Chapitre 32-2

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Nous avions réussi à nous éloigner suffisamment pour ne pas être blessé, mais pas assez pour ne pas être à moitié assommé par le bruit et le souffle de l'explosion. Je perdis l'équilibre et tombai en avant, me rattrapant in-extrémis à l'épaule d'Isy qui se trouvait juste devant moi et avait réussi à conserver son équilibre.

— Il faut que l'on sorte de là...tout de suite...avant que ce fichu tunnel ne nous tombe sur la tête, me dit-elle entre deux quintes de toux, dues à la poussière tournoyant tout autour de nous.

— Où est Elana, lui demandai-je en guise de réponse.

Je savais qu'elle avait raison et qu'il fallait que nous sortions d'ici au plus vite, mais j'étais revenue dans cette enfer pour deux choses. Maintenant que les survivants étaient sains et sauf, une seule chose m'obnubilait, au point de me faire perdre toute logique.

— Je suis là, me répondit une voix exténuée, quelque part sur ma gauche.

Je pivotai instantanément dans cette direction, la cherchant du regard malgré la pénombre.

— Dis-moi que tu as toujours le sac, lui demandais-je précipitamment d'une voix tendue et inquiète.

— Le sac... ? Commença-t-elle à me demander, visiblement perdue et désorientée.

— Oui, celui que tu as ramassé pendant la fuite, lui précisai-je sans aucune patience.

— Ah, le sac de médicament ?! Oui je l'ai toujours, pourquoi...

— Passes-le moi...vite ! La coupai-je sans ménagement, en le lui arrachant presque des mains, lorsqu'elle me le tendit d'une poigne tremblante.

Une fois que je sentis le poids rassurant de la besace au bout de mes doigts, un grand soulagement, ainsi qu'un sentiment d'urgence, s'emparèrent de moi. Sans même remercier Elana, je fis volte-face et la plantai là, sans me soucier une seule seconde de ce qu'elle pouvait penser de mon comportement. Puis je me dirigeai, d'un pas pressé et fébrile, vers la sortie.

Au bout de quelques pas, je commençai à ralentir pour finir par m'arrêter net, rattrapée par ma conscience et la vue des rescapés gisant au sol parmi les débris de roche. Je devais les aider eux aussi et Elana...elle avait quand-même risqué sa vie pour ce sac. Même si je lui en voulais à mort et ne lui faisait plus aucune confiance, j'aurai dû la remercier. Il y avait quelques jours de cela, c'est ce que j'aurai fait sans même réfléchir...qu'étais-je donc en train de devenir ?

— Ne t'inquiètes pas et fais ce que tu as à faire, me dit gentiment Lada avec une perspicacité troublante. Le plus urgent c'est Oliver ! Vas t'occuper de lui et nous on s'occupe des blessés.

Je ne lui répondis pas. Pas par manque de mots, mais parce que ma gorge serrée ne m'aurait pas laissé faire. Je me contentai donc de lui faire un petit sourire reconnaissant, qu'elle ne vit sûrement pas tellement il faisait sombre...mais l'intention était là. Mon précieux fardeau en main, je retournai auprès des autres. À peine avais-je mis un pied dehors, que je vis Ophélia accourir vers moi, l'air complètement paniqué.

— Que s'est-il passé ? J'ai crus entendre comme...comme une explosion. Le sol s'est mis à trembler...j'ai eu tellement peur. Où sont les autres ?!

— Ils arrivent...ne t'inquiète pas, la coupais-je pour la calmer, quand je me rendis compte de son état de stress. Tu devrais aller les aider, on à retrouver les autres...enfin une partie et ils sont plutôt mal en point. Ton aide ne serait pas de trop.

— C'est vrai ! S'exclama-t-elle visiblement soulagée, avant de reprendre presque instantanément son air inquiet. Mais Oliver va très mal, je ne peux pas le laisser...

— Je m'en occupe...j'ai les médicaments, lui dis-je avec un petit sourire victorieux malgré mon épuisement, tout en lui montrant le sac d'un geste las. Ça devrait  aller maintenant.

— Mais si des gardes arrivent, si...

— Que tu sois là ou pas ni changera pas grand-chose, lui assenai-je, même si ce n'était pas tout à fait vrai. Va aider les autres, nous aurons plus de chances tous ensemble.

Elle finit par m'écouter et rejoindre l'entrée du collecteur, non sans une certaine réticence, visible à chacun de ses pas hésitants. La vérité était, que j'aurai préféré qu'elle reste avec nous. Pouvant contrôler la luminosité, cela aurait été très utile pour nous camoufler le cas échéant. Mais sortir tout le monde de cet enfer le plus rapidement possible, était aussi une urgence vitale et nous manquions cruellement de bras, donc...il valait mieux risquer de perdre trois personnes que six.

Lorsque je parvins au chevet d'Oliver, j'eus peur d'être arrivée trop tard. Il avait perdu connaissance et gisait à présent sur le sol, étendu sur le côté après que son dos eut glissé le long de l'arbre. Son teint maladif, tirait à présent sur le verdâtre et il respirait de manière saccadée et laborieuse. Je tombai, plus que je m'agenouillai à ses côtés et d'une main fébrile, entrepris d'ouvrir le sac.

Le tissu, certainement malmené pendant notre fuite, se déchira bruyamment sous mes efforts maladroits, répandant tous son contenu sur le sol. Heureusement la terre recouverte d'humus et de feuilles mortes, fit comme un tapis, amortissant la chutes des quelques flacons en verres se trouvant à l'intérieur. Je passais frénétiquement en revu toutes les étiquettes et trouvai enfin ce que je cherchai, un antibiotique à large spectre.

Pour que son effet soit plus efficace et plus rapide, j'optai pour la forme liquide et m'empressai donc de dénicher une seringue dans tout ce bazar. Sur les deux présentes dans le sac, une seule était utilisable, l'aiguille de l'autre étant complétement tordue. Je remplis le piston de la plus forte dose que je pouvais lui administrer sans risque, fis gicler un peu de liquide pour être sûr qu'il n'y ai plus d'air à l'intérieur et m'apprêtai à le lui injecter. Quand, subitement j'hésitai, ma seringue non-stérilisée à la main.

L'une des règles d'or que l'on nous serinait et nous rabâchait à longueur de journée lors de mes cours à l'E.E.V, était de ne jamais utiliser de matériel non stérilisé, au risque de tuer notre patient. Cette subite pensée me fit sourire tristement. Nous n'étions plus à l'E.E.V, ici c'était la réalité et si je m'obstinai à suivre ces règles obsolètes...Oliver allait mourir. Sans plus tergiverser, je remontai sa manche et faisant ressortir une des veines du creux de son bras avec deux des doigts valide de ma main gauche, lui injectai le précieux liquide dans les veines.

La piqure, pourtant pas des plus délicate, ne le sortit même pas de l'inconscience, tandis que  je me reculai, en priant pour qu'il ne soit pas trop tard. Machinalement, je posai une main sur son front et la retirai presque aussitôt, effrayée par la chaleur qu'il dégageait. J'étais en train de chercher  de quoi faire baisser sa fièvre, quand les premières convulsions commencèrent.

— Isy, j'ai besoin d'aide ! L'interpellai-je d'une voix nerveuse, alors qu'elle s'apprêtait à retourner à l'intérieur pour aider à transporter le dernier blessé.

Elle s'apprêtait à me dire d'attendre mais se ravisa à la seconde où elle aperçut Oliver, agité de mouvements sporadiques de plus en plus violent.

— Mon dieu mais...que ce passe-t-il ? Il ne supporte pas les médicaments ?! S'écria-t-elle d'une voix angoissée, en se précipitant vers nous.

— Non...c'est la fièvre, lui répondis-je en essayant de ne pas paniquer malgré mon épuisement et mon manque d'expérience. Il faut absolument la faire tomber. Le problème c'est que toute l'aspirine dont nous disposons est en comprimé. Tu crois que l'on peut trouver de l'eau par ici ?

— Aucune idée...mais...je vais aller jeter un coup d'œil.

— Non...c'est trop risqué...prononça soudain une voix faible et rauque, qui nous fit violemment sursauter.

Nous nous retournâmes d'un bloc, surprises et soulagées, vers un Lynch mal en point, mais enfin réveillé.

Isolated SystemOù les histoires vivent. Découvrez maintenant