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PRÈS DES YEUX, LOIN DU CŒUR

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Fyodor s'agenouilla au sol et ouvrit sa valise, avant de commencer à en sortir ses vêtements. Il était enfin de retour chez lui, dans son appartement. Il était de nouveau seul. Ses nouveaux amis étaient tous partis de leur côté à présent, Chûya était parti avec Dazai pour discuter avec lui, Gin passait du temps avec Tachihara, et Yosano avait retrouvé Ranpo, à qui elle racontait tout ce qui lui était arrivé. Et Atsushi avait retrouvé son petit ami, ils s'étaient d'ailleurs rapidement éclipsés dans son appartement pour... Des retrouvailles plus intimes. Après l'agitation de ces deux semaines passées à leur côté, le calme de l'appartement de Fyodor semblait bien étrange. Ses amis étaient plein d'énergie, surtout à côté de lui, et leur absence lui laissait un sentiment de vide qu'il ne savait comment combler.
   Il avait toujours aimé la solitude, et il aimait le silence de son appartement. Il lui permettait de mieux réfléchir, de se concentrer, d'établir des stratégies, de faire de la musique, ou bien d'évacuer. Mais aujourd'hui, il détestait ce silence. Il l'engloutissait et l'écrasait, il faisait résonner ses pensées et l'assourdissait, et Fyodor se retrouvait encerclé par les images qui naissaient dans son esprit. 
   Une fois de plus, il voyait Nikolaï sourire dans les vapes de son esprit. Il voyait parfaitement son sourire, ses yeux qui se plissaient, sa cicatrice qui rétrécissait, et ses faussets qui apparaissaient. Il entendait son rire aigu et il le voyait rejeter sa tête en arrière. Avant de le voir se tourner et prendre Sigma dans ses bras. Il le voyait l'étreindre longuement avant de l'embrasser, ses bras passaient autour de sa taille pour l'attirer contre lui, et ses lèvres se posaient délicatement sur les siennes. Leur timide baiser devenait sauvage, et soudain, ils étaient nus l'un contre l'autre, à se faire l'amour avec passion. Fyodor les voyait ensemble avec toujours plus de détails, et à présent, il les voyait se balader ensemble, main dans la main, et passer du bon temps loin de lui.
   Plus les jours passaient et plus ces images devenaient douloureuses, il les supportait de moins en moins. Les imaginer coucher ensemble était déjà un véritable supplice, mais les imaginer agir comme un couple et passer de bons moments ensemble... C'était bien pire. Pourquoi fallait-il que Nikolaï choisisse Sigma ? Qu'avait-il de plus que Fyodor ? Et pourquoi rejetait-il ainsi Fyodor ? Il pouvait simplement lui dire qu'il ne l'aimait pas... Il n'avait pas besoin de l'ignorer...
— Fyodor ?
Le jeune homme se retourna en entendant son prénom, abandonnant les vêtements qu'il rangeait, et croisa deux yeux bleus qu'il reconnut immédiatement. Son cœur s'arrêta de battre et son sang se glaça dans ses veines, laissant une vague d'angoisse le submerger.
— Nikolaï, demanda-t-il avec un mélange d'espoir et de surprise. Depuis quand... Qu'est-ce que...
— J'ai fait un portail, sourit Nikolaï en mimant l'apparition d'un portail du doigt.
   Fyodor fixa Nikolaï sans comprendre, incapable de bouger. Nikolaï se tenait bien devant lui, vêtu de ses habituels vêtements blancs, et le regardait avec un magnifique sourire. Fyodor ne l'avait pas entendu entrer grâce à son portail, et il n'avait pas du tout senti sa présence. Mais depuis quand était-il ici ?!
   Il ne semblait pas en colère contre lui, il semblait même heureux de le voir. Son sourire était le même que d'habitude, et pendant un instant, Fyodor eut l'impression que rien n'avait changé entre eux. Qu'il n'était jamais parti, qu'il n'avait jamais embrassé Chûya ni fait de photos avec lui, que Nikolaï ne l'avait pas ignoré, et qu'il n'était pas parti vers Sigma. Peut-être que s'il ne disait rien, que s'il faisait comme si rien ne s'était passé... Peut-être qu'il retrouverait Nikolaï ? C'était la première fois qu'il le voyait depuis deux semaines, et la première fois que Nikolaï lui parlait. Il faisait un pas avec lui après deux horribles semaines de silence. Fyodor ne devait pas le faire fuir.
   Il se releva lentement, partagé entre la peine qu'il ressentait, et son envie de se jeter dans ses bras, et s'approcha de Nikolaï. Nikolaï ne recula pas, il le laissa venir à lui en continuant de sourire, et lorsque Fyodor fut assez proche de lui, et posa ses mains sur ses joues.
   — Tu m'as manqué, dit-il avec envie.
   Fyodor le regarda sans comprendre, mais le soulagement qui l'envahissait le fit sourire, et il en oublia complètement tout le mal qui lui avait été fait.
   — Tu m'as manqué aussi, dit-il d'une voix pleine d'espoir.
   — Je sais, répondit Nikolaï en l'attirant contre lui.
   — Je suis...
   — Chut, dis rien.
   Nikolaï releva doucement son menton, et avant que Fyodor ne comprenne ce qu'il se passe, il posa ses lèvres sur les siennes et lui offrit un baiser brûlant. Nikolaï passa sa main derrière sa nuque pour approfondir son baiser, il bougea ses lèvres contre les siennes avec douceur et envie, avant de le serrer contre lui. Fyodor se laissa faire, il l'enlaça avec soulagement et se blottit contre lui en fermant les yeux. Ce baiser le réchauffait, il le guérissait et refermait ses plaies, il le faisait revivre. Fyodor ne voulait plus jamais être séparé de lui, il ne voulait plus d'explications ni d'excuses, il voulait seulement rester dans ses bras, et que se baiser dure pour toujours.
   Il voulait de nouveau sentir Nikolaï contre lui, lui appartenir une nouvelle nuit, peu importe ce qu'il se passerait ensuite. Nikolaï entendit ses pensées et le déshabilla entièrement, il toucha son corps sans retenue, avant de le pousser sur son lit et de s'installer entre ses jambes.
   En le regardant se déshabiller à son tour, Fyodor se demanda vaguement s'il avait juste attendu son retour pour reprendre leur relation, et s'il l'avait ignoré car il lui en voulait d'être parti, ou d'avoir accepté une mission sans lui. Mais lorsque Nikolaï se pencha sur lui pour l'embrasser de nouveau, toutes ses pensées disparurent une nouvelle fois. Ce baiser lui faisait tellement de bien que la flamme de son cœur se ravivait dans sa poitrine, il renaissait de ses cendres et propageait une merveilleuse sensation de bien-être en lui, effaçant toutes les cicatrices que portait son âme. Nikolaï était venu le voir et l'embrassait, il le tenait contre lui, il mordait ses lèvres, il partageait son souffle avec lui... Fyodor était aux anges. Il n'aurait pu rêver mieux comme retrouvailles avec lui, c'était même trop beau pour être vrai.
   Lorsqu'ils furent à bout de souffle, Nikolaï se redressa avec un sourire et écarta ses cuisses d'un air pressé. Mais des pas résonnèrent dans la chambre, quelqu'un s'approcha, et Sigma apparut près du lit. Il était nu lui aussi, son corps luisait sous la lumière de sa chambre qui faisait briller chacune de ses courbes. Il grimpa à quatre pattes sur le lit, un sourire joueur étirant ses lèvres, et Nikolaï le dévisagea avec appétit.
   — Sigma..., murmura Fyodor sans comprendre.
   — Quoi ? Tu pourrais coucher avec la terre entière pour attirer l'attention de Nikolaï, alors on peut le faire à trois... Non, demanda-t-il en souriant.
   La réponse de Fyodor se perdit dans sa gorge, et il ne réussit pas à parler. Il regarda avec impuissant Sigma pousser Nikolaï sur le côté, pour l'allonger et monter sur lui. Il fit alors descendre son bassin sur le sien pour se faire posséder, avant de se pencher sur lui et de l'embrasser avec passion. Nikolaï lui rendit immédiatement son baiser, un baiser encore plus sauvage que celui qu'il venait d'offrir à Fyodor.  
   Une lame tranchante transperça la poitrine de Fyodor et déchira son cœur, le faisant pousser un hurlement de douleur. Il se redressa et essaya de séparer Sigma et Nikolaï, mais ils étaient à présent à des mètres de lui, et il avait beau courir vers eux, il ne parvenait à les rattraper. Plus il courait, et plus il s'enfonçait dans le sol, sa poitrine se mettait à saigner abondamment, sa peau tombait en lambeaux sur ses os, et il finit par s'effondrer en sanglots au sol. Il hurla à s'en briser la voix et se prit la tête entre les mains, alors que les gémissements de plaisir de Sigma et Nikolaï s'élevaient autour de lui et envahissaient ses sens.
   — Non, gémit-il à travers ses sanglots. Laissez-moi, laissez-moi, laissez-moi ! Arrêtez !
   — Fyodor ! Fyodor réveille-toi !
   Fyodor ouvrit soudainement les yeux et se redressa, tremblant, haletant, les joues inondées de larmes.
   — Tout va bien, c'était juste un cauchemar, dit quelqu'un en l'entourant de ses bras. Tout va bien, je suis là...
   Fyodor hoqueta difficilement et s'accrocha aux bras qui le tenaient en regardant autour de lui avait panique. Il était couvert de sueur, sa poitrine se soulevait à toute vitesse sous son t-shirt, et ses yeux étaient baignés de larmes. Son état de choc l'empêchait de réfléchir et de se calmer, il n'avait jamais ressenti autant d'angoisse qu'en ce moment.
   Il mit du temps à réaliser qu'il était dans sa chambre, que sa poitrine ne saignait pas, et que Nikolaï et Sigma n'étaient pas là. Ils n'avaient jamais été là.
   — Tout va bien, murmura une voix à son oreille.
   Fyodor battit des paupières pour retrouver ses esprits. Il regarda autour de lui avec difficulté, et vit que Poe, Gin, et Ryûnosuke se trouvaient autour de lui et le regardaient avec inquiétude. Et Chûya était celui qui le tenait contre lui, il était monté sur son lit et le touchait sans craintes.
   Ce n'étaient que des amis, il n'y avait personne d'autre. Fyodor se détendit en constatant cela, il laissa tomber sa tête sur l'épaule de Chûya, épuisé, et ferma les yeux. Comment avait-il pu rêver que Nikolaï venait le voir ? Cela faisait trois jours qu'il était rentré, et trois jours que Nikolaï l'évitait...
   — Tu veux boire un peu, demanda Poe en lui tendant un verre.
   Fyodor secoua la tête en reprenant sa respiration.
   — Ça va... J'ai juste besoin de reprendre mes esprits...
   — Tu peux rester dans mes bras, dit alors Chûya.
   Fyodor acquiesça silencieusement. Chûya s'adossa au mur derrière son lit et Fyodor s'installa contre lui, en se répétant qu'il venait simplement de faire un cauchemar. Un horrible cauchemar.
   — Tu veux des antidépresseurs, demanda Gin avec sérieux.
   — Quoi, demanda Fyodor sans comprendre.
   — Des antidépresseurs. Pour... Te détendre un peu ?
— Il a une peine de cœur, pas une dépression, dit Ryûnosuke en croisant les bras.
— Il a l'air en dépression.
— Elle a raison, tu n'as vraiment pas l'air bien..., dit Poe d'un air inquiet.
— Les peines de cœur n'entraînent pas la dépression, dit remarquer Ryûnosuke en haussant les sourcils.
— Je tomberais en dépression si Ranpo me quittait, répondit Poe.
   — Je ne suis pas en dépression, dit Fyodor d'un air épuisé.
— T'es pas sorti de chez toi depuis trois jours, tu n'as même pas mangé et tu n'arrêtes pas de pleurer, c'est de la dépression, dit Gin d'un air assuré. Ryû était comme ça avant, et c'était de la dépression !
— J'étais pas comme ça, s'indigna Ryûnosuke.
— Si, j'étais super inquiète pour toi.
— Je sais pas si c'est de la dépression, mais moi je suis vraiment inquiet pour toi Fyodor, j'ai peur que tu fasses une bêtise, dit Chûya.
Comme sauter par la fenêtre ? Il l'avait envisagé, mais il n'en était pas capable...
— Je suis pas dépressif, dit simplement Fyodor.
— Tu sais tu peux t'en sortir, Ryû aussi est passé par là, dit aussitôt Gin.
— Je n'ai jamais été dépressif, s'exclama Ryûnosuke avec agacement.
— Ryû, tout le monde le sait, inutile de nier.
— Il n'y a rien de mal à être dépressif, dit Poe d'une voix mal assurée.
— Je ne suis pas dépressif, et je n'ai pas besoin d'antidépresseurs !
— ... Si tu le dis..., dit Gin d'un air peu convaincu.
— Fyodor, peu importe que tu sois dépressif ou non. Tu peux pas rester dans cet état, il faut faire quelque chose, dit Chûya en essuyant ses larmes.
— Je vais bien.
   — Ça se voit, répliqua Gin en croisant ses bras sur sa poitrine.
— Tu n'as rien mangé depuis trois jours, tu passes ton temps à dormir, et tu pleures beaucoup... Tu vas mal. Je sais que tu n'as pas réussi à voir Nikolaï depuis ton retour, mais... Il faut faire quelque chose, dit Chûya.
   — Je n'ai pas envie d'aller mieux.
   — Fyodor...
   — Je vous avais dit qu'il fallait tuer Nikolaï, soupira Gin.
   — Ça n'arrangerait rien, et puis s'il meurt, Fyodor ne pourra jamais parler avec lui, dit Chûya.
   — On peut le kidnapper et l'obliger à parler, proposa alors Ryûnosuke. On peut l'enfermer dans un livre de Poe, non ?
   — Oui je peux le faire, dit Poe en hochant la tête.
   — Je veux pas que Nikolaï se retrouve enfermé avec Fyodor, dit Chûya d'un ton catégorique.
   — C'est inutile de toute façon, Nikolaï ne veut pas me voir, finit par dire Fyodor.
   — Mais il m'a dit qu'il t'aimait, dit Poe d'une voix perdue.
   — Tu n'as peut-être pas compris...
   — Qu'est-ce qu'il t'a dit exactement, demanda Gin.
   — Qu'il aimait Fyodor et qu'il ne voulait pas le perdre. Il a dit que c'était l'amour de sa vie, et qu'il ressentait rien pour Sigma !
   — C'est facile à dire ça, répliqua Gin d'un air hautain.
   — Il avait l'air sincère, et je sais qu'il t'aime, assura Poe en jetant un regard à Fyodor.
   — Si c'était l'amour de sa vie, il ne serait pas capable de coucher avec un autre.
   — Mais il pensait à Fyodor...
   — Oui mais c'étaient les jambes de Sigma qui étaient ouvertes devant lui, dit Gin d'un ton sec. Moi je suis pas excitée sur une autre femme que celle que j'aime.
   — Ça ne doit pas être impossible pourtant, puisque Chûya et Fyodor ont réussi à faire des photos d'eux nus ensemble, répliqua Poe.
   — Oui et justement, il faudrait peut-être vous questionner sur votre relation les cocos, déclara Gin en leur jetant un regard entendu.
   — Gin, tu peux facilement être excité pour rien, c'est juste une réaction mécanique du corps, intervint Ryûnosuke avec calme. Et puis il faut prendre en compte le contexte, ils avaient bu et danser ensemble, alors c'est normal que ça les ait excités.
   — J'ai bu et dansé plein de fois avec Tachihara, et j'ai jamais essayé de coucher avec lui.
   — Oui parce que tu es lesbienne Gin.
   — C'est toi le jumeau gay.
   — Pas du tout, c'est toi.
   — J'aime tout le monde moi.
   — Non Gin, tu n'aimes personne.
   — Je te signale que tu n'aimes personne non plus, monsieur je regarde mal tout le monde.
   — T'as pas assez d'originalité pour inventer tes propres arguments ?
   — Les tiens te vont si bien...
   — Les enfants, c'est pas le moment de se disputer, intervint Chûya avec calme.
   — Les enfants, répéta Poe sans comprendre.
   — Il pense qu'on est ses enfants, expliqua Ryûnosuke en poussant Gin pour se mettre devant elle. Pour en revenir à Nikolaï, je suggère que nous le convoquions ici, et s'il ne vient pas, on considérera ça comme la fin de votre relation.
   — Et Fyodor se mettra avec Chûya, ajouta Gin en poussant à son tour son frère.
   — Gin arrête de faire ta propagande Fyochu et va jouer aux fléchettes, répliqua Ryûnosuke. Je gère la situation.
   — C'était moi qui gérais la situation, avec Yosano on était les cheffes des opérations. Personne ne t'a demandé ton aide, en plus t'es nul en amour.
   — Qui est en couple ici ?! Et vu la situation, mon aide ne vous fera pas de mal ! Je suis spécialiste en amour maintenant.
   — Toi, spécialiste en amour, répéta Gin en éclatant de rire. T'es spécialiste de rien du tout !
   — Dis celle qui veut tuer tous ceux qui l'approchent !
   — Tu es exactement pareil !
   — Ils sont toujours comme ça, demanda Poe à l'adresse de Chûya.
   — Ça dépend des jours... En tout cas ça a l'air de t'amuser, dit Chûya en tournant la tête vers Fyodor.
   Un petit sourire était apparu sur ses lèvres sans qu'il ne s'en soit rendu compte.
   — Un peu, dit-il avec un haussement d'épaule.
   — Seulement ? Dommage, j'entendrais pas ton rire bizarre.
   — Mon rire n'est pas bizarre.
   — On dirait que t'as le hoquet mais en accéléré.
   — Laisse mon rire tranquille.
   — Mais c'est mignon !
   — Arrête de te moquer, dit Fyodor alors qu'une sonnerie retentissait dans son appartement.
   — T'attends quelqu'un, demanda Chûya.
   — Non...
   Fyodor se redressa à contrecœur, s'extirpant de la douce étreinte de Chûya et de la chaleur de son lit. Tout le monde le suivit en file indienne, avant de se cacher derrière un mur pour observer en cachette Fyodor ouvrir la porte.
   Peut-être que Mori venait le voir car il n'avait pas travaillé depuis trois jours. Ou bien c'était Ranpo et Atsushi qui venaient chercher leur petit ami, et Yosano qui venait voir Gin. Depuis que Fyodor était revenu, ses coéquipiers avaient pris l'habitude de se retrouver chez lui comme s'il s'agissait d'un café, tout le monde allait et venait dans son appartement...
   Mais lorsque Fyodor ouvrit la porte, il tomba sur la personne qui hantait ses pensées. Nikolaï se tenait devant lui, en chair et en os, et le regardait droit dans les yeux. Fyodor se figea en le voyant, sa main resta bloquer sur la poignée de la porte, son souffle se coupa, et son cœur cessa de battre. Nikolaï était venu le voir.
   Il n'avait rien à voir avec le Nikolaï de son rêve. Fyodor l'avait imaginé avec un sourire plein de malice, des yeux pétillants et plein de confiance... Mais Nikolaï ne semblait plus avoir souri depuis des jours, ses yeux étaient éteints, et ses épaules s'étaient affaissées de tristesse. Il était presque aussi abattu que Fyodor.
   — Salut, dit-il timidement.
   — Salut, répondit Fyodor d'une voix presque inaudible.
   — On peut parler ?
   Fyodor ouvrit la bouche pour répondre, mais rien ne lui vint à l'esprit, et il se contenta de se décaler sur le côté pour laisser entrer Nikolaï. Nikolaï passa devant lui, laissant une traînée de parfum frais derrière lui, et s'avança à petits pas dans le salon. Fyodor le suivit, perdu, alors que ses amis sortaient de leur cachette.
   — On va vous laisser, dit Poe avec gêne.
   — On repassera plus tard, ajouta Ryûnosuke.
   — J'ai mis des caméras donc fais attention, menaça Gin.
   Ryûnosuke attrapa son bras et la tira pour la forcer à partir. Cela n'empêcha pas Gin de donner un coup d'épaule à Nikolaï en passant devant lui. Nikolaï l'ignora et se tourna vers Chûya, qui n'avait pas bougé.
   — Tu peux partir aussi ?
   — Pourquoi ?
   — Parce qu'on a pas besoin de toi pour parler.
   — Fyodor a l'air d'avoir plus besoin de moi que de toi.
   — Chûya, il faut qu'on parle, intervint Fyodor à voix basse.
   — Tu pourras parler autant que tu veux Nikolaï, aucun mot ne pourra effacer le mal que tu lui as fait, dit Chûya en s'approchant de lui d'un air menaçant. T'as trente minutes.
   Il regarda Nikolaï de haut en bas, les yeux remplis de colère, avant de s'éloigner de lui, comme s'il ne voulait pas être contaminé par son parfum.
   — Le laisse pas faire ce qu'il veut, murmura Chûya en passant devant Fyodor.
   Il lui lança un regard perçant, avant de partir à son tour. La porte d'entrée claqua, et un lourd silence s'installa entre Fyodor et Nikolaï. Fyodor resta immobile à l'entrée de son salon sans savoir quoi faire, incapable de regarder Nikolaï. Il pensait que le revoir le comblerait de joie, qu'il lui suffirait de croiser ses yeux pour aller mieux, mais en réalité... Il arrivait à peine à le regarder. Il n'osait plus poser les yeux sur lui, il avait tellement honte qu'il préférait garder les yeux rivés au sol. Il ne savait pas pourquoi il avait honte, si c'était à cause des photos qu'il lui avait envoyées, ou bien si c'était parce qu'il se sentait sale et désabusé... Mais son ventre se tordait de honte, et il n'arrivait plus à regarder Nikolaï.
   Savoir qu'il était dans la même pièce que lui était terriblement angoissant, il ne savait pas à quoi s'entendre. Nikolaï n'avait pas l'air bien non plus, mais était-ce parce qu'il regrettait son comportement, ou bien parce qu'il était blessé par les photos qu'il avait reçues ? Allait-il lui faire des reproches ? Ou pire, lui dire qu'il choisissait Sigma ? Non, Fyodor ne pourrait pas le supporter...
   Il devait engager la discussion. Ils ne pouvaient pas rester planter l'un devant l'autre sans se parler. Fyodor se mordit les lèvres et croisa ses mains avec angoisse. Il était en vêtements de nuits, ses cheveux étaient emmêlés, et il avait une mauvaise mine. Devait-il s'excuser pour se présenter ainsi à lui ? Non, Nikolaï n'en avait probablement rien à faire, il ne devait pas avoir remarqué qu'il était en pyjama. Il n'avait même pas vu ses yeux rougis et ses joues brillantes, et encore moins sa perte de poids...
   — Il y a vraiment des caméras, demanda Nikolaï au bout d'un moment.
   — Comment, demanda Fyodor en relevant la tête vers lui.
   — Gin a mis des caméras ?
   — Oh, non. Non il n'y a rien, et ils ne peuvent pas nous entendre depuis l'extérieur.
   — Ok...
   — Nikolaï je... Je suis désolé pour les photos, murmura Fyodor. Et je suis désolé de t'avoir harcelé de messages...
   — Non, c'est moi qui suis désolé Fyodor... J'aurais pas dû... Faire tout ce que j'ai fait. J'ai jamais voulu te blesser, murmura Nikolaï en s'approchant de lui.
   — Ce n'est pas grave...
   — Si, je m'en veux vraiment.
   — Moi je ne t'en veux pas. Je te pardonne, dit Fyodor d'une voix tremblante.
   — Tu devrais pas.
   Fyodor détourna la tête sans savoir quoi répondre. Il savait qu'il ne devrait pas être si gentil avec lui, qu'il devrait être en colère contre lui, et qu'il devrait lui dire à quel point ses actes l'avaient blessé. Mais il n'y arrivait pas. Il l'aimait trop pour lui en vouloir, et les mots restaient bloquer dans sa gorge.
   Il était déjà au bord des larmes, alors que la discussion venait à peine de commencer. Il avait attendu cette discussion pendant plus de deux semaines, il avait imaginé leurs retrouvailles de plusieurs manières possibles, il s'y était accroché en se disant que revoir Nikolaï réglerait tous ses problèmes. Il était persuadé qu'il avait juste besoin de l'entendre lui parler pour oublier tout ce qu'il lui avait fait, et qu'il se jetterait dans ses bras avec soulagement...
   Alors pourquoi se sentait-il aussi mal ? Nikolaï se tenait devant lui et s'était excusé, cela devrait lui suffire pour aller mieux... Mais Fyodor se sentait encore plus mal qu'avant. Pourquoi continuait-il de souffrir alors qu'il avait reçu des excuses ? Pourquoi continuait-il de penser à Nikolaï dans les bras de Sigma alors que Nikolaï était revenu vers lui ? Pourquoi ne pouvait-il pas simplement oublier tout cela et être heureux de retrouver Nikolaï ?
   Le bonheur lui semblait si lointain à présent qu'il ne savait plus comment l'atteindre. Les plaies de son cœur continuaient de pleurer, l'éclat de lumière de ses iris continuait de se noyer dans ses larmes, et son corps continuait de cristalliser dans le froid qui l'envahissait. Il allait mal, et Nikolaï ne lui suffisait pas... Il avait besoin de comprendre. Il avait besoin de savoir s'il était le problème, s'il n'était pas assez bien pour lui, s'il avait fait quelque chose de mal, ou juste... Si Nikolaï l'aimait ou non. Il avait besoin de savoir s'il allait devoir partager Nikolaï, s'il allait devoir le regarder aimer un autre... C'était la seule chose qu'il avait besoin de savoir...
   — Si tu aimes Sigma, je... Je préfère que tu me le dises tout de suite..., dit Fyodor, la gorge serrée par l'angoisse.
   — Fyodor, c'est toi que j'aime, répondit Nikolaï avec désespoir.
   — Mais tu m'as ignoré et ensuite tu as couché avec un autre, dit Fyodor en sentant des larmes remplir ses yeux. Avec mon meilleur ami...
   — Je sais, j'ai fait n'importe quoi, mais je t'assure que c'est toi que j'aime et... E-et Sigma pourra jamais compter comme toi tu comptes, s'exclama Nikolaï en lui prenant les mains.
   — Alors pourquoi t'as fait tout ça ?
   — Je pensais que c'était la bonne solution ! Je voulais pas te blesser, je voulais juste que... Que tu me dises que tu m'aimes... Fyodor, j'ai pas arrêté de penser à toi depuis que t'es parti, et je sais que j'ai vraiment, vraiment, mal agi mais... Mais je t'aime... Je t'aime toi et pas Sigma, je te le jure !
   — Arrête, dit Fyodor en se reculant.
   — Je sais que j'ai tout gâché et que je t'ai fait du mal, et je m'en veux vraiment, s'exclama Nikolaï en essayant de le retenir. J'ai jamais voulu tout ça ! Je... Je pensais qu'en te rendant jaloux, tu m'avouerais tes sentiments et... Dazai m'a dit de faire ça pour que tu viennes à moi et j'ai été assez stupide pour le croire, mais je sais que j'aurais pas dû faire ça, je te promets que je le referais plus !
   — Nikolaï stop...
   — J'ai rien ressenti avec Sigma, je t'assure, continua Nikolaï en serrant ses mains. J'ai pas aimé couché avec lui, c'était à toi que je pensais et... Et je le referais jamais ! Fyodor t'es le seul que je veux, t'es le seul que j'aime ! J'arrête pas de penser à toi et à tout ce qu'on aurait pu avoir si j'avais pas tout gâché, et... Je m'en veux vraiment, parce que je t'aime et que tu méritais pas de subir tout ça ! Quand... Quand j'ai vu les photos que t'avais faites avec Chûya ça m'a vraiment fait mal, et je t'en ai voulu au départ, mais... Mais j'ai réalisé que si j'avais pas mal agi, ces photos existeraient pas et... J'avais juste l'impression de pas avoir le droit de te parler. Je voulais pas empirer les choses, je savais pas comment tout arranger, et je voulais pas te faire plus de mal... Fyodor je te jure que je t'aime et que j'ai jamais voulu te faire de mal... J'ai fait les mauvais choix et je le reconnais... Mais s'il te plaît, laisse-moi te montrer que je peux te rendre heureux... S'il te plaît, je veux pas que tu partes avec un autre, je peux te rendre heureux... S'il te plaît...
   Fyodor ne parvint pas à répondre. Il n'avait plus la force de se reculer pour s'écarter de Nikolaï, ni de tirer sur ses mains pour qu'il le lâche. Des larmes tombaient de nouveau sur ses joues, ainsi que sur celles de Nikolaï, et Fyodor n'essayait plus de les cacher. Cacher sa peine n'avait plus de sens à présent, il était trop tard pour effacer ses larmes.
   — Je veux pas te perdre..., dit Nikolaï avec détresse.
   Il s'approcha de lui et caressa doucement son visage, et Fyodor pencha la tête pour frotter sa joue contre sa main. Nikolaï dut prendre cela pour une invitation, car il approcha son visage du sien et déposa ses lèvres sur les siennes. Fyodor ferma les yeux sans parvenir à le repousser, et de nouvelles larmes s'écrasèrent sur ses joues. Ce baiser était bien différent de celui qu'il avait rêvé. Celui de son rêve était chaud, il avait ravivé le feu qui brûlait en lui, effacé ses peines et refermé ses cicatrices. Le baiser de son rêve avait été un souffle de vie, il lui avait fait du bien, et pendant quelques secondes, Fyodor avait été comblé de bonheur. Il s'était revu lors de sa première nuit avec Nikolaï, et ce souvenir l'avait rempli de joie.
   Mais le baiser que lui offrait Nikolaï ne ressemblait en rien à celui de ses lèvres, ni à celui de leur nuit ensemble. Il avait le goût de l'eau et du sel, si bien qu'il piquait les plaies que s'était faites Fyodor aux lèvres. Ce baiser déchirait son âme au lieu de la guérir, il entaillait son cœur et approfondissait ses cicatrices. Il était aussi froid que le vide que ressentait Fyodor en lui, glacé comme la solitude que Nikolaï lui avait imposée. Embrasser Nikolaï n'avait plus rien de plaisant.
   Fyodor n'arrivait plus à ignorer la douleur qui grimpait en lui. Il voudrait repousser Nikolaï, lui dire qu'il avait trop mal pour l'embrasser, se détacher de lui et tout oublier. Mais il n'y arrivait pas. Il était paralysé, bloqué par l'espace autour de lui les lèvres de Nikolaï étaient si froides qu'elles glaçaient son corps et l'empêchaient de bouger. Il ne pouvait pas le repousser, sa peine grandissait en lui et son angoisse l'étouffait, l'empêchant de réagir. Ce n'était qu'un baiser, mais Fyodor sentait déjà les mains de Nikolaï sur lui, il avait l'impression de se faire déshabiller sans pouvoir résister... Si seulement quelqu'un pouvait venir les interrompre...
   Mais personne ne vint, et Nikolai enlaça bientôt Fyodor. Il le fit reculer contre une table et l'embrassa avec plus de passion, avant de passer sa main sous son t-shirt pour caresser sa poitrine. Il se mit alors à embrasser son cou, laissant Fyodor respirer, et le jeune homme leva les yeux au plafond. Avait-il embrassé Sigma de la même manière ? L'avait-il d'abord plaqué contre une table en lui offrant un baiser passionné, avant d'embrasser son cou, de goûter à sa peau, et de caresser sa poitrine ? Lui avait-il parlé ? Ou bien était-il resté froid, comme avec Fyodor ? Les images du rêve de Fyodor lui revinrent soudain en tête et apparurent devant ses iris, le forçant à regarder Sigma embrasser Nikolaï.
   Il ne pouvait pas... Il ne pouvait pas continuer, c'était trop difficile à supporter.
   — Arrête, murmura-t-il avec détresse.
   Nikolaï remonta le long de sa gorge et déposa des baisers sur sa mâchoire sans l'entendre.
   — Arrête, stop, dit Fyodor en essayant de le repousser.
   Nikolaï remonta son t-shirt le long de son torse pour lui retirer, mais Fyodor lutta contre lui et commença à se débattre avec force.
   — Nikolaï arrête, tu m'as fait du mal et tu continues de le faire, cria-t-il en le repoussant avec force.
   — Fyodor..., murmura Nikolaï sans comprendre. Mais je...
   — Tu m'as fait du mal et tu veux coucher avec moi, cria Fyodor à travers ses larmes.
   — Je suis désolé, j'ai jamais voulu te faire de mal...
   — Mais tu l'as fait ! On avait tout pour avoir une bonne relation, tout allait bien entre nous et on était heureux ! Je t'ai fait confiance, je t'ai suivi, je t'ai aimé, et toi tu m'as détruit, cria Fyodor avec colère. La seule putain de chose que t'avais à faire, c'était rester avec moi après notre nuit ensemble, et me dire que tu m'aimais ! Tu avais deux mots à dire, et rien ne t'empêchait de le faire ! On venait de coucher ensemble, après avoir passé des mois à flirter, et tu as préféré partir sans même essayer quoi que ce soit ! Mais ça tu vois, j'aurais pu le comprendre, parce que je t'aime et que j'aurais pu accepter que tu aies eu peur et que tu avais besoin de temps. Mais tu m'as ignoré, tu as fait comme si je n'existais plus, tu as fait comme si j'étais un inconnu pour toi, et tu es parti baiser mon meilleur ami ! Mon meilleur ami !
   — Fyodor, je suis vraiment désolé...
   — Je ne veux pas de tes excuses, cria Fyodor en frappant Nikolaï. Si tu étais désolé, tu me l'aurais dit immédiatement ! Mais tu as préféré faire comme si de rien n'était, et dès que j'ai été loin de toi, tu m'as rayé de ta vie ! Tu as lu chacun des messages que je t'ai envoyés sans y répondre, tu n'as même pas fait l'effort de me remercier pour les informations que je te donnais ! Tu m'as ignoré alors qu'à côté, tu restais auprès de Sigma, et quand je suis revenu, tu n'as même pas eu le courage de venir me voir ! Et tu crois que me dire que tu m'aimes ça arrangera tout ?!
   — Mais je t'aime vraiment, se défendit Nikolaï d'une voix forte. Et je peux te le montrer, si tu me laisses une chance je-
   — C'est trop tard pour le prouver ! Je t'imagine tous les jours avec Sigma, tous les jours je souffre en pensant à toi, et tous les jours je me dis que je suis le problème entre nous deux, alors que tu es le problème, s'exclama Fyodor dans un sanglot. Comment qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Tu veux que j'oublie tout et que je retourne avec toi comme si de rien n'était ? Tu veux que je couche avec toi et que tout redevienne comme avant ? Mais qu'est-ce qui me dit que demain, tu ne partiras pas coucher avec Sigma ?!
   — Moi je te le dis, Fyodor c'est à toi que je pense !
   — Mais moi c'est à toi et Sigma que je pense, et je pourrais jamais l'oublier ! Tu me fais du mal, regarde dans quel état je suis ! Tu me fais du mal et tu ne te rends même pas compte que j'ai besoin que tu me laisses...
   — ... Tu veux que je sorte de ta vie, demanda Nikolaï, les yeux plein de larmes.
   Fyodor ne répondit pas, mais il soutint son regard. Ses joues étaient inondées de larmes et il tremblait de tout son corps, mais cette fois-ci, il était prêt à repousser Nikolaï. Il entendait les lamentations de son cœur et il savait qu'il souffrirait de cette séparation, mais il ne changerait pas d'avis. Ce mal était nécessaire s'il voulait aller mieux. Il devait oublier Nikolaï.
   — Fyodor, je t'aime vraiment, murmura Nikolaï avec impuissance.
   — Moi aussi je t'aime, répondit Fyodor en battant des paupières. Mais si tu tiens à moi, tu dois me laisser partir.
   — Fyodor...
   — Laisse-moi partir. S'il te plaît Nikolaï, laisse-moi avant que je change d'avis et que je souffre encore...
   Nikolaï le regarda longuement, pleurant silencieusement. Fyodor serra les poings et se força à ne pas détourner les yeux, il lutta contre son envie de se jeter dans ses bras, enfonçant ses ongles dans ses paumes, et s'obligea à respirer avec calme.
   Et au bout d'un interminable moment de silence, un portail doré apparut devant Nikolaï.
   — Prends soin de toi s'il te plaît, murmura-t-il d'une voix étranglée.
   Fyodor battit des paupières en acquiesçant, et la seconde d'après, Nikolaï avait disparu. Fyodor retourna alors sur son canapé et se roula en boule dessus. Il éclata aussitôt en sanglots et enfouit son visage dans un coussin pour pleurer.
   Il aurait aimé être capable d'oublier ce qu'avait fait Nikolaï. Il aurait aimé rester dans ses bras et s'offrir une fois de plus à lui, que sa douleur disparaisse pour laisser place au plaisir, et qu'il soit de nouveau heureux avec lui... Mais il n'en était pas capable. Il pensait l'être, et il pensait que l'attention de Nikolaï suffirait à le rendre heureux... Mais il était trop blessé pour pouvoir se contenter de cela. Il avait besoin d'une relation saine, il avait besoin de sentir qu'il était aimé, qu'il pouvait faire confiance à son partenaire... Et Nikolaï ne pouvait satisfaire ses besoins...
   De longues minutes s'écoulèrent sans que Fyodor ne parvienne à bouger. Ses larmes ne s'arrêtaient plus de couler, et bien qu'il était sûr d'avoir fait le bon choix, il ne pouvait s'empêcher de s'en vouloir de repousser Nikolaï. Lui non plus, il ne voulait pas le faire souffrir, et il ne voulait pas qu'il parte avec un autre... Mais il avait besoin d'oublier Nikolaï, il avait besoin de libérer son cœur...
   Une main finit par se poser sur ses cheveux pour les caresser avec douceur, et un parfum de cigarettes embauma l'air.
   — Je suis fier de toi, dit la voix de Chûya.
   — J'ai tout gâché, dit Fyodor d'une voix étouffée.
   — Non, tu as mis fin à votre relation désastreuse.
   — Ça aurait été plus facile de rester dans cette relation et d'avoir Nikolaï...
   — Tu peux avoir d'autres personnes tu sais.
   Fyodor renifla et tourna la tête pour voir Chûya. Il s'était agenouillé devant lui pour le caresser, et le regardait avec peine. Il était revenu seul dans son appartement, les autres avaient dû rentrer chez eux.
   — Tu sais, si tu es fait pour Nikolaï, tu le retrouveras un jour. Mais en attendant il faut que tu penses à toi.
   — Je ne survivrais jamais à ça, je ne pourrais plus jamais faire confiance à quelqu'un.
   — Moi tu peux, répondit Chûya avec un sourire. Ça fait toujours mal de sortir d'une relation toxique, mais il faut passer par là.
   — C'est trop douloureux, je pourrais plus jamais me sentir bien...
   — Tu vas y arriver, je t'aiderai. Nikolaï t'a expliqué pourquoi il a agi comme ça ?
   — Oui... Et... Il m'a embrassé...
   — ... Oh, dit Chûya en cessant ses caresses.
   — Il voulait coucher avec moi...
   — Oh... Et tu... Qu'est-ce que tu as fait ?
   — Je l'ai repoussé.
   — C'est bien, dit Chûya d'un air rassuré. T'as ressenti quelque chose ?
   — J'étais... Je me sentais mal, c'était... Angoissant, et douloureux. Je me sentais vraiment mal... Je pensais que l'embrasser me ferait aller mieux, et je pensais même que j'étais prêt à coucher avec lui, même si c'était seulement pour du sexe... Mais j'en suis incapable. Embrasser Nikolaï m'a juste rappelé qu'il avait embrassé un autre, dit Fyodor en baissant les yeux.
   — Tu as eu raison de le repousser.
   — C'est quand même difficile à accepter... J'aurais préféré aimer l'embrasser... Mais là c'était trop difficile...
   — Est-ce que je dois en conclure que notre baiser t'as plus plu, tenta Chûya pour lui remonter le moral.
   — Il a dû me plaire un peu vu qu'il m'a excité, répondit Fyodor avec un petit sourire.
   — Donc il n'y a pas que Nikolaï qui peut réchauffer ce joli corps ! Ça veut dire que tu pourras l'oublier.
   — Sauf que j'étais bourré, et tout le monde n'a pas ton sex appeal Chûya.
   — On reste ensemble alors ! C'est ce qui était prévu de toute façon.
   Fyodor ne put s'empêcher de sourire un peu plus, et se redressa.
   — Je vais commencer à croire que tu me dragues vraiment.
   — Ben... Flirter avec d'autres personnes que Nikolaï ça te ferait du bien. Quand tu seras prêt, on pourra ressortir en boîte pour s'amuser, proposa Chûya. On pourrait sortir avec les autres, Gin serait ravie d'avoir une excuse pour sortir avec Yosano.
   — Pour qu'on refasse des photos en étant bourré ?
   — Pourquoi pas ? Mais cette fois-ci on les gardera pour nous, plaisanta Chûya avec un clin d'œil.
   Fyodor sourit en essuyant ses larmes. L'idée n'était pas déplaisante au fond, il avait aimé passer ce moment avec Chûya, il s'était senti si bien... Mais il avait besoin de temps avant d'arriver à s'amuser de nouveau, pour le moment, il ne s'en sentait pas capable.
   Chûya finit par venir s'asseoir à ses côtés, et Fyodor tourna la tête vers lui. 
   — Je pense qu'il va falloir attendre un peu pour sortir en boîte.
   — Je peux t'attendre, répondit alors Chûya.
   — Merci, répondit Fyodor en laissant tomber sa tête sur son épaule.
   — C'est normal, entre clowns il faut se soutenir, dit Chûya en lui prenant la main.
   — Heureusement que tu es là, tu es la seule personne que j'ai maintenant... Enfin il y a les autres, mais ils comptent moins. Alors merci.
   — T'as pas à me remercier... Moi aussi je suis heureux de t'avoir.

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C'est la fin de cette intrigue !

La fin du Fyolai est donc plus triste que celle du soukoku, mais je pense que c'était le meilleur choix à faire, il ne pouvait pas y avoir de couple à la fin de cette histoire.
Bon, en réalité cette intrigue c'était surtout du fyochu (je ne sais pas comment s'appelle leur ship-). Je vous l'avais pas dit parce que je savais que beaucoup ne la liraient pas, ou partiraient avec des préjugés si je disais que c'était plus du fyochu. Je voulais d'abord développer leur relation, pour montrer que dans cette histoire ils allaient mieux ensemble, et vous laisser le comprendre de vous-même ! Certes, ils ne finissent pas ensemble, mais la fin est ouverte et on peut imaginer qu'ils finissent par se mettre ensemble !

(Promis l'intrigue qui sort vendredi c'est du vrai soukoku et du vrai Fyolai).

Je suis contente d'avoir fait cette intrigue. Pour ceux qui me connaissent, vous savez que j'ai déjà beaucoup exploré des thématiques sombres (dépression, mort, agressions...), mais j'avais jamais abordé celle des relations toxiques, donc c'était le moment de le faire !

J'espère que l'intrigue vous a plu, n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé :)

À demain pour un petit os soukoku !

Recueil Bungo Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant