Chapitre 19 - Je n'ai plus envie de résister (2)

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Sans grande surprise, Sun s'éloigne peu à peu de mon frère pour se rapprocher de moi de l'autre côté de la boutique. Pendant quelques secondes je reste silencieuse, hésitant à faire part de ma frustration. Mais alors que sa main effleure la mienne — par inadvertance ? — je me braque.

— Est-ce que tu te la joues stalker, Sun ? murmuré-je après avoir jeté un coup d'œil pour m'assurer que Haru est assez loin pour ne pas nous entendre.

— Il faut qu'on parle, Neela.

— Tu exagères, ça pouvait attendre que je rentre à l'appartement.

— Avoue-le, tu aurais trouvé un autre moyen de t'enfuir à ce moment-là.

Pour la forme, je soupire en levant les yeux au ciel. Mais au fond, je sais qu'il n'a pas tort. Je suis d'ailleurs plutôt surprise qu'il arrive à lire en moi si facilement et que lui n'ait pas choisi de fuir aussi. Pour une fois.

Je détourne le regard, évitant de croiser ses yeux perçants. Les souvenirs douloureux de nos accrochages passés refont surface, me rappelant combien il m'a blessé en me repoussant à plusieurs reprises. Je ne veux vraiment pas avoir cette discussion. La peur de me faire briser le cœur à nouveau m'envahit.

— Je ne suis pas sûre que c'est le bon moment pour ça.

Du regard, je désigne mon frère qui ne se trouve qu'à quelques pas de là. Immédiatement, Sun se fait plus tendu, comme tiraillé entre la présence de Haru et l'envie de me faire parler. Cela me prouve une fois de plus qu'il est déterminé à garder notre relation secrète et je crains que cela ne finisse par me blesser encore plus.

— Nous ne pouvons pas continuer à esquiver cette discussion, insiste-t-il.

Je continue à éviter son regard, cherchant une échappatoire. Mon cœur est partagé entre le désir d'explorer cette connexion entre nous et la peur de souffrir encore une fois.

— Je sais que j'ai fait des erreurs par le passé. J'ai préféré fuir à plusieurs reprises plutôt que de faire face à la situation.

— La « situation », ironisé-je amère. Et je peux savoir dans quelle situation on se trouve exactement ?

— C'est peut-être par là que l'on devrait commencer cette conversation. On ne peut plus nier qu'il y a quelque chose entre nous.

— Tu as toujours été le seul à le nier, rappelé-je de plus en plus tendue.

Il soupire doucement en fermant une seconde ses paupières et ses épaules s'affaissent légèrement.

— Tu as raison et je ne veux pas répéter mes erreurs.

— Elios Serrano qui veut se la jouer mature et ouvert à la discussion, on aura tout vu, lancé-je avec un sourire moqueur.

Lorsque je prononce son vrai prénom, ses poings se referment nerveusement sur le rebord de la vitrine en verre. Je cherchais à le provoquer, mais étonnamment, c'est le seul signe de son trouble qu'il laisse transparaître. Et plutôt que de me reprendre, il se contente d'inspirer profondément comme pour se forcer à garder son calme.

— J'essaie de bien faire les choses, corazón. Ne rends pas cela plus difficile que ça ne l'est déjà.

Je fais l'erreur de relever la tête vers lui alors qu'il me donne ce surnom si particulier. Mes yeux rencontrent enfin les siens, cherchant la sincérité dans son regard. Je peux voir sa vulnérabilité, sa propre peur d'être rejeté une fois de plus. Mon cœur est partagé entre la prudence et l'espoir.

— Je veux juste que l'on parle, qu'on soit sur la même longueur d'onde, plaide-t-il.

Et je n'arrive plus à ignorer son expression presque suppliante.

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