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DERRIÈRE LA PLUME D'UN GÉNIE


Le cadre photo

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Attention : mention de viol dans le chapitre

(Me revoilà 🤗. Je préviens juste un changement de programme : ceci est l'avant dernier chapitre de l'intrigue, j'en ai rajouté un pour mieux conclure)

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   Les volets de la chambre de Fyodor étaient fermés, mais les rideaux de sa fenêtre étaient ouverts, et filtraient la lumière du soleil matinal. Ses rideaux étaient longs, pourpres, et la lumière qui passait au travers se teintait de rouge, ce qui donnait une apparence sensuelle à la chambre. Fyodor se trouvait là, endormi, allongé sur le lit, son visage était caressé par un rayon doré de soleil qui échappait au filtre de ses rideaux. Il était sur sa couette, il reposait sur le ventre, les bras en croix, et portait son kimono de satin carmin, celui brodé de dentelle noir et ouvert dans le dos. Nikolaï sourit en le voyant ainsi, et ne put s'empêcher de contempler la ligne délicatement arquée de sa colonne vertébrale. Sa peau était rosée par la lumière, et les os de ses omoplates ressortaient doucement, comme deux montagnes encadrant une plaine. Fyodor ne mettait ce kimono que lorsqu'il était avec Nikolaï, et qu'il voulait lui faire comprendre qu'il avait envie de lui. Alors s'il le portait aujourd'hui, c'était qu'il savait que Nikolaï viendrait le voir, peut-être même qu'il était réveillé.
   Pour ne pas lui faire peur, Nikolaï laissa la porte entrouverte derrière lui, en la faisant légèrement grincer pour produire un peu de bruit et signaler sa présence. Il s'approcha ensuite du bureau et saisit un vase qui était posé dessus. Il était rempli de fleurs séchées, c'étaient des roses blanches, dont les pétales fanés tenaient encore à leurs cœurs et produisaient des bruits de papiers à chaque fois qu'ils se frôlaient. Nikolaï les avait offertes à Fyodor deux semaines plus tôt, et il aimait voir que Fyodor ne les avait pas jetées lorsqu'elles avaient perdu vie. Aujourd'hui, Nikolaï lui avait acheté de nouvelles fleurs, encore des roses, mais celles-ci avaient une couleur rouge sang. Il les avait aperçues sur le marché par lequel il était passé pour venir ici, et elles lui avaient immédiatement fait penser à Fyodor, alors il les avait achetés. Plus le rouge était sombre, et plus il allait à Fyodor, comme deux cerises mûres ressortiraient à merveille sur une couche de neige.
   Il disposa les roses de sang dans la pureté des fleurs blanches, en faisant attention à ne pas les casser, puis il remit le vase à sa place, et s'approcha du lit. Il le contourna en retirant son gilet, puis il grimpa à quatre pattes dessus et se blottit contre son petit ami.
   Il ne l'avait pas vu depuis plus d'une semaine à cause du travail qu'ils avaient à faire, et Fyodor commençait à vraiment lui manquer. Nikolaï s'était tellement habitué à sa présence qu'il se sentait vide en son absence, une journée sans lui était une journée triste, insipide. Alors, hier soir, il avait veillé tard pour terminer tout son travail de la semaine et libérer son week-end, il n'avait presque pas dormi de la nuit, mais c'était pour la bonne cause. Il allait pouvoir passer tout le week-end avec son chéri, et cela suffisait à lui donner de l'énergie.
   Il prit soin de chatouiller Fyodor avec ses cheveux, qui tombaient par dessus son épaule, puis il se pencha sur lui pour embrasser sa tempe. Comme il s'y attendait, un sourire apparut sur ses lèvres, et il glissa sa main dans ses cheveux pour lui montrer qu'il pouvait continuer de l'embrasser. Nikolaï s'allongea alors contre son dos et se redressa sur un coude, il embrassa d'abord sa joue, puis sa mâchoire, son cou et son épaule, en passant sa main sur son ventre pour l'attirer contre lui.
   — Merci pour les fleurs, dit Fyodor en ouvrant les yeux.
   — De rien, dit Nikolaï en caressant son ventre. Je voulais t'offrir des fleurs en pot pour qu'elles ne fanent jamais, mais avec toi les fleurs fanées sont magnifiques alors je vais continuer de t'offrir des fleurs fraîches.
   — Je les garderai toutes précieusement, j'adore les fleurs fanées, dit Fyodor avec un sourire.
   — Je sais. T'as passé une bonne semaine ?
   — Sans plus. Et toi ?
   — Moi aussi. Mon lit était tout froid sans toi, et ne plus écrire avec toi dans mes bras m'a fait bizarre.
   — Maintenant que le semestre se termine on pourra passer plus de temps ensemble, rassura Fyodor alors qu'un sourire éclairait son visage.
   — Oui enfin ! C'est quoi cette tenue ? T'es toujours aussi sexy quand tu dors ?
   — Je savais que tu viendrais me voir ce matin, répondit Fyodor d'un air coquin. Mais je voulais t'accueillir éveillé, dans mon imagination c'était beaucoup plus sensuel.
   — Ça me va très bien comme ça... T'es tout nu en dessous ?
   — Peut-être, je ne sais pas.
   — On va voir ça, répondit Nikolaï en souriant.
   Il glissa sa main entre ses cuisses, sous son kimono, et sentit de la dentelle sur son intimité. Son sourire s'agrandit et il lança un regard amusé à Fyodor, alors qu'il frottait ses cuisses l'une contre l'autre. Nikolaï ne se souvenait pas avoir acheté ce sous-vêtement. Il lui avait offert plusieurs en voyant qu'ils lui allaient à merveille, et à force de caresser leur tissu lorsqu'ils le couvraient, il avait fini par reconnaître les dessins de leur dentelle. Or, il ne reconnaissait pas les motifs floraux de celui-là.
   Il était tout aussi fin que les bas qu'il possédait déjà, il était couvert de dentelle, et il y avait si peu de tissu qu'il ne cachait pas du tout les fesses de Fyodor, ce qui plaisait beaucoup à Nikolaï. Il se laissa caresser ses fesses et les serrer, avant de leur donner une petite tape, et de faire de nouveau passer sa main entre ses cuisses. Il se pencha un peu plus sur Fyodor, pour que son souffle chaud s'échoue sur ses lèvres, et caressa du creux de sa main son intimité. Fyodor se cambra contre lui et se frotta contre son bassin, il ferma les yeux, et un long soupir de bien-être s'échappa de ses lèvres. Nikolaï le serra un peu plus en voyant le bien qu'il lui procurait, et se mit à déposer des baisers humides sur son épaule dénudée.
   La chaleur qui émanait du corps de Fyodor lui avait manqué. Elle était si douce, si hypnotisante, qu'elle restait gravée dans l'esprit de Nikolaï. Il ne l'oubliait jamais, et lorsqu'il en était privé, il ne pouvait s'empêcher d'y penser et d'en rêver. Sa chaleur était sensuelle comme une flamme qui léchait l'âtre de sa cheminée, et Nikolaï voulait plonger dedans, la sentir envelopper son corps et se perdre dedans. Il voulait encore entendre son souffle, ses profondes respirations, les notes de plaisir qui tremblaient dans sa voix, et voir ses lèvres s'ouvrir dans un « oui » muet. Il ne désirait rien d'autre que ce spectacle en cet instant, et il savait que Fyodor le voulait aussi. Il avait remarqué que Fyodor adorait éprouver du plaisir à son réveil, ça l'aidait à passer une bonne journée. Et puis c'était un moyen de se réveiller en douceur. Nikolaï faisait plutôt partie de ceux qui aimaient s'endormir en ressentant du plaisir, alors, lorsqu'il dormait avec son petit ami, ils s'arrangeaient pour satisfaire leurs deux envies. Ils s'endormaient et se réveillaient bercés par le plaisir, ce qui leur offrait des nuits de rêve.
   La main de Fyodor se mêla à celle de Nikolaï et le conduisit un peu plus loin entre ses cuisses, alors que de belles rougeurs naissaient sur ses joues, comme de la poudre venue de pétales de roses qui se serait étalée sur ses joues. Nikolaï comprit ce qu'il lui demandait, alors il souleva la ficelle de son bas pour passer ses doigts en dessous, et les fit entrer en Fyodor, avec autant de délicatesse que possible. Il dévora sa gorge de baisers pour le détendre, mais Fyodor ne semblait pas fuir la douleur qui l'envahissait. Au contraire, ses joues étaient plus rouges, il se mordait les lèvres, fronçait les sourcils, s'accrochait aux draps, et se cambrait en continuant de frotter ses cuisses l'une contre l'autre. Nikolaï avait toujours l'impression que c'était une douleur qui lui plaisait, et lorsqu'il y repensait après l'acte, il ne pouvait s'empêcher de se dire que ce n'était peut-être pas très sain pour Fyodor. C'était comme si son corps réagissait automatiquement pour éprouver du plaisir, comme s'il cherchait de l'extase dans la douleur. Et maintenant que Nikolaï savait ce qu'avait vécu Fyodor, il sentait que ce réflexe était trop mécanique pour qu'il vienne de son cœur.
   C'était une peur au fond de lui, qui le poussait à aimer la douleur dans un rapport, cette peur le rassurait. Nikolaï n'avait jamais osé lui en parler, mais il savait qu'il avait raison, car il savait reconnaître les manifestations du cœur de Fyodor, et les effets de son plaisir sur son corps. Il pouvait voir lorsque Fyodor aimait vraiment quelque chose, et lorsqu'il ne l'aimait pas. Il pouvait entendre son cœur parler dans sa poitrine, et son excitation lui chuchoter ses plaisirs. Il savait lorsque Fyodor s'obligeait à aimer quelque chose, même lorsqu'il le faisait inconsciemment, alors il faisait toujours attention à ne pas le pousser à ressentir ce plaisir souillé.
   Il bougea ses doigts en lui avec précaution, et le couvrit de baisers, jusqu'à ce qu'il se détende réellement. Une fois qu'il fut sûr que la pénétration ne lui était plus désagréable, il tourna Fyodor vers lui, le saisit par les cuisses, et roula sur le dos pour que Fyodor se retrouve allongé sur lui. Fyodor grimpa à califourchon sur son bassin et se redressa, en tirant Nikolaï par les épaules pour qu'il l'imite. Il passa ses bras autour de son cou et plaqua ses lèvres sur les siennes, et Nikolaï répondit à son baiser avec fougue. Il serra ses cuisses, puis fit entrer ses mains sous son kimono et caressa son corps. Le baiser de Fyodor lui faisait tourner la tête, il lui donnait l'impression de revivre après cette dure semaine de travail, il respirait de nouveau à travers l'air de Fyodor, et rien au monde ne pourrait le faire se sentir mieux. Malgré cela, il restait assez lucide pour sentir que les courbes de Fyodor s'étaient affinées.
   Il était plus mince, les os de sa colonne vertébrale ressortaient plus, tout comme ses côtes. Et ses joues étaient toujours aussi creuses, son ventre toujours aussi plat. Pourtant, Nikolaï veillait à ce qu'il mange bien, alors il ne comprenait pas comment Fyodor faisait pour maigrir. Peut-être qu'il stressait trop à cause du travail. Et puis il pensait encore beaucoup à son passé, et cela devait peser sur son mental...  
   À cette pensée, Nikolaï passa ses bras atour de Fyodor et le serra contre lui avec amour, comme pour le protéger.
   — Tu veux le faire, murmura-t-il en mettant fin à leur baiser.
   — Parce que tu en doutes, demanda Fyodor avec un sourire.
   — Je veux juste être sûr, j'ai peur que tes hanches soient un peu rouillées puisque ça fait un moment qu'on l'a pas fait, répondit Nikolaï d'une voix joueuse.
   — Mes hanches n'attendent que toi, et tu verras qu'elles bougent toujours aussi bien qu'avant. Mais on ne doit pas faire de bruit, Chûya est juste à côté.
   — Très bien, alors je te laisse faire.
   Fyodor sourit, puis il se pencha et sortit un préservatif d'un petit coffre sous son lit. Il déchira le papier alors que Nikolaï baissait son pantalon, puis il lui mit la protection, et le fit entrer en lui. Nikolaï dut maintenir de force ses hanches pour contrôler leur descente, et l'empêcher de se pénétrer trop brutalement, et laissa tomber son front contre le sien en poussant un long soupir. Il aimait tant la sensation humide qui l'entourait, la manière dont il se serrait autour de lui, et comment il se cambrait lorsqu'il le recevait. C'était terriblement plaisant, Nikolaï était partagé entre l'envie de bouger pour décupler son plaisir, ou bien rester immobile, laisser Fyodor le brûler et se laisser consumer de plaisir en lui. Les deux choix étaient aussi tentants l'un que l'autre...
   Lentement, il releva les yeux, il les posa d'abord sur les lèvres rosées de son petit ami, puis dans ses yeux, rouges comme un rubis nacré. Ils brillaient et l'appelaient, chaque étincelle dedans faisait battre son cœur, et s'il le pouvait, Nikolaï plongerait dans le vin qui baignait ses iris pour s'y noyer. Les cils noirs de ses yeux s'abattirent momentanément sur ses pupilles lorsqu'il battit des paupières, et un décharge parcourut le corps de Nikolaï. La tentation de se jeter sur lui n'était plus supportable, alors il plaqua ses lèvres sur les siennes et l'embrassa avec furie, jusqu'à en perdre haleine. Fyodor faillit basculer en arrière, mais il se rattrapa au cou de Nikolaï et s'y accrocha, en commençant à bouger sur lui. Il répondit à son baiser en pénétrant sa bouche de sa langue, ce qui perdit un peu plus Nikolaï dans les ardeurs de son plaisir. Il était affamé, et la chair de Fyodor avait le goût le plus exquis qui n'avait jamais envahi sa bouche.
   Ivre de plaisir, il embrassa la mâchoire, la gorge et les épaules de Fyodor, en le serrant si fort contre lui qu'il devait lui faire mal. Lorsqu'il suça sa peau pour y laisser une trace rouge, il entrouvrit les paupières, et son regard tomba sur le vase de rose qui se trouvait sur le bureau. Sans le remarquer, il avait posé le vase dans un raie de lumière, qui faisait parfaitement ressortir les pétales courbés des fleurs. La peau de Fyodor avait la douceur d'un pétale de rose. Elle portait le même duvet, la même odeur, les mêmes courbes. Son corps était comme une tige dont les épines avaient été arrachées, solide mais dépourvu de défenses. Nikolaï avait l'impression de tenir une rose de sang dans ses bras, une fleur de plaisir qu'il avait cueillie dans les ronces de la volupté*.
   Après avoir suffisamment goûté à sa peau, il s'écarta et se laissa tomber en arrière, pour laisser Fyodor s'épanouir sur lui, et le contempler d'un nouvel angle de vue. Il le regarda défaire le nœud qui maintenait fermé son kimono, bien que le passage des mains de Nikolaï avait écarté ses pans et révéler une partie de sa poitrine. Il l'ouvrit lentement, avant de le laisser descendre le long de ses bras, tout en montant et descendant sur son bassin. Il se pencha ensuite sur lui et posa ses mains sur son torse pour prendre appui dessus, et Nikolaï en profita pour saisir ses cuisses et les écarter davantage. Nikolaï avait rarement une aussi belle vue sur Fyodor, il n'allait pas y résister longtemps...
   — Seigneur... C-Comment j'ai fait pour vivre jusque-là sans ça, murmura Nikolaï en caressant ses cuisses.
   — Fais-moi jouir au lieu de parler, répondit Fyodor d'un ton presque suppliant.
   — J'y suis presque... Tu peux te lâcher...
   — Oh ! Me fais pas gémir, dit Fyodor d'une voix tremblante. L-La porte est ouverte, m-me fais pas gémir...
   — Si, murmura Nikolaï en accélérant la cadence.
   — N-Non, me fais pas... A-Ah... Me fais pas gémir...
   — Te retiens pas, laisse toi aller !
   — N-Non... Me fais... Ah... Pas gémir... Oui, gémit Fyodor en fronçant les sourcils. Oh mon Dieu, Oui ! Oui ! Encore ! Nikolaï !
   Il posa ses mains sur sa poitrine et se pencha un peu plus en avant, et accéléra ses mouvements de bassin. Il était de plus en plus cambré, son ventre se rentrait, et ses épaules se rejetaient en arrière, et sa poitrine ressortait. Nikolaï la regardait et peinait à se jeter dessus, à la prendre en bouche pour la sucer, faire rouler la pointe de ses tétons sur sa langue, la bloquer entre ses dents, la caresser de son palais, jusqu'à ce qu'elle devienne rouge et dure. Comme une petite groseille pas encore mûre, un bourgeon encore jeune.
   À cette pensée, une délicieuse chaleur grimpa dans le corps de Nikolaï et le fit trembler. Ses joues s'empourprèrent, sa vue se perdit, ses yeux se fermèrent, et il se mit à trembler d'un coup. Son plaisir lui échappa alors qu'un gémissement s'élevait dans la chambre, suivit de son nom, et d'un soupir de plaisir. Entendre Fyodor gémir son nom l'excita encore plus, et Nikolaï lui donna de grands coups de bassin pour prolonger leur orgasme. Fyodor rejeta sa tête en arrière en haletant, il s'accrocha à sa poitrine et gémit de nouveau son nom, d'une voix de plus en plus aiguë, jusqu'à ce que le plaisir de Nikolaï explose et coule en lui. Il se paralysa et se laissa submerger par son bien-être, et resta un moment immobile, à essayer de reprendre son souffle. Enfin, lorsqu'il le put, il releva difficilement ses hanches tremblantes et se sépara de Nikolaï, avant de s'écrouler à côté de lui.
   Nikolaï ne supporta pas longtemps de ne plus être en contact avec lui. Il attendit à peine de retrouver ses esprits et de reprendre son souffle, et se tourna vers lui pour le prendre dans ses bras et l'étreindre. Fyodor répondit à son étreinte en se tournant à son tour vers lui, il passa l'une de ses jambes au-dessus de sa hanche, et enfouit son visage dans son cou en fermant les yeux.
   — Je t'aime, murmura-t-il avec un baiser sur sa joue. 
   — Je t'aime aussi, et j'avais hâte de te revoir, dit Nikolaï.
   Lui aussi avait fermé les yeux, ses mains se baladaient sur la cuisse de Fyodor posée sur lui. Il se sentait apaisé, et toute la pression accumulée au cours de la semaine s'était complètement envolée. Il resta un long moment allongé ainsi, à câliner Fyodor, jusqu'à ce qu'il remarque que Fyodor était en train de s'endormir, et qu'il somnolait déjà. Il tapota doucement sa hanche pour le tirer des bras de Morphée, et Fyodor poussa un gémissement de mécontentement.
   — Te rendors pas, je veux papoter avec toi, dit-il avec un petit sourire.
   — Le sexe ça me détend, maintenant je peux dormir. Et je n'ai pas dormi cette nuit, je suis fatigué.
   — Pourquoi t'as pas dormi ?
   — J'ai fait un cauchemar, alors je ne voulais pas me rendormir.
   — Mais tu en as déjà fait mardi et jeudi, dit Nikolaï en fronçant les sourcils. Et la semaine dernière aussi...
   Fyodor ne répondit pas, alors Nikolaï posa la main sur sa joue pour écarter son visage de son cou, et le regarder dans les yeux. Le regard de Fyodor s'était terni, et bien que ses joues étaient encore rouges, un sentiment de tristesse avait pris possession de ses traits.
   — Je vais bien, dit Fyodor avant que Nikolaï n'ait le temps de dire quoi que ce soit. Tu sais que je ne dors pas toujours bien. Quand je suis avec toi ça va, c'est juste que cette semaine on s'est à peine vu alors ça m'a rendu triste.
   — T'as pas l'air bien en ce moment, dit Nikolaï avec inquiétude.
   — Je vais bien, je suis heureux avec toi, dit Fyodor en fronçant les sourcils.
   — Je sais mais... Je sens que mentalement ça va pas. Tu dors mal, tu perds du poids et tu prends pas soin de toi...
   — ... Je fais des efforts, je t'assure, dit Fyodor d'une voix désolée.
   — Je sais ! C'est pas du tout un reproche, je sais que tu essayes de rester stable et je suis super fier de tous les efforts que tu fais au quotidien ! Je me permettrais pas de te faire une remarque alors que je sais que certaines journées peuvent être vraiment difficiles pour toi. Mais je... J'ai l'impression qu'en ce moment t'as que des mauvaises journées et je suis inquiet pour toi. Si tu sens que tu craques, tu sais que tu as le droit de me le dire ?
   — Tu m'as juste manqué, et comme on ne s'est pas beaucoup parlé, j'avais l'impression d'avoir un vide dans ma vie. Mais je vais bien maintenant, assura Fyodor, en se réinstallant contre lui pour clore la discussion.
   Il logea sa tête au creux de son cou et déposa plusieurs baisers sur sa peau, en passant sa main dans son dos, comme pour essayer de le rassurer. Malgré cela, Nikolaï avait du mal à le croire et à se contenter de ses explications. Il sentait bien que Fyodor était différent ces derniers temps, il semblait moins gai, moins présent... Ça avait d'abord commencé lorsqu'il avait fait sa première crise d'angoisse avec lui, et qu'il lui avait avoué ce qu'il avait vécu avec son ex petit ami. Il s'était renfermé et était resté angoissé tout le reste de la semaine. Nikolaï avait veillé sur lui bien entendu, et il s'était dit que c'était à cause de sa crise d'angoisse, de tout le travail qu'il avait à faire, et de la découverte des sentiments de Chûya à son égard. C'était beaucoup pour lui, alors c'était normal qu'il craque un peu. Nikolaï avait fait attention à Fyodor pour qu'il comprenne qu'il ne risquait plus rien avec lui, et son angoisse était un peu passée.
   Mais depuis qu'il avait refait une crise d'angoisse à cause de Dazai, il allait de nouveau mal. Fyodor n'avait rien voulu lui dire à propos de ce qu'il s'était passé entre eux, mais Nikolaï se doutait bien que Dazai avait dû raviver ses souvenirs. Maintenant, ils le hantaient de nouveau et le rongeaient, Nikolaï essayait de le faire parler, mais il ne disait plus rien sur son traumatisme, Fyodor restait silencieux... Nikolaï commençait à vraiment être inquiet. Fyodor ne se fermait pas à lui, au contraire, Nikolaï sentait qu'il essayait de s'ouvrir et de lui communiquer son mal-être, mais c'était comme s'il était bloqué, que ses mots restaient dans sa gorge et le réduisaient au silence. Ses souvenirs et ses sentiments refusaient de sortir et le tourmentaient de plus en plus, comme une invasion de bactéries prendrait possession de son corps et engloutirait ses cellules saines.
   Mais le plus difficile n'était pas de faire parler Fyodor, c'était de prendre soin de lui. Du moins, prendre soin de lui dans son plaisir sexuel... Nikolaï avait remarqué que lors de leurs derniers rapports, Fyodor s'était à peine préparé, il lui avait demandé plusieurs fois d'aller plus fort avec lui, et il était prêt à laisser son corps à sa merci, à se laisser écraser sous lui, à se faire immobiliser, ou même à recevoir des fessées. Nikolaï aimait beaucoup faire cela, et il savait que Fyodor aussi, mais ces derniers temps son plaisir n'était plus le même qu'avant, ses réactions étaient différentes, et Nikolaï n'était pas sûr que ce soit très sain pour lui de faire cela... Il ne voulait empirer l'état de Fyodor en lui faisant du mal sans s'en rendre compte. Le plaisir de Fyodor survenait d'un coup et explosait comme s'il s'agissait d'un besoin vital, et il en était sa propre victime...
   Et parfois, Nikolaï avait l'impression qu'il subissait son plaisir plus qu'il ne l'aimait, et il ne savait pas quoi faire pour l'aider...Mais il avait prévu d'essayer quelque chose, et il espérait vraiment que ça marcherait. En attendant, il voulait continuer d'étreindre Fyodor et l'aider à lâcher prise.
   — Désolé si je t'embête un peu avec ça, dit Nikolaï en tirant le kimono de Fyodor sur lui pour le couvrir.
   — Tu ne m'embêtes jamais, et puis ça me rassure de voir que tu te soucies tous les jours de moi, et pas seulement de temps en temps.
  — Parce que tu pensais que je te négligerais ?
   — Je sais pas, dit Fyodor en haussant les épaules, sans aucun ton de reproche dans la voix. Je pensais plutôt que tu ne ferais pas autant attention, que tu ne verrais pas à chaque fois que j'ai un problème. Je ne pourrais pas t'en vouloir, c'est parfois épuisant d'être avec quelqu'un qui ne va pas toujours bien, et la douleur n'est pas toujours visible. Poe et Chûya ne le voient pas toujours, alors... Je m'attendais à ce que tu sois un peu pareil.
   — Je comprends. Tu sais, je suis le genre de personnes qui notent toutes ses journées sur dix, pour voir un peu comment ça va mentalement. C'est un peu bête mais j'aime bien le faire, et j'en viens naturellement à me demander comment tu noterais tes journées toi aussi. Et que je me dis que tu leur mettrais une mauvaise note, je sais que je dois prendre soin de toi.
   — Comment est-ce que c'est possible d'avoir autant de qualités ? Moi je ne fais même pas la moitié de ce que tu fais pour toi... Je suis désolé, je suis vraiment négligeant en comparaison.
   — Je trouve pas ! On a chacun notre manière d'agir ! Moi je fais ça, c'est comme ça que je montre que je tiens à quelqu'un. Toi tu es moins expressif, mais tu fais tout autant pour moi !
   — Tu trouves, demanda Fyodor d'un air peu convaincu.
   — Tu m'envoies des messages, tu m'envoies plein de vidéos de personnes qui écrivent, tu prends ma main dans la rue, tu m'écris des petits mots quand j'en ai besoin... On a chacun notre love language, et le tien me convient parfaitement.
   — Le tien aussi me convient parfaitement, dit Fyodor, avant d'unir ses lèvres aux siennes.
   — J'espère bien, parce que t'y auras le droit tous les jours !

Recueil Bungo Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant