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 Dès mon réveil, Merikh avait déjà disparu. Il m'a à nouveau couverte de ses vêtements. Je l'ai aperçu plus loin avec des hommes penchés sur une carte. De toute façon, il m'a confié à un des gardes qui est venu la nuit de mon évasion. Je vais commencer à croire qu'il n'a pas confiance en moi pour faire me surveiller par Rheet. Mais d'un autre côté, j'ai tellement plus de liberté que Godric que je sais que ce n'est pas ça. J'ai réussi à soudoyer ledit garde en lui proposant de lui parler un peu plus de son chef quand nous étions au château pour qu'il me permette de voir mon ami. Et il a accepté bien rapidement pour un homme censé être de nature droite et militarisé. Peut-être que la différence est sous mon nez, ces gens sont plus humains que ceux que j'ai côtoyés toute ma vie. En tout cas, plus je passe de temps avec eux, plus je me rends compte qu'ils ne collent pas du tout avec l'image qui leur était attribuée dans les livres. J'ai compris que c'étaient eux, les sudistes. Plus grand, plus fort que les azérians.

Je fais abstraction des regards curieux que j'intercepte en avançant vers mon ami que je retrouve avec un torchon. Dans sa main. En train d'astiquer du matériel de guerre. Il s'est débarrassé de sa veste rouge foncé où était inscrit son grade, il ne me voit pas arriver tant il est concentré dans sa tâche sous le regard aiguisé de son garde personnel. Mais lui à la fonction de le surveiller car il est une menace, pas parce qu'il est menacé.

— Tu t'es converti au ménage ? Un coup de main ?

— Par de mon propre chef.

Il jette furtivement un œil accusateur sur son garde. Pour lui non plus, les journées ne doivent pas être simples. Je m'assois en face de lui et imite son mouvement. Il me dit de ne pas faire ce genre de tâche salissante mais je ne vais pas me contenter de le regarder alors que je ne fais rien de mes journées.

Maintenant que je n'ai plus une seule trace violacée sur mes pieds et mes mains causé par le froid, je me sens en pleine forme. L'ennui me renverrait à mon état précédent.

— Tu sais, ce n'est pas si mal que ça. Je veux dire que ça pourrait être pire.

Est-ce un début d'adaptation non hostile que je vois ?

— Je ne comprends toujours pas pourquoi tu as sauté.

Il n'y a pas fait une seule fois référence aux fois où nous avons réussi à nous voir. Cette question trotte dans ma tête. Il arrête tout mouvement, le bouclier reste sur ses genoux, partiellement nettoyé, partiellement couvert de boue.

— Je ne pouvais pas laisser ma seule amie aux mains de l'ennemi. Qui sait ce qui aurait pu t'arriver.

Mon cœur s'attendrit en entendant ses mots. Il ne m'avait encore jamais appelé son amie.

— Oh, Godric... Tu sais que Merikh ne me fera jamais rien. Et maintenant c'est toi qui est prisonnier.

— Ce n'est rien, tant que je sais que tu vas bien, tout me satisfait.

Il reprend son nettoyage, alors que moi, je me stoppe. Comment j'ai pu imaginer tant de fois qu'il était sans cœur et avait pitié de moi ?

— Tu savais, que c'était lui le traître. Depuis longtemps.

Mon silence lui répond, il y réagit par un sourire furtif, ni joyeux, ni surpris. Il constate juste ce qu'il savait déjà.

— C'est pour ça que tu nous as trouvé en haut des remparts. Toi aussi tu le savais. Mais tu n'as rien dit.

— Toi non plus, tu n'as rien dit. Pourtant tu as eu un tas d'occasions, avec la reine, avec le chef Dixon. Avec moi. Un seul regard, un seul mot, et je l'aurais compris. Je t'ai toujours compris, Arweny. Alors pourquoi lui ? J'aurais pu être à sa place.

D'étoiles et d'épines [ TERMINÉ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant