Chapitre 14-1

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Dès que nous eûmes franchis la porte, le changement radical de décor m'arrêta net, et me laissa bouche-bée quelque secondes. Nous étions dans un couloir de béton, identique dans sa forme et ses proportions à ceux de l'école, mais la ressemblance s'arrêtait là. Les murs uniformément gris auxquels j'étais habituée depuis l'enfance, étaient ici recouverts d'une multitude de dessins gais et colorés, qui m'agressaient presque tellement le contraste était saisissant.

— Tu aimes notre déco personnelle ? Me demanda Connie en revenant sur ses pas, lorsqu'elle s'aperçut que j'étais restée figée à l'entrée du couloir. C'est un peu hétéroclite, mais tout ce gris nous déprimait à la longue. Alors nous avons décidé de prendre les choses en main. Tu pourras participer si ça te dis ?

— Mais...nous sommes où ici ? Me contentais-je de lui demander d'une voix basse et éraillée.

J'avais beau apprécier à leur juste valeur, tous les efforts qu'elle faisait pour engager la conversation et me mettre à l'aise, mais je n'arrivais pas à l'imiter. Trop de questions se bousculaient dans ma tête, combinées au stress et à la fatigue, je n'étais pas vraiment dans mon état normal et mes bonnes manières prenaient l'eau.

— Comment ça ? Gab ne t'a rien expliqué, me demanda-t-elle apparemment surprise.

— Eh bien, comment dire...il n'est pas du genre loquace. Ne pus-je m'empêcher d'ironiser malgré ma gorge douloureuse.

— Alors ça, c'est le moins que l'on puisse dire, s'esclaffa-t-elle bruyamment avant de se reprendre et de me fixer d'un air pensif. Mais alors pourquoi es-tu... ?

Elle s'interrompit brusquement, au moment où un flash blanc traversait ma vision, me laissant désorientée et au bord de l'évanouissement. Elle se précipita vers moi pour me soutenir et m'empêcher de tomber et cette fois-ci je ne la repoussais pas. Du moins dans un premier temps. Mais dès l'instant où je pus me tenir à nouveau seule sur mes jambes sans risquer la chute libre, je la repoussais d'un geste doux mais ferme.

— Ola ! Ça va aller, me demanda-t-elle d'une voix inquiète.

— Oui, ne vous inquiétez pas...juste un petit coup de fatigue, lui répondis-je d'une voix lasse.

— Tu peux me tutoyer tu sais, après tout on a presque le même âge...À moins que cela ne te dérange, me demanda-t-elle soudain l'air gênée.

— Non, non pas du tout, ne t'inquiète pas, m'empressais-je de la rassurer, n'aimant pas l'idée de la rendre mal à l'aise. Ça doit être à force de vouvoyer le professeur Lynch...c'est devenu un réflexe.

— Le prof... ? Ah oui Gab, se reprit-elle vivement un sourire malicieux se dessinant sur ses lèvres. On a tous été surpris quand Troy l'a désigné pour infiltrer l'E.E.V. J'avoue que j'ai toujours eu du mal à l'imaginer en professeur, continua-t-elle à babiller en rigolant. Il était comment ?

— Que...quoi...attends ! Lynch n'est pas professeur, arrivais-je enfin à lui demander en bredouillant, tellement je me sentais dépassée par les évènements.

J'avais enfin des infos mais bizarrement trop et pas assez à la fois pour que j'arrive à y comprendre quelque chose. Le moins que l'on puisse dire est que c'était frustrant. La pièce se remit brusquement à tourner autour de moi et je me rattrapais de justesse en m'appuyant contre le mur. Voyant qu'elle se précipitait une nouvelle fois pour m'aider, je lui fis comprendre d'un petit signe de la main, que ça allait.

— Bon je crois que les questions, les tiennes comme les miennes, peuvent attendre que tu ais mangé et que tu te sois reposée, me dit-elle gentiment et plus calmement. Tu peux marcher seule ou il te faut un coup de main ?

— Non ça ira, lui répondis-je du mieux que je le pus. Mais...

— Non, tout à l'heure, me dit-elle fermement mais sans se départir de son sourire, tout en reprenant sa marche. J'aurais déjà dû te montrer le dortoir et les parties communes. C'est de ma faute, je parle trop. Ici tout le monde me surnomme la pipelette et toi c'est quoi ?

Voyant que je la fixais, sans vraiment comprendre ce qu'elle me demandait, elle précisa ;

— Ton surnom c'est quoi ? Tu as bien un surnom ? Tout le monde en a un...

— Whisper, lui dis-je précipitamment la coupant dans sa tirade.

Malgré moi, un sourire commença à se former sur mes lèvres. L'entendre jacasser comme une pie était un peu stressant, mais aussi revigorant d'une certaine façon.

— Non ? Excellent, on va faire la paire. Je crois qu'on est vraiment faite pour s'entendre toutes les deux, s'esclaffa-t-elle en me faisant un clin d'œil. Puis sans attendre que je lui réponde, elle m'entraina plus avant dans les couloirs en continuant son babillage.

Elle parla tout le temps que dura notre trajet, qui heureusement pour mes jambes et mes oreilles, ne dura pas trop longtemps. J'essayais malgré tout, au milieu de tout ce bla-bla, de glaner quelques informations utiles. Mais mis à part le fait que pour me repérer dans ce dédale, je devais me fier aux indications inscrites sur les murs par les occupants, je ne compris pas grand-chose. C'est donc avec un grand soulagement que je la vis s'arrêter dans un couloir plus sobre que les autres, niveau déco. En revanche ils s'étaient vengés sur les portes ! Chacun des quatre battants en bois rafistolé, était sommairement peint d'une couleur différente, agrémenté de deux séries de lettres peintes en noire...Ps ou Ph.

— Laisse-moi deviner, ici c'est le dortoir des filles ? Arrivais-je à placer avant qu'elle ne m'interrompe, en lui désignant la porte recouverte de différents tons de rose d'un signe de tête.

— Et oui ! Nous sommes un peu limités en choix de couleur ici et les garçons avaient déjà réquisitionnés le bleu et le vert, alors... ! Plaisanta-t-elle en poussant la fameuse porte rose, qui s'ouvrit en grinçant légèrement.

— Et les lettres elles signifient quoi ?

— Oh ça c'est tout simple. Ps...pour psychique et Ph...pour physique, me dit-elle comme si c'était évident. Allez, tu viens ! M'interpella-t-elle en entrant dans la pièce, avant que je n'aie le temps de lui demander des explications.

Isolated SystemOù les histoires vivent. Découvrez maintenant