Chapitre 25.1 - Cayden

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Elle va m'embrasser.

Mary va m'embrasser.

Mon cœur bat la chamade, mon rythme cardiaque accélère dangereusement. Ses lèvres touchent presque les miennes. Elle l'a déjà fait, mais cette fois est plus douce, moins surprenante, me laissant tout le temps du monde pour stresser.

— Vous allez mieux ? demande une voix dans mon oreille.

Trop tard. Le moment de magie disparaît. Je me retiens de soupirer et d'insulter de tous les noms l'employé venu nous déranger. Il aurait pu faire ça quelques secondes plus tard, mais il a tout gâché. J'ose espérer que Mary n'aura pas de regret et que nous nous embrasserons quand même à un moment ou à un autre.

Je rêve de ses lèvres. Je rêve de son corps. Je rêve de son âme. Je rêve de son cœur. Je rêve d'elle. Complètement et infiniment. Tellement fort que c'en est maladif, peut-être même psychopathe sur les bords. Mais je m'en fiche. Mon âme crie son prénom à l'unisson de mon cœur. Je l'aime.

— Oui, merci.

— Il serait peut-être prudent de mettre fin à l'activité patinoire pour ce soir, la conseille-t-il.

Dans sa voix, je perçois un sourire qui m'importe peu. Je reste focalisé sur Mary, sur chacun des traits de son visage que je peux observer pour la première fois depuis notre rencontre. Jusqu'ici, soit je ne la voyais pas d'assez près, soit pas assez longtemps, soit j'avais peur de passer pour un fou qui la regarde plus qu'il ne l'écoute. C'est difficile de résister, mais c'est souvent pour le mieux. Cette fois, je m'octroie ce droit. Elle allait m'embrasser, je peux bien détailler son visage autant que je le souhaite.

— Il a raison, dit-elle en se tournant vers moi. Tu veux aller manger ? Cet épisode m'a donné faim.

Je hoche la tête, encore légèrement troublé de notre presque-baiser. Elle se baisse alors pour délasser ses patins, mais je me précipite pour le faire. En quelques mouvements rapides, ses pieds sont libérés et je profite qu'elle s'étire pour retirer les miens. Je récupère sa paire avant de rapporter nos patins et les échanger contre nos chaussures.

Une fois nos pieds de nouveau enfermés, nous quittons le coin du National History Museum.

— Une idée pour manger ? la questionné-je.

Je suis encore dans le mal. Ça doit faire une bonne dizaine de minutes que notre baiser a été écourté, mais je n'arrive encore qu'à penser qu'à ça. Il faut vraiment que je reprenne mes esprits.

Elle réfléchit quelques secondes avant de lever un doigt dont l'ongle est peint en rouge bordeaux.

— J'ai mangé chinois hier, donc pas ça.

— C'est pas une réponse, me marré-je pour l'embêter.

Elle lève les yeux au ciel et m'offre une petite tape sur l'épaule, un sourire décorant son sublime visage.

— Je sais que c'est simple, mais... Pizza ? J'ai vu une adresse sur TikTok qui a pas l'air loin d'ici.

— Parfait, ça me va très bien, acquiescé-je. Tu es sûre de l'adresse, par contre ? C'est souvent des placements de produits cachés.

— Ah, tu crois ? Je t'avoue que j'ai pas fait gaffe, mais ça avait l'air délicieux.

— On peut y aller, mais j'aimerais bien être sûr de ne pas foutre les pieds dans un endroit qui va me donner la chiasse.

Mary ouvre grand les yeux.

— Quoi ?

— Tu... Enfin... Chiasse ?

Je la dévisage.

— Quoi ? T'es choquée parce que j'ai dit le mot "chiasse" ?

Elle hausse les épaules, ce qui m'arrache un sourire.

— T'as jamais eu la chiasse, toi ? Parce que je peux te dire que c'est pas une partie de plaisir.

— Tu sais quoi ? évite-t-elle. On va aller manger dans une pizzeria que tu connais. T'en connais forcément une, hein ?

Sa panique me fait marrer. Elle est terriblement gênée, à croire que je viens de courire nu devant tout le monde, la merde au cul. C'est à mourir de rire, mais je préfère me contrôler. La dernière chose que je voudrais faire est de la vexer.

— Ouais, j'en connais une pas mal. Elle est à deux pas d'ici, t'as de la chance.

On se dirige alors vers ma pizzeria favorite, celle où je n'hésite pas à acheter dès que je ne sais pas quoi cuisiner.

— C'est celle du TikTok, note Mary en fixant la devanture.

— Parfait, pas de chiasse en vue, alors.

— Peut-être, mais une queue de malade.

Foutue application. C'est une pizzeria qui a toujours tourné avec ses clients habituels, mais qui n'était jamais surchargée. Une vidéo et pouf, une queue de trois kilomètres devant. Je soupire. Je ne vais plus jamais pouvoir déguster la délicieuse Margherita qui vient de chez eux. J'en ai le goût en bouche tellement j'en suis fan.

— Tu crois que ça passe si je dépasse tout le monde parce que je suis un client de longue date ?

Mary grimace avant de me faire un signe qui tend sur le négatif.

— J'essaie quand même. Tu veux quoi ?

— Une quatre fromages, s'il te plaît.

Je lui adresse un signe militaire et me dirige jusqu'à la porte où je demande à passer, prétextant faire partie du staff. À l'intérieur, l'équipe que je connais bien est débordée. J'ai même l'impression qu'il y a des nouvelles têtes.

— Je pourrais voir Vincent, s'il vous plaît ? lancé-je à un des employés qui essaie tant bien que mal de gérer les commandes.

— Qui le demande ?

— Cayden. Il saura.

Il m'adresse un pouce en l'air avant de s'excuser auprès du client qu'il s'apprêtait à accueillir. Une seconde plus tard, il apparaît avec le gérant, devenu mon ami avec le temps.

— Salut, mon pote ! Tu veux quoi ? On est carrément débordés.

— Ouais... Mon amie m'a dit qu'une vidéo vous a rendu viral.

— Oui ! Même la presse est venue me voir.

— Je suis content pour toi. Dis, tu crois que tu peux m'arranger ?

— Tout ce que tu veux. Tu le sais, toujours.

— Cette amie, c'est mon date ce soir. Elle a vu ton adresse, mais l'énorme queue gâcherait notre soirée... Pas top, si je veux la draguer.

— Est-ce que c'est celle dont tu m'as parlé ?

J'acquiesce avec un sourire, les larmes me montant presque aux yeux.

— M'en dis pas plus. T'es là depuis le début, tu m'as tellement aidé, ça n'a pas de prix. Tu veux quoi ?

— Une margherita et une quatre fromages.

— OK, ça part tout de suite. Je dis à l'équipe de la passer en prio. Et tu sais quoi ? Cadeau de la maison, ça se fête.

— Rien n'est fait.

— Elle tombera sous ton charme, j'en suis certain.

— Merci. Énormément.

Vincent me fait signe que ce n'est rien et crie quelques ordres à sa petite armée en cuisine.

— Ils vont te ramener ça. Je retourne en cuisine, je vais nous mettre à la bourre. Faut qu'on se voit en dehors des heures d'ouverture, je veux en savoir plus sur ton date.

The Tulips Between Us [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant