avec surprise. S'agit-il des fleurs que je vous offre ?
   — Oui. J'ai toujours aimé le fait que vous m'offriez des bouquets avec les tiges enveloppées dans du papier pour conserver leurs racines. Cela me permet de les replanter dans mon jardin. Je suis le seul à m'en occuper bien entendu.
   — ... Cela me touche, dit Atsushi d'une voix émue.
   — Ce ne sont que des fleurs enfin, répliqua Ryûnosuke avec gêne.
   — Je pensais que vous les laissiez faner avant de les jeter... Mais vous les gardiez depuis le début...
   — Je n'ai jamais caché que j'aimais les camélias.
   — Je suis heureux que vous preniez soin de mes fleurs, dit alors Atsushi avec un grand sourire. Mais pourquoi y a-t-il des iris ?
   Au fond du jardin s'élevaient quelques iris, leurs pétales étaient blancs et orangés, ils ressortaient particulièrement parmi le rouge des camélias. Ryûnosuke posa ses mains sur ses hanches et lança un regard de reproche à Atsushi.
   — Cela est de votre faute.
   — De ma faute ?!
   — C'est le premier bouquet que vous m'avez offert. Il ne s'agissait pas de camélias, cela décrédibilise mon jardin.
   — Le premier... Oh ! Mais vous me l'aviez jeté au visage en disant que vous détestiez les iris !
   — Oui mais j'ai fait récupérer les fleurs. D'ailleurs, que symbolisent-elles ?
   — Les iris ? Elles symbolisent la force masculine et la protection au Japon. Plus généralement, elles symbolisent... Enfin...
   — Oui ?
   — Rien. Enfin vous savez, les significations peuvent varier... En tout cas, vos fleurs sont magnifiques, déclara Atsushi en s'agenouillant devant les camélias.
   Ryûnosuke le regarda faire en plissant les yeux, et se promit de demander à Chûya ce que signifiaient les iris. Il s'agenouilla ensuite près d'Atsushi, et observa ses mains qui touchaient avec délicatesse ses fleurs. Ses pouces passaient avec douceur sur les pétales courbés des camélias, il les écartait pour toucher le pollen et en respirer l'odeur. Ses doigts étaient si délicats... Ryûnosuke battit des paupières et remarqua que son cœur s'était accéléré. Que lui prenait-il ? Il devait se contrôler, et mettre au clair sa relation avec Atsushi.
   Plus vite ils se diraient qu'ils n'éprouvaient rien l'un pour l'autre, et plus vite ils pourraient retrouver une relation comme avant.
   — Chûya m'a dit que les camélias représentaient le désir, la passion, et l'amour romantique, déclara soudain Ryûnosuke. Pourquoi m'offrez-vous ces fleurs ?
   — Oh... Ce sont vos préférées, répondit Atsushi avec malaise.
   — Mais vous connaissez leur symbole et vous m'avez dit aimer les messages floraux.
   — En effet, je les aime.
   — Dans ce cas, est-ce que ces fleurs traduisent le désir que vous ressentez pour moi ?
   Atsushi ouvrit la bouche, mais il ne répondit pas. Ryûnosuke soutint son regard, le cœur battant à toute vitesse. Il regrettait déjà d'avoir posé cette question. Il n'était plus sûr de vouloir entendre la réponse d'Atsushi. S'il lui disait qu'il se trompait et qu'il ne ressentait aucun désir pour lui... Cela serait douloureux à accepter. La nature de ses sentiments lui était encore inconnue, mais Ryûnosuke savait qu'il ne voulait pas être le seul à ressentir du désir. Il voulait au moins partager cela avec Atsushi... Mais d'un autre côté, il savait qu'Atsushi devait répondre non. Il ne pouvait pas ressentir de désir pour lui, il allait épouser Gin, il n'avait pas le droit d'avoir de l'affection pour lui...
   — Que feriez-vous si je vous répondais que oui, finit par dire Atsushi en rougissant.
   — Je ne le sais pas...
   — Je ne sais quoi vous dire, je ne pensais pas que vous vous intéresseriez aussi tard au langage des fleurs et à présent que je dois courtiser la Princesse Gin je... Ai-je le droit de désirer une autre personne qu'elle... ?
   — Je suppose que non, dit Ryûnosuke, une pointe de déception dans la voix.
   — Malgré cela... Les restrictions ne peuvent faire taire mes pensées et je ne peux ignorer le fait que je vous ai délibérément offert des fleurs dont je connaissais la signification, expliqua Atsushi à voix basse.
   Il jeta un regard autour d'eux, comme pour vérifier que personne ne les avait entendus, avant de baisser la tête et de laisser un embarrassant silence s'installer. Venait-il... Venait-il d'avouer qu'il le désirait ?! Ryûnosuke avait bien compris, il venait de lui confirmer qu'il savait que les camélias étaient synonyme d'envie, et qu'il ressentait du désir pour lui malgré la cour qu'il devait mener à Gin.
   Alors... Était-il possible que lui aussi ressente cette chaleur dans son ventre ? L'essoufflement qui le prenait lorsqu'ils étaient près l'un de l'autre, ces battements de cœur qui le rendaient à fleur de peau et... Cette démangeaison dans son intimité ? Ressentait-il ce besoin obsessionnel de le toucher ? L'incapacité de retrouver une respiration normale lorsqu'il le regardait ? Cette tension qui chargeait l'air et le rendait palpable ? Ressentait-il tout cela de la même manière que Ryûnosuke ? Rêvait-il de lui la nuit et se réveillait-il bercer par une sensation de flottement, dans des draps qui portaient les marques de son désir ? Pensait-il à lui lorsque l'ennui le hantait, et cela faisait-il naître une violente passion dans son corps ?
   Était-il possible qu'Atsushi partage ses sentiments et que ses bouquets de fleurs n'étaient que des messages cachés depuis toutes ces années ? Ryûnosuke tourna la tête vers lui. Sa poitrine se soulevait rapidement et ses joues étaient rouges, il était dans le même état que lui. Ryûnosuke ne pouvait plus ignorer son désir, il avait besoin de partager cela avec Atsushi.
   — Les gardes ne peuvent pas nous voir d'ici, dit-il en regardant Atsushi.
   — Comment, demanda Atsushi en tournant la tête vers lui.
   — Personne ne peut nous voir ici, les hortensias nous abritent des regards indiscrets. Ce jardin est secret, j'ai interdit à quiconque de l'approcher. Vous êtes le premier à venir ici.
   — Oh...
   Les deux jeunes hommes s'observèrent longuement, sans que personne n'ajoute quoi que ce soit. Le cœur de Ryûnosuke battait si fort à présent qu'Atsushi devait l'entendre, et la tension entre eux était devenue si pesante qu'elle en devenait écrasante. Ils restèrent immobiles un moment, figés par le silence qui les séparait. Ryûnosuke fut le premier à bouger. Il esquissa un mouvement pour se tourner vers Atsushi, et son geste provoqua une décharge d'électricité dans l'air. Cela suffit pour qu'Atsushi réagisse enfin. Il se pencha vers lui et brisa l'espace entre eux, pour poser ses lèvres sur les siennes.
   Ses lèvres avaient un goût de fraîcheur, de verdure. Elles étaient exactement comme l'avait imaginé Ryûnosuke, délicates comme un pétale de rose, douce comme la peau d'une pêche, et aussi fine que la dentelle qui décorait ses toilettes. Les embrasser était merveilleux, ce simple baiser était enivrant, les quelques mouvements de lèvres que faisait Atsushi suffisaient à faire réagir le corps de Ryûnosuke. Plus Atsushi suçait ses lèvres, plus son corps s'approchait de sien et devenait chaud. Ryûnosuke avait l'impression d'être ailleurs, comme s'il n'y avait plus que leur baiser qui comptait. Il ne parvenait plus à détacher ses lèvres de celles d'Atsushi, même si l'air commençait à lui manquer, il voulait continuer de l'embrasser afin de marquer dans sa mémoire le goût de sa bouche. Il était indescriptible, Ryunosuke sentait le thé qui avait coulé sur ses lèvres, un thé de matcha, herbacé, fruité d'agrume, et même rendu amer par un fond de chocolat. Il pouvait aussi sentir le baume de vanille qu'Atsushi utilisait pour s'hydrater, ainsi que les habituelles touches florales qui constituaient son odeur.
   Le manque de souffle le força à s'écarter d'Atsushi. Il respira contre ses lèvres en gonflant avec force ses poumons, et une fois de plus le souffle sucré d'Atsushi coula dans sa gorge. C'était comme s'il buvait son parfum, comme s'il s'agissait d'une liqueur qui aurait le don de faire brûler tout son être. Il enivrait Ryûnosuke et perdait son esprit dans des vapeurs de plaisir, toutes ses pensées étaient tournées vers Atsushi, et il ne pouvait plus se détacher de lui. Il ne pensait pas qu'un simple baiser puisse lui procurer autant de bien, ni le faire plonger dans un tel état d'ébriété. Il aimait unir ses lèvres à celles d'Atsushi, il aimait le tenir par la nuque et l'attirait contre lui, plonger ses mains dans ses cheveux et défaire ses tresses, ouvrir les yeux et croiser son regard envieux, et perdre sa raison dans ses baisers. Il aimait cela, et il en voulait plus.
   Mais lorsqu'il essaya de monter à califourchon sur Atsushi, celui-ci mit fin à leur baiser et s'écarta précipitamment, essoufflé.
   — Je n'ai pas le droit de vous toucher, dit-il, les joues toutes rouges.
   — Vous êtes le seul à pouvoir me toucher, répondit Ryûnosuke en se rapprochant de lui pour s'asseoir sur son bassin.
   — Je vais vous déshonorer...
   — Je vous ordonne de me déshonorer, répliqua Ryûnosuke avant de plaquer ses lèvres contre les siennes.
   Atsushi lui rendit immédiatement son baiser et l'enlaça contre lui, incapable de lui résister. C'était la toute première fois que quelqu'un touchait ainsi Ryûnosuke, et qu'il touchait lui-même une personne de cette manière. Il était assis sur Atsushi comme s'il s'agissait de sa monture, son torse épousait le sien, ses cuisses se refermaient autour des siennes, et son visage était lié au sien par de sauvages baisers. Ses joues étaient rouges de gêne et de plaisir, et lorsqu'Atsushi se mit à le caresser, tout son visage changea de couleur. Atsushi fit tomber l'obis qui entourait sa taille, puis il ouvrit son kimono, et vint goûter sa peau avec douceur.
   — Ryûnosuke... Savez-vous en quoi consiste l'acte charnel, murmura-t-il en embrassant son épaule.
   Ryûnosuke eut du mal à comprendre qu'il lui avait posé une question. Il venait de réaliser qui s'était volontairement laissé nu sous son kimono, alors qu'en temps normal il portait toujours plusieurs vêtements sur lui, surtout à cette période de fin d'année. Et Atsushi venait d'ouvrir son kimono, il en avait écarté les pans pour les rejeter derrière ses cuisses, et il baissait peu à peu ses manches pour voir révéler ses bras. Ce qui signifiait qu'il était nu contre son torse...
   Son kimono ouvert ne lui cachait plus rien, et Atsushi en profitait pour regarder son corps en l'embrassant. Il posa d'abord ses mains sur sa taille, sous le tissu d'or de son kimono, qui tombait à présent dans son dos, et le tira vers lui. Il fit ensuite tomber ses mains sur ses fesses avec timidité, et les toucha délicatement. Ses gestes furent d'abord volatiles, comme s'il ne voulait qu'effleurer sa peau pour la faire frissonner, avant qu'il ne pose définitivement ses mains sur lui. Ses mains contournèrent ses fesses, elles les caressèrent avec douceur alors qu'il se mettait à embrasser sa gorge, et Ryûnosuke poussa un soupir de plaisir. Ses baisers le faisaient frissonner, ils étaient doux et plein de tendresse. Sa nudité, mêlée aux caresses d'Atsushi et ses baisers, avaient raison de lui. Il était incapable de réfléchir.
   — Ryû, appela Atsushi en le serrant un peu plus contre lui.
   — Oui, murmura difficilement Ryûnosuke.
   — Connaissez-vous l'acte charnel ?
   — Non.
   Il n'avait jamais éprouvé le besoin de questionner Chûya à ce sujet, et il n'avait jamais essayé de s'éduquer lui-même en se rendant dans des maisons de plaisir. Ce qui faisait qu'il ne connaissait que très peu de choses sur l'acte charnel, il savait seulement qu'il permettait de concevoir des enfants, et qu'il nécessitait d'être nu. 
   — Voulez-vous que je vous apprenne, demanda Atsushi en relevant la tête vers lui.
   — Vous savez comment cela se passe ?
   — Oui. La plupart des jeunes hommes sont envoyés dans des bordels à leur seizième année.
   Cela était vrai, et Ryûnosuke aurait sûrement dû y aller si son père n'était pas mort avant. Chûya y était allé, et Ryûnosuke lui était reconnaissant de ne pas avoir précipité sa perte de pureté.
   — Apprenez-moi, dit-il en retirant complètement son kimono.
— Avez-vous déjà... Enfin... Exploité votre plaisir... ?
— Jamais.
— Oh... Puis-je vous toucher... plus intimement ?
— Vous le pouvez...
Atsushi posa timidement une main sur son intimité, et Ryûnosuke sentit son cœur manquer plusieurs coups. Cela était étrange, aucune main ne s'était jamais posée sur cette partie de son corps et il était embarrassant de se faire toucher à cet endroit. Mais Ryûnosuke choisit de faire confiance à Atsushi, il ne chercha pas à reculer, et le regarda bouger sa main sur lui.
— Votre plaisir grandit avec des caresses, murmura Atsushi à son oreille. Tout votre corps peut répondre au désir, mais certains endroits sont plus sensibles que d'autres... Vos lèvres... Vos oreilles... Votre poitrine... Et... Votre intimité.
Il susurra cela en déposant de petits baisers sur son cou, et en faisant monter et descendre sa main sur l'intimité de Ryûnosuke. Cela était de plus en plus plaisant, la gêne laissait place à l'excitation, et Ryûnosuke perdait peu à peu le rythme régulier de son souffle. Atsushi était de plus en plus à l'aise également, il touchait sa peau avec moins de retenue, l'embrassait plus longuement, et le serrait avec plus de force.
— L'acte charnel consiste en cela, dit-il après avoir sucé sa peau. Et une fois que votre plaisir est suffisamment grand, vous pourrez unir votre corps à celui de la personne que vous désirez... Votre intimité trouvera la sienne, et votre plaisir guidera vos mouvements, votre corps réagira de lui-même...
— Unissez votre corps au mien, dit alors Ryûnosuke en relevant le visage d'Atsushi vers lui. Faites-moi vôtre.
Le rythme de son cœur s'accéléra, et pendant un instant, il craignit qu'Atsushi ne s'écarte et disparaisse. Mais Atsushi ne fit rien de cela.
Il s'empara de ses cuisses et le souleva, avant de l'allonger délicatement sur les pétales rouges qui parsemaient l'herbe. Il retira à son tour les kimonos qu'il portait, sans quitter des yeux Ryûnosuke, et le jeune homme regarda avec avidité son corps. Il n'était pas aussi menu qu'il l'avait pensé, ses muscles étaient visibles, ils ressortaient discrètement sur ses bras et son ventre, sculptant sa peau de marques ovales. Il était grisant de pouvoir observer son corps sans retenue, et Ryûnosuke se demanda si sa poitrine avait aussi le goût des fleurs qu'il portait.
Une fois entièrement nu, Atsushi se glissa entre ses jambes et vint de nouveau l'embrasser, avant de glisser une main entre ses jambes, sur une zone qu'il n'avait pas encore touchée. Il fit alors entrer un doigt en lui, avec la même douceur qu'il avait eue lorsqu'il avait découvert sa gorge de ses lèvres. Ryûnosuke ouvrit la bouche pour respirer et rejeta sa tête en arrière, enfouissant ses cheveux noirs dans l'herbe verte. Atsushi lui demanda plusieurs fois s'il souffrait, il prit son temps pour bouger son doigt en lui et en ajouter un autre, et caressa tendrement ses cheveux pour le détendre. Mais Ryûnosuke n'avait jamais été aussi détendu. Il ne ressentait aucune douleur, seulement la profonde satisfaction de sentir Atsushi en lui. Des papillons volaient dans son ventre avec frénésie, chacun de leur battement apportait une vague de soulagement à Ryûnosuke, ils faisaient tant grandir son plaisir que cela en devenait douloureux. Son intimité le brûlait une fois de plus, il la sentait mûrir entre ses cuisses et se frotter contre lui, prête à exploser de plaisir comme une fruit devenu trop tendre.
Les sentiments qui l'envahissaient étaient si puissants qu'il ne parvenait plus à les cacher. Ses soupirs de plaisir se multiplièrent sans qu'il ne puisse les retenir, et il se mit à se cambrer pour essayer de frotter son intimité contre celle d'Atsushi. Il voulait aller plus loin à présent, il voulait unir son corps à celui d'Atsushi et lui appartenir.
— Que faut-il faire pour être lié à vous, demanda Ryûnosuke avec envie.
— Il... Il faut que je vienne en vous avec mon intimité...
   — Faites-le, dit aussitôt Ryûnosuke, qui était excité par l'idée de recevoir l'intimité d'Atsushi.
   — Cela peut être douloureux, dit Atsushi en écartant ses cuisses. Me faites-vous confiance ?
   — Je vous fais confiance.
Atsushi souleva légèrement son bassin. Ryûnosuke sentit la chaleur de son intimité contre lui, avant de soudain la sentir entrer en lui, là où étaient entrés les doigts d'Atsushi. Il poussa un cri de surprise mêlé au plaisir et se crispa par réflexe, la respiration précipitée.
— Vous êtes en moi, s'exclama-t-il avec envie.
— Je peux me retirer si cela est trop douloureux, dit Atsushi, qui semblait difficilement se retenir d'aller plus loin en lui.
— Je vous interdis de vous retirer, répondit Ryûnosuke d'une voix tremblante. Je me sens incroyablement bien...
— Détendez-vous dans ce cas...
Atsushi s'enfonça un peu plus en lui, faisant se cambrer son corps. Il se pencha au-dessus de lui et l'embrassa avec tendresse, puis il s'allongea sur son torse, et se mit à doucement bouger en lui. Ryûnosuke lui rendit son baiser sans hésiter, il entoura sa taille de ses jambes pour emprisonner contre le sien, et laissa la passion le submerger.
La peau d'Atsushi était lisse et brillante, imprégnée d'huiles essentielles aux fleurs de son pays. Elle avait le goût de fleurs de rose, fruité, avec des notes de sucre et d'acidité, et encore une fois, Ryûnosuke pouvait sentir la vanille et le sureau qui étaient mêlés à l'huile. Il avait toujours aimé respirer ce parfum, mais le goûter était au-delà de tous les plaisirs qu'il avait connus. Atsushi se mit à le couvrir de baisers, et Ryûnosuke l'imita pour continuer de le goûter avec ivresse. Ils s'embrassèrent avec passion, se caressèrent avec envie, s'étreignirent avec amour. Il était doux de s'adonner à l'acte charnel, mais il était encore plus de le faire en étant enlacé par l'homme qui animait ses passions. Ryûnosuke aimait tant être dans les bras d'Atsushi, il se sentait léger, rassuré, et aimé. L'étreinte d'Atsushi était chaude, mêlée de délicatesse et de sauvagerie, et cet accord faisait perdre la raison à Ryûnosuke.
Son corps glissait contre la douceur de l'herbe qui lui servait de lit, elle chatouillait sa peau et la rendait encore plus sensible, comme si chaque brin qui l'effleurait déposait un baiser sur lui. Les pétales de fleurs s'emmêlaient à ses cheveux défaits, les camélias enveloppés son corps et le transportaient ailleurs, dans un jardin de plaisir qui n'appartenait qu'à lui et Atsushi. Et son regard se perdait sur le ciel bleu au-dessus de lui, découpé par les sommets des pins qui les entouraient. Ryûnosuke était comblé. Atsushi lui faisait l'amour au milieu des camélias, ils étaient bercés par le parfum floral du jardin et le murmure d'un ruisseau lointain, et leur corps se rencontrait et s'entrechoquait sauvagement sur un lit de verdure. Ryûnosuke n'aurait pu espérer perdre sa vertu d'une meilleure manière, et dans un meilleur endroit.
Il se cambra et posa son front sur celui d'Atsushi pour gémir contre ses lèvres, et Atsushi se mit à le posséder avec plus de force. Il fit grimper son corps contre le sien à toute vitesse, posa une main sur sa poitrine pour la serrer, et s'enfonça aussi loin que possible en lui. Il buvait tout son souffle et le privait d'air, il faisait tourner sa tête et le privait de pensées, Ryûnosuke ne pouvait plus que ressentir. Du plaisir, de la passion, de l'envie, de l'euphorie, de l'exaltation. Tout son corps réclamait celui de son amant, son intimité était en feu, et chaque caresse lui arrachait un gémissement. Il atteignait un point de non-retour, son excitation devenait violente, elle envahissait tous ses sens et l'assommait presque, il était comme frappé par elle. Il ferma les yeux, laissa tomber sa tête en arrière, enfouit ses mains dans l'herbe pour s'y accrocher, et se mit à gémir plus fort. Atsushi comprit qu'il était sur le point de jouir, alors il s'empara de l'une de ses cuisses pour l'écarter davantage, il serra sa poitrine, embrassa sa gorge, avant de toucher son point sensible.
Une vague de chaleur submergea Ryûnosuke et il poussa un cri de plaisir, paralysé par la sensation de plénitude qu'il éprouvait. Quelque chose de chaud se répandit en lui et Atsushi s'immobilisa, essoufflé. Il se retira de lui, le laissant creux et dégoulinant de plaisir, avant de s'écrouler sur lui. Les deux jeunes hommes restèrent un moment ainsi, essayant de retrouver leur calme et de reprendre leur souffle. Ryûnosuke avait du mal à réaliser ce qu'il venait de faire, il était étourdi à présent, et épuisé. Mais il était heureux, il était soulagé d'avoir pu assouvir son envie, et d'avoir partagé cela avec Atsushi. Et... Il était heureux de lui avoir offert sa pureté, c'était le seul que Ryûnosuke acceptait pour prendre sa vertu.
— Elles représentent l'amour, murmura Atsushi au bout d'un moment.
— Comment, demanda Ryûnosuke, qui contemplait les nuages du ciel en essayant d'apaiser son cœur.
— Les iris. Tout à l'heure, vous m'avez demandé ce qu'elles représentaient. Les iris blancs symbolisent l'amour, et les iris oranges une déclaration d'amour enflammée, du désir...
— ... Vous m'avez offert ces fleurs à vos quinze ans, s'exclama Ryûnosuke en rougissant. Vous sortiez à peine de l'enfance !
— Ne me jugez pas, gémit Atsushi en enfouissant son visage dans son cou. C'est la seule solution que j'ai trouvée pour vous témoigner mon affection...
— Vous êtes précoce Atsushi.
— Je ne peux que l'être avec vous, Ryûnosuke. Avez-vous... Aimé cela ?
— Les fleurs, ou le fait que vous venez de me ravir toute vertu ?
— Vous étiez d'accord, s'exclama Atsushi avec gêne.
— Je sais. J'ai beaucoup aimé, dit Ryûnosuke d'un air rassurant. Bien que je me sente à présent... Aussi vide qu'un vase dont on aurait ôté les fleurs.
— Je peux vous combler de nouveau, proposa alors Atsushi avec un sourire.
— Peut-on le faire plusieurs fois à la suite ?
— Il est possible, mais nous ne pouvons le faire indéfiniment... Ryûnosuke... Il faut que je vous dise quelque chose, dit Atsushi en se redressant au-dessus de lui.
— Oui ?
— C'est vous que je veux épouser, pas votre sœur.
Le cœur de Ryûnosuke perdit le rythme calme qu'il avait retrouvé, et se mit à battre à toute vitesse.
— Demandez-moi de ne pas l'épouser, et je cesserai immédiatement de la courtiser, dit Atsushi avec un regard perçant.
— Je n'ai jamais voulu que vous l'épousiez... Mais il lui faut un époux et... Vous êtes l'homme le plus droit et respectueux que je connaisse. Vous prendriez soin de Gin...
— C'est de vous dont je veux prendre soin.
— Nous ne pouvons pas nous marier Atsushi.
— Je le sais. Je peux me passer de mariage, mais je ne peux me passer de vous. Je ne désire que votre compagnie, et je serai incapable de vivre avec Gin, et d'accomplir un acte conjugal avec elle. Je suis prêt à chercher un homme respectable dans mon propre pays pour Gin, j'irai lui chercher un prince à l'autre bout du monde si cela me permettait d'être avec vous.
— Atsushi, si vous n'épousez pas Gin, vous devrez épouser une autre femme, et je devrais en épouser une aussi, dit Ryûnosuke en se relevant.
— Une autre femme me conviendrait, mais Gin est votre sœur et je ne peux entretenir une relation avec elle, alors que c'est vous que je désire. Cela serait étrange...
— Vous avez raison...
— Je ne veux pas forcer vos sentiments alors... Souhaitez-vous que j'épouse Gin ? Je ne ferais rien sans que vous ne m'ayez dit ce que vous désirez.
Ryûnosuke regarda longuement Atsushi. Ses devoirs lui disaient de le pousser vers Gin, mais il entendait son cœur pleurer à l'idée de le voir épouser sa sœur. Que devait-il faire ? Il ne voulait pas faillir à ses devoirs et priver Gin d'un époux, mais il ne voulait pas non plus laisser Atsushi partir avec elle. Et dire qu'il avait toujours affirmé le détester... S'il avait écouté ses sentiments plus tôt, il ne se retrouverait pas dans une telle situation...
— Je veux que vous n'apparteniez qu'à moi, finit par murmurer Ryûnosuke. N'épousez pas Gin...
— C'est déjà le cas, répondit doucement Atsushi.
— Je veux que vous offriez de magnifiques bouquets de fleurs à Gin pour vous excuser de refuser un mariage avec elle, déclara aussitôt Ryûnosuke. Et soumettez-lui une liste d'hommes qu'elle pourrait épouser. Il faut un homme respectable, avec un haut statut social, un prince ou bien un héritier de clan, pas un simple aristocrate. Il doit être intelligent, beau, et il doit laisser de la liberté à son épouse. Oh et il doit avoir moins de trente ans obligatoirement, plus son âge est proche de celui de Gin, plus cela lui conviendra. Un coréen serait parfait, cela permettrait de rapprocher nos royaumes...
— Je le ferai, dit Atsushi avec joie.
— Ne vous réjouissez pas trop vite. Gin a des critères de sélection difficiles à respecter..., soupira Ryûnosuke en se laissant tomber dans l'herbe. Cela serait un miracle si nous parvenions à lui trouver un époux avant de la fin de l'année...
— Nous y parviendrons, je n'en doute pas, déclara Atsushi en souriant.
— Je l'espère... Atsushi, n'y a-t-il qu'une seule position lors de l'acte charnel, demanda soudain Ryûnosuke.
— C-Comment ?!
— Dois-je toujours être allongé lorsque vous me possédez ?
— N-Non... Vous pouvez être assis, de dos...
Ryûnosuke se redressa et poussa Atsushi en arrière pour l'allonger dans l'herbe, avant de monter sur son bassin et de s'asseoir sur lui.
— Et puis me mettre ainsi ?
— Ryûnosuke... Je vois tout votre corps ainsi..., dit Atsushi en rougissant violemment.
— Justement. Laissez-moi faire, et admirez, ordonna Ryûnosuke, avant de se pencher sur lui pour l'embrasser.

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Désolé de pas avoir poster hier 😬
J'ai pas eu le temps de le faire, mais pour me faire pardonner je posterai un os samedi :).

Voilà donc le premier lemon de cette intrigue 👀
J'espère qu'il vous plaît. Comme il y a pas mal de lemon dans cette intrigue, j'ai essayé de faire un premier lemon plutôt doux, sans trop insister sur tout ce qu'il se passe... Et puis je voulais faire un contraste entre Ryû qui découvre la sexualité et adore ça, et Gin qui découvre en quoi consiste l'acte conjugal et qui en est dégoûté. C'est souvent comme ça dans la vraie vie, les hommes ont beaucoup moins d'appréhension concernant la sexualité, alors que beaucoup de femmes ont peur de faire leur première fois.

Demain on se retrouve pour un Fyolai, j'espère qu'il vous plaira 👀

À demain 🦦

Recueil Bungo Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant