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NATE
Mars 2023

Les journées ne sont pas longues lorsque l'on est bien entouré. Gabriella me suffit et le temps défile à une allure ahurissante, si bien que nous ne voyons pas les jours passer. Nous partageons nos journées entre des balades dans les bois, des après-midis pâtisseries, le rattrapage de sa culture cinématographique qui est à chier et beaucoup – beaucoup – de moments sous la couette.

Toutes les pièces y sont passées, dans toutes les positions et voir le sourire béat de Gabriella après chaque partie de jambes en l'air me conforte dans ma décision d'évasion.

Je l'aime tellement que ça me laisse sans voix à chaque fois. Sa beauté me transcende, son odeur est planante, elle sent la vanille et l'amour à la fois, elle laisse derrière elle des volutes de bonheur que j'inspire et j'aspire pour me nourrir de cette allégresse que j'ai peur de perdre.

Chaque jour qui passe m'éloigne un peu plus de la peine et me rapproche un peu plus d'elle et j'aime me sentir heureux dans ses bras. Ses jambes qui enserrent ma taille et ses mains qui se croisent dans mon dos sont tout ce dont j'ai besoin. Jusqu'à la fin de ma vie.

Rien qu'elle et moi.

Il est environ seize heures et nous sortons tout juste de la douche lorsque quelqu'un toque à la porte. Nous échangeons un regard circonspect. Nous n'attendons personne et personne n'est censé nous chercher.

Surtout, personne n'est censé nous trouver.

Gabriella avance à tâtons dans la maison, rasant les murs pour ne pas être vue. Elle est à moitié soulagée lorsqu'elle reconnaît Elisa.

A moitié, parce qu'Elisa dans cette maison ne présage rien de bon.

Elle entre dans la maison sans un mot, sans même saluer sa sœur. Les relations ont toujours été tendues entre les deux filles, mais là, elles atteignent des sommets. De ce regard hautain dont elle seule a le secret, Elisa toise sa frangine avec suffisance et dédain, alors que Gabriella se contente d'opter pour un masque d'indifférence terrifiant.

– Que fais-tu là ?

C'est Gabriella qui a parlé et je n'ai presque pas reconnu sa voix. Ma petite amie s'adresse à Elisa comme à une inconnue. Le tutoiement est le seul indice qui laisse penser qu'elles se connaissent, autrement, l'ambiance est glaciale, presque létale tant la froideur du ton de Gabriella me pétrifie.

– Ne commence pas, siffle la nouvelle arrivante.

– Elisa, combien de temps comptais-tu encore me mentir ?

Elle réplique du tac au tac et telle que je la connais, elle est blessée. Elle a été mise de côté dans toute cette mascarade, même Elisa était dans la confidence de l'identité d'Il Luppo et Gabriella se sent trahie. Sa propre sœur travaillait avec son père toutes ses années, sans qu'elle ne soit au courant de la nature de leurs affaires. Sa colère est probablement légitime, mais n'en demeure pas moins mal venue. Connaissant Il Luppo, il doit avoir de très bonnes raisons pour qu'Elisa soit là aujourd'hui. Car je suis à peu près sure que sa venue lui est due.

Elisa lève les yeux au ciel, preuve d'un dédain incommensurable à l'égard de sa sœur. Ma présence ne semble pas atténuer leur rancœur.

– C'est papa qui m'envoie, réplique Elisa.

– Evidemment. Qui d'autre.

– Gabriella, peux-tu arrêter deux secondes de faire l'enfant ? C'est précisément pour ça que papa t'a écartée de nos affaires tout ce temps. De toute manière, je suis là pour Nate. Papa s'est renseigné via ses contacts en prison. C'est bien L'Épine qui t'a agressé.

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