67/366

6 1 0
                                    

7 Mars : Cellule (YYMDoE)


Le jeune soldat avait intégré les équipes de la Prison Impériale depuis moins d'un mois. Au début, il avait été écœuré par son affectation. Ses camarades de régiment s'étaient moqués de lui sans pitié. C'était un poste de planqué. Il n'irait jamais sur le terrain. Il ne pourrait jamais se distinguer parmi ses pairs pour avoir un meilleur statut et apporter de la renommée a sa famille. Déjà qu'il les avait humilié et déçut en étant chassé de la petite secte où ils l'avaient envoyés parce qu'il était un cultivateur médiocre... il avait espéré qu'être un cultivateur lui vaudrait une avancée plus rapide et une meilleur survie par rapport à ses camarades médiocres. Et voila qu'il était coincé ici, dans les geôles impériales à écouter geindre les prisonniers.

Il avait vu défiler trois types de gens : les prisonniers de droit commun, les plus nombreux et ceux qui y restaient le moins longtemps. En général, ils s'en sortaient avec une amende ou quelques coups de bâton au pire. Dans les locataires de plus longue durée, Il y avait les condamnés à mort d'un coté, les prisonniers politiques de l'autre. Les uns comme les autres étaient régulièrement torturés lors de leurs interrogatoires.

Dans la prison, le défilé des prisonniers était rapide. Heureusement quelque part. Les cellules étaient peu nombreuses. Il était fréquent qu'ils doivent entasser quatre ou cinq bonhommes dans une cellule prévue pour deux. Alors pourquoi ne pas utiliser la cellule tout au fond ? On lui avait dit dès le premier jour qu'il ne pouvait y enfermer personne, même si toutes les autres dégueulaient de locataires. Il arrivait parfois qu'on mette des prisonniers mâles dans la cellule prévue pour les femmes, plus confortable et chaude, si celle-ci était vide quand on manquait de place. Mais jamais au grand jamais personne ne devait être emprisonné dans la cellule tout au fond.
A chaque fois que le garde posait la question, ses camarades se contentaient de rire de bon cœur et de lui dire qu'il saurait bien assez tôt. Le jeune homme avait été perturbé lorsqu'il avait été envoyé dans la dite cellule pour y faire le ménage. La cellule n'avait rien d'une cellule ! Même celle des femmes, honteusement confortable pour une prison était ascétique par rapport à celle là. Un grand lit confortable, des couvertures dans les meilleures soies, un poêle, de la vaisselle, un mur entier couvert de livres ????

La curiosité n'en avait été que plus forte.

"- QingMing Daren !!! Ca faisait longtemps !"

"- Cai Can ! Comment vas-tu mon ami ?"

Le jeune garde sursauta. Qui était l'homme en robe blanche qui débarquait ainsi encadré par huit hommes en arme visiblement très amusés ?? Il n'était pas à la capitale depuis assez longtemps pour l'avoir déjà vu.

"- Très bien, merci QingMing Daren. Comment s'est passé votre voyage dans le nord ?"

"- Le Yin Yang reste égal à lui-même."

Le visage mobile du cultivateur s'était chargé d'un mélange d'amusement et de résignation dépitée.

"- Je me demandais quand vous passeriez nous voir. J'étais presque inquiet. Les rumeurs vous donnent revenu depuis presque quatre jours."

"- Boya à mis un peu de temps à décuver et je l'ai insulté."

Boya ??? L'homme parlait aussi cavalièrement de l'Empereur ??? Le garde était horrifié. Et ce fou l'avait insulté ?

"- Que lui-avez-vous dit ?"

"- Qu'à force de se baffrer de gâteaux, il allait finir avec un cul de jument."

"- QingMing Daren ! Enfin !" Mais le garde en chef était hilare.

"- Ma chambre est toujours là ?"

"- Propre de ce matin."

"- Parfait !"

Le prêtre salua par leurs noms les soldats qui l'avaient accompagnés avant qu'ils ne repartent.

"- A dans quelques jours, QingMing Daren !"

"- A dans quelques jours."

"- Vous avez été condamné à quoi cette fois ?"

"- Comme d'habitude."

"- Ho ! Il viendra vous chercher lui-même d'ici deux jours."

"- Comme d'habitude." Souriait encore le cultivateur tout en prenant ses quartiers dans la cellule du fond comme s'il était chez lui. "Comment vous vos jumeaux, Cai Can ?"

Le chef de la prison était extatique.

"- Nés à la date que vous aviez prévu, comme vous aviez prévu. Les guérisseurs étaient là pour intervenir sur l'hémorragie de ma femme, comme vous l'aviez annoncé. Elle est sauvé et les bébés aussi." Le nordiste avait prédit la naissance et la mort de son épouse d'hémorragie. S'il voulait la sauver, il fallait qu'il demande de l'aide à un guérisseur et une sage femme spécifiques ce que le gardien avait fait. Les jumeaux, un garçon et une fille avaient survécut, comme leur mère.

QingMing eut un large sourire. Il était heureux pour l'homme.

"- Quand je pourrais avoir accès à mes appartements du palais, je vous ferai envoyer le cadeau que j'ai prévu pour eux trois. Puis-je avoir un peu d'eau pour le thé ?"

"- Bien sur, QingMing Daren."

Le jeune soldat n'attendit même pas qu'on lui donne l'ordre. Il revint avec l'eau très vite, trop curieux du prisonnier pour être discret.

"- Merci jeune homme. Un nouveau ?"

Cai Can hocha la tête.

"- Un défroqué de la secte Hang. Il vous sera affecté quand vous êtes là."

Le prêtre eut un large sourire.

"- Excellent !" Il allait le former de son mieux quand il serai là. Ca ne faisait jamais de mal d'avoir des gens capables dans des endroits comme celui-là.

"- QINGMING !!"

"- Ha, je ne pensais pas qu'il viendrait me chercher si vite." Souriait largement le nordiste.

Dans l'encoignure de la porte, l'Empereur lui-même, le visage barré d'une moue irritée de petit garçon venait chercher son meilleur ami depuis qu'ils avaient vaincu le Serpent ensemble et qu'il avait été propulsé Empereur parce qu'il ne restait personne de sang Impérial qui ait les épaules pour prendre le Trône.

"- Tu as finis de bouder ?" Souriait encore QingMing.

L'Empereur fronça les sourcils. Les soldats se jetèrent le front par terre pour éviter sa colère.

"- Je ne boude pas !"

"- Tu boudes parce que je suis resté absent une semaine de plus que prévu. Et parce que tu as un cul de jument depuis que tu te vautres dans la soie."

"- Tu veux vraiment rester ici deux jours de plus ?"

"- Tu peux me tenir compagnie si tu veux. Personne ne viendra te chercher des poux ici. Et je serais même assez généreux pour partager mon lit, tu n'auras même pas besoin de dormir par terre."

Ce qu'ils firent, à la grande horreur du jeune garde et au grand amusement des gardes. Ce n'était pas rare que l'Empereur mette au frais son meilleur ami après s'être chamaillé avec lui. Puis qu'il finisse par venir le rejoindre un jour ou deux pour se cacher de ses fonctionnaires et respirer. Les soldats de la prison gardaient le secret de leurs aventures avec une certaine fascination. Comment deux hommes de leur stature et de leur pouvoir pouvaient se comporter ainsi comme des gamins ? C'était étrange de se souvenir que l'Empereur et son Prêtre Impérial étaient humains. Et pourtant, si rassurant.


WriYeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant