46

10 4 0
                                    

Il fait nuit noir entre ces murs, pas une torche n'éclaire les allées, j'avance pourtant sur de moi. Parce qu'il le faut, parce que je le veux. Pour moi, pour Merikh. Si personne ne me laisse sortir pour faire ce qu'il me plaît, je ferais tout ce qu'il me plaît à l'intérieur de cette enceinte, quitte a créer des problèmes. Je fais confiance à mon don, il me guide entre les couloirs jusqu'à ce que j'entende des voix étouffées.

Je n'entends pas ce qu'ils disent, mais au moins je reconnais la lourde voix directive de Merikh. J'ai bien fait de ne pas me coller à la porte car quelques minutes après, elle s'ouvre, laissant sortir une ribambelle de chevaliers à la mine fatiguée. Les brides de mots que j'intercepte à travers les couloirs, tout comme l'agitement que j'observe à travers ma fenêtre, m'indiquent la même chose. La guerre se prépare, elle arrive, et sera brutale dans les deux camps.

La porte est entrouverte et il se tient là, dos à moi, il est tellement silencieux tout à coup que je... Je prends une bonne inspiration avant de me faufiler dans la pièce, refermant lentement la porte. J'ai fait du bruit, pourtant il ne semble pas le moins du monde dérangé par mon intrusion. Il ne prend même pas la peine de se retourner pour savoir qui se tient derrière lui.

—Merikh. On doit parler.

Autant aller droit au but, nous n'avancerons à rien si nous continuons dans cette direction, et nous ne prenons pas la même.

— En quoi puis je vous aidez, princesse ?

— Ne m'appelle pas comme ça. Mes parents ne sont pas cachés pour nous espionner.

Ça pourrait être leur style de comportement.

— Je ne peux vous appeler autrement, vous êtes ma princesse, la fille de mes souverains.

Je soupire, peiné de le voir agir de cette façon. Qu'est-ce qu'ils ont bien pu lui dire ou faire pour qu'il soit si refermé, si indifférent avec moi ? Il est comme avant, il l'est redevenu.

— Je ne veux pas jouer à ça avec toi. On vaut mieux que ça, bien plus que ce retour à... rien.

Je franchis le ridicule mètre qui nous sépare, lui est toujours de dos et ne semble clairement pas ouverte à la conversation, mais on ne peut pas rester comme ça, je ne peux pas faire comme si nous n'avions rien partagé alors que la guerre arrive et que tout nous séparera à nouveau pour un temps indéterminé. Je pose ma main sur son épaule, bien déterminé à ce qu'il me regarde, pourtant, ce n'est pas ce qui arrive. L'électricité court dans mes doigts, dans ma main, remontant dans mon épaule avant de se propager dans tout mon corps, sans s'arrêter. Elle me brûle alors que des centaines d'images défilent à une vitesse folle devant mes yeux, elles se succèdent dans le temps, dans l'espace et la même personne est concernée, sans quitter un instant ces visions. L'effroi m'animent, je sens mon corps remuer dans tout les sens, mes joues sont humides pendant que ces images poursuivent leur chemin en se gravant dans mon esprit. Jusqu'à la dernière, noire. La nébuleuse est morte.

— Winnie ! Bon dieu mais respire !

Sa voix me sort de ma transe, l'air regagne douloureusement mes poumons, c'est là que je me rends compte que mon corps tremble comme une feuille et que j'étais en apnée depuis le début, les larmes coulent toujours sur mon visage quand je retrouve ma vue, dénuée d'étoiles, que son visage apparaît devant moi. Merikh est devant moi, plus inquiet que jamais, ses mains tiennent mon visage en coupe.

— Tout va bien ? Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce que tu as vu ?

— Ne va pas faire cette guerre. Pitié, n'y va pas. Je t'en supplie.

Malgré mes pleurs, mes mots sont parfaitement compréhensible quand je m'accroche à sa cape.

— Je dois y aller.

D'étoiles et d'épines [ TERMINÉ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant