Cette fois-ci le trajet se fit en silence, ce qui me surpris autant que cela me ravie. Car à vrai dire, je n'étais pas vraiment d'humeur à faire la conversation. Tout se bousculait dans ma tête, à tel point que je n'arrivais même plus à réfléchir clairement et à vrai dire je n'étais même pas sûre d'en avoir encore envie. Le trajet me sembla durer des heures. À mesure que nous avancions, la désagréable impression que les murs allaient se refermer sur moi ne cessait d'augmenter, m'oppressant la poitrine et me donnant l'envie irrépressible de fuir loin d'ici. Sensation curieusement renforcée par le silence et le calme auxquels j'aspirais tant, encore quelques instants auparavant. J'avais beau savoir que j'étais en train de faire une nouvelle crise de claustrophobie, cela n'en atténuait pas les effets pour autant.
— On est bientôt arrivées ?
Ma voix sifflante et étranglée, creva le silence oppressant comme un coup de tonnerre, faisant pousser un petit cri de surprise à Connie. Elle se retourna brusquement, visiblement étonnée que j'aie rompu le silence la première.
— Ça va ?! Tu...
— Oui ça va, la coupais-je abruptement. Dis-moi juste si on en a encore pour longtemps, finis-je à bout de souffle en lui lançant un regard agacé.
Je m'en voulais de la brusquer ainsi, mais ce n'était pas le lieu le plus adapté pour faire la conversation. Je m'excuserais une fois que nous aurions quitté ces couloirs lugubres et oppressants.
— Prends ma main et ferme les yeux, me dit-elle soudain d'une voix ferme et assurée, qui ne lui ressemblait pas. À force de m'occuper de Justin je sais reconnaitre une crise de claustrophobie quand j'en vois une ! Alors fais-moi confiance et fais ce que je te dis.
Je ne sais si ce sont ses paroles ou sa voix autoritaire, mais je lui obéis presque avec soulagement et le résultat fut spectaculaire. À peine avais-je pris sa main et fermer les yeux que le poids sur ma poitrine disparu presque instantanément. Voyant que je ne protestais pas et respirais mieux, elle reprit sa marche en me guidant d'une main ferme.
— Tu peux ouvrir les yeux, nous sommes arrivées, me dit-elle quelques minutes plus tard. Tu te sens mieux ?
— Oui merci beaucoup. Excuse-moi pour tout à l'heure...
— Ne t'en fais pas pour ça, me répondit-elle avec un grand sourire lumineux qui lui ressemblait déjà beaucoup plus, avant de se retourner pour ouvrir la porte rose.
Nous étions de retour dans le couloir des dortoirs. Cet endroit avait beau paraître immense et tentaculaire, j'avais la désagréable impression d'y tourner en rond, sans qu'un plan des lieux n'arrive à s'imprimer dans ma tête. Le moins que l'on puisse dire et que je trouvais ça déroutant. À nouveau, je pénétrais à sa suite dans le dortoir bariolée où le désordre et la débauche de couleur me surpris toujours autant. J'arriverais surement à m'y faire au bout d'un moment, me dis-je en refermant la porte derrière moi. Comme la dernière fois que j'y étais venu, le dortoir était vide et calme. N'ayant aucune idée de l'heure qu'il était, je ne savais pas si cela était normal ou non.
— Il n'y a que toi ici ou...
— Non, nous sommes trois. Les autres ne devraient pas tarder d'ailleurs, me dit-elle en s'asseyant sur l'un des lits avec un soulagement évident. Mets-toi à l'aise. Ces deux lits là sont libre, prends celui que tu veux.
Je me dirigeais sans hésiter vers le lit situé à côté du sien et m'y assis. Ce qui eut l'air de lui faire plaisir.
— Tu as été extra aujourd'hui, me dit-elle soudain en me fixant d'un regard grave rempli de gratitude. Heureusement que tu étais là, sinon...
Je rosie légèrement sous ses remerciement et baissais la tête, un peu gênée. Je n'avais pas l'habitude que l'on m'exprime de la gratitude et ne sachant pas comment me comporter, je préférais me taire.
— Comment va ta main, me demanda-t-elle soudain, sans doute pour me mettre à l'aise.
— Ca va, lui dis-je d'une petite voix. Je n'ai presque plus mal.
— Mais je manque à tous mes devoirs, s'exclama-t-elle soudain horrifiée en se levant d'un bond.
Surprise et un peu inquiète, je la regardais se précipiter vers la commode jouxtant son lit et en ouvrir successivement tous les tiroirs d'un geste brusque. Elle revint ensuite vers moi en courant presque, les bras chargés de vêtements.
— Tiens, me dit-elle en me les tendant. J'espère qu'ils t'iront, je pense que nous faisons à peu près la même taille.
— Merci Connie c'est très gentil de ta part, mais garde tes vêtements. Je ne peux pas...
— Ne sois pas bête. Tu ne peux pas rester avec ses guenilles toutes tâchées, me réprimanda-t-elle gentiment. Tiens, insista-t-elle en me les mettant dans les bras. Viens prendre une douche et te changer, tu te sentiras beaucoup mieux après tu verras.
Commençant à comprendre que lorsqu'elle était en mode « missions » rien ne pouvait l'arrêter, je la suivi docilement jusqu'à la salle de bain, qui se trouvait exactement à la même place qu'à l'E.E.V. Mais comme pour tout le reste, la ressemblance s'arrêtait là. La pièce semblait avoir été ravagée par un tremblement de terre. Une partie du plafond s'était effondré, divisant la surface de moitié et remplissant ce qu'il restait de gravats en tout genre. Miraculeusement une douche semblait avoir survécu, même si à présent sa porte ne se résumait plus qu'à un bout de tissus rapiécé. Les toilettes, quant à elles, semblaient ne pas avoir eu cette chance, ce qui m'inquiéta quelque peu.
— Je sais ce n'est pas le grand luxe, mais l'eau est chaude et nous ne manquons pas de savon, s'excusa-t-elle avec un petit sourire. Quant aux toilettes, continua-t-elle avant que je n'ai eu le temps de poser la question, il faudra aller dans la chambre d'en face. Là-bas ils ont des toilettes mais pas de douche ! Donc nous partageons.
— Que s'est-il passer ici, demandais-je en posant mon fardeau sur un gros gravats plus plat que les autres.
— On ne sait pas exactement. Ses bâtiments sont abandonnés depuis des années tu sais. Bon je te laisse tranquille. Tu as besoin d'aide, me demanda-t-elle avec un petit signe de tête en direction de ma main blessée.
— Non, ça devrait aller, lui dis-je avec un petit sourire reconnaissant.
— Ok, si tu as un problème appelle moi, dit-elle avant de sortir en refermant la porte derrière elle.
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Isolated System
Ficção Científica*Vainqueur du concours Award Rentrée 2016 dans la catégorie science-fiction* Hayden fait partie des survivants. Descendante des quelques centaines de chanceux, rescapés du grand cataclysme ayant ravagé la terre, une centaine d'années auparavant...