Un amour dans l'ombre, Tome 1

Chapitre 35

Matéo

Je n'arrête pas de penser à Joy, à l'effet qu'elle me fait, et à tout ce qu'elle me fait ressentir. Mais là, je sens que ça devient différent. Ça m'a beaucoup trop atteint. Je pensais pouvoir gérer la situation, mais j'avais tort.

Je me noie.

Je parvenais à garder le contrôle avant cette soirée qui a tout fait basculer. J'ai sombré dans une peur bleue de la perdre, dans une peur bleue des sentiments que je ressens à son égard. Tout cela n'aurait jamais dû arriver. Du moins, pas comme ça, pas dans ces circonstances.

Nous sommes en couple, bordel.

Mais cette soirée a définitivement fait pencher la bascule de manière irréversible. Je le sais. Mon coeur le sait. Je ne parviens plus à me voiler la face. Ces dernières semaines ont été dures.

J'ai lutté si fort, contre cette angoisse oppressante qui n'a cessé de prendre mon cœur en otage.

Contre les sentiments qui me frappent l'estomac jusqu'à m'achever.

Jusqu'à me rendre fou.

Contre les regards de pitié de mon entourage.

Contre tout ce qui me ramène à elle.

Tous ont remarqué mon état, mais aucun n'a osé entamer une véritable discussion avec moi. En même temps, il faut dire que mon attitude doit les convaincre de me laisser tranquille.

Je me sens étouffer dans cette maison, j'ai besoin de prendre l'air.

— Où est-ce que tu vas ? me demande mon père en me voyant débarquer avec mon équipement de moto.

— Faire un tour.

— Sois prudent.

— Oui.

Je referme la porte d'entrée et me dirige dans le garage. Je mets mon casque et démarre en direction de mon coin préféré, dans les hauteurs de la ville. Sur la route, mes pensées me torturent toujours.

Joy.

J'essaie de me vider la tête en me concentrant sur la route sombre. Il fait nuit, il vaut mieux que je reste concentré. Au bout d'un certain temps, je remarque une lueur dans mon rétroviseur. J'y prête attention et comprend qu'une autre moto est non loin derrière moi. Je pense automatiquement à mon frère. Il me connaît par cœur. Il sait ce qui me tourmente depuis des semaines et il est le seul à connaître mon endroit préféré.

Arrivé, je me stationne sur le bord de la route et descend de ma moto. J'enlève mon casque et admire cette vue en hauteur sur la grande ville éclairée. La moto de mon frère vient se garer à côté de la mienne et ce dernier vient s'asseoir à mes côtés. Nous restons silencieux quelques instants, puis c'est lui qui aborde le sujet en premier :

— Qu'est-ce que tu comptes faire ?

Son ton est beaucoup plus calme que d'habitude. En temps normal, Julien est assez réticent face à mes sentiments envers Joy, et cette situation que cela crée. Je comprends qu'il est prêt à m'écouter, à me comprendre, et à être beaucoup plus compatissant que d'habitude, et cela à le mérite de faire disparaître ma rancoeur à son égard en un claquement de doigts :

— Je ne sais vraiment pas, je me sens comme une merde.

— Ne dit pas ça.

Je ne sais plus quoi répondre.

— Je vois bien à quel point ça te rend de plus en plus mal, Matéo. Au début je pensais que ce n'était qu'une passade inappropriée, mais je comprends maintenant que c'est bien plus fort que ça. Et ça me fait chier pour toi. Ça me fait chier de te voir mal.