Chapitre 16 - Aucune différence

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En bas des marches, Ron se sépara d'Harry et Parvati pour entrer dans la Grande Salle où les élèves se massaient. Le bras sur celui de Malfoy, Hermione le laissa guider. Leur descente accrocha des premiers regards, certaines filles la dévisagèrent d'un air peu flatteur, avant d'écarquiller les yeux en la reconnaissant. Les murmures se répandirent en cascade parmi les élèves.

Son appréhension grimpa en flèche, accompagnée par une pointe de nervosité. Que penserait Ron quand il la verrait ?

Consciente de chacun de ses pas, elle atteignit le bas de l'escalier, puis traversa la foule de robes, de capes et de tenues de soirée jusqu'aux doubles portes de la Grande Salle. Entre les murs couverts de givre, sous les guirlandes et le gui suspendus, les quatre grandes tables avaient disparu, remplacées par des centaines de tables rondes entourées chacune d'une douzaine de chaises.

La moitié était déjà pleines. Non loin, celle où s'installaient Ron et Padma n'avait plus que quatre places de libres. Hermione s'en détourna. Ils auraient tout le temps de saluer Ron pendant la partie dansante du bal.

« Et rater une occasion pareille ? Jamais. »

Malfoy l'entraîna vers leur table, ignorant ses protestations. Padma, dont les doigts tapotaient la nappe en attendant que Ron daigne lui prêter attention, fut la première à se tourner vers eux.

— Salut Ron, salut Padma ! tenta Hermione.

Happé par l'entrée des champions, en particulier de Fleur, Ron lui jeta un bref regard. Il revint sur elle la seconde suivante et ses yeux s'écarquillèrent. Malfoy ricana intérieurement. Au lieu de lui rendre son salut, Ron dévia vers Malfoy et ses sourcils se froncèrent.

« Aimable, la belette. » commenta Malfoy en tirant une chaise.

Il l'aida à s'y installer puis s'assit à côté d'elle. Le silence se poursuivit.

— La Grande Salle est magnifique, vous ne trouvez pas ? dit finalement Hermione, en tentant de calmer les coups répétés dans sa poitrine.

Le plafond magique déployait un nuage d'étoiles, chacune brillant de son propre éclat sur le velours du ciel, assez pour couvrir de milliers d'étincelles le givre des murs. Mais tout ce que Ron fixait était Malfoy.

— C'est qui lui ?

S'il ne s'était pas agi de Draco Malfoy mais de son véritable cavalier, le ton grossier de Ron l'aurait mortifiée.

— Il ne doit pas me connaître parce que je suis de Beauxbâtons, dit Malfoy pour Hermione avant de pointer Ron du doigt. C'est lui qui pensait que tu n'avais pas de cavalier ?

Ron s'empourpra et Hermione sentit ses propres joues s'échauffer. Autour d'eux, les assiettes avaient commencé à se remplir suivant les commandes des élèves. Elle attrapa un menu à la hâte et prit le premier plat de la liste. Des panais rôtis apparurent dans son assiette, accompagnés de pommes de terre aux herbes.

— Et vous vous êtes rencontrés comment ? demanda Ron en reposant ses couverts.

— À la bibliothèque. On n'est peut-être pas obligés de parler de ça ?

— Tu as raison. On n'est même pas obligé de parler tout court, je ne voudrais surtout pas vous déranger, c'est lui ton cavalier.

Le bout de panais lui assécha soudain la bouche.

— Tu as bien raison, lança Malfoy. En plus vous aviez l'air en si grande conversation, toi et ta cavalière, c'est moi qui m'en voudrais de vous...

Hermione posa une main sur son bras, le cœur battant furieusement.

« Laisse tomber, je n'aurais pas dû accepter ce plan. C'était puéril de ma part. »

À la table des champions, Fleur plissait le nez vers les décorations pendant que son cavalier l'admirait. Hermione frôla le tissu de sa robe, appréciant sa douceur, son éclat, puis revint vers Ron qui ne leur prêtait plus la moindre attention.

Il ne parlait que de beauté quand il s'agissait de filles. Elle s'était laissée tenter, mais dans l'espoir que quoi ? Qu'il la remarque ? Et après ?

« De toute façon je n'ai pas autant de temps à consacrer, tous les jours, juste pour qu'on me trouve jolie. »

Donc rien n'irait jamais nulle part. Elle ramassa la carte de desserts sans envie et laissa les autres terminer, les yeux baissés vers sa propre assiette, perdue dans les spirales azur ornant la porcelaine.

— Je suis désolée, Ma... ma foi tout ça était stupide.

Un morceau de bûche atterrit dans son assiette et Malfoy lui tendit sa cuillère. Elle croqua dans le chocolat glacé qui lui procura un frisson de réconfort, comme le faisaient ceux de Lupin.

— Merci.

Puis elle découvrit l'expression de Malfoy. Ses yeux bleus brillaient de malice.

« Malfoy... »

Il ouvrit la bouche, lançant d'une voix juste assez forte pour que toute la table entende :

— C'est plutôt moi qui devrais te remercier. Après tout tu as décliné l'invitation de Viktor Krum pour m'accompagner.

Hermione s'étouffa sur son morceau de bûche. Le silence autour d'eux se fit si épais qu'il aurait fallu le couper au couteau pour s'enfuir.

Complètement insensible au malaise qu'il venait de créer, Malfoy balaya les verres du regard. Le sien était le seul rempli et il le lui tendit. Les larmes aux yeux, elle prit plusieurs gorgées avant de le lui rendre.

« Non non, garde-le. Tu l'as touché, c'est le tien maintenant. »

Elle reposa le verre en secouant la tête. Aux tables autour d'eux, les élèves commençaient à se lever.

Dumbledore venait d'inviter les champions à lancer le bal. Les tables s'alignèrent le long des murs, libérant la piste de danse. Ron et Padma s'éloignèrent ensemble alors que la musique jouait ses premières notes, amplifiant le serrement de son cœur.

— Je suis désolée, tu as perdu ton temps, dit-elle d'un ton qu'elle espérait neutre. C'était idiot de ma part de croire que quelques atours feraient une différence. Ça ne me ressemble pas.

Malfoy lança un coup d'œil vers Ron.

« Pas si sûr que ça n'a fait aucune différence. »

Il lui tendit la main.

— On va au moins danser, parce que c'est notre première soirée de libre depuis des mois et je n'ai même pas pu remettre Weasley à sa place.

Il avait effectivement fait beaucoup de sacrifices pour cette soirée. Pour elle.

C'était la moindre des choses, songea-t-elle en déposant la main dans la sienne.


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