Chapitre 10.1 - Mary

118 16 5
                                    

Hier, j'ai pu avancer sur l'affaire de Cayden. J'ai commencé à faire mes recherches juridiques afin d'avancer dans l'affaire et pouvoir proposer à mon clients les meilleures solutions, même si j'avais déjà commencé à étudier le dossier avant de le rencontrer la semaine dernière. J'y ai passé une bonne partie de ma journée, notant les ressources sur lesquelles se pencher, les témoignages et potentielles pistes qui nous aideraient à trouver des preuves supplémentaires du cas particulier de Cayden. Même si un diagnostic et la preuve qu'il a bu serait suffisant, plus on en a, plus on a de chances de gagner. Or, je ne peux pas me permettre de perdre une affaire où je suis si grâcieusement payée.

Aujourd'hui, je le revois. Mon cœur bat rapidement, comme si je m'apprêtais à partir en date. Cela me fait encore plus regretter la soirée de vendredi. L'idée de l'embrasser était sacrément conne, je sais que cela pèsera sur l'ambiance de notre rendez-vous. Aedlin n'aurait-elle pas pu être là pour m'empêcher de faire des conneries ? Quoi qu'elle aurait été capable de me pousser dans ses bras en me disant de profiter de ma soirée tant que cela est possible.

Ce matin, celle-ci n'est pas là, elle est partie dans la fin de matinée hier pour un événement d'une marque française qui se déroule à Paris. Ce sera l'occasion pour elle de parler de sa marque, de se faire des contacts, et de faire du contenu pour ses réseaux sociaux à but d'influence. Elle m'a promis qu'elle me ramènerait un souvenir de la Tour Eiffel, et j'ai hâte. Du plus loin que je me souvienne, j'ai toujours adoré ce pays et sa culture. Le monde doit tellement de choses à la France, mon pays le premier. L'art, la littérature, la mode, la philosophie... De nombreuses choses proviennent de nos voisins et cela me donne particulièrement envie de découvrir les différentes villes qui existent en France. Peut-être qu'un jour, j'aurais suffisamment d'argent pour m'y rendre. Je suis étonnée que mes parents ne m'y aient jamais emmené alors qu'ils sont des passionnés du voyage et y sont allés de nombreuses fois. Je ne leur ai jamais demandé si, lorsque j'étais plus ou moins âgé, ils m'y ont emmené, mais je n'apparais sur aucune des photos qu'ils ont d'eux là-bas.

C'est étrange de vivre dans l'appartement de Aedlin alors qu'elle n'est pas là. J'ai presque l'impression de ne pas avoir le droit d'être là, de ne pas mériter de vivre dans un tel palace. Mon appartement à Glasgow fait pitié à côté : il coûte minimum cent fois moins, est bien plus petit et bien moins beau. Je profite de vivre ici car la réalité me rattrapera et me rappelera que tout le monde n'a pas le droit d'être riche et que le destin ne sélectionne qu'une poignée de privilégiés qui auront la chance de savoir ce que cela fait que de pouvoir vivre sans jamais s'inquiéter de ce qui se trouve sur son compte en banque. Si seulement.

Je fais chauffer de l'eau et sors du thé en vrac. J'attrape une tasse dans un placard et un infuseur en métal. Je trouve une cuillère et enfin, je verse l'eau chaude dans mon mug et y ajoute le thé grâce à l'infuseur. J'attends plusieurs minutes durant lesquelles je me prépare un petit déjeuner composé de deux pommes de terre, de trois tranches de lard, d'un œuf, de quelques tomates cerises et d'un demi-avocat. Je suis arrivée à Londres il y a quelques jours seulement, mais j'ai déjà pris goût aux petits déjeuners dignes d'un hôtel cinq étoiles que Aedlin me prépare chaque matin. À présent, je ne peux plus m'en passer et me retrouve à cuisiner si tôt alors que je ne le fais déjà pas la journée, priorisant des plats tout prêts alors qu'ils sont loin d'être bons pour la santé.

Une fois que j'ai pris mon repas et que mon corps a suffisamment d'énergie pour vivre pendant plusieurs heures, je me prépare. J'ai envie de vêtements plus simples que ceux de la dernière fois, j'opte alors pour une tenue complètement noire, que je balance avec un manteau beige. J'ajoute un peu de mascara sur mes yeux et un gloss pour réhausser la couleur naturelle de mes lèvres. Enfin, je prends la route en direction du café où je dois retrouver Cayden.

Moins de vingt minutes plus tard, j'arrive et l'aperçois déjà, assis sur l'une des tables bordant une grande vitre qui donne sur la rue. Je commande rapidement une boisson et le rejoins. Je me débarrasse de mon manteau puis m'installe.

— Bonjour, Monsieur McCarthy, le salué-je en gardant mon professionnalisme.

Les images de vendredi soir me reviennent aussitôt, mais je me force à les chasser. Il n'est pas question qu'une soirée aussi temporaire viennent gâcher l'affaire qui pourrait sauver mon cabinet. J'ai besoin de réussir et rien ne pourra interférer avec cela, pas même une telle erreur.

— Bonjour, Madame Bennett, me retourne-t-il.

Il me tend alors une tulipe orange. Délicatement, je prends la tige entre mes doigts et la fais rouler quelques instants en observant ses pétales à la couleur vive. Je souris et relève les yeux vers Cayden.

— Pourquoi une autre couleur ?

— Parce que le orange est une belle couleur. Vous ne trouvez pas ?

Je hoche la tête et réalise soudain qu'il observe mes cheveux. Je me mords la lèvre inférieure, mais ne sais comment réagir. Ce n'est pas professionnel, il ne devrait pas parler de mon physique. Il ne devrait pas m'offrir de fleurs. Nous n'aurions pas dû avoir une telle relation vendredi. Pourtant, je ne hais rien de tout ça. Je crois même que j'apprécie. Cependant, je garde en tête ce pourquoi je suis venue. Je n'oublie pas qu'il est mon client.

— Sans doute, me contenté-je de répondre avant de déposer la fleur sur le côté de la table.

Je m'assure que je ne risque pas de l'abîmer, puis j'attrape dans mon sac le dossier de Cayden. Je le dépose sur la table et le feuillette, comme pour me le remémorer bien que je le connaisse par cœur.

— Avez-vous pu avancer sur les preuves dont nous avons parlé la semaine dernière ?

Il acquiesce.

— Je n'ai pas encore pu avoir un diagnostic, ma collègue ne bosse pas le vendredi et je n'ai pas pu trouver de rendez-vous avec un autre médecin. Il faudrait attendre un mois au moins.

The Tulips Between Us [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant