Chapitre 52

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En fin d'après-midi, mon beau-père est revenu. Je l'ai su par les échanges de voix que j'ai entendus provenant de son bureau. Il discutait avec ma belle-mère et leur conversation allait dans tous les sens. Je me suis rapprochée pour essayer d'écouter quelques bribes.

— Tu es consciente que ton fils a dépassé les limites. Irina, paix à son âme, n'aurait jamais permis que son fils devienne cet homme cruel.

— Tais-toi ! Ne parle plus jamais d'elle.

Qui était Irina ? Je n'avais jamais entendu parler d'elle. Était-elle la mère biologique de Martin ?

— Refuser de parler du passé ne changera rien. Martin a besoin d'un suivi psychologique. Il est urgent qu'on fasse ce qu'il faut pour son bien. C'est notre enfant, je te rappelle !

— Que sais-tu des enfants ? Tu n'as jamais pu m'en donner au fil des ans. Comment peux-tu te permettre de contester mes décisions ?

J'ai ressenti une douleur aiguë ; mon beau-père était aussi cruel que son fils.

— Je n'ai pas d'enfants, c'est vrai, mais j'ai élevé Martin comme mon fils !!!

— Tant mieux, mais reste à l'écart de cette affaire. Ça ne te concerne pas. Je vais faire venir Martin et il va m'expliquer la situation. On ne peut pas se permettre de croire à cette petite arriviste. Comment a-t-il pu être épris de cette femme au point de vouloir l'épouser à tout prix ? Mercy était un meilleur parti pour lui. En s'alliant avec elle, j'aurais eu l'assurance que mes affaires continueraient de prospérer. Mais il a fallu qu'il gâche tout en se mettant à dos cette famille puissante pour une pauvre fille de...

— Arrête ! Tu exagères. Martin aimait son épouse et c'est pourquoi il l'a choisie.

— S'il l'aimait comme tu le dis, il ne l'aurait pas trahie de cette manière. Reste à savoir si elle a véritablement dit ce qui s'est passé.

Mon cœur était en miettes. En écoutant les propos de mon beau-père, j'ai compris qu'il avait toujours joué un jeu avec moi. Si ça n'avait dépendu que de lui, je serais en ce moment dans un trou perdu. La seconde d'après, je suis revenue sur mes pas et j'ai pris la direction de ma chambre. J'en avais suffisamment entendu.

De retour dans ma chambre, j'ai fermé la porte doucement, essayant de contenir les larmes qui menaçaient de couler. Chaque mot échangé entre mon beau-père et ma belle-mère résonnait en moi comme un coup de poignard. Comment avais-je pu être si aveugle ? Martin m'avait trahie, oui, mais de là à imaginer que son propre père m'avait toujours vue comme une gêne, une simple pièce dans ses plans pour manipuler les affaires de la famille…

Je me suis laissée tomber sur le lit, le cœur lourd.

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[ Une heure plus tard... ]

Iris m'a signalé que mon beau-père demandait à me voir dans son bureau. Mon cœur s'est immédiatement serré. Je ne savais pas à quoi m'attendre après ce que j'avais entendu plus tôt. Devais-je faire semblant de ne rien savoir ? Ou confronter directement cet homme qui semblait prêt à me détruire pour son propre gain ?

Je me suis levée, respirant profondément pour calmer les tremblements qui me parcouraient. Chaque pas vers son bureau me paraissait lourd, comme si l'air autour de moi devenait plus oppressant. Arrivée devant la porte, j'ai pris une seconde pour me préparer. Lorsque j'ai voulu frapper pour signaler ma présence, j'ai entendu la voix de mon époux s'échappant de l'intérieur.

De quoi parlaient-ils ?

J'ai collé mon oreille contre la porte pour recueillir quelques morceaux de leur conversation. Écouter aux portes était devenu mon passe-temps favori.

— Elle veut me piéger avec cette grossesse. Je lui ai pourtant dit que je ne veux pas avoir d'enfants !!!

Mon cœur a fait un bond dans ma poitrine. Les images de la veille du départ de Martin pour la Corse sont revenues dans mon esprit. Il désirait avoir un enfant, il voulait que je porte son enfant, et maintenant, que disait-il ? C'était insensé. À moins que… J'ai secoué la tête vigoureusement pour chasser cette pensée de mon esprit. C'était quasiment impossible. Si ça avait été le cas, je l'aurais su. Il m'aurait parlé de ça, non ?

Au même instant, le bureau est devenu silencieux et la porte s'est ouverte sans que je n'aie le temps de réajuster ma position. J'ai atterri lourdement au sol en laissant échapper un cri.

Je me suis retrouvée allongée à terre, mes mains cherchant désespérément un appui pour me relever, mais mes jambes tremblaient sous la tension. Martin et son père me fixaient, surpris, mais une lueur de colère passa rapidement dans les yeux de mon beau-père. Il m'avait clairement prise en flagrant délit.

— Qu'est-ce que tu faisais là ? Ton audace est sans bornes !

La voix de mon beau-père, aussi froide que coupante, me fit frissonner. Martin, de son côté, se contentait de me fixer sans bouger. Aucun soutien, aucune compassion dans son regard.

Je me suis relevée tant bien que mal, le souffle court.

— J'étais simplement venue, comme demandé, dis-je en évitant son regard perçant.

Le silence était devenu lourd. Mon beau-père n’avait visiblement pas l’intention de laisser passer cet incident.

— Nous avons encore des choses à régler. Il est temps que tu t'assoies, dit-il en désignant une chaise en face de son bureau.

Mon cœur battait à tout rompre, mais je savais que je n'avais pas le choix. Une confrontation s'annonçait, et il me fallait être prête à affronter des vérités que je ne voulais pas entendre.

Je me suis assise sur la chaise, tentant de maintenir une façade calme malgré la tempête qui faisait rage en moi. Mon beau-père me scrutait avec une intensité presque déstabilisante. Martin, toujours silencieux, se tenait en retrait, ses bras croisés, comme si tout cela ne le concernait pas.

— Tu as toujours été une épine dans le pied de cette famille, commença mon beau-père, sa voix glaciale. Tu penses vraiment que tu peux te cacher derrière ton mariage avec Martin ? Que ton rôle ici est assuré ?

J'ai ouvert la bouche pour répondre, mais il m'a coupée d'un geste.

— Ne t'avise pas de parler sans qu'on te le demande. Si tu crois que cette soi-disant grossesse va te permettre de t'ancrer encore plus dans cette famille, tu te trompes lourdement. Si tu attends un enfant de mon fils, je veux des preuves.

Mon souffle s'est coupé. Il ne me croyait pas ? Ou pensait-il que je mentais pour obtenir un avantage ? J'ai jeté un coup d'œil à Martin, espérant y trouver un signe de soutien, mais il a évité mon regard, comme s'il était ailleurs.

— J'ai fait tout ce que vous avez demandé. J'ai soutenu Martin, je suis restée loyale à cette famille malgré tout. Je ne mérite pas ce traitement.

Mon beau-père éclata d'un rire sec, dénué de toute chaleur.

— Loyale ? Ne sois pas ridicule. Ce que tu appelles loyauté, c'est plutôt de la survie. Mais ne t'inquiète pas, si tu es véritablement enceinte, tu resteras ici… en tant que mère de mon petit-enfant. Sinon…

Il laissa planer sa menace, et je sentis mon estomac se nouer. La réalité me frappa de plein fouet. Il ne m'avait jamais vue comme un membre de la famille. J'avais toujours été une pièce remplaçable dans son jeu.

Martin s'approcha enfin, son visage fermé.

— Qu'est-ce que tu attends de moi ? lança-t-il, la voix froide. Je ne t'ai jamais promis d'enfants.

Ces mots résonnèrent comme un écho dans la pièce. Je l'ai regardé, la gorge nouée, incapable de comprendre comment l'homme que j'avais épousé avait pu changer à ce point.

POURQUOI J'AI TUÉ MON MARI ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant