19.

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Est ce que tu te souviens qui tu étais avant que le monde te dise qui tu devais être ?

Je buvais mon deuxième verre de vodka quand la porte s'ouvrit.
Dehors il faisait nuit depuis longtemps et la lune brillait dans le ciel,énorme et ronde elle nous rappelait que nous n'étions rien.
Évidemment c'était mon frère.Il n'y avait que ma famille pour rentrer dans mon bureau sans frapper.Après tout avant d'être un homme d'affaire j'étais d'abord un frère,un fils,un neveu ou même un cousin.
Sauf pour elle.Pour elle je n'étais que son rafisseur et pourtant,pourtant elle me tenait tête.Son petit corps me provoquait rien que par sa présence ici alors qu'elle devrait comme toutes les autres servir dans un bordel.
Cette fille avait pris beaucoup trop de liberté.

- Tu voulais me voir ?
- Oui effectivement,répondis-je d'une voix morne.

Vinchenso se servit un verre de vodka.C'était certe cliché mais c'était vrai.Tous les Russes buvaient de la vodka.
Mon premier verre je l'ai tenu entre mes mains à onze ans.
Maintenant j'en avait vingt-cinq et pourtant je me revoyais encore à cette époque.L'époque de la rupture entre le bambin et l'homme.Pour certains ça pourrait paraître trop tôt mais j'étais le fils aîné,j'étais le digne successeur de mon père.J'avais des obligations.
Il se laissa tomber dans un fauteuil,le même qui,quelques heures plus tôt,était occupé par la fille Rosefield.

- Je t'écoute
- Je t'ai vu lui parler,dis-je sans m'en rendre compte.

Les mots étaient sorti tout seul.Ils avaient jailli de ma bouche et s'étaient alignés d'eux même afin de créer une phrase.
Vin sourit derrière son verre en cristal transparent un éclair de sournoiserie enfantine dans le regard.Mon frère a toujours été le plus malicieux de notre famille.
Enfin c'était toujours lui qui échafaudait les mauvais plans et dès que je le suivais dans ses aventures,sa finissait mal.
Je me rappelle de cette fois où il avait décidé de repeindre le bureau de notre père en rose parce que ce dernier lui avait interdit de sortir.
Nous avions fini la joue brûlante et le bureau de mon père a moitié repeint.
Maintenant lui aussi à grandi.Il à toujours quelques mimiques,souvenirs de son enfance agité,mais ce n'est plus le même.Il est plus sérieux,plus terre à terre.
Et soudain,j'eu l'impression d'avoir,au fil des années,échanger mon rôle avec celui de mon frère.
Maintenant c'est lui le sérieux et moi le diable.Au bien sûr étant gamin je n'étais pas insensible au charme de la rébellion ! Mais j'avais d'autre chose à faire qu'être perpétuellement en guerre contre l'autorité parentale.
Et puis je devais être un modèle pour mon frère et pour elle.

Ma petite sœur.

Je secouai la tête.

Maudits souvenirs.

Il y a bien longtemps que j'avais arrêté de vivre dans le passé.En réalité,moins j'y pensais mieux je me sentais.
Mais il m'arrivait parfois de replonger dedans simplement à cause d'un objet,d'un lieu ou d'une situation.
C'était là la magie des souvenirs,sans ton accord ils avaient grignoté une partie de ton âme.
Mes souvenirs faisaient désormais parti de moi et à jamais ils m'hanteraient.
J'avais beau être le chef de la mafia,contre ça je ne pouvais rien faire.

- Oui c'est exact,même si selon moi on ne peut pas appeler vraiment cela une discussion
- Je veux la voir souffrir,avouais-je à mon frère.

Je ne regardai pas sa tête tellement j'étais perdu dans la contemplation de mon verre,faisant couler le liquide de droite à gauche du cylindre ouvert.
Je n'avais pas besoin de le voir pour savoir sa réaction.Je connaissais mon frère mieux que personne.J'avais grandi avec lui et ses mimiques après tout.

- Tu ne devrais pas faire ça
- Pourquoi donc ?
- Parce que ce n'est pas elle Vladimir.Tu reportes la haine que tu as pour Sonya contre cette fille.

Mon frère était calme,comme toujours.Moi,j'étais énervé.
Ses mots n'étaient ni vrai ni faux.Pourtant,je ne sais pourquoi ils m'énervèrent au plus au point.
J'étais colériquement parlant,totalement instable.
Autrement dit j'étais caractériel.

- C'EST FAUX ! Hurlais-je en me levant.

Dans un coup de sang je projetai mon verre contre un mur de mon bureau.
Il s'écrase contre l'imposant amat de briques peintes et ses débris s'écrasèrent au sol.

Mon frère se leva et avant de s'en aller me lança une dernière réplique agaçante dont lui seul en a le secret :

- Tu sais que j'ai raison mon frère seulement tu n'es pas encore prêt à l'accepter.Tu fuis juste la vérité pour ne pas avoir à lui faire face.

La protégée du diable.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant