Chapitre 33-1

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— Non mais tu pensais à quoi ? gronda-t-il d'une voix sourde à quelques centimètre de mon oreille en stoppant brutalement en plein milieu du couloir. Je me cache depuis des années et voilà que je vais devoir représenter une espèce qui me méprise, au milieu d'humains, sans péter les plombs ! C'est un cauchemar, râla-t-il en se prenant rageusement la tête entre les mains.

Intimidée et légèrement effrayée par sa colère, je me reculai de quelques pas.

— Excuse-moi, se reprit-il presque aussitôt en me lançant un regard d'excuse. Ton raisonnement est logique et tu n'y es pour rien...je ne devrais pas m'en prendre à toi...désolé.

— J'aurais peut-être dû t'en parler avant ? lui répondis-je froidement, vexée par son attitude. Mais...je n'ai pas réfléchis...pardonne-moi.

Sitôt la dernière syllabe prononcée, je tournai les talons et commençai à m'éloigner dans le couloir sans trop savoir où j'allais. Les remords le disputaient à la peine dans mon esprit, mais le plus inquiétant était la colère que je sentais enfler en moi, en même temps que ma...nouvelle personnalité...louve...colocataire ou je ne savais quoi, tentait de nouveau de remonter à la surface.

— Rose, attend ! m'interpela Nicolas en me retenant par le bras.

Sans réfléchir je lui arrachai mon bras en me retournant dans le même mouvement et avant que je ne me rende compte de ce que j'étais en train de faire, je l'avais repoussé de ma main et...projeté à plus de deux mètres !

Ahurie, je le regardai percuter le mur comme au ralenti sans vraiment comprendre ce que je voyais. C'est le bruit mat et sourd de son corps rencontrant le béton qui me sortit de ma transe.

— Oh...je...je suis désolée, m'exclamai-je en me précipitant vers lui, alors qu'une petite voix dans ma tête serinait « il l'a bien cherché quand même ! ». Je ne voulais pas...

— T'inquiète, c'est rien, me dit-il tandis qu'il se redressait en se massant l'épaule. Ta force grandit, c'est normal. Tu vas devoir apprendre à la contrôler.

Légèrement effrayée je regardai mes mains. Je ne me sentais pas plus forte qu'avant pourtant, subtilement différente, mais pas plus forte. Les mains de Nicolas se posèrent en douceur sur les miennes et je sursautai en levant le visage vers lui.

— Les changements sont progressifs et subtiles, me dit-il gentiment. Normalement je devrais t'accompagner et tout t'expliquer petit à petit mais avec tout ce cirque...je ne peux pas jouer mon rôle correctement. Comme en plus je vais devoir partir à cette...réunion...

— Tu n'es pas obligé d'y aller, m'empressai-je de lui dire en retirant mes mains des siennes...avec plus de douceur cette fois. Tu as raison, ce n'était pas une bonne idée, je n'aurais pas dû...

— Si, tu as eu raison, avoua-t-il dans un soupir. Nous n'avons pas le temps pour mes craintes ou mes états d'âmes. Je vais y aller, je n'ai pas le choix.

— Encore faudra-t-il que les autres soient d'accord, intervint Thomas d'un ton sombre en s'avançant vers nous.

— Ils seraient quand même mesquins de faire les difficiles puisque personne ne veut y aller ! lui rétorquai-je en me tournant vers lui.

— Vous ne connaissez pas les métamorphes ma chère, vous seriez surprise ! lança Akshay en nous rejoignant à son tour, son sempiternel sourire sardonique au coin des lèvres. Les loups garous, qui au passage étaient censés avoir disparus, n'ont jamais eu la réputation d'être très...posés et diplomates. Normal que cela suscite des appréhensions, non ?

— Parce qu'un métamorphe enragé et incontrôlable ce serait mieux peut-être ? m'énervai-je aussitôt.

Décidément cet homme me sortait par les yeux !

— Hé, ne tire pas sur le messager, gamine ! me rétorqua-t-il avec un sourire railleur.

— Tous le monde ne sait pas que je suis un loup-garou ? On est pas obligé de le leur dire. Vous n'avez qu'à arguer que j'ai une résistance naturelle élevée à cette drogue et le tour est joué.

— C'est une bonne approche, approuva Aaron mais...tu es certain d'y arriver ? Tu avais l'air affecté par les effets de cette substance, même si elle t'impactait moins que nous.

— J'arriverai à résister, affirma-t-il sans hésiter. Ce qui m'inquiète plus, ce sont certains changements involontaires qui pourraient survenir malgré moi et pourrait être remarqué, comme mes yeux passant subitement au jaune sous l'effet de la drogue par exemple.

— Porte des lentilles ! Vous avez décidé de finir la réunion dans le couloir ? Original ! C'est pour court-circuiter le piaf ?

— Linda ! Contrôle-toi, la rabroua Thomas d'un ton agacé. Cette situation n'est pas un jeu.

— Justement, vous êtes tous si...sinistre ! Il faut vous détendre un peu. Faire des têtes d'enterrement ni changera rien. C'est la merde, il faut vous faire une raison.

Je vis Aaron serrer les poings et Akshay lancer un regard assassin vers Lyn qui avait l'air de beaucoup s'amuser de la situation.

— Linda a raison sur un point, ne restons pas dans le couloir. Akshay, pourriez-vous la raccompagner, pour être sûr qu'elle ne se perde pas encore en route ? ironisa Thomas, en nous faisant signe de retourner dans la pseudo-salle de réunion.

— J'ai quelque chose à vous dire, lui répondit-il d'un air soudain très sérieux en nous emboîtant le pas. Je suis sûre que notre clown maison, saura retrouver son chemin toute seule. Sinon, elle aura affaire à moi !

Son ton, ainsi que l'intensité menaçante de son regard suffit pour une fois à faire obéir Lyn, sans qu'il n'ait besoin de se répéter. Il remonta d'un petit cran dans mon estime. J'avais beau trouver Lyn marrante, là, elle était juste énervante.

— Qu'y a-t-il Akshay ? demanda Thomas dès que la porte se fut refermée sur nous.

— En discutant avec Cat, j'ai eu une idée. Envoyer Nicolas à cette...réunion de la dernière chance, c'est une bonne solution...mais de secours seulement. Déjà, il ne pourra pas y aller seul. Les humains, eux, seront au minimum une bonne dizaine, un homme seul éveillerait forcément leurs soupçons et leur méfiance. Deuxièmement, il y aura peut-être d'autres métamorphes que l'on ne connait pas...

— Viens-en au fait ! l'interrompit Aaron, apparemment à bout de patience. Tu proposes quoi ?

— Retrouver le labo où était retenue Cat. D'après elle, il existerait un antidote. Si on le trouve, on aura une chance de plus de notre côté.

— Je croyais qu'elle ne se souvenait de rien, s'exclama Thomas, surpris.

— C'est en train de lui revenir petit à petit. Elle m'en a parlé dès que le souvenir lui est revenu.

— Elle se rappelle aussi où était le labo ?

— Malheureusement non, mais d'après elle, ce n'était pas très loin du terrain vague où Rose l'a trouvé.

— Il nous reste deux jours, c'est un coup à tenter. C'est même notre meilleure chance, approuva Aaron, bien qu'à contrecœur. Reste à savoir, qui envoyer ?

— C'est moi qui irais, dit Nicolas en se levant. Si on le trouve, cet endroit risque d'être pollué par cette substance, on ne peut pas se risquer à y introduire des métamorphes.

— Tu ne peux pas y aller tout seul ! Ce serait du suicide !

— Il ne sera pas seul, j'irais avec lui ! affirmai-je avant de me rendre vraiment compte de ce que je disais.

— Ca, c'est absolument hors de question ! grogna soudain Nicolas d'une voix implacable en me foudroyant du regard. 

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant