Chapitre quarante-et-un

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Jacques Brel – La valse à mille temps



Cette nuit-là allait être fatale pour le gang diversifié. C'était un jour J parmi tant d'autres. Ils étaient tous endormis, à patauger dans des rêves aussi étranges les uns que les autres. Les étoiles brillaient peu, la pollution s'opposait à elles, mais on les voyait quand même. L'air était frais, il véhiculait de nombreux sons habituels qui constituent la ville de l'amour. Les klaxons, des sifflements, des personnes peu discrètes,des poubelles qui se renversent, des bagarres entre félins... Des bruits que des provinciaux ne supporteraient pas, mais les habitués voyaient ces désagréments comme une berceuse. Les moteurs des voitures permettaient à Oxymore de dormir, de s'apaiser un minimum.Ses partenaires imaginaires ont gardé le silence, eux aussi étaient apaisés par l'environnement.




Une brise parfumée caressait ses narines. Cette brise était loin d'être naturelle. Une essence de marque. Cette odeur se prononçait davantage, la source se rapprochait. De plus en plus.




- Réveille-toi.



En guise de réponse, il émit un grognement manifestant son mécontentement. Il devait être trois heures du matin.



Il ouvrit difficilement les yeux, passant ses phalanges dans ses cheveux, rejetant le peu de boucles qui traînaient sur son front à présent dégagé. Les yeux plissés, il ne parvenait pas à distinguer la silhouette qui restait immobile devant lui.




- C'est qui ? Peina-t-il à prononcer, sous une voix rauque et cassée

- C'est moi.

- Gemma, qu'est-ce que tu fous ?

- Tu me manquais...



Il leva les yeux au ciel une fois de plus. Non seulement il était fatigué, mais en plus l'auteure de son réveil soudain n'avait pas l'air de comprendre qu'il n'était pas intéressé du tout par sa venue, ni par les intentions qu'elle dissimulait sous ce sourire angélique et forcé. Bien qu'excédé, le protagoniste se décala de quelques centimètres pour laisser la place à sa Juliette du dimanche, ne se privant nullement pour pousser de longs soupirs.Qu'elle se rende compte de sa présence superflue, vaudrait mieux pour elle avant que sa visite ne finisse par des obsèques faites dans la plus grande discrétion.



Ses deux jambes frôlèrent les siennes pendant un bref instant, mais ce bref instant lui était suffisant pour déduire que son invitée portait une tenue un peu trop légère. La soie qui la recouvrait si bien était en fait une nuisette parsemée de dentelles par endroits, plus précisément sur le décolleté et le bas. Elle s'invita à faire parcourir ses doigts le long de ses biceps prononcés, à presser délicatement ses doigts dessus pour mesurer sa robustesse, elle s'invita également à nicher son nez au creux de son cou afin de humer l'odeur enivrante qu'il dégageait.Son toucher était un peu trop intime, un peu trop indiscret à son goût, surtout pour une nuit qu'il avait prévue de passer dans un profond sommeil. Impuissant, paralysé par la fatigué, il se laissa faire. Cela le frustrait. Ce n'était pas comme un viol, mais l'idée de subir les actions malsaines de l'autre sans consentement était là. L'idée de viol le dégoûtait. Un des criminels les plus recherchés était dégoûté par une acte aussi écœurant qu'il avait commis ces derniers temps. Même les plus méchants, même les plus sadiques, même les plus froids sont dotés d'un cœur gorgé de quelques sentiments. Quelques-uns. Suffisamment pour être humain.

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