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23 Avril : Insomnie (YYMDoE)

Boya fixait le plafond au dessus de lui depuis des heures.

La boule d'angoisse au fond de son estomac lui sembla prendre en substance d'un coup au point qu'il dut se redresser pour ne pas s'étouffer avec sa propre terreur soudaine.

Les yeux fermés, il posa ses poings sur ses orbites qu'il pressa si fort qu'il finit par voir des étoiles derrières ses paupières closes. Un hoquet explosif passa ses lèvres puis un second. Il se força à retenir sa respiration jusqu'à ce que des papillons noirs lui donnent l'impression qu'il allait tourner de l'œil. Alors seulement il se permit de prendre une grande inspiration rauque.

Le chasseur se recroquevilla sur lui-même. Les ongles enfouit dans les cheveux, il s'égratigna probablement le cuir chevelu mais ne sentit pas la douleur. La peur qui lui serrait le cœur emportait tout. Boya n'était plus capable d'entendre quoi que ce soit dans cet état d'angoisse infinie qui éteignait tout autour de lui à part les hurlements au fond de son crane.

Le chasseur sauta de son lit pour faire les cent pas dans sa petite chambre. Il n'espérait pas distancier ses peurs ni même les tenir à distance. Pas alors qu'il faisait face à la plus grande peur de sa vie d'adulte.

Un gémissement lui échappa. Il avait envie de hurler mais ne pouvait s'y résoudre. Le cri l'aurait certainement soulagé un instant mais n'aurait été qu'une cautère sur une jambe de bois. S'il criait une fois, il ne pourrait plus s'arrêter avant que la cause de ses angoisses ne disparaisse. Ou apparaisse.

Boya passa ses mains sur ses joues. Une part de son inquiétude disparue, remplacée par de la surprise. Des larmes ? Il pleurait ? Pourquoi pleurait-il ?

Le froid de la nuit le fit frissonner malgré la fièvre qui lui battait les tempes.

Il ouvrit en grand la fenêtre de sa chambre. Le vent nocturne s'y engouffra d'un coup. Boya ne profita même pas du frisson qui lui remonta dans le dos. Il avait l'impression d'être engloutit par son propre cœur qui allait s'arracher de sa poitrine à force de battre si fort.

"- Ho, Boya..."

Le jeune homme ne put retenir un petit gémissement de souffrance. La très vieille dame qui l'avait élevé et éduqué depuis qu'il était arrivé à JingYun le prit par la main pour le forcer à s'asseoir sur son lit. Elle était si petite qu'elle lui arrivait à la taille mais Boya serait toujours soumis à son autorité. Elle était sa seconde maman quelque part. Sa simple présence le calmait quelque peu. Il se comportait comme un petit garçon effrayé par l'orage.

"- Je ne t'ai jamais vu comme ca."

"- Il n'est pas venu." Souffla doucement le chasseur.

"- Il est juste en retard."

Boya serra dans ses bras le coussin que sa Shifu lui avait mit contre le torse. Ce n'était pas première fois qu'elle devait composer avec les angoisses de son élève mais elle ne l'avait jamais vu à ce point ravagé. Elle ne pouvait qu'espérer que ce n'était qu'un petit retard. Si leur visiteur avait été tué ou pire, décidé de ne pas venir, elle ne savait pas comment elle pourrait consoler son élève.

"- Tu devrais dormir, Boya."

"- Je ne peux pas. Pas sans savoir."

"- Dormir le fera venir plus vite."

"- Je ne veux pas être endormit quand il va arriver."'

Boya était toujours si mature, c'était étrange de retrouver le petit garçon qu'elle avait élevé.

Il avait posé sa joue contre son épaule et s'accrochait à elle comme lorsqu'il était arrivé pour la première fois au temple. Elle n'avait pas encore rencontré l'homme qui le mettait dans cet état aussi était-elle partagé sur son apriori.

Une sensation bizarre lui fit remonter un frisson dans le dos. "DEMON" c'était ce qu'elle pensa immédiatement. Puis son regard tomba sur un portail ouvert et un homme en blanc au sourire si doux qu'elle ne put que rejeter sa première impression.

"- QINGMING !"

"- Boya. Je suis en retard, je suis désolé."

"- Mais... TU SAIGNES !!!"

Le nordiste souriait si tendrement à son ami que la vieille dame en fut presque jalouse. Son petit élève avait trouvé quelqu'un pour l'aimer maintenant. Il n'aurait plus vraiment besoin d'elle. Elle comprenait ce que pouvait éprouver un parent qui voit son enfant partir.

"- Ce n'est rien." Rassura le nordiste en riant doucement.

QingMing avait attrapé la main de Boya pour serrer gentiment ses doigts entre les siens pour les effleurer de ses lèvres. Ils avaient oubliés la présence de la vieille dame, perdu comme ils l'étaient dans leur petit monde personnel. Elle préféra les laisser tranquille. Ils ne dormiraient pas davantage ce soir, mais elle préférait la présence à l'absence pour son adorable élève.



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