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11 Juillet : Pardon 2 (YYMDoE)


La haine était un sentiment que Boya connaissait intimement.

Il avait longtemps hait les démons en général, les renards en particulier. Il s'était hait lui-même pour sa faiblesse quand il était gamin et qu'il n'avait pu sauver sa mère. Il avait hait son géniteur pour les avoir abandonné, les autres nobles pour les avoir moqué, les autres épouses et concubines de son père pour avoir tout fait de pour se débarrasser d'eux parce qu'il était le seul garçon et que sa mère n'était qu'une simple concubine.

Boya avait hait JingYun pour être arrivé trop tard pour sauver sa mère. Il avait hait son Shifu pour le forcer dans une carrière dont il ne voulait pas, lui qui voulait être musicien. Il avait hait, hait, hait parce que c'était tout ce qui lui était resté pendant des années.

Il n'était plus qu'une boule de haine qui n'avait pas basculé pour devenir un démon grâce à... et bien... il n'en savait rien. La chance ? Autre chose ?
Boya était conscient qu'il aurait du changer depuis bien longtemps. Même sa présence à JingYun n'expliquait pas qu'il soit resté humain avec cette boule de haine dans le cœur et le ventre.

Il aurait fallu un demi-démon renard pour commencer à lentement détricoter cette haine absolue de tout ou presque. Ironique
Une ironie encore plus grande quand on savait que ce demi-démon avait réussit à le convaincre d'aller parler à son géniteur.

Le prince était toujours au palais. Il était toujours dans son petit domaine, toujours avec ses épouses et ses concubines.

Et Boya était toujours son fils unique.

"- Boya Daren ?"

"- Mmm."

"- Le prince ne va pas tarder." Sourit une servante avec un rien d'inquiétude.

Elle tremblait lorsqu'elle lui servit une tasse de thé avant de filer.

Boya sentait des regards sur sa nuque. Lorsqu'il releva les yeux, ce fut pour croiser ceux de plusieurs des épouses de son géniteur ainsi que plusieurs de ses sœurs. La plus grande... était-ce même sa sœur ou la dernière concubine en date de son père ? Il n'en savait rien. Mais la petite d'environ sept ans qui s'était faufilé entre deux des adultes pour s'approcher ? Elle, il était sur qu'elle était se sœur. Ils avaient presque le même visage.

"- Bonjour Boya."

Le chasseur ne répondit pas à la Première Epouse qui lui parlait aussi cavalièrement et sans respect de sa charge ni de son rang. Comme s'ils étaient proches. Il n'avait que faire d'elle. Il ne devait pas s'occuper d'elle, plutôt. Il avait promis à QingMing de faire un effort. Pour ca, il ne pouvait pas laisser échapper sa haine envers elle ni envers aucune des autres même si elles étaient responsables de la chute de sa mère. Tout ca parce qu'il était né.

Ha ! Le karma était venu se venger pour lui. Ses frères étaient tous morts avant d'avoir un an.

"- Boya Daren."

"- Prince Jin."

Le prince frôlait la cinquantaine. Il était encore solide mais n'avait rien d'un guerrier. Il prenait de la brioche, les rides commençaient à se voir et le muscle était mou.

"- Je ne m'attendais pas à votre demande de me rencontrer."

"- Je n'en avais aucune envie mais j'ai promis."

"- Mon époux..." Commença la Première Epouse avec sévérité.

"- Tu peux nous laisser." La réponse sèche la heurta.


La première épouse pinça les lèvres. Elle voyait d'un très mauvais œil la présence de Boya. Elle ne désespérait pas de produire un garçon qui parviendrait à l'âge adulte et pourrait hériter du domaine, de la charge et de la place de son père dans la famille impériale et le palais. Si son mari se réconciliait avec Boya, il pourrait avoir l'idée stupide de faire de lui son héritier reconnu.

"- Pourquoi avoir chassé ma mère ?" Boya et le tact ? La blague était cocasse.

Son géniteur soupira

"- J'ai été stupide. Je voulais faire plaisir à mes épouses. Tu avais plusieurs grand frères à quelques semaines prêt, ca ne paraissait pas un bien grand sacrifice pour la paix de la maison. Mes épouses, surtout la première, étaient insupportables. Je préférais vous savoir à l'écart et vivants plutôt qu'ici et empoisonnés."

Boya serra les mâchoires. Il dut respirer lentement pour reprendre son calme. Hurler après son géniteur ne servirait à rien. Aller égorger sa belle-mère non plus.

"- Vous êtes sérieux ?"

Le prince haussa les épaules.

"- Je ne peux te le prouver. Que tu me crois ou non ne regarde que toi."

Boya allait lui arracher les dents.

"- Je vous hais." Siffla Boya. "Je vous hais pour nous avoir chassé. Je vous hais pour avoir tué ma mère. Je vous hais pour m'avoir laissé partir à JingYun. Je vous hais pour m'avoir abandonné. Pour avoir abandonné ma mère. Sans vous, elle aurait eut une bonne vie. Elle aurait eut une vie tout court !" Elle n'était qu'une musicienne du palais mais son art lui permettait de vivre dignement avant qu'elle ne tape dans l'œil du prince qui ne lui avait pas laissé le choix de devenir sienne. Elle n'avait que quinze ans quant il l'avait prit pour lui. Elle n'en avait pas vingt cinq quand elle était morte.

Le prince accepta la fureur et le dégout de son fils avec dignité. Il le méritait après tout. Trente ans en arrière, il se serait emporté contre lui. Il l'aurait fait remettre à sa place pour ses insultes, pour ne pas être filial. Mais entre eux, il ne restait bien que du sang. Tellement de sang. Pas uniquement celui qui coulait dans leurs veines.

"- J'accepte ton ressentiment, Boya. C'est bien la seule chose que je peux faire pour mon fils." Et c'était mérité. Il avait regretté la mort de la mère de Boya. S'il ne l'avait pas reprit avec lui par contre.... "Tu serais mort dans les guerres de palais si tu étais resté ici. Tu le sais." L'homme ne se faisait aucune illusion sur les causes des décès de tous ses fils à part Boya. Il ne pouvait juste pas le prouver et faire punir les responsables. Ses épouses, concubines, d'autres princes, peu importait. Le résultat était le même.

Boya lâcha un cri de rage. Il avait bondit sur ses pieds et faisait les cents pas. Malgré sa peur, le prince ne bronchait pas. Son fils avait le droit d'exprimer sa colère, une fois de plus.

"- Tu es devenu un adulte puissant, capable de se protéger seul." Murmura le prince au bout d'un moment.

"- Ha n'essayez même pas de vous justifier davantage !" Siffla encore Boya dont la respiration heurtée était de plus en plus oppressée. A ce rythme, il allait exploser et faire quelque chose que son géniteur allait regretter.

Le prince Jin eut l'intelligence de se taire et d'attendre.

Boya risquait de craquer. Il ne le pouvait pas. Il sortir un lin'ger de son uniforme, les mains tremblantes.

"- Q... QingMing ?"

"- Je suis là Boya." La voix douce fut suffisante pour calmer un peu Boya. Il avait refusé que son ami l'accompagne mais avait besoin de lui.

Il savait que QingMing aurait tout autant besoin de lui quand il irait confronter sa propre famille. Ils avaient fait un pacte pour avancer.

"- Boya ? Ca va aller ?"

"- Continue à me parler un peu."

QingMing ne posa aucune question. De la même voix douce que le prince distinguait à peine, il murmura quelques nouvelles stupides et sans importance sur les cancans de JingYun qu'il avait récolté depuis son arrivée.

"- Merci QingMing."

"- De rien mon ami. N'hésite pas. Je serais toujours là."

Boya eut un pauvre sourire. Il le savait.

Une fois son calme retrouvé, il retourna s'asseoir devant le prince pour reprendre leur conversation. Il ne lui pardonnerait pas. Mais il pouvait essayer de comprendre, d'adulte à adulte.



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