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 Je vomis une nouvelle boulette d'aleam, c'est déjà la sixième qui sort de mon estomac depuis ce matin. Sept avec celle-ci quand Marcus tapote mon dos.

Apparemment, ça serait le contrecoup du remède qui a réveillé mon pouvoir. Les étoiles dans mes yeux. Je m'essuie le coin de la bouche en regardant les boulettes s'accumuler dans le seau.

— Tu réagis mieux que ce que j'espérais. Je ne pensais pas que toutes les toxines que tu as gardées en toi ressortiraient si rapidement. C'est bon signe.

Plus il y aura de boulettes de poison dans le seau, plus mon pouvoir prendra de la place en moi. Quand je buvais cette soupe, je n'imaginais pas un seul instant que ce qu'il y avait à l'intérieur s'accrochait à mes entrailles, me collait à la peau, c'est pour ça qu'on ne m'en donnait qu'une fois par semaine. Pour que je puisse répondre aux demandes de la reine sans pouvoir faire autre chose que ça, et uniquement pour elle.

Je pourrais vomir du dégoût si je n'étais pas déjà occupée à le faire maintenant. Une autre boulette de la taille d'un cercle formé entre le pouce et l'index tombe dans le seau et rejoint les autres. Ma gorge me fait mal à cause de leur passage.

— Partons du principe que tu en as avalé pendant un peu plus de dix ans...

Il secoue son crayon en tapotant contre un papier.

— Et qu'ils mettaient une dose de la taille d'une phalange de petit doigt de femme. En supposant que seule la moitié reste en toi à chaque soupe... et qu'une boulette fait deux phalanges.

Une neuvième boule remonte dans ma bouche.

— Tu devrais en avoir fini dans encore... cent vingt-huit boulettes sur cent trente-sept !

Ah, pitié. Comment est-ce possible ?

Je me sens plus légère. C'est comme si je découvrais mon corps pour la première fois, c'est lui sans être lui. Il me paraît différent, maintenant qu'il est débarrassé de tout poison. Vomir ces boulettes m'aura pris toute la matinée plus la moitié de l'après-midi en plus de la curiosité de Marcus. Je me demande comment est-ce que j'ai pu ne pas mourir avec la quantité folle qui se trouvait en moi, tapissée dans chaque recoin. Même à faible dose, le poison aurait dû me tuer, mais il m'a seulement affaibli pendant des années entières. Marcus ne sait pas comment c'est possible. Un miracle m'a-t-il dit.

— Marcus m'a dit que tu avais vomi. Beaucoup.

Il arrive toujours dans mon dos à ce que je vois.

— Désolé de ne pas avoir été avec toi.

— Tu as des choses à faire aussi, ce n'est rien. Marcus et Godric étaient avec moi. Surtout pour se débarrasser des sceaux mais ils ne m'ont pas quitté un instant.

Sa mâchoire bouge, il est ennuyé par cette information. Il ne le porte toujours pas dans son cœur.

— Je vois qu'il y en a qui profite pleinement de la permission que je lui ai accordée.

— Je sais que je suis mal placé pour en parler mais... il essaye de vraiment s'adapter, j'ai vraiment le sentiment qu'il fait de son mieux. Ne sois pas trop dur avec lui.

Il soupire, une main posée sur sa hanche. Je crois qu'il y réfléchit, à cette demande. Sincèrement.

— Tu sais que je ne peux pas faire mieux, même pour toi. Et elle sait que je ferais tout pour toi.

Il lève les yeux au ciel en parlant d'elle. S'agit-il de Drorena ?

Je tais les pensées qui s'immiscent dans mon esprit à l'entente de ses mots, tout comme ce baiser nocturne qui ne me quitte pas. Pas un instant je n'oublie la douceur de ses lèvres, la lueur de son regard constellé d'astres par le mien. Ou encore la caresse de sa main sur ma joue quand nous sommes rentrés nous coucher, la chaleur de son souffle.

D'étoiles et d'épines [ TERMINÉ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant