Chapitre vingt-neuf.

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MELANIE MARTINEZ - Gingerbread Man.














Leurs semelles connaissaient trop bien les rues de Paris à présent. Jongler entre les quartiers chauds de la capitale avec tous ces sex-shops, ces cabarets, ces rues bondées de péripatéticiennes ; les rues peu rassurantes de Barbès, avec ces cancres adeptes de ventes au marché noir en bas de chez eux, des insultes résonnant dans l'enceinte des bâtiments peu entretenus et réputés pour contenir une assez grande quantité de familles défavorisées, tout cela les a fatigués. Ils ont couru, ils se sont baignés dans des fontaines, enflammaient des poubelles... Ils ont semé le chaos là où ils sont passés. D'ailleurs, Opium était tenté de succomber au charme de cette  dévergondée à la crinière ébène, aux courbes très peu cachées, une cigarette à la main et des cheveux ébouriffés, peu soignés... Cependant, Einsam l'a repris et l'a entraîné de nouveau dans leur défilé nocturne. Ils ignoraient l'heure qu'il était, mais le changement de couleur du ciel leur a donné un indice. Il devait être six heures du matin. Ils n'ont pas fermé l'œil de la nuit, ils ont préféré courir sans but précis dans la ville lumière, quitte à se perdre dans tous ces coins identiques... Les Champs-Elysées les ont accueillis les bras grands ouverts. La place leur appartenait, ils marchaient sur les trottoirs interminables, là où des magasins de marque comblaient cet immense vide. La beauté ne se faisait pas désirer. Avec cette grande roue brillante, ces arbres taillés en carrés, des guirlandes en guise de parure sur leurs feuillages prêts à rendre l'âme, les Britanniques pensaient avoir trop consommé. Paris est une belle ville, si l'on est riche. Einsam a rencontré un bref moment de solitude, car le prénommé Zain devait impérativement s'absenter pour régler une petite affaire qui n'était autre que se repoudrer le nez. Il voulait conserver sa réserve de cocaïne, mais ses saignements de nez l'ont salement trahi.

















Leurs pieds traînaient sur le sol parisien, ils abîmaient volontairement leurs chaussures, leurs dos étaient courbés, les bras pendants, les yeux plissés, les rues désertes, cela avait l'air d'être une épidémie de zombies.














- Je n'en peux plus... C'est quand qu'on rentre ?

- On fait une cavale de notre propre cavale... C'est dur de tenir le coup je comprends... Il faut qu'on se trouve une piaule, maintenant.

- J'ai juste envie de m'allonger par terre, là, et m'endormir.

- Attends qu'on trouve un endroit tranquille. D'ici deux heures, tu n'entendras que les voitures et les passants parler.

- Au point où j'en suis, aucun bruit ne me dérangerait, Opium... Je suis crevé...

- Si t'avais accepté l'aide de cette charmante prostitué, tu ne serais pas aussi épuisé.

- Au contraire, ça m'aurait aidé à trouver le sommeil. Puis, on n'a pas d'argent, tu veux la payer avec quoi ?

- De l'herbe, on ne sait jamais...

- N'importe quoi... Tu crois qu'elle accepterait d'assouvir le moindre de tes désirs, que je ne souhaiterai pas connaître, en passant, pour de la drogue ? Déjà que c'est un dur métier, alors la remercier avec ça... Ce serait comme donné un gâteau à son chien après qu'il ait fait les tours que tu lui as appris.

- Remballe ta science. Je croyais que t'étais fatigué.

- Je le suis toujours.

- Pourquoi tu continues de raconter de la merde, alors ?

- Oh, ça va, hein... Marmonna-t-il en baissant la tête.

- Tu veux qu'on rentre ? On partira une prochaine fois... On a trop improvisé. Il faudrait qu'on s'organise la prochaine fois.

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