Chapitre 56

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En arrivant au travail ce jeudi, j'étais dépitée. Le professeur m'avait demandé de venir le voir à la pause, et le petit rendez-vous n'avait pas été très agréable. Mes absences à répétition, seulement deux mois après la rentrée, avaient été remarquées. “Ce n'est pas mon genre de prévenir le Crous, mais si vous ne vous ressaisissez pas, je vais devoir le faire. Cette licence est très demandée et en novembre, il n’est pas trop tard pour intégrer des personnes sur file d'attente. Pensez aux autres, mademoiselle Robert.” m’avait-il dit. Et depuis, je me sentais totalement démunie. Ce n'était pas très sympa de sa part de faire culpabiliser en parlant de ceux en file d'attente, mais il avait raison. Des gens devaient être dégoûtés de ne pas être à ma place. Il fallait vraiment que je trouve une solution.

Durant ma pause, appuyée à côté du piano pour écouter un jeune homme jouer, je regardais les différentes formations à Toulouse. Rien ne m'intéressait… De toute manière, je n'étais pas faite pour les études…

_ Excusez-moi Alix, je sais que c'est votre pause, mais il n’y a plus de sucre et Victoria est occupée…

Je souris au jeune habitué qui venait de me tirer de ma rêverie, et même si j'avais encore cinq minutes devant moi, je retournais au travail. De loin, je vis ma collègue me zieuter. Je crois qu’elle avait remarqué que je n'étais pas en forme aujourd'hui. Justement, durant un moment de creux, elle s'approcha de moi :

_ Ça va Alix ? T’as l'air au bout de ta vie…

_ Je réfléchis à ma place dans la société et à mon avenir professionnel…

_ Oula. De grandes questions existentielles. Qu’est-ce qui se passe ?

Je soupirais en rangeant mieux les gâteaux dans la vitrine.

_ L'an dernier, je supporte la première année de psychologie difficilement ; cette année, je déteste ma filière qui ne me correspond pas du tout…

Victoria semblait vouloir parler, mais je continuai :

_ Je suis sur le point de me faire virer car je sèche tout le temps, et donc je vais finir à la rue sans chambre étudiante, sans bourse, et sans avenir. Obligée, je vais devoir retourner vers Albi chez mes parents, démissionner de ce travail que j'aime beaucoup car je ne pourrais plus venir, quitter Clémence avec qui je viens tout juste de commencer à sortir car je ne pourrais jamais la voir, et je vais finir ma vie à devoir bosser à la ferme.

_ Wow wow wow, tu sors avec Clémence ça y est ??

_ Oui… Je lui ai dit que je l'aimais car on se disputait et maintenant on est ensemble… Mais je vais devoir la quitter… je ne vais pas lui imposer une relation à distance avec une NEET qui vit chez ses parents…

Soudain, Victoria m'attrapa les épaules.

_ On se calme, Alix. Tu vas pas finir NEET, abandonner ses études à 20 ans ce n'est pas là fin du monde et tu pourras toujours rebondir, tu n’es pas seule.

_ Mes parents vont être tellement déçus si j’abandonne, encore…

Je me sentais vraiment mal. Je n’avais jamais pris conscience de mes difficultés avec le monde scolaire et professionnel. Enfin, je savais que je n’aimais pas ça, mais pas à ce point.

_ Tu ne vas pas les décevoir, voyons…

_ Mais si… Je suis tellement dépitée… Je crois que le mieux c'est que je supporte cette année même si je déteste et que je vais me sentir mal en cours et….

_ Alix, je suis désolée d’avance de ce que je vais faire. Ne m'en veux pas.

Je n’eus même pas le temps de réaliser la phrase de Victoria que je reçus de la crème fouettée sur le visage.

Mon seule secret (histoire lesbienne) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant