Chapitre 14.2 - Mary

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Une seconde plus tard, je me glisse de justesse dans le train, et sens les portes se refermer à quelques centimètres de mon corps. Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir que Cayden n'a pas su être aussi rapide que moi. Je le fais cependant et le découvre de l'autre côté de la porte, frappant celle-ci pour essayer de l'ouvrir, en vain. Il me fait alors des signes que je n'interprète qu'à moitié. Je n'ai pas le temps de lui crier que je vais descendre au prochain arrêt que déjà, l'engin démarre.

Je sors immédiatement mon portable, mais constate que celui-ci ne capte pas. J'avais oublié que les métros de Londres sont connus pour être creusés si profondément que le réseau ne passe presque jamais. Je tente malgré tout d'envoyer un message à Cayden, juste au cas où mon téléphone aurait du réseau le temps d'une seconde. Bien vite cependant, j'arrive à la station suivante et descends alors à quai. Je vérifie mon téléphone mais celui-ci n'affiche toujours aucune connexion. Je relève la tête et attends le prochain train, annoncé dans moins de deux minutes. Ce n'était finalement pas la peine de se précipiter, deux minutes de plus ou de moins n'auraient rien changé.

Au bout du temps annoncé, j'aperçois les phares du métro dans le tunnel. Une seconde plus tard, il se stationne et les portes s'ouvrent dans une synchronie électrique.

— Mary ! crie une voix non loin.

Je tourne la tête vers Cayden et sans hésiter, je le rejoins et monte dans la même rame que lui. Quelques secondes plus tard, le train quitte de nouveau le quai pour rejoindre le prochain arrêt. Durant les dix minutes de trajet, mes oreilles sifflent à plusieurs reprises tant le bruit de frottement sur les rails est strident. Je grimace et Cayden fait de même. Autour de nous, de nombreuses personnes ne prêtent pas la moindre attention au vacarme, et je peux deviner qu'ils vivent ici depuis assez longtemps pour s'y être habitués.

Arrivant finalement à Camden Town, nous sommes immédiatement accueillis par l'ambiance si particulière du coin. Camden High Street est la rue la plus célèbre du quartier avec ces bâtiments de toutes les couleurs et les devantures de magasins toutes plus originales les unes que les autres. D'énormes chaussures aux styles différents décorent certaines d'entre elles. Aussi, des graffitis décorent les murs, c'est un art sans pareil. Je sors mon portable et prends une dizaine de clichés de l'endroit. Cayden m'observe avec un sourire.

— Tu n'es jamais venue ?

Je hausse les épaules.

— Si, mais je ne m'en souviens pas vraiment.

Il ne pose pas de question pour savoir pourquoi je ne me remémore pas du temps que j'ai passé ici, et cela m'arrange, je n'ai aucune envie d'en parler. Je suis moi-même souvent perdue quand il s'agit d'en faire mention, mes parents m'en ont dit le moins possible par peur que j'en souffre trop, c'est plus simple de rester dans l'ignorance même si cela n'est qu'une solution temporaire. Un jour, je pourrais retrouver ma mémoire, découvrir tout ce que j'ai préféré enfouir durant ces dernières années. J'aurais pu faire le choix de le découvrir peu à peu, mais les risques que je ne retrouve jamais les souvenirs de mon passé sont si hauts que je préfère espérer que cela n'arrive jamais.

Nous continuons à nous promener dans la rue lorsque j'aperçois le fameux passage piéton aux couleurs de l'arc-en-ciel pour représenter la communauté LGBTQIA+. Je souris, repensant aux plusieurs soirées étudiantes lors desquelles j'ai embrassé des femmes, couché avec, me découvrant à travers ces relations. Je n'ai pas honte d'être qui je suis, d'aimer sans faire de distinction particulière entre les différents genres et sexes. Je n'ai jamais été sûre du mot à employer pour me définir entre la bisexualité et la pansexualité, mais au fond, je m'en fiche pas mal. Je suis qui je suis et j'en suis fière, peu importe la case dans laquelle je suis supposée entrer. Ne pas me donner d'étiquette est plus simple, ça m'évite cette impression d'avoir des règles officieuses à respecter. J'ai peur de ne pas rentrer dans le moule du cliché, j'ai peur que certains me disent que je ne ressemble pas à une personne qui aime sans différence parce que je n'ai ni cheveux teintés ni piercing ni tatouage, à l'exception d'un seul, sur mon poignet. C'est tellement plus simple d'être seulement moi bien que je respecte tout autant ceux qui préfèrent mettre un mot sur ce qu'ils sont. Chacun fait son chemin de la manière qu'il souhaite, tant qu'à la fin, il est heureux.

Je décide de prendre une photo du passage piéton, Cayden me regarde faire.

— Tu veux que je te prenne en photo dessus ?

The Tulips Between Us [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant