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DERRIÈRE LA PLUME D'UN GÉNIE

Peau zébrée

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— Alors ça c'est Spécial K, parce qu'il est tout maigre, ça c'est Medovik et Praga, parce que c'est trop bon, ah et lui c'est Kouign-amann, j'ai aucune idée de ce que c'est mais j'ai vu ce mot dans un magasin, et j'ai trouvé ça trop drôle ! Ça c'est Gnou, lui il s'appelle Bioubiou, lui c'est Champi, lui c'est ça du coup c'est Gnon, ça c'est Vodka, Zephyr, Kissel, Princesse Miaou, Dobby... Et voilà les plus importants, je leur ai beaucoup parlé de toi. Sigma râle à chaque fois que je lui parle de toi, donc j'en parle à eux, et ils sont très heureux de t'accueillir cette nuit.
Fyodor dévisagea Nikolaï d'un air incrédule, puis il regarda la tribus d'animaux en peluche devant lui, avec de relever les yeux vers Nikolaï. Donc ces... Ces peluches, ces minuscules animaux en tissu, c'étaient ses... Enfants ? Était-ce Nikolaï qui était complètement fou, ou était-ce Fyodor qui n'avait pas eu d'enfance et qui ne comprenait pas le principe des doudous ?! Il avait un peu de mal à saisir l'intérêt d'en avoir autant, et les peluches de Nikolaï étaient assez particulières... Une loutre, une grenouille, un axolotl, une méduse, une noix de coco, une sorte de... Salade, une araignée, un champignon, une pomme de terre, un chiffon, une créature qui semblait nue, et qui n'était composée que d'une moitié de tête et de deux jambes... Où trouvait-il tout cela ?! Et pourquoi leur donner des noms de nourriture ?
Cela faisait une demi-heure que Fyodor était chez Nikolaï. Après avoir rapidement visité son appartement, qui était effectivement très mal rangé, il était parti se doucher, tandis que Nikolaï se préparait un repas. À présent qu'il s'était lavé, il ne portait plus qu'un peignoir qui appartenait à Nikolaï, il était assez épais pour lui tenir chaud, et de petites oreilles d'ours étaient accrochées à la capuche qui recouvrait sa tête, ce qui devait lui enlever tout sérieux. Nikolaï l'avait amené dans sa chambre, il l'avait fait s'asseoir sur son lit, puis il avait commencé à lui présenter ses peluches une à une. C'était aussi mignon que déconcertant, Fyodor commençait sérieusement à se demander où il avait atterri.
— Et donc ce sont... Tes enfants, essaya-t-il de comprendre.
— Oui ! Mon premier doudou c'était Zéphyr, je l'ai appelé comme ça parce que j'adore la guimauve, expliqua joyeusement Nikolaï.
— Les peluches sont pour les enfants, non ?
— Mais non ! Ok, tu l'as quand t'es enfant, mais après il grandit avec toi et c'est ton bébé ! Je pourrais jamais les quitter, si tu veux être avec moi, tu dois les accepter.
— D'accord. Je les accepte alors.
— Parfait ! Et toi t'as des doudous ?
— Non.
— Même pas un ?!
— Non ?
— Tu dormais avec qui quand t'étais petit alors, dit Nikolaï d'un air attristé.
— Je dormais seul, ou avec mes frères. Mes parents ne m'ont jamais acheté de jouets, expliqua Fyodor.
— Oh... Moi j'avais juste le droit aux doudous, mais c'étaient mes tantes qui me les offraient en cachette. T'as qu'à en choisir un !
— Je n'ai pas besoin tu sais.
— Mais si, comme ça tu pourras lui faire des câlins quand tu te sentiras seul ! Vas-y, prends-en un !
— Je ne sais pas lequel prendre, dit Fyodor avec perplexité.
— Alors je vais choisir pour toi, proposa Nikolaï.
Il observa un instant ses peluches, sous le regard déboussolé de Fyodor. Il finit par saisir une peluche, une méduse rouge et rose, et la lui tendit fièrement.
— C'est Kissel, elle t'a choisi Fyodor, dit-il avec sérieux.
Un éclat de rire échappa à Fyodor sans qu'il ne puisse le contrôler, et il plaqua sa main sur sa bouche pour se retenir de rire. Nikolaï lui lança un regard outré, avant de plaquer sa peluche contre lui.
— C'est ton enfant maintenant.
— Je crois que je n'ai pas d'instinct parental, dit alors Fyodor en riant.
— Ça viendra avec le temps. C'est peut-être parce que tu n'as pas vécu de grossesse... Il faut que je te mette enceint !
— Je suis un homme ! Je ne peux pas tomber enceint.
— Tu peux pas le savoir si t'as pas essayé, répliqua Nikolaï en se penchant vers lui. Tu veux qu'on essaye ?
— Même si on le faisait toute la nuit, je ne tomberais pas enceint, répondit Fyodor en souriant.
— Moi je pense que tu dois au moins essayer, assura Nikolaï.
— Tu n'avais pas dit que tu ne me toucherais pas ce soir ?
— Je te parle juste, répliqua Nikolaï avec un sourire innocent.
— Tu comptes essayer de me faire un enfant en parlant, demanda alors Fyodor.
— Hmm... Tu as une autre idée pour le faire, demanda Nikolaï, avant de se rapprocher de lui.
— Je ne sais pas... Pour faire un enfant, il faut au moins un contact entre deux personnes..., dit Fyodor alors que son corps se réchauffait.
— Un contact ? Je vois pas de quoi tu parles..., dit Nikolaï dans un murmure qui effleura le visage de Fyodor, et accéléra le rythme de son cœur.
Il était si proche de lui que Fyodor était obligé de baisser les yeux pour voir ses lèvres bouger. Son souffle était chaud, il caressait son visage et s'échouait sur ses lèvres, dans un mouvement suave, plein de volupté. Il le touchait, comme si des doigts passaient sur la pulpe de ses lèvres, avec légèreté, délicatesse, Fyodor avait presque l'impression que le souffle de Nikolaï l'embrassait. Cela avait quelque chose de sensuel, le simple fait de sentir sa respiration tomber sur ses lèvres, l'effleurer, avant de pénétrer sa bouche de la réchauffer, de l'engloutir, et de s'enrouler autour de sa langue, de fondre dessus, avant de tomber au fond de sa gorge. Sa simple respiration suffisait à faire battre son cœur plus fort.
Il battait de plus en plus vite, comme pour faire monter la température de son sang, et faire rougit ses joues. Son ventre s'était mis à papillonner, et plus Nikolaï se rapprochait de lui, plus son bas-ventre s'agitait. Fyodor ne s'était toujours pas remis de leur rapport dans les toilettes de l'université, alors il était à fleur de peau, et si Nikolaï continuait de s'approcher ainsi de lui, il ne pourrait plus résister... Mais cela ne le dérangerait pas, au contraire. Nikolaï se penchait de plus en plus sur lui, si bien qu'il le surplombait presque, prêt à le coucher dans son lit, et Fyodor avait terriblement envie de le sentir sur lui.
— Vraiment ? Tu ne connais pas ce genre de contact, demanda-t-il dans un souffle.
— Tu veux dire... Celui que tu me faisais ce midi, quand tu avalais tes enfants, demanda Nikolaï avec un sourire.
— Je ne me souviens pas avoir fait ça, dit Fyodor en levant la tête vers lui, pour se rapprocher davantage de lui.
— Oh je t'en prie... Tes lèvres ont encore l'odeur du plaisir...
— Je ne me souviens pas avoir fait quoi que ce soit...
— Étrange... Tu veux que je t'aide à te souvenir, demanda Nikolaï en prenant son menton entre ses doigts.
— Comment tu comptes faire ?
— Oh ne t'inquiète pas pour ça, répondit Nikolaï dans un souffle.
Il fondit sur Fyodor avant même d'avoir achevé sa phrase, et captura ses lèvres avec envie. Soulagé de pouvoir enfin l'embrasser, Fyodor se laissa tomber en arrière, pour que Nikolaï s'allonge pleinement sur lui, et posa ses mains sur ses joues.
Ses baisers lui avaient manqué, il en était devenu dépendant. Il avait besoin de goûter à ses lèvres, de faire danser sa langue sur la sienne, de partager son souffle avec lui. Ses baisers étaient hypnotisant. Ils semblaient lui donner la vie, ils éveillaient son corps et ses sens. Fyodor s'abreuvait de ses baisers avec avidité, il s'en nourrissait, et il se sentait plein rien qu'en passant sa langue sur celle de Nikolaï. Il n'avait besoin que de cela pour se sentir bien. De ses baisers plein d'envie, de ses caresses délicates, de ses respirations entrecoupées, de ses regards brûlants, de son corps contre le sien, de son cœur près du sien.
— Je t'ai pas demandé la permission, dit Nikolaï en s'écartant soudain.
— Tu l'as, embrasse-moi, répondit aussitôt Fyodor.
— Même dans le cou ?
— Où tu en as envie, embrasse-moi, déshabille-moi, touche-moi, fais tout ce que tu veux, dit Fyodor avec envie.
Rassuré, Nikolaï se jeta de nouveau sur lui, et l'embrassa avec encore plus de passion. Le consentement de Fyodor lui retira toute sa retenue, il se fit plus volontaire, plus enjoué, et osa poser ses mains à des endroits plus osés de son corps. Il caressa d'abord ses épaules, comme pour s'assurer qu'il était à l'aise, avant de poser une main sur sa taille. Il ne reprit pas une seule fois son souffle, ses lèvres étaient scellées à celles de Fyodor, et même s'il semblait à court d'air, il ne fit aucun mouvement pour s'écarter. Au contraire, il s'allongea un peu plus sur lui, l'embrassa avec plus de fougue, et dénoua son peignoir. Fyodor le laissa faire, il bomba son torse sous lui pour approcher sa poitrine de la sienne, et ferma les yeux, pour s'abandonner au plaisir qui montait en lui.
Les doigts de Nikolaï étaient chauds. Ils caressèrent sa poitrine en même temps qu'ils ouvraient son peignoir, le faisant frissonner. Nikolaï se retenait, Fyodor sentait qu'il s'empêchait de dévorer sa poitrine, peut-être pour mieux la contempler, ou pour ne pas le brusquer. Il prit son temps pour l'observer, pour couvrir sa gorge de baisers avant de s'attaquer à sa poitrine, et déposa timidement sa main sur sa cuisse. Il la souleva pour la plier, et sa main se posa d'abord sur son genou, avant de glisser sous sa cuisse, et de remonter vers ses fesses. Elle ne passa pas dessus pour autant, et préféra remonter sur sa hanche, avant de redescendre sur le côté de sa cuisse. Elle effleura ses cicatrices avec timidité, dessinant leur contour du bout des doigts, et Fyodor ne réalisa pas tout de suite que Nikolaï le caressait à cet endroit. Il sentait seulement que sa main le touchait, qu'elle était chaude contre sa peau froide, qu'elle le réchauffait autant qu'elle le faisait frissonner. Il sentait seulement son contact, la chaleur apaisante qu'il lui prodiguait, comment il accélérait les battements de son cœur, et comment il éloignait de lui ses mauvaises pensées.
Nikolaï l'embrassait autant qu'il le caressait. Son étreinte oscillait entre la douceur et la passion, et Fyodor aimait de plus en plus être allongé sous lui. Il se sentait incroyablement bien ainsi.
   — Est-ce que t'es resté chaud comme ça toute la journée, à repenser à ce qu'on avait fait dans les toilettes, demanda Nikolaï, pressant sa cuisse contre son entrejambe.
   — Peut-être...
   — Et est-ce que tu aurais voulu que je te prenne dans les toilettes ?
   — Oui, gémit Fyodor, en enfonçant sa tête dans l'oreiller.
   Les lèvres de Nikolaï accrochèrent soudain le cou de Fyodor, et il se mit à le sucer, jusqu'à y laisser une trace rouge. Fyodor le laissa faire, les yeux fermés, une expression de plaisir sur le visage, une main posée sur sa poitrine, et l'autre sur sa cuisse, pour essayer de la retenir de trop se frotter à lui.
   — T'as envie de moi, demanda Nikolaï d'une voix pleine de plaisir, alors qu'il continuait de colorer son cou de ses lèvres.
   — Oui, soupira Fyodor, alors qu'il frottait son ventre contre lui.
   Nikolai le serra un peu plus et passa sa langue sur sa gorge, arrachant un petit gémissement à Fyodor.
   — Tu veux que je te prenne maintenant ?
   — Oui, répondit Fyodor sans hésiter.
   Sa respiration était précipitée, il haletait, soufflait, et lorsque Nikolaï releva son visage et approcha ses lèvres des siennes, il perdit le peu d'air qu'il réussissait à trouver. Les quelques caresses qu'il avait reçues l'avaient bien trop excité, son corps était brûlant à présent, prêt à s'offrir à Nikolaï. Il le voulait en lui, il voulait terminer ce qu'il avait commencé dans la cabine de toilettes.
Nikolaï rejeta les pans de son peignoir sur les côtés, de manière à voir tout son corps, et commença à embrasser sa poitrine, avant de descendre sur son ventre. Il se releva ensuite et retira précipitamment son pantalon, Fyodor le regarda faire, partagé entre le plaisir de recevoir des baisers sur cette partie de son corps, et l'impatience de le sentir en lui. Mais au moment même Nikolaï le prenait par les hanches, une sonnerie retentit, et les deux jeunes hommes se relevèrent en sursautant.
— Qu'est-ce que c'est, s'exclama Fyodor sans comprendre.
— Oh non, c'est les pâtes qui sont prêtes, je les avais oubliées, s'exclama Nikolaï.
— L'eau des pâtes ? Tu n'as pas déjà mangé ?
— Ben non, je t'attendais ! Bon alors on mange et ensuite, je te mange. Parce que le goût du sperme avec les pâtes je pense pas que ça soit génial...
— En effet, je ne pense pas que ça soit très bon, dit Fyodor en riant.
— Viens ! Ah ! Il faut que tu t'habilles aussi, sinon tu vas avoir froid, ajouta Nikolaï.
Il se releva d'un mouvement vif et ouvrit son armoire, avant de saisir des vêtements propres, et de les apporter à Fyodor.
— Merci. Tu sais tu n'avais pas besoin de m'attendre, je n'ai pas très faim, dit-il en s'habillant.
— Oui mais t'as jamais faim, il faut que tu manges !
— J'ai mangé tout à l'heure.
— T'as mangé quoi, demanda Nikolaï d'un air suspicieux.
— J'ai bu du vin rouge. C'est comme si je mangeais du raisin.
— Non Fyodor c'est pas du tout pareil ! En plus t'as pas mangé ce midi, et ce matin je suis sûr que tu as juste pris une barre de céréales.
— Si, j'ai mangé quelque chose ce midi.
— Le sperme ça compte pas, fit remarquer Nikolaï en haussant un sourcil.
— Pourquoi ? C'est très nutritif.
— N'importe quoi ! Viens, t'as pas le choix, tu dois avaler quelque chose, ne serait-ce qu'une coquillette.
Nikolaï saisit Fyodor par la main, puis il l'obligea à se lever, et partit dans la cuisine. Fyodor n'eut pas d'autre choix que de le suivre et de s'asseoir sur son canapé. Ça l'embêtait, il n'avait pas envie de manger, surtout qu'il dormait avec Nikolaï après, alors...
— T'inquiète pas, je te regarderai pas manger si c'est ce qui t'inquiète, dit Nikolaï en voyant son expression renfermée.
— Je n'aime pas avoir le ventre plein, après j'ai envie de dormir et je ne suis plus productif.
— Dans tous les cas tu dormiras après de toute façon, fit remarquer Nikolaï en lui apportant un bol de pâtes au pesto. Désolé j'ai que ça, mon frigo est vide, c'est la fin du mois...
— Si je mange on ne pourra pas coucher ensemble, tenta Fyodor.
— Je préfère que tu manges que de coucher avec toi.
— Vraiment, dit Fyodor avec agacement.
— Ta santé est plus importante que le sexe.
— Je préfère le sexe.
— Bien tenté, mais ça ne marchera pas. T'es pas obligé de tout manger, mais avale au moins quelque chose, ça te fera du bien ! Et puis t'as pas besoin d'être productif ce soir, tu vas juste te reposer, pour être en forme pour demain
— Mais je-
— Pas de « mais » ! Mon appart, mes règles ! Je sais que tu manges mal et que tu écourtes ton sommeil, alors tant que tu es chez moi, je vais veiller à ce que tu prennes soin de toi. Prends ton temps pour manger, je peux rester avec toi toute la nuit, déclara Nikolaï en s'asseyant à ses côtés.
Il embrassa sa joue, comme pour le rassurer, avant de ramener ses jambes en tailleur et d'entamer son plat. Fyodor soupira et baissa les yeux sur son bol, dans lequel une montagne de coquillettes s'élevait. Il saisit sa cuillère et les remua pour mélanger au pesto, avant d'en prendre une bouchée. C'était plutôt bon, bien que le plat restait très simple. Les pâtes étaient un peu dures, mais c'était ainsi que les aimait Fyodor, et il se doutait que Nikolaï avait volontairement réduit leur temps de cuisson pour lui faire plaisir.
— Est-ce que Chûya t'a répondu d'ailleurs, demanda Nikolaï au bout d'un moment. Il a vu que tu étais là ?
— Oui, il a vu mon message. Je suis un peu inquiet pour lui, le connaissant il va se faire des films et penser que je ne l'aime plus.
— Il faut que tu lui dises que tu ne lui en veux pas !
— Je l'ai fait, mais Chûya est toujours inquiet, quand on se dispute il pense souvent que c'est la fin de notre amitié.
— Peut-être que c'était comme ça avec ses anciens amis, et que maintenant il a peur de perdre ceux à qui il tient. Sigma est comme ça aussi, à chaque fois qu'on se dispute, il se met à pleurer comme si c'était la fin du monde.
— Chûya pleure aussi, ou alors il pète un câble et casse tout ce qu'il touche. Mon meilleur ami aussi pleure quand il se dispute avec son petit ami.
— Attends comment il s'appelle déjà ? Ah oui c'est Poe non ? Hé mais c'est un prof lui aussi !
— Oui, mais il est nouveau.
— Apparemment il est super gentil ! Lui aussi il est en couple avec un gars ? C'est drôle, vous êtes tous gays dans ton groupe d'amis !
— On n'est pas gays, dit Fyodor en riant. J'aime aussi les femmes, et Chûya aussi. Mais c'est vrai que Poe n'aime que les hommes.
— Tu connais des personnes hétéros, demanda Nikolaï d'un air curieux. Sans compter ta famille.
Fyodor rit en entendant sa question, avant de réaliser que Nikolaï avait raison. La plupart des personnes de son entourage étaient attirées par les personnes du même genre qu'elles ! Chûya aimait tous les genres, et Poe aimait les hommes (enfin, il n'aimait que son petit ami). Osamu était un gay refoulé. Son professeur préféré était marié à un homme. Même son directeur de thèse était très ambigu avec le professeur qui dirigeait la thèse d'Osamu, M. Fukuzawa. C'était tout de même une drôle de coïncidence...
— Mori aime les femmes, dit Fyodor après une minute de réflexion. Tu l'avais au semestre dernier non ?
— Oui, c'est le pire prof. Mais lui il compte pas, tu le connais pas personnellement !
— Je le connais quand même. Ça compte.
— Non, en plus lui il a pas de cœur, il aime personne.
— Bon alors Eren. Je le connais personnellement, et il aime les femmes.
— Mouais... C'est bien le seul alors. Même ses amis sont gays, j'en suis sûr.
— Tu connais quelqu'un d'hétéro en lettres, demanda alors Fyodor.
— Sigma ! Et Ryû et Atsushi, eux ils aiment les filles aussi.
— Ils sont ensemble, dit Fyodor en riant.
— Qui ça ?!
— Ryû et Atsushi !
— Mais non !
— Ils sont colocataires et il y a clairement quelque chose entre eux.
— Ah... Oh mais en même temps qui est hétéro en lettre ? Personne.
— Donc si je comprends bien, on est tous dépressif et gay en lettres, conclut Fyodor.
— Faut croire que oui ! Les trois vont ensemble. Trouve-moi quelqu'un en lettres qui n'est pas dépressif ou gay, lança Nikolaï.
— Sigma ?
— Il est tellement stressé qu'il a l'impression de jouer sa vie tous les jours, donc lui il est dans les dépressifs.
— Bon alors Mori et Eren.
— Erreur, Mori est dans la catégorie très spéciale des « sans cœur » en plus lui ça se voit qu'il est super problématique. Et Eren ça se voit qu'il est politico-anxieux, c'est comme éco-anxieux mais avec la politique, c'est un dépressif, il le cache bien.
— Je suppose que Mikasa ne marchera pas non plus... Dazai est dans les deux catégories, Chûya et Poe ça ne marche pas... Et bien sinon... Dans mes classes il y en a forcément. J'ai un élève avec des cheveux roses qui est toujours de bonne humeur.
— Il s'appelle comment, demanda Nikolaï d'un air peu convaincu.
— Aucune idée, dit Fyodor en fronçant les sourcils. Je ne me souviens plus de son nom.
— Haru ? Si c'est lui ça compte pas, il est aussi dans la catégorie « fatigués de la vie ».
— Non ce n'était pas lui, lui je le connais.
— Kaoru ?
— Mais il a mon âge, ça ne peut pas être mon élève.
— Ah...
— C'est le meilleur ami du fils adoptif de M. Gojo. En plus il est en couple avec une fille, je les ai déjà vus ensemble, dit Fyodor en fouillant dans sa mémoire.
— Yuji, s'exclama aussitôt Nikolaï. Oh oui, il est avec Yuko... Ben oui mais il compte parce que... Ben... Ben parce que son jumeau est fou, donc voilà ça efface aussi sa stabilité.
— Mais quelle mauvaise foi, s'exclama Fyodor en écarquillant les yeux. J'ai trouvé quelqu'un en lettres qui n'était ni dépressif, ni gay, donc j'ai gagné !
— Non t'as pas gagné, tu connaissais même pas son nom !
— Et ? Je connais son existence, c'est suffisant.
— T'es un tricheur !
— Et toi tu es un mauvais perdant, répliqua Fyodor. Et comment ça se fait que tu connaisses autant de personnes ? Tu connais tout le temps les ragots sur tout le monde.
— Mais c'est toi qui me les racontes, t'es une commère, se défendit Nikolaï.
— Pas du tout, s'indigna Fyodor. C'est toi qui me racontes la vie de tout le monde à chaque fois qu'on se voit !
— Mais quoi ?! Mais quoi ?! Qui me raconte la vie de Dazai le feignant à chaque fois ?!
— Qui me raconte que Tetchô s'est encore fait recalé par Jôno ? Je ne les connais même pas, répliqua Fyodor d'un ton vif.
— Qui me raconte les engueulades Eren-Jean parce qu'ils se partagent Armin ?!
— Qui me raconte les caprices de Teruko quand il n'y a plus de cookie à la cafétéria ?!
— Qui me raconte les engueulades Mori-Fukuchi dans la salle des profs ?!
— Qui me raconte que Denji dévalise les buffets aux soirées étudiantes ?!
— Qui me raconte combien de suçons que M. Geto a dans le cou ?!
— Qui me raconte que Louis a encore essayé de se débarrasser de son beau-frère alors que je m'en fiche ?!
Nikolaï ouvrit la bouche d'un air choqué, et Fyodor le regarda d'un air supérieur, avant de soudain réaliser quelque chose. Nikolaï lui parlait toujours de tout un tas de choses, il aimait en particulier lui parler de la vie de personne qu'il ne connaissait pas, et ce lors de leur séance de tutorat. Mais alors, cela voulait dire que...
— Attends mais on ne travaille jamais au tutorat ou quoi, demanda-t-il d'un air incrédule.
— ... Hé mais c'est vrai ! On fait que s'échanger des potins, réalisa Nikolaï en éclatant de rire.
— Ce n'est pas drôle !
— Ah si ! En fait je te raconte les ragots sur les licences et les masters, et toi tu me racontes les ragots des doctorants et des professeurs.
— Donc tu avoues que tu me racontes beaucoup de choses ?
— Oui, mais tu le fais aussi ! On est tous les deux des commères.
— Tu as raison.
— Ce genre de relation c'est les meilleures, moi je préfère largement raconter ma vie, et celle des autres, à la personne avec qui je sors.
— Moi je ne sais pas, avant je ne faisais pas ça avec mes anciens petits amis, expliqua Fyodor.
— Tu peux me raconter autant de choses que tu veux en tout cas, répondit alors Nikolaï.
— Merci, dit Fyodor en souriant. Je ne veux plus de mes pâtes, qu'est-ce que j'en fais ?
— Hmm, laisse-le dans le bol, je les finirai demain. Mais t'as bien mangé, je suis fier de toi.
— Tu sais que tu n'as pas besoin de me dire ça, demanda Fyodor d'un air embarrassé. Je ne suis pas anorexique, je mange normalement.
— Oui mais tu prends jamais soin de toi, et quand tu le fais c'est un exploit. Donc, je suis fier de toi, déclara Nikolaï en déposant un nouveau baiser sur sa joue. Bon ! Je fais la vaisselle et ensuite tu veux faire quelque chose de particulier ? Ou tu veux te coucher ?
— Je suis fatigué, alors je préfèrerais me coucher.
— Tu veux qu'on dorme ensemble ?
— Oui. Mais je veux vraiment dormir, rien d'autre.
— Ok, je te toucherai pas. Et c'est vrai pour cette fois ! Tu m'accompagnes dans la cuisine ?
— Oui, je vais t'aider, répondit Fyodor en se levant.
Il accompagna Nikolaï et l'aida à faire la vaisselle, puis il rangea rapidement la cuisine, dans laquelle des sachets de nourriture et des boîtes de biscuits vides traînaient. Une fois que la cuisine fut un peu plus présentable, les deux jeunes hommes partirent dans la salle de bain pour se laver les dents. Elle aussi était très mal rangée, des échantillons de parfum traînaient partout autour du lavabo, des vêtements sales étaient empilés dans un coin, et le miroir était taché de gouttelettes d'eau. Fyodor lança un regard entendu à Nikolaï, et Nikolaï lui répondit par un sourire angélique. Il était un cas désespéré, comment pouvait-il vivre dans un tel bazar ? Fyodor avait presque envie de se lancer dans un grand ménage de son appartement...
Il retint cependant ses pulsions maniaques, et fit de son mieux pour faire abstraction du désordre dans la salle de bain. Il retourna ensuite dans la chambre de Nikolaï, qui était un peu mieux rangée, et les deux jeunes hommes se glissèrent dans le lit sans attendre. Ils étaient tous les deux épuisés, et se glisser dans un lit bien chaud leur fit du bien. Les draps portaient l'odeur de Nikolaï, une odeur fraîche, légère, qui fit sourire Fyodor. Il remonta avec un mélange de joie et de timidité sa couette sur lui, recouvrant ses épaules, puis il se retourna vers Nikolaï. La chambre était plongée dans le noir à présent, mais Fyodor pouvait distinguer les yeux brillants de Nikolaï, qui l'observaient déjà, et la forme de son visage, ovale, avec une mâchoire peu marquée, et un nez légèrement relevé. Ses yeux vairons étaient rivés sur le visage de Fyodor, mais ils n'avaient rien d'intrusif, il l'observait simplement, comme s'il observait un tableau dont il voulait marquer les coups de pinceaux dans son esprit. Fyodor se sentait comme... En sécurité dans son regard. C'était étrange, il ressentait rarement cela. Il ne le ressentait qu'avec son grand-frère, Mikhaïl, ou bien avec Chûya et Poe. Mais Nikolaï avait le don de le mettre à l'aise, de l'apaiser par ses simples battements de cils.
Sa présence calmait son cœur. Nikolaï était toujours très énergique, il parlait sans arrêt, parfois il se mettait à parler pendant des dizaines de minutes, et ne s'arrêtait que lorsqu'il se rendait compte que Fyodor s'était tu. Il était aussi solaire, un peu décalé, et riait souvent bruyamment. Son énergie pouvait même fatiguer Fyodor. Mais ce soir, son air survolté avait disparu, pour laisser place à une expression calme, et à une attitude de repos. Fyodor aimait cet aspect de lui autant que son aspect plus dynamique.
Il se rapprocha un peu plus, hésitant à se blottir contre lui. Cela faisait tellement longtemps qu'il n'avait plus partagé son lit avec quelqu'un qu'il ne savait plus comment s'y prendre. Il leva sa main d'un geste mal assuré, et la posa sur la joue chaude de Nikolaï. Il la sentit gonfler sous sa paume, signe que Nikolai souriait, alors il s'approcha un peu plus de lui, et l'embrassa du bout des lèvres. Nikolaï passa un bras au-dessus de sa taille, sa main se posa au creux de ses reins, et il l'attira contre lui pour l'enlacer.
— C'est juste un câlin de bonne nuit, précisa-t-il alors que leurs corps entraient en contact.
— Et moi c'est juste un baiser de bonne nuit, répondit Fyodor.
— Si je pouvais recevoir ce baiser tous les soirs, je ne passerais que des belles nuits, dit Nikolaï en prenant sa main pour embrasser ses doigts.
Fyodor sourit sans répondre, son cœur battant de plaisir dans sa poitrine.
— Je peux te poser une question, demanda Nikolaï en passant son pouce sur son index.
— Oui ?
— T'es pas obligé d'y répondre, c'est comme tu veux. Je voudrais juste savoir d'où viennent les cicatrices sur ta cuisse gauche, demanda Nikolaï d'un ton délicat. Je les ai vues ce midi, et je tiens à te dire que ça me dégoûte pas ni quoi que ce soit d'autre, tu es magnifique, alors tes cicatrices le sont aussi. Je veux juste savoir si tu vas bien, ou si je peux faire quelque chose pour toi.
Fyodor ouvrit la bouche sans savoir quoi répondre. Il ne s'était pas attendu à cette question, il n'avait d'ailleurs pas fait attention au fait que Nikolaï ait vu ses cicatrices. Il n'y avait pas fait attention dans les toilettes, car Nikolaï n'avait rien dit, et il lui faisait tellement de bien qu'il n'avait pas pu y songer. Tout à l'heure aussi, il n'avait pas réalisé que ses cicatrices étaient visibles. En réalité, il ne s'était jamais vraiment fait la réflexion que Nikolaï les découvrirait un jour. C'était peut-être parce que Nikolaï avait déjà vu ses brûlures sur ses doigts, et qu'il n'avait jamais rien dit, que Fyodor ne s'était pas inquiété à ce sujet.
Il ne savait pas quoi lui dire, il n'avait pas prévu de lui en parler, puisqu'il n'avait pas pensé qu'ils en discuteraient...
— Je vais bien, dit-il d'une voix serrée.
Nikolaï ne répondit pas, et serra un peu plus ses doigts. Fyodor savait que ses mots paraissaient bien insensés... Tout à l'heure, lorsqu'ils s'étaient retrouvés dehors par hasard, il se brûlait les doigts, et il savait que Nikolaï l'avait vu faire. C'était sûrement pour cela qu'il avait été si inquiet, et qu'il avait insisté pour rester avec lui.
— Je t'assure que je vais bien, répéta-t-il. Les brûlures c'est juste... Je le fais sans m'en rendre compte, mais je vais bien.
— Et sur ta cuisse ? Tu veux m'en parler ? Je te demande pas de comptes, t'as le droit de garder ça pour toi, je sais que c'est pas agréable d'en parler.
— Je... Alors je ne veux pas t'en parler. Pas pour l'instant.
— Ok.
— Désolé. C'est juste que... Enfin...
— T'as pas besoin de te justifier, c'est pas grave si tu veux pas me le dire. Vraiment, assura Nikolaï en embrassant de nouveau ses doigts.
— Je te le dirais quand je serais prêt.
— D'accord. Mais tu sais que si jamais tu te sens mal, tu peux venir chez moi, ou juste m'appeler pour qu'on discute. Même en pleine nuit.
— Ça sera épuisant pour toi, mentalement ce n'est pas toujours simple d'aider quelqu'un.
— Si c'est quelqu'un qu'on aime, on peut le faire. T'inquiète pas, je te proposerais pas ça si je savais pas que je pouvais le faire. Et puis c'est mon rôle d'être là pour toi.
— Et si tu ne décroches pas ? Ou que je ne te trouve pas ?
— Hmm... T'as qu'à mettre ça, proposa Nikolai.
Il lâcha un instant Fyodor pour ramener sa tresse sur son torse, et détacha ses cheveux. Il récupéra son élastique, puis il le passa autour du poignet de Fyodor, et reprit sa main dans la sienne.
— Tu le fais claquer si tu sens que tu vas faire quelque chose de mal. Et si ça ne te calme pas, tu appelles Chûya ou Poe. Si tu veux tu peux même prendre Kissel chez toi pour le câliner, comme ça ton enfant est avec toi.
— D'accord, dit Fyodor avec un petit rire.
— Tu le feras, demanda Nikolaï en levant son petit doigt devant lui.
— J'essaierai, répondit Fyodor en enlaçant son auriculaire au sien.
— Je te fais confiance. Maintenant on se repose, sinon demain tu seras fatigué.
— Bonne nuit.
— Bonne nuit, n'hésite pas à rêver de moi, dit Nikolaï en embrassant son front, avant d'attirer son visage contre lui pour l'étreindre.
Je le ferai, pensa Fyodor en fermant les yeux.

Recueil Bungo Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant