Chère Chloé - Tome 2

Chapitre 50 - Le caviar

"Nous préférons des malheurs inconnus à des bonheurs trop connus".
Jacques Deval

– Chloé ? M'interpelle madame Dambury, alors que je reste sans voix. Qu'est-ce que tu en penses ?
Matt vient de partir du salon, et je me retrouve seule, sous les regards scrutateurs de ces inconnus. Que répondre face à cette annonce ? Que je veux retrouver ma mère et que pour le reste, je ne sais pas ?
"Bonne soirée, c'était cool. À l'année prochaine !"
– Il est parti à droite, m'indique Hailey après quelques secondes pesantes.
Je me lève sans vraiment savoir ce que je fais, et je laisse mes jambes me guider. Je marche à la recherche de l'homme qui est en train de changer ma vie. Qu'est-ce qui est en train de se passer ?
– Matt ?
J'ai besoin de comprendre.
J'ai besoin qu'il me parle, qu'il m'explique.
Car là, je suis perdu.
Après plusieurs minutes à arpenter les couloirs, je le découvre dans un bureau. Lorsqu'il se tourne vers moi, je découvre son visage froncé et mon estomac se contracte. Il veut m'aider à retrouver ma mère, mais je ne peux pas accepter son sacrifice.
On parle d'un mariage.
– Il y a d'autres solutions, Matt. On n'est pas obligé de faire ça.
J'effleure sa barbe blonde et il appuie son visage sur ma main.
– Ce n'est pas comme cela que je voulais que ça se passe, explique-t-il. Tu mérites tellement mieux.
De quoi me parle-t-il ?
Il plonge sa main dans sa poche et sort un écrin rouge.
Oh Bordel !
– Tu comprends qu'entrer dans une famille comme la nôtre ne sera pas simple ? Demande le blond en fixant ses doigts. Il y a des traditions ancestrales qui sont conservées, même au XXIe siècle. Et si tu t'engages avec moi, ce ne sera pas une relation normale. Même si ce n'est pas un défaut en soi.
Ah.
Comment est-ce qu'on a pu en arriver là ?
J'ai cligné des yeux et tout est parti en... De travers !
– Matt ?
– Mon père a raison, et nous ne pouvons pas organiser un faux mariage. Nous avons été stupides de croire que ce serait juste un thème original. Nous avons l'image de notre famille à tenir. Et ...
Il relève le visage vers moi et son sérieux me fait peur. Sa mâchoire serrée me glace le sang. Ses mains qui tremblent légèrement me donnent des sueurs froides.
– Nous ne pouvons pas jouer la comédie pour quelque chose d'aussi important.
Il ouvre l'écrin et je découvre une bague en or avec une pierre accrochée. Un solitaire brillant et... Est-ce un diamant ?
– Je sais ce que je veux, reprend-il avec détermination. Oui, c'est précipité, mais finalement, est-ce que ce n'est pas ça la vie ? Prendre des risques et en profiter ? Tu es la première à me dire que tu veux te battre pour ta mère et être heureuse. Si on le faisait ensemble ?
Je n'arrive pas à décrocher mon attention de la pierre.
Mes mains tremblent elles aussi. Mon cerveau est en galère. Quand est-ce que ma vie a commencé à vriller ?
– Il faut que je te rappelle que ce ne sera pas toujours simple, chuchote-t-il en attrapant ma main avec douceur. Mais est-ce que dans 10 ans, on ne regrettera pas si on ne le fait pas ? Tu passeras toute ta vie à te demander ce qu'il se serait passé. Veux-tu avoir des regrets ? Ou est-ce que tu es prête à te lancer dans un nouveau pari ?
Il me sourit tendrement. Mon cœur bat frénétiquement.
– Il y a toujours des hauts et des bas. Tes folies apporteraient un peu de lumière à mon sérieux. Et ton sourire me donnerait de la force dans chaque montagne russe.
Ma mâchoire est bloquée.
Je n'arrive plus à bouger.
– Je crois que je suis prêt à t'entendre râler quand je laisserai traîner ma serviette. À patienter pendant que tu prends ta douche brûlante en chantant. À me battre avec tes cheveux qui trainent partout. Je suis prêt à te soutenir dans n'importe quelle nouvelle extravagance. Comme celle-là d'ailleurs.
Mes jambes deviennent flageolantes.
- Et punaise, je crois que je suis prêt à faire n'importe quoi pour dormir tous les soirs contre toi. Surtout quand tu portes ces sous-vêtements rouges !
Il observe la bague, puis plonge ses yeux verts dans les miens. L'intensité est impressionnante. Il m'éblouit malgré le stress de la situation.
– Matt, on parle d'un vrai mariage là.
– Oui.
Je déglutis avec difficulté.
– Je te propose une vie différente. Maintenant, c'est à toi de savoir ce que tu veux. Est-ce que tu préfères te contenter d'une vie basique et manger des œufs de lompe. Ou est-ce que tu veux venir déguster du caviar avec moi ?
Qu'est-ce qu'ils ont tous avec le caviar ?
– Chloé, je suis tombé amoureux de toi et je n'ai pas besoin d'attendre 10 ans pour passer ce cap.
Amoureux ?
Mon cœur fait un salto arrière dans ma poitrine. Quant à mon cerveau, il vient de faire un beug sur cette image. Amoureux ?
– On se connait à peine.
– Et alors ? Dans 30 ans, je suis certain que tu me réserveras encore des surprises. Je continuerai à apprendre à te connaître, même après des années passées ensemble. Quand est-ce réellement le bon moment ? Je veux te savoir en sécurité et heureuse.
- Mais...
Je perds mes mots. Ma mâchoire a des difficultés à bouger. Les sons meurent dans ma bouche. Je suis comme statufiée !
- Qui a dit qu'il fallait connaître la personne à 100% avant de se marier ? D'ailleurs, quel couple se connaît autant ?
Son regard rempli d'espoir me bouleverse. Sa voix suave est confiante, il se tient face à moi avec une conviction qui me dépasse.
– Et si ce n'est pas moi la personne qui te rendrait heureux ? Je souffle d'une voix presque inaudible.
– Tu le fais déjà. Arrête d'être trop exigeante, personne n'est parfait. Dans une relation, c'est la volonté qui compte. Nous avons tous des petits défauts, mais ce sont les qualités qu'il faut voir.
Des frissons me parcourent.
– Tu ne connais pas tous mes défauts, Matt.
– J'en connais quelques-uns, chuchote-t-il en me lançant un clin d'œil. Puis, est-ce vraiment grave si je ne sais pas tout ? Depuis que je t'ai vu, mon instinct me pousse vers toi. Et regarde, je suis là malgré tout ce qu'il s'est passé. J'aurais pu fuir comme n'importe quelle personne. Mais non. Je me suis battu pour que tu aies confiance en moi.
– Et si on se rend compte qu'on n'est pas fait l'un pour l'autre ?
– C'est une question de volonté, Chloé. Personne n'est fait à l'identique, avec les mêmes besoins, ou les mêmes caractères. J'ai vu qui tu étais, et j'ai tout de suite su que tu pourrais me rendre heureux. Maintenant, c'est à toi de savoir ce que tu veux.
Il m'observe en fronçant les sourcils avant de chuchoter :
– Je te propose une solution afin de retrouver ta mère. Mais je te propose aussi l'option de devenir ma femme.
Il attrape ma main dans un geste doux.
– Je te propose une vie hors des sentiers battus, remplie de montagnes russes. Désormais, réfléchis. Moi, je sais ce que je veux et je suis prêt à me battre. A me battre pour toi, mais surtout à me battre avec toi.
Il dépose l'écrin au creux de ma main avant de reprendre :
– Arrête de te laisser guider par la peur. Ta vie, c'est maintenant. Plus tard, ce sera trop tard.
Il relâche ma main.
Merde !
Qu'est-ce que je fais ?
Dans un soupir, Matt s'éloigne et mon cœur se brise. Mon corps refuse de bouger. Ma poitrine me brûle et pourtant, aucun son ne sort de mes lèvres. Je vais passer ma vie à regretter si je ne saisis pas cette chance. Et je sais que je n'en aurai pas d'autres.
Pour ma mère.
Mais aussi pour moi.
Dans une vie, combien d'hommes comme lui pourrais-je rencontrer ? Ai-je déjà parlé avec quelqu'un d'aussi charismatique et intelligent ? Ai-je déjà vu un homme s'adapter avec autant de prestance et de beauté ? En fait, je ne lui arrive même pas à la cheville, mais c'est à moi de réfléchir à sa proposition.
Le monde tourne à l'envers !
Je jure que Zac Efron n'est rien à côté de Matthew Dambury. Car punaise, lorsqu'il me regarde, il n'a pas besoin de me toucher pour m'embraser. Il n'a pas eu besoin de me parler pour que je tombe sous son charme ! J'ai eu l'impression que chaque minute à ses côtés était un cadeau. Et Matt m'a offert quelque chose sans prix : un soutien infaillible.
Je ne veux plus me laisser guider par mes peurs.
- Matt ?
Le beau blond se tourne vers moi, et l'inquiétude que je lis sur son visage me fait l'effet d'un coup de poing. Ses mains dans les poches de sa veste, il ne bouge pas et attend que je réagisse.
L'écrin est toujours ouvert au creux de ma main.
Qu'est-ce que je fais là ?
Je plonge dans ses yeux verts et chuchote :
- Je choisis le caviar.