Chapitre 3-1

13.6K 1.3K 75
                                    






Elle essayait de me fixer de ses deux grands yeux dilatés par la détresse et la peur qui lui mangeaient le visage et ne paraissaient pas me voir.

— N'aies pas peur, lui murmurai-je aussi fortement que je l'osai pour qu'elle puisse m'entendre, tout en m'avançant d'un pas.

Le regard flou de la jeune fille essaya une nouvelle fois de se focaliser sur moi, mais sans y parvenir plus de quelques secondes d'affilées. Elle bougeait lentement la tête dans tous les sens, sans paraître comprendre ce que je lui disais. Elle avait l'air affolé et paniqué de quelqu'un coincé en plein cauchemar et bien que sa bouche s'ouvre et se ferme de façon sporadique, aucun son n'en sortait.

Je restai là, à l'observer bêtement sans trop savoir quoi faire, figée dans mon élan par son comportement déstabilisant. C'est alors que son regard se posa sur le morceau de verre toujours dans ma main et qu'elle sembla subitement reprendre ses esprits. Des larmes se mirent à couler sur ses joues, ses yeux toujours braqués sur ma main qui brandissait le tesson devant elle comme une arme menaçante.

C'est à cet instant seulement que je me rendis compte de ma posture. J'avais, en parlant, instinctivement mit ses mains en avant dans un geste d'apaisement...qui de son point de vue à elle, devait ressembler à tout autre chose ! Dans la pénombre et dans la situation plus que précaire dans laquelle elle se trouvait, j'imaginai très bien ce qu'elle pouvait penser. Je baissai alors précipitamment mes mains, en prenant garde de rendre mon couteau de fortune moins visible, mais sans le lâcher pour autant.

— Je ne te veux aucun mal. Je suis là pour t'aider, lui dis-je doucement. Tu comprends ce que je dis ?

Aucune réponse ne sortit de sa bouche tandis qu'elle continuait de me fixer d'un regard hagard et terrifié.

— Tu t'es emmêlée les pieds dans une corde et je n'arrivais pas à te libérer à mains nues donc...il a fallu que je trouve quelque chose pour la couper, continuai-je d'une voix explicative et apaisante tout en levant le morceau de verre devant moi d'un geste lent et un peu hésitant.

Une étincelle d'espoir sembla passer dans ses yeux, décidemment beaucoup trop grand pour son visage émacié. Elle les ferma ensuite un court instant, avant de rouvrir ses paupières et d'acquiescer maladroitement d'un léger signe de tête.

J'attendis quelques secondes supplémentaires pour être certaine qu'elle avait bien compris, puis approchai doucement avant de m'accroupir à ses côtés. Puis, avec des gestes lents et précautionneux pour ne pas l'effrayer d'avantage, je commençai à entailler la corde. À peine avais-je débuté, qu'elle se mit instinctivement à bouger et à se tortiller pour se libérer plus vite. Elle avait beau ne pas avoir beaucoup d'énergie, ni de force, cela était suffisant pour faire dévier la lame et risquer de la blesser.

— Tiens-toi tranquille ! lui dis-je d'une voix essoufflée à la limite de l'agacement, tout en lui en lui lançant un regard d'avertissement et en écartant rapidement le morceau effilé de sa peau pour ne pas la blesser par accident.

Sa réaction instinctive était logique et parfaitement compréhensible mais j'étais trop à bout de nerfs pour prendre des gants. Une fois que nous serions hors de danger je prendrais le temps de la rassurer et de la réconforter, mais pour le moment...ce n'était pas le plus urgent. Mon regard avait dû être éloquent, car elle arrêta de s'agiter presque instantanément, me permettant de reprendre ma tâche. Tâche qui s'avéra beaucoup plus laborieuse que prévue ! Car le bout de verre étant ce qu'il était, il avait pour principal qualité et inconvénient d'être tranchant...partout. Ce qui était parfait pour couper la corde, mais un problème de taille pour le tenir. Surtout que j'étais droitière et handicapée par ma blessure qui rendait ma main glissante à cause du sang et du tissu synthétique de mon blouson molletonné.

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant