Je suis réveillée par le grincement de la porte de ma cellule. Je ne sais pas comment c'est possible, mais j'ai fini par m'endormir, et je n'ai pas rouvert l'œil de la nuit.
Quoique je ne suis pas sûre que le matin soit arrivé. Je crois que je tuerais pour un café.
Une policière fait irruption dans la pièce et me tire hors des couvertures.
— Debout, m'ordonne-t-elle. On n'a pas de temps à perdre.
Des menottes sont refermées sur mes poignets. Le contact froid du métal me fait frissonner. Je cligne des paupières avec affolement, les néons du couloir agressent mes yeux ensommeillés. Ross, comme moi, est tiré hors de sa cellule ; lui semble parfaitement éveillé. Sans son T-shirt et son jean froissés, il aurait l'air tout droit sorti d'un défilé de mode.
Le demi-sourire qu'il arbore alors m'indique que j'ai pensé trop fort.
Toi aussi, tu pourrais sortir d'un défilé.
Tu sais que tu mens mal.
Bon, peut-être plus d'un tableau. Genre, art abstrait...
Je te déteste.
Les agents nous tirent de couloir en couloir jusqu'à un parking souterrain. Ils nous forcent à monter dans un fourgon aéroglisseur. Si ces engins ne sont pas capables de voler comme des navettes, ils lévitent à quelques centimètres de la route, évitant crevaisons de pneu, cahots et dérapages.
Je me retrouve sur une banquette face à Ross. Nous sommes chacun coincés entre deux policiers, qui semblent eux aussi en manque de caféine.
— Ça vous dérangerait de faire une pause sur la route ? leur demandé-je. Je prendrais bien un croissant...
Je trouve ma demande plutôt légitime, puisque nous n'avons rien eu à manger depuis notre emprisonnement. Mais la seule chose que j'obtiens, c'est un regard noir de la part de Ross.
Ne les énerve pas, grince-t-il dans ma tête.
Comment pourrais-je ? Tout le monde aime l'art abstrait.
Fallait pas mal le prendre. Tu sais que t'es magnifique...
Menteur.
Oh, arrête, tu peux sentir que je le pense...
Il a raison. Je peux.
— Pourquoi tu souris ? me jette l'un des policiers. Qu'est-ce qu'il y a de drôle ?
Le fourgon s'arrête après une dizaine de minutes de route. Les conducteurs descendent pour nous ouvrir les portes depuis l'extérieur. Les agents qui nous encadrent nous poussent au-dehors. Comme je le soupçonnais, le jour vient à peine de se lever. Le ciel est teinté de rouge et d'or, et des trois soleils de Merkil 8, seuls deux ont fait leur apparition. Après l'obscurité du véhicule, ça reste suffisant pour m'éblouir.
Nous nous trouvons sur au cœur d'un immense spatioport, qui déjà à cette heure, semble grouiller d'activité. Navettes individuelles, vaisseaux de croisière et transporteurs commerciaux s'alignent à perte de vue sur le macadam. J'aperçois plusieurs engins peints aux couleurs de la PI. Et juste devant...
— Merde, peste l'un des policiers.
— Qui les a prévenus ? grince un de ses collègues.
— Va savoir. Ce service est une vraie passoire...
Ce qui suscite leur mécontentement, c'est le groupe de journalistes qui se dresse sur notre route. Une dizaine de reporters en costume, armée de micros et d'enregistreurs holographiques. Je reconnais les logos de plusieurs chaînes d'information intergalactiques.
On est célèbres, glissé-je à Ross.
Je paries que t'es fière de toi.
Très.
Les policiers qui m'escortent resserrent leur poigne sur mes bras-comme si je n'attendais que d'avoir un public pour me mettre à courir. Je m'agite un peu, essaie de soulager mes poignets martyrisés par les menottes, et leurs doigts s'enfoncent encore plus dans ma chair. Au moins, la douleur me maintient alerte, malgré la fatigue et la faim.
Dès que nous arrivons à leur hauteur, les journalistes brandissent leur matériel et nous encerclent.
— Monsieur l'agent, pouvez-vous confirmer les rumeurs selon lesquelles ces deux individus sont parvenus à entrer dans l'une des salles les mieux protégées du CSM ?
— Des informations sensibles ont-elles été divulguées ?
— Y a-t-il un risque pour la sécurité intergalactique ?
— Est-ce vrai que les prévenus vont être immédiatement transférés à Baklang ? Que répondez-vous à ceux qui voient cela comme une infraction du droit pénal interplanétaire ?
Les questions pleuvent comme des météorites, et les policiers les ignorent sans un mot. Je suis un peu vexée de voir que personne ne s'adresse à moi. Après tout, avec Ross, nous sommes les principaux concernés...
J'ouvre la bouche pour intervenir, quand soudain, je ressens une douleur aiguë au visage. Surprise, je retiens de justesse un cri. Mais la sensation s'estompe aussitôt, comme étouffée.
Je comprends alors qu'elle ne m'appartient pas.
Je me tords le cou pour regarder Ross, légèrement en arrière. Comme souvent, ses traits sont impassibles, mais ses yeux reflètent mon propre étonnement.
Quatre petits points rouges sont visibles sur sa joue. Un filet de sang s'en échappe.
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Evasion (Cass-tome 2)
Science Fiction⚠️ Si vous n'avez pas lu le tome 1, n'hésitez pas à aller le retrouver sur montre profil ! Attention, spoilers dans ce résumé... Thétis est morte. Akhilleús a été définitivement détruit. Cass Jackson ne souhaite qu'une chose : tourner la page, et v...