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29 Janvier : Saucisses cocktail


Boya n'aimait pas ses mains. Il les trouvait petites et mal pratiques. Elles étaient fortes sans doute, mais il avait l'impression de toujours avoir des mains d'enfant. Ses doigts étaient musclés et forts mais courts et épais comme des saucisses cocktail.
Quand il comparait ses mains avec celles de QingMing, il en était invariablement jaloux.

Celles de son ami étaient longues, fines, délicates et élégantes bien que tout aussi fortes si ce n'était plus que les siennes.

Il n'y avait bien que deux occasions où Boya n'avait pas horreur de ses mains : quand il tenait une arme et quand il les posait sur QingMing.

Avec une arme, il arrachait des cris de douleur à ses ennemis.

Posées sur QingMing, il lui arrachait des cris de plaisir.

Comment ne pas être fier de ses mains à ce moment ?

Mais en règle général, non, Boya n'aimait pas les mains de bébé qu'il avait.

Un gros soupir lui échappa. Il aurait aimé être capable de gestes précis et délicat. Peut-être que sa calligraphie en aurait été meilleure ? En tout cas, elle n'aurait pas été pire.

Quand il regardait QingMing écrire, c'était toujours voir de l'art apparaitre sous ses yeux. Ho bien sûr, il n'était pas dupe. Son ami avait dû souffrir le martyr sous l'enseignement de son Shifu mais surtout sous celui de Kuang HuaShi. Le shishen avait tenté une fois ou deux de lui faire améliorer sa propre écriture. Boya avait pensé crever. L'esprit était un démon quand il s'agissait de faire travailler ses élèves. Ou un esclavagiste.

QingMing ne pouvait qu'avoir une écriture parfaite après avoir passé des jours à répéter le même trait encore et encore jusqu'à la nausée. Boya se satisfaisait d'être lu.

En plus d'avoir des saucisses cocktail à la place des doigts, sa calligraphie aurait fait passer un plat de nouilles pour une écriture charmante. Bah. Au pire, on pourrait dire que c'était une méthode comme une autre pour protéger ses rapports puisqu'il n'y avait bien que son Shifu qui arrivait aisément à le déchiffrer.

Alors qu'il regardait ses mains avec la même désolation qu'à son habitude, QingMing les prit dans les siennes. Il les porta à sa bouche pour embrasser lentement chaque doigt l'un après l'autre.

Lui aimait passionnément les mains de son amoureux. Elles étaient certes petites et épaisses, mais elles allaient parfaitement à leur porteur. Fortes avec les cals que donnent les armes et l'arc. Les mains de Boya étaient de celles qui donnent confiance quand on les serre. Elles étaient celles d'un guerrier et d'un protecteur qui ne renâcle devant rien pour atteindre son objectif.

QingMing aimait ses doigts. Ils étaient courts et épais, oui. Mais c'était des doigts puissants qui se pliaient parfaitement autour du fût d'une flèche, bandait la corde d'un arc de guerre sans peiner et désignait un coupable sans trembler.

QingMing aimait les doigts et les mains de son Boya. Il pouvait passer des heures à les caresser, à les lécher ou les sucer sans jamais se lasser. Il aimait les sentir sur sa peau ou se glisser dans sa fourrure. Les doigts de son ami étaient une récompense en eux-mêmes pour un petit renard timide comme le demi-sang. Boya savait toujours comment les utiliser pour lui gratter le derrière des oreilles ou la base des queues.

Les doigts de Boya étaient peut-être des saucisses cocktails comme aimait à s'en plaindre le chasseur. Mais comment un renard pourrait-il se plaindre d'une telle gâterie apéritif ?



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