Je me débats, donne des coups de pieds à mon ravisseur mais aucun ne l'atteint, il les pare tous et m'immobilise fermement contre la table devant moi.
— Calme-toi, ce n'est que moi.
Il me libère, je me retourne directement face à lui. Il est là, c'est Merikh. Décidément ce soir mon cœur vit une ascension émotionnelle à tout rompre. Je lui frappe le torse, sans intention de le blesser, ce n'est pas comme si je le pouvais.
— Tu m'as fait peur tout à l'heure !
Il laisse passer les secondes sans rien dire, comme s'il n'était pas avec moi, je ne vois que quelques parties de son visage à cause du feu que je cache.
— Ce n'était pas moi.
Mon apaisement est de courte durée, si ce n'était pas lui qui était bel et bien en train de me chercher, quelqu'un d'autre le faisait. Ça n'est clairement plus aussi simple de s'en sortir en sachant ça.
— Depuis combien de temps tu es là ? Il te cherche depuis longtemps ?
Il m'attrape par les épaules, plus sérieux que jamais. Mais je n'aurais pas été là si lui avait tenu ses engagements. Étrangement, ça me met en colère alors que j'ai agi de mon plein gré.
— C'est plutôt toi que je devrais questionner. Où est-ce que tu étais au lieu d'être avec moi ?
Sa bouche s'ouvre puis se referme, incapable de me donner une réponse.
— Je ne peux pas te le dire.
— Pourquoi, Merikh ? Tu es tellement... tellement...
Je sens la frustration grimper en flèche.
— Tellement quoi ?
Ses mains se resserrent sur moi, le feu se reflète dans ses yeux.
— Énigmatique.
Il soupire avant de s'éloigner, non loin de moi, pourtant il rompt le contact, mes chances de vérité fuient avec lui.
— Je ne peux pas tout te dire. Je le ferai un jour, mais pas maintenant.
— Mais je veux savoir maintenant ! Pourquoi tu es comme ça, pourquoi tu es si différent des autres, que tu parles de cette façon et que tu me traites de cette manière.
— Arweny.
Mon nom sonne comme un avertissement entre ses lèvres bleutées par le froid.
— Je veux savoir pourquoi ton épée est bleue alors que personne d'autre ne possède la même, merde.
Je ne sais pas si c'est mon injure qui le surprend ou que je dis enfin ce qu'il y a dans mon sac mais ses yeux doublent de volume. C'est la première fois que je hausse le ton avec lui.
— Je croyais que tu étais inconsciente à ce moment-là.
Il a l'air sincère, mais plus inquiet de savoir que je gardais ça pour moi depuis tout ce temps.
— Tu n'es pas normal, n'est-ce pas ?
— Je...
Le son d'une cloche retentit, il relève la tête et fixe la porte. Lui aussi vit une escalade d'émotions, il a l'air perdu. Mais je le suis aussi, cette cloche n'a jamais rien signifié de bon.
— Quoi ? Comment elle a pu déjà s'en rendre compte ?
Elle ?
— On a pas le temps, viens vite.
Trop lente à son goût, il me tire le bras et me soulève avant de partir en courant. Je finis sur son épaule en sac à patate, incapable de résister à cause de sa rapidité. En un instant, nous sommes dans le couloir qui est relié à mes quartiers, du moins ce que j'en reconnais avec la tête à l'envers. Mon souffle se coupe plusieurs fois à cause des coups de haut en bas contre son épaule. Mes côtés me font mal mais je n'ai rien à dire, il a bien réagi, il est en train de nous sauver. Si quelqu'un m'avait vu dehors, en plus de cette cloche qui ne s'arrête pas, je ne sais pas ce qu'il me serait arrivé.
Je reconnais les dernières pierres du couloir, les cris des gardes montent à mes oreilles, mon sang court dans mes veines, puis un objet passe devant mes yeux. Il n'a rien à voir avec la situation et je comprends encore moins ce qu'elle fait ici. Pourquoi une pierre pointue vient de sortir de la poche de Merikh ? Je n'ai pas le temps de me questionner pourquoi mon garde se promène avec des pierres dans son uniforme que le paysage change du tout au tout, les pierres du couloir se troquent contre l'escalier sombre que je vois de trop près. Merikh met un coup de pied dans la porte qui s'ouvre à la volée et me jette presque dans mon lit.
— Reprend ton souffle et ne bouge pas d'ici, je serai devant la porte. Tu n'as pas quitté ta chambre, d'accord ?
— D'accord.
Il referme la porte, la cloche s'arrête mais mon cœur ne se réfrène pas. Faites que ça ne soit pas le garde qui m'ait vu. En y pensant, ça ne peut pas être ça, s'il m'aurait vu il ne m'aurait pas lâché et m'aurait certainement ordonné de me montrer à lui. Quant à cette cloche, elle est sonnée pour les anomalies qui peuvent nuire aux personnes dans le château. Alors quoi, un incendie ? Une attaque ?
Je reste silencieuse en essayant de tendre l'oreille au maximum, je ne perçois que des vibrations au-dessus de ma tête, celles des gardes qui courent sûrement pour monter sur les remparts, la menace doit être conséquente pour avoir déclenché cette alarme au milieu de la nuit. Ça ne pouvait pas attendre le petit matin pour être annoncé. Les vibrations circulent au-dessus de moi puis se rapprochent rapidement. Ce ne sont plus des vibrations à ce stade mais bien des bruits de pas que je perçois dans les escaliers qui mènent directement dans mes quartiers. Il n'y a qu'une seule entrée, qu'une seule sortie, ce n'est pas une coïncidence. Je me redresse mais je n'ai pas besoin de coller mon oreille au bois pour entendre ce qu'il se trame de l'autre côté.
— Où est-elle ?
Qu'est-ce que fait la reine ici ?
— Je t'ai demandé où elle était !
Son hurlement me retourne l'estomac. Mes mains tremblent.
— Elle est dans sa chambre, ma reine.
C'est bien la première fois qu'il l'appelle de cette manière, elle doit être terriblement en colère pour qu'il le fasse.
— Pousse-toi.
— Elle n'est pas sortie de sa chambre de la nuit ma-
— J'ai dit : pousse. toi. Ou tu préfères perdre ta tête ?
Je n'entends aucun bruit de résistance, j'ai à peine le temps de me lever que la reine apparaît sous mes yeux. Avant que mon front ne heurte mon lit, sa gifle me propulse un mètre en arrière. La douleur est immédiate, je n'ai pas le temps de toucher ma peau que je me fais tirer, traîner par les cheveux jusqu'au pas de la porte en criant de douleur.
Quand elle me lâche, je prends mon crâne entre mes mains, il est chaud et sensible mais elle ne compte pas me donner de répit puisque je sens un pied s'abattre dans mon ventre. Calia prend un malin plaisir à me violenter alors que sa mère se ronge le pouce en me fixant, un de ses yeux tressaute. Elle s'avance rapidement vers moi, poussant sa fille.
Du coin de l'œil je vois Merikh qui est tenu par deux gardes et il ne peut que regarder ce qu'il se passe. Ma tête est forcée de se diriger vers le haut, elle prend une poignée de cheveux et la tire vers le plafond pour que je la voie.
— C'était toi ? Elle secoue ma tête par la force de sa main qu'elle agite dans tous les sens.
— Je ne sais pas de quoi vous parlez.
Je réponds difficilement, ce qui intensifie sa colère.
— Alors qu'est-ce que ça faisait devant les escaliers ?
Elle jette un objet sur moi, créant une nouvelle douleur. Le liquide chaud coule le long de ma tempe alors que je reconnais cet objet.
C'est la pierre que Merikh a fait tomber de sa poche. Je lève les yeux vers lui, il est aussi surpris que moi. Je pensais m'être fait attraper à cause de ma sortie, pas à cause du vol de mon garde.
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D'étoiles et d'épines [ TERMINÉ ]
FantasyArweny est une jeune femme dotée d'un don de clairvoyance depuis l'enfance. Ses parents étant pris entre deux feux la vende à la reine du royaume qui est obsédée par l'immortalité et la richesse, elle est donc parfaite pour les épargner en tant que...