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Malo

Voilà qui n'était pas prévu, mais après tout, pourquoi pas ? Je ne peux m'empêcher d'esquisser un sourire en voyant que Mia m'a emboîté le pas tout en tentant en vain d'être discrète. Je ne presse pas particulièrement le pas, désireux de ne pas la semer, après tout elle doit être néophyte en matière de filature. Lorsqu'un passage piéton muni de feux me force à l'arrêt j'en profite pour fouiller dans l'une des poches de ma veste pour sortir mon paquet de clopes et en allumer une avant de reprendre ma progression. Ne me retournant pas je laisse mes sens me guider afin m'assurer que Mia me suit toujours. Ma destination me guide vers des rues de plus en plus calmes, un peu plus étroites et tortueuses aussi, tout ça pour aboutir à l'un des arrondissement les plus mal famé de la ville. J'avais secrètement espéré que ça découragerait ma poursuivante, pourtant elle n'en fait rien et ne me lâche pas d'un pas comme si elle ignorait le danger que ce quartier représente pour une femme seule.

Lorsque j'arrive à mon objectif le hall de l'immeuble est quasiment désert à part deux gars en train de discuter avec animation et bloquant l'accès aux caves. En me voyant ils se décalent immédiatement pour me laisser passer mais je m'immobilise sur le seuil du petit escalier en béton. Au bruit de ses baskets couinant contre le carrelage du hall je sais que Mia m'a suivi et est resté dans l'entrée de ce dernier. Elle a du examiner l'endroit pendant quelques secondes avant qu'un des hommes ne s'approche d'elle pour lui demander :

— Tu t'es perdue ma belle ?

J'hésite quelques secondes sur le fait ou non d'intervenir, j'avoue être curieux de voir comment elle se sortirait de cette délicate situation mais je fini par soupirer et lâcher :

— Elle est avec moi, laisser là passer si elle le souhaite.

Je n'attends pas de savoir si je suis obéi ou même si Mia va me suivre et me contente de descendre les escaliers. Tant mieux pour sa sécurité si elle vient, tant pis pour elle autrement. En plongeant dans la pénombre du couloir qui mène aux caves je me force à la chasser de mes pensées pour me concentrer sur l'épreuve qui m'attends ce soir.

Lorsqu'enfin je gagne le club ma détermination est sans faille et j'ai plus qu'une seule hâte : pouvoir me défouler. Le lieu est déjà emplit d'une foule assez compacte et particulièrement bruyante. Le club qui en réalité est un regroupement de plusieurs caves dont les cloisons ont été abattues dispose en son centre d'un large espace rectangulaire séparé par un lourd grillage surmonté de barbelés, si à l'heure actuelle la cage est vide, elle ne devrait pas tarder à se remplir et je ne peux m'empêcher de frissonner d'impatience et d'expectative en passant devant. Mes pas me guide jusqu'au bar improvisé qui se résumé un comptoir et plusieurs frigos. Je salue Kate qui est derrière et lui demande un verre de whisky qu'elle s'empresse de me servir en me souriant et tout en me demandant :

— Prêt pour ce soir ?

— Je suis toujours prêt voyons.

— Alors ne me fait pas regretter d'avoir misé sur toi.

Je regarde la blondinette qui doit à peine dépasser le mètre soixante et lui sourit tout en lâchant un clin d'œil. Sans rien ajouter je profite de mon verre et tue un peu le temps en observant le public présent, beaucoup d'habitués, mon rival de la soirée qui m'adresse un regard moqueur tandis que Mia semble nulle part ce qui n'est pas plus mal au final. Je laisse mes pensées divaguer un peu jusqu'à l'heure fatidique.

Peu à peu le silence se fait dans le club, le bruit de la porte métallique de la cage qui s'ouvre dans un grincement raisonne et je sais alors que c'est mon moment de briller, encore une fois. Je retire ma longue veste en cuir noire et la plie soigneusement avant de la tendre à Kate qui la range derrière le bar. Je me dirige ensuite vers la cage d'un pas décontracté. Un homme est installé au centre, je le salue d'un signe de tête et me positionne dans l'un des angle tandis que mon rival arrive quelques secondes plus tard. Je n'écoute pas l'arbitre nous présenter et me contente de scruter Nikolaï qui me fait face. Bien que le combat n'ait pas encore commencé il s'est mis en garde, étant donné qu'il est un peu plus grand que moi il doit dépasser de peu les deux mètres, si sa taille pouvait être un avantage certain, son embonpoint réduit ce dernier à néant. Je sais pour l'avoir déjà vu combattre que le slave peut donner des coups puissants mais qu'il est lent. C'est là-dessus que je dois jouer et ça tombe bien, c'est à ça que je suis fort.

Le silence se brise quand notre arbitre qui a pris soin de se reculer annonce le début du combat. Aussitôt de nombreux encouragements, que ça soit pour moi comme pour mon adversaire raisonne, les spectateurs étant désireux de rentabiliser leurs paris et peut-être même remporter le pactole. Je m'avance jusqu'au centre de l'arène et laisse Nikolaï combler la distance qui nous sépare. On se jauge avec toujours un éclat moqueur dans son regard, qu'il me sous-estime m'arrange plutôt pas mal et c'est ainsi que je lui assène le premier coup au niveau de la mâchoire sans qu'il n'ait le temps de le voir venir. Le reste du combat s'enchaîne rapidement, j'esquive quelques coups qui me semblent incroyablement lent et maladroit tout en frappant dès que j'en ai l'opportunité. Même si j'ai donné le premier coup, c'est à présent mon adversaire qui maîtrise le rythme du combat. Je ne se cherche pas à contrer ça, après tout j'ai le temps, il s'épuisera bien avant moi. Malgré tout Nikolaï recule peu à peu jusqu'à ce qu'il se retrouve acculer contre la grille. Les cris de la foule redoublent en intensité tandis que je continue de prendre mon temps pour distribuer des coups donnés de manières méthodique et avec force. Alors que j'allais esquiver un nouveau coup le slave n'en fait rien et fouille en une fraction de secondes dans la poche de son survêtement. Je ne comprends que lorsqu'il effleure mon avant-bras que ce petit con a sorti une lame. Je perds quelques secondes à observer mon bras pisser le sang avant de me reprendre tandis que de nouveaux cris parcourent la foule.

Dès le départ le combat était inégal et le fait qu'il triche avec une arme blanche démontre que mon adversaire le savait, cependant cette lame rabats les cartes et me pousse à davantage de prudence. S'il y a quelques secondes j'acceptais sans peine que le combat traîne en longueur pour offrir un peu de spectacle il n'en est à présent que je risque ma vie plus question. Tout en faisant abstraction de mon sang qui coule ainsi que de la douleur je me force à reprendre le combat avec application. Les coups se mettent alors à pleuvoir sur mon adversaire qui fini cependant par déceler une faille dans ma garde et parvient à planter sa lame dans mon pectoral droit. Furieux de cette erreur de ma part mes coups redoublent de violence et Nikolaï ne tarde pas à tomber au sol. Alors que je m'approche pour donner un nouveau coup avec mon pied au niveau des côtes l'arbitre intervient pour mettre un terme à ce qui va purement et simplement se transformer en massacre.

La colère qui m'a gagné ne reflue pas et c'est dans un geste rageur que j'ouvre la porte de la cage pour quitter cette dernière. J'ignore le sang qui imprègne mon t-shirt qui colle à ma peau et sort du club pour rejoindre l'une des caves que j'ai pris le soin d'aménager en salle de repos. Le lieu est particulièrement spartiate mais j'y serais au calme le temps de justement retrouver ce dernier. Alors que j'allais retirer mon haut pour examiner ma plaie plus en détail, je vois la poignée de la porte s'abaisser et s'ouvrir lentement sur Mia. Comme si c'était le moment. Elle est blême comme si le spectacle que je venais d'assurer l'avait choquée. Et alors que je m'apprête à lui dire de dégager de là, elle devance en me demandant :

— Est-ce que ça va aller ?

Sa question me semble tellement stupide que je me retiens de rire, ce n'est que face à son regard insistant et visiblement inquiet que je me force à lui répondre :

— Évidemment, mais toi, qu'est-ce que tu fous là ?

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