Chapitre 30 - Lena

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Les pieds qui traînent dans l'eau, je regarde Cooper qui essaie désespérément de faire des ricochets.

— Je ne trouve pas les bons cailloux, dit-il après une nouvelle tentative infructueuse.

— Ce n'est pas la faute du caillou, dis-je en secouant la tête avec une moue rieuse.

Il en saisit un nouveau et recommence, sans y parvenir pour autant.

— Est-ce que tu es en train de dire que je suis vraiment mauvais ?

— Et bien...

Il franchit rapidement les quelques mètres qui nous séparent et vient s'assoir à côté de moi.

— À ton tour, alors.

— Très bien, dis-je en saisissant le caillou qu'il me tend.

Petits, nous restions ici durant des heures à essayer de les faire rebondir le plus loin possible sur l'eau. C'est une habitude que j'ai gardée. Et je suis plutôt douée.

Je l'observe longuement avant de lui lancer un regard défiant.

— Regarde, et apprends, lui dis-je.

Je jette le caillou juste comme il faut, lui donnant la bonne impulsion pour qu'il rebondisse. Un, deux, trois... huit rebonds !

Cooper a l'air admiratif, et un peu vexé, aussi.

— Je m'avoue vaincu. Quel est ton secret ?

Je ris, tournant une nouvelle pierre entre mes doigts.

— De longues heures d'entraînement.

Je me sens bien ici aujourd'hui, à ses côtés. Je me sens apaisée.

Je regarde les reflets du soleil sur l'eau, lorsque je sens sa main se poser sur la mienne. Je relève les yeux vers lui et rencontre les siens.

— Est-ce que tout va bien ? me demande-t-il.

— Oui, répondis-je sans bouger.

— Lena, à propos de ce qui s'est passé hier soir...

Je sens mes joues rougir et Cooper m'offre un sourire réconfortant.

— Je crois qu'il faudrait qu'on en parle.

Il a raison. Le fait de ne pas avoir discuté il y a dix ans nous a coûté notre amitié.

— Je suis d'accord.

— Alors, qu'est-ce que tu penses de... tout ça ?

Un tourbillon d'émotions se bouscule dans ma tête, mais je suis sûre d'une chose, c'est que je ne veux pas qu'il reparte loin de moi.

— Je ne sais pas trop, Coop. J'aime ce qui se passe entre nous. Je veux dire, hier, c'était incroyable. Mais...

— Tu m'en veux toujours.

C'est sans doute stupide dix ans plus tard, mais c'est vrai.

— C'est une des choses qui font que la situation est compliquée aujourd'hui, oui.

Il hoche la tête, semblant comprendre mon point de vue.

— On n'a jamais discuté de ce qui s'est passé. Je sais que je t'ai blessé ce soir-là.

— Ouais, ce n'est rien de le dire.

— Tu sais, j'étais un petit con arrogant. Et tu me plaisais déjà beaucoup à l'époque.

— Si c'était le cas, tu l'as toujours bien caché.

Il a l'air un peu moins sûr de lui, mais ne lâche pas ma main.

— Mais ça n'en reste pas moins vrai. Tu n'as pas idée du nombre de fois où j'ai eu envie de t'embrasser.

— Pourquoi tu ne l'as jamais fait ?

— Tu méritais mieux, Lena.

— C'était à moi d'en décider.

— Je m'en rends compte maintenant.

— Qu'est-ce qui a changé ? Je ne mérite pas mieux désormais ?

Cooper sourit tristement.

— Je crois toujours que c'est le cas, mais je suis trop égoïste pour te maintenir loin de moi.

Je lui rends son sourire. C'est difficile de remettre ça sur la table, des années après. Mais c'est nécessaire.

— Tu m'as dit que Jenni ne comptait pour toi. Alors, pourquoi est-ce que tu l'as choisi elle ?

— Tu étais tellement en colère, dit-il en secouant la tête. Tu refusais de me parler... J'ai essayé Lena. De revenir vers toi, de t'expliquer. J'ai voulu te dire à quel point ce baiser avait compté pour moi. Mais tu t'es tellement renfermée sur toi même, et tu as dressé une barrière entre nous que je n'ai plus jamais réussi à franchir.

C'est exactement ce qui s'est passé.

Sauf que ce n'était pas une barrière, mais un véritable mur, que j'ai érigé entre nous.

Bien sûr qu'il avait ses torts, mais, avec les années, je me rends compte maintenant que j'ai mal réagi, moi aussi. Un cœur brisé nous fait parfois faire des choses insensées.

— Et Jenni ? Elle t'a quand même suivi à Los Angeles...

— Au début, j'ai pensé qu'il te fallait du temps pour digérer ce que tu avais appris ce soir-là. Je me suis dit que ta colère s'estomperait. Mais les jours ont passé, puis les semaines, et rien ne s'est arrangé.

Je sens ma main se crisper, malgré moi, mais Cooper en caresse la paume avec une tendresse qui me réconforte.

— Jenni... Elle était la raison de cette animosité entre nous. Et puisque tu refusais de me parler, j'ai fini par me convaincre que, puisque ça avait coûté notre amitié, alors je devais faire fonctionner cette relation. Je me disais que si ça ne marchait pas entre nous, alors ça signifiait que j'avais tout gâché, pour rien. C'était tordu comme raisonnement, mais à l'époque, c'est ce qu'il m'a semblé falloir faire. Alors quand Jenni est revenue, je l'ai... laissé faire. Et j'ai cru pendant un moment que ça pourrait fonctionner.

Cet échange est difficile pour moi parce qu'il fait remonter des choses à la surface que j'ai tenté d'enfouir depuis dix longues années déjà. Des blessures qui ne se sont jamais totalement refermées.

— Mais... Tu dois savoir ce qui s'est passé, reprend-il.

— J'ai eu quelques échos par tes frères, en effet.

Jenni l'a suivi à Los Angeles l'année suivante, mais il l'a retrouvé dans les bras de son patron un soir, quelques mois à peine après son arrivée. Sans compter qu'elle passait la plupart de son temps libre à vider son compte en banque dans des virées shopping.

C'était sans doute mesquin de ma part, mais je dois dire que je m'étais réjouie de la situation quand les garçons me l'avaient raconté.

— Au final, j'ai perdu plusieurs mois de ma vie avec elle, mais surtout, je t'ai perdu toi. Parce que même après m'être séparé d'elle, tu n'étais plus là... Je ne pouvais pas revenir, c'était trop difficile. Tu m'en voulais toujours et... je... mes frères me disaient que tu étais bien, que tu avais trouvé quelqu'un toi aussi, alors, j'ai laissé couler. Je le regrette aujourd'hui. Et cette fois-ci, je veux que les choses soient différentes

Ça a toujours été toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant