C'est le bruit d'une branche qui se casse qui me ramène dans le présent. Le paysage blanc m'a donné l'envie de me reposer alors j'ai fermé mes yeux sans m'endormir malgré l'envie. C'est le premier bruit que j'entends si distinctement. La neige est toujours présente mais des trous se forment à certains endroits, la terre se réchauffe par zones.
— On va faire une pause, on est suffisamment loin.
Il ne s'adresse pas directement à moi pourtant je me rappelle de ses mots d'il y a quelques heures. Il va me donner de quoi me réchauffer. Mes pieds comme le bas de mes jambes ont affronté le froid, ils pourraient se briser tant leur température est basse, ils sont tout engourdis.
Les quatre hommes nous devancent pour la première fois, puis descendent de leur monture en les attachant autour d'un arbre. Godric se fait lui aussi descendre sans délicatesse puis immobiliser contre un arbre, entouré de ficelles. Il semble exténué.
Merikh descend à son tour, je m'attendais à ce qu'il m'aide à descendre aussi mais il me laisse perchée sur le cheval et le tire par son attache pour le faire avancer. Un des hommes me dévisage un instant, je n'arrive pas à soutenir son regard et je fixe alors mes mains. Les hommes forment un petit cercle entre eux, je les observe faire, parler entre eux, se jeter des regards et des sourires faibles. Ils s'échangent leur gourde et se réchauffent en frottant leurs bras entre eux, ils ont l'air proches tous les cinq.
C'est à ce moment que mon garde réparait, il était accroupi non loin d'eux, à quelques mètres. Il prend un de mes pieds entre ses mains, le frotte entre elles avant de le glisser à l'intérieur d'une chaussure qu'il entoure ensuite d'un épais tissu, refermé par une ficelle autour de ma cheville. Il fait la même chose sur mon autre pied et m'aide à descendre en me soutenant par la taille. Je reste accroché à lui quelques secondes, prise de vertige, puis fais un pas en avant. La sensation dans ses chaussures est particulière, mais je n'ai plus froid. C'est en reportant mon attention sur les hommes que je constate que j'ai les mêmes chaussures qu'eux. Merikh fait ensuite passer mes bras dans une épaisse veste puis dépose une cape qu'il noue autour de mon cou. Je suis bien emmitouflée, mes mouvements sont plus restreints tout à coup.
— Tu ne viens pas d'ici, n'est-ce pas ?
— Qu'est-ce qui te fais dire ça ?
Il vérifie que je sois bien au chaud en faisant le tour de ma nouvelle tenue.
— Ces vêtements... C'est la première fois que je les vois.
— Mais tu n'as pas vu grand-chose encore.
Je rougis malgré moi, piqué au vif. Il me tend une gourde, l'eau me fait autant de mal que de bien dans ma gorge sèche et irritée. Derrière son imposante musculature, je vois mon ami, de la neige vient de tomber de la branche pour s'écraser sur ses cheveux bruns. Ses yeux sont fermés, il doit aussi avoir besoin de reprendre un peu de force. Je découvre les nouvelles sensations de ces chaussures en diminuant l'écart entre nous et m'agenouille près de lui en secouant ses cheveux pour qu'il ne prenne pas froid.
— Lève la tête, je vais te donner à boire.
Il ne rechigne pas et ouvre la bouche, ses lèvres sont craquelées. Je fais couler le liquide dans sa bouche, il avale à grosse gorgée et déglutit bruyamment, puis me regarde enfin dans les yeux. Il ouvre une fois la bouche avant de la refermer, un son rêche en sort avant qu'il ne recommence.
— Il faut t'enfuir, dès que tu le peux. Cours sans te retourner.
C'est à mon tour d'ouvrir la bouche avant de la refermer. Nous n'avons pas la même vision de la situation. Je ne comprends peut-être rien à ce qu'il se passe, mais je sais que je ne risque rien, pas pour le moment.
— Je ne compte pas m'enfuir. Ni partir, en fait.
— Tu t'es pris un coup sur la tête en tombant ? Ne vois-tu pas qu'ils viennent de te kidnapper et qu'en plus tu les aides sans rechigner ?
— Ce n'est pas un enlèvement.
Mon ton est plus acerbe que voulu.
— Si ça n'en a pas un, est-ce qu'il t'a demandé ton avis avant de te pousser dans le vide ?
Il marque un point, mais je ne peux pas le lui laisser savoir.
— Il est venu me sauver.
— Tu n'étais pas en danger, maintenant il te mène au véritable danger. Tu ne risquais rien dans le château, la reine aurait continué de te protéger.
Sa remarque m'irrite mais il est déjà dans une mauvaise posture. Je peux le comprendre, dès la première rencontre, lui et Merikh ne se sont pas entendus. En plus, dès qu'il a atterri, il s'est fait ligoter. Nous n'avons pas eu les mêmes traitements de faveurs.
— Arweny, viens s'il te plaît.Il arrive dans mon dos avant de me surplomber, il m'aide à me relever et me passe derrière lui.
— Tu es notre invité, mais lui, ce n'est pas la même histoire. Pour l'instant, il doit être surveillé.
Intrus, sort de ses lèvres sans pour autant se matérialiser. Même si je veux contester, je ne peux que me plier à sa demande, je suis en terrain inconnu, avec quatre hommes bien entrainés dans une situation que je ne saisis pas. Merikh est l'homme qui dirige les événements, Godric est l'homme qui a échangé sa position avec lui. Tout m'est inconnu, différent, alors je ne veux pas faire de vague.
J'adresse un sourire désolé à mon ami en suivant Merikh qui me pousse vers le cercle des quatre hommes. Nous nous installons entre eux, directement, leurs dos se redressent en flèche.
— Nous sommes dans cette zone-ci.
L'un d'entre eux tourne une carte vers Merikh. Elle me dit quelque chose, je suis sûre de l'avoir déjà vue quelque part sauf que celle-ci est beaucoup plus grande que celle que j'ai vue à la volée dans les livres. Elle paraît complète. Il n'y a pas que le château d'Azearia dessus. Il y a tellement d'éléments dans cette carte que je me demande quelle quantité a été supprimée dans les livres que j'ai vus.
— Combien de temps avant d'arriver au lac d'Onyx, Vick ?
— Ça nous prendra moins d'une demi journée, environ cinq ou six heures je pense, répond le dit Vick.
— Bien, nous sommes assez loin, nous avons choisi le bon moment. La neige à Azearia les empêchera de sortir avant quelques heures. Ils ne pouvaient pas s'attendre à cette fuite, ils n'étaient pas sur leur garde, rien n'est prêt de leur côté.
Je découvre un nouvel aspect de sa personne, il est stratège. Cette évasion était donc prévue depuis un bon moment. Je n'ai aucune intervention à faire alors je me contente de suivre leur échange, je ne me suis pas interdite de les écouter et ils en parlent à moins d'un mètre de moi c'est donc que je ne suis pas une menace, je ne suis même pas mise de côté, Merikh s'assure de garder le contact avec moi au fil de la conversation. J'apprends aussi que les trois autres hommes se prénomment Blaze, Alric et Rheet.
Je ne les écoute presque plus et observe la carte, les contours qui semblent avoir été tracé finement me dévoile tellement de nouveauté que je me demande s'ils en ont une autre pour satisfaire la curiosité qui grandit en moi. Mais d'un coup l'un d'entre eux l'enroule sur elle-même et la range loin de mes yeux.
— Bien, on repart, dans trente minutes, pas plus tard.
— Oui, chef !
Chef ?
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D'étoiles et d'épines [ TERMINÉ ]
FantasyArweny est une jeune femme dotée d'un don de clairvoyance depuis l'enfance. Ses parents étant pris entre deux feux la vende à la reine du royaume qui est obsédée par l'immortalité et la richesse, elle est donc parfaite pour les épargner en tant que...