Épisode 107 : A travers les hautes plaines

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Épisode 107 :

Le soleil se levait sur les hautes plaines de la Duat, écartant paresseusement les brumes du matin. Eru et Pandore marchaient sur la route, conscients que dès que la luminosité serait importante, ils devraient se cacher.

-Il faudrait peut être qu'on se repose, suggéra Pandore d'une voix traînante. J'ai sous estimé le contre coup de mon sort...

Eru acquiesça :

-Dès qu'on trouve une cachette potable on s'arrête.

Les deux amis quittèrent la route de pavés pour s'enfoncer parmi les hautes herbes des plaines. Ils se dirigèrent vers un petit cercle d'arbres d'où ils pouvaient voir la route sans être vu. Eru jeta un rapide coup d'œil à son amie. Elle était beaucoup plus fatiguée qu'elle ne le laissait paraître, trébuchant sur le sol inégal et manquant de tomber régulièrement. Il prit les devant afin de vérifier le petit bosquet. Il ne sentit rien à part quelques rongeurs qui se cachèrent à son approche.

-C'est bon, lança t il à Pandore qui s'appuyait contre le premier arbre.

Elle pénétra entre les troncs et laissa tomber son sac par terre.

-Je vais faire une petite sieste si tu n'y vois pas d'inconvénients...murmura t elle.

Eru rigola doucement en laissant la jeune fille étendre sa cape sur le sol et se rouler en boule. Au bout de quelques instants, il vit sa poitrine se soulever régulièrement et lentement : elle s'était endormi. Eru détacha sa longue veste de voyage à son tour et la posa sur son amie, s'en servant comme d'une couverture. Il regarda autours de lui, hésitant à masquer le bosquet au moyen de l'Orbe d'Isolement mais il ne savait pas pendant combien de temps il réussirai à le tenir. C'était un sort très particulier et l'unique moyen de manipuler le principe furtif. Se matérialisant sous la forme d'une sphère masquant l'intérieur au reste du monde, l'Orbe d'Isolement demandait une maîtrise fine et puissante des principes ainsi qu'une concentration sans faille. Les plus puissants chamans réussissaient à le fusionner avec leur propre technique mais, pour Eru, former une sphère parfaite était déjà un exploit. Alain leur avait conseillé de ne pas utiliser ce sort car, si jamais il était brisé, la puissance qui s'en libérerait attirerait tous les monstres vers eux.

Pandore se réveilla en milieu de journée et ils reprirent leur voyage, traversant les herbes hautes, gravissant et dévalant les collines tout en gardant la route sur leur gauche. La nuit commençait à s'installer quand ils atteignirent le sommet d'un amas de cailloux sur lequel se dressait un pilier de pierres taillées.

-On fait quoi ? Demanda Eru. Tu te sens de continuer ?

-Ouais, acquiesça son amie, ça va.

Elle serra les pans de la longue veste d'Eru qu'elle portait encore, sa faiblesse due au contre coup du sort avait disparut, elle devait continuer. Ils redescendirent alors et se dirigèrent vers le nord-est. La lueur de la lune éclairait leur chemin et ils avançaient rapidement.

-Je sais qu'on a pas beaucoup parlé de ceux qui nous attendent sur Terre, lança Pandore au bout d'une heure silencieuse, j'avais peur de ne jamais quitter cet endroit. Mais maintenant qu'on se dirige vers la Porte et qu'on n'a rien laissé derrière...

Sa voix se brisa au souvenir des elfes de Fal'rair mais elle reprit :

-Tu penses qu'il se sera écoulé combien de temps dehors ?

-Je sais pas du tout, répondit Eru pensif. Alain nous a dit que le temps n'avait aucune signification ici et je suppose qu'il peut s'être écoulé 100 ans dehors comme une dizaine de jours.

-Alors peut être... commença Pandore sans pouvoir aller au bout de sa réflexion.

-Oui, murmura le jeune homme, peut être qu'ils seront tous morts.

Il senti l'aura de son amie faiblir doucement, comme si elle refusait la réalité.

-Ne t'en fais pas, la rassura t il. Tu sais très bien ce que je pense et je suis convaincu qu'ils sont en vie. Je ne peux pas l'expliquer mais je sens qu'ils ne sont pas morts.

Il se connecta à l'esprit de son amie et utilisa la Voix de Réalité pour lui transmettre tout ce qu'il n'arrivait pas à exprimer. Ils continuèrent de marcher et il reprit :

-Je te promets que tu reverras Johan dans cette vie. Je jure sur mon existence que je mettrai tout mon pouvoir pour que tu le retrouves.

-Non, lança t elle avec un sourire. Je veux que tu t'en sortes avec moi, il y a quelqu'un qui t'attends à la maison aussi.

-Qui ? Demanda Eru en se retournant avec une expression d'incompréhension sur le visage.

Pandore éclata de rire et lui lança un petit coup de poing qu'il esquiva facilement.

-Ariane boulet ! Rigola t elle.

Eru haussa des épaules en reprenant sa marche :

-Bah, c'est pas tout à fait comme Johan et toi, si je peux donner mon avis.

-Tu vois, répondit Pandore, c'est ça ton problème.

Eru sentit qu'elle avait un sourire en coin et la laissa continuer.

-Tu n'as pas vu la façon dont elle te regarde et tout ce qu'elle fait pour toi. Tu es toujours prêts à tout pour les autres, même sacrifier ta vie mais peu de gens sont comme toi. Pour Ariane, les efforts qu'elle fait pour se hisser à ta hauteur et t'être utile sont immenses. Eru... rends toi compte de ça... elle a des sentiments pour toi.

Eru ne comprenait pas, il n'avait jamais songé à tout cela. Pour lui, aimer quelqu'un était impossible : il ne savait pas qui il était réellement. Il était heureux pour Pandore et Johan mais n'avait jamais chercher à explorer cette voie. Pour lui, Ariane était une amie proche et fidèle en qui il pouvait avoir confiance. Il haussa des épaules :

-Évitons de se préoccuper de ça tant qu'on est pas sorti.

Il se replongea dans le silence et dans des réflexions qu'il trouvait bien plus intéressantes et pertinentes : les épreuves qui allaient se présenter à eux bientôt. Ils continuèrent de marcher jusqu'à arriver face à quelque chose dont Alain ne leur avait jamais parlé. Comme pris par un enchantement, ils s'arrêtèrent et contemplèrent ce qui se trouvait face à eux.

-Qu'est ce que c'est que cet endroit ? Demanda Pandore d'une voix tremblante.

Ils étaient au pied d'une collines sur laquelle s'élevait un haut obélisque dorée qui brillait dans la lumière de la lune.

-Je connais cet endroit... murmura Eru.

La beauté et la finesse de l'obélisque étaient à couper le souffle. Eru ferma les yeux, sentant le sang tambouriner à ses tempes. C'est alors qu'il fut transporté dans un autre endroit : il était au cœur d'une oasis, face à ce même obélisque, au côté d'une jeune femme à la peau d'ébène et habillée d'une simple robe blanche qui laissait voir plus de peau qu'elle n'en cachait. Ses cheveux noirs étaient tressés et elle était coiffée d'une couronne d'or représentant un cobra.

-Mon Seigneur, déclara t elle d'une voix vibrante de pouvoir, je vous suivrez toujours alors je vous en supplie, venez me trouver quand vous le rencontrerez.

A ces mots, la jeune femme disparut avec l'obélisque dans un éclat de soleil, dissipant la scène. Revenu à la réalité, Eru fixa l'obélisque qui se trouvait dans sa vision et qui se tenait maintenant devant lui en murmurant :

-Je dois en avoir le cœur net.

A ces mots, il se mit à courir et fila vers le monolithe.

Edfou - Saison 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant