Quelques semaines avaient passé depuis notre retour, et je n'avais toujours aucune nouvelle de Martin. J'ignorais s'il était encore en vie. Vincent m'avait enfermée dans une pièce de la maison, m'interdisant de sortir.
Il me retenait prisonnière, et cette captivité me rendait folle. Je voulais comprendre ce qui se passait, mais j'avais l'impression de sombrer dans la folie, enfermée entre ces quatre murs. Parfois, il me faisait sortir, m'obligeant à assister à ses ébats avec ma sœur.
C'était répugnant. Elle ne se doutait même pas qu'il n'était pas celui qu'elle croyait. La voir prête à tout sacrifier pour son confort matériel m'emplissait de tristesse.
La frustration et l’impuissance me rongeaient de l’intérieur. Chaque jour, je scrutais la porte, espérant qu’elle s’ouvrirait, que Vincent me libérerait de cet enfer. Mais le silence pesant ne faisait qu’aggraver ma détresse. Je me perdais dans mes pensées, repensant à Martin, à notre dernière conversation, à son regard déterminé. Était-il en danger ? Avait-il réussi à s’échapper ?
Lorsque Vincent me sortait de ma prison, c’était toujours avec un sourire machiavélique, comme s’il savourait ma souffrance. Je ne pouvais que tourner la tête, me forcer à ne pas voir la scène dégoûtante qui se déroulait sous mes yeux. Ma sœur, innocente, riait, inconsciente de la vérité. J’avais envie de la secouer, de lui crier que l’homme qu’elle voyait était un imposteur, un traître. Mais ma voix se bloquait dans ma gorge, paralysée par la peur et le dégoût.
Un mâtin j'ai commencé à ressentir de vives douleurs au bas-ventre. Inquiète, j'ai supplié Vincent pour qu'il me conduise à l'hôpital mais il ne l'a pas fait. Il m'a clairement fait comprendre qu'il désirait que je perde le bébé.
Cette haine fut la goutte de trop. Je décidai d'agir. Je devais le tuer ou c'est lui qui allait le faire.
J'avais remarqué que Vincent avait l'habitude de boire un verre de whisky tous les soirs, un rituel dont il ne se séparait jamais. Il avait un goût particulier pour cette liqueur, et cela me donna une idée. Je devais me procurer du poison, un poison discret qui ne lèverait pas de soupçons.
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Chaque fois qu'il me sortait de ma prison, je prenais mentalement note de tout ce qui m’entourait. La cuisine, même si elle était rare, restait accessible lorsque Vincent était distrait par ma sœur. J'avais commencé à feindre des douleurs pour le faire baisser ma garde.
Un matin, alors qu'il était occupé à préparer le petit-déjeuner, je profitai d'un moment de faiblesse pour entrer dans la cuisine. Le placard contenait des produits d'entretien, mais je savais que je devais aller plus loin. À l’arrière, une petite boîte de médicaments était posée. J’attrapai une fiole de cyanure, un poison puissant et rapide. Je savais que c’était risqué, mais c’était la seule option.
Lorsque Vincent rentra dans la pièce, je feignis de chercher un verre, cherchant à masquer mon excitation. Avec une précision calculée, je versai quelques gouttes du poison dans son verre de whisky, tout en maintenant une conversation anodine. Je parlais de ma sœur, de sa naïveté, et de tout ce que j'avais en tête pour ne pas éveiller ses soupçons.
Le moment venu, il leva son verre, ignorant tout du danger qui l’attendait. Le dégoût me submergea à l’idée qu’il allait boire ce qu’il pensait être un simple whisky. « À la vie », déclara-t-il en souriant, et je souris à mon tour, un sourire qui cachait ma haine.
Alors qu’il ingurgitait le breuvage, je savais que le compte à rebours avait commencé. Je priai pour que cela fonctionne, que ce poison l’emporte rapidement, avant qu’il ne puisse réagir. Je me tenais prête, attendant que les premières douleurs se manifestent.
Les minutes s’écoulèrent, et Vincent continua de parler, inconscient du poison qui faisait lentement son effet. Je scrutais son visage, notant chaque changement subtil dans son expression. D’abord, il semblait enjoué, mais au fil du temps, une ombre de malaise commença à s’installer sur ses traits.
Finalement, alors qu'il prenait une autre gorgée, il s’arrêta brusquement. Son sourire s’effaça lentement, remplacé par une grimace de douleur. Je sentis une montée d’adrénaline, un mélange d’angoisse et de satisfaction.
__ Vincent, ça va ? demandai-je d’un ton faussement inquiet, bien que l’excitation me fît vibrer.
Il se redressa soudain, une main sur l’estomac, l’autre sur la table pour se soutenir.
__ Qu'est-ce qui se passe ? grogna-t-il, le teint blême. Je l’observai, une satisfaction morbidement douce remplissant mon cœur. Le poison agissait, et je savais que le moment de vérité approchait.
__ Peut-être que tu as mangé quelque chose de mauvais ? tentai-je, feignant l’innocence. Je m’approchai de lui, le regardant avec un mélange de compassion et de mépris. Il secoua la tête, le souffle court, et je vis l’angoisse envahir son visage.
Alors qu’il se dirigeait vers le lavabo, je réalisai que je devais me préparer à ce qui allait suivre. Je ne pouvais pas rester là, passive, attendant qu’il succombe. J’avais besoin d’un plan de sortie. Avec un dernier regard vers la pièce, je me souvins de la fenêtre, de l’issue qui pourrait me mener à la liberté.
Vincent vomit dans le lavabo, son corps tremblant de spasmes. Je me détournai, un frisson de satisfaction parcourant mon échine.
__ Appelle quelqu’un, Vincent ! hurlai-je, comme s’il pouvait encore sauver sa peau. Mais je savais que le poison avait fait son œuvre.
Il se tourna vers moi, ses yeux pleins de rage mêlée à la douleur.
__ Tu m’as empoisonné ! cracha-t-il, la voix rauque.
J'aurais voulu répliquer, mais la peur m'étreignit. Il ne devait pas savoir à quel point j'avais anticipé sa colère. Je devais agir vite.
Dans un élan de désespoir, je courus vers la fenêtre, la poussant avec fracas. La lumière du jour m'aveugla un instant, mais je savais que je n'avais pas le temps de réfléchir. Je devais sortir avant qu'il ne puisse me rattraper.
Alors que je me hissais à travers l’ouverture, je l'entendis hurler derrière moi, sa colère résonnant dans l'air.
__ Tu ne t'en tireras pas comme ça ! Mais je n'écoutais plus. Je sentais déjà la liberté m’appeler.
Je tombai sur l'herbe fraîche en dessous, l'adrénaline me poussant à courir aussi vite que mes jambes le permettaient. Je me dirigeai vers la route, la liberté à portée de main, mais je savais que cela n’allait pas s’arrêter là. Vincent pourrait encore me poursuivre, et je devais rester sur mes gardes.