Chapitre 44-2

5.3K 666 85
                                    



La surprise me paralysa, mais heureusement pas Nicolas, qui parvint à dévier le coup mortel in-extrémis d'un geste flou de la main. La balle, ainsi écartée, l'atteignit néanmoins à l'épaule, l'arrachant violemment à mon étreinte et l'envoyant percuter le mur proche dans un grognement assourdis. J'entendis les rugissements indignés de Lin et d'Akshay, mêlé au rire sinistrement joyeux d'Ivory, tandis que la métamorphe se jetait sur Cooper pour tenter de le maîtriser.

La colère et la rage m'envahirent tandis que mon regard se transformait sous l'effet de l'adrénaline et de la haine que j'éprouvais pour ce monstre d'Ivory. Important ou pas pour notre cause, hors de question que ce psychopathe vive une minute de plus, pensai-je confusément en ramassant l'arme tombée au sol avant de me diriger vers le loup garou entravé comme une automate. Plus rien ne comptait, hormis mettre cette...chose hors d'état de nuire.

— N'essai même pas de m'en empêcher ! grondai-je d'une voix méconnaissable à Akshay en passant devant lui.

Il ne dit rien et se contenta de s'écarter d'un pas sur le côté, me donnant ainsi son approbation tacite. Je comblai la distance qui me séparait du loup garou en quelques secondes et sans hésitation, ni réflexion supplémentaire, je pointai l'arme sur la tête d'Ivory qui me regardait en rigolant et j'appuyai sur la détente.

Le recul me surpris et m'arracha presque l''arme des mains, tandis que la détonation m'explosait les tympans. Je m'attendais à ouvrir les yeux (que j'avais fermés par reflexe au moment du tir) une demi-seconde plus tard sur un Ivory sanglant et surtout très mort, une balle fichée entre les deux yeux, mais au lieu de ça, mon regard tomba...sur le vide ! Seul des moignons de chaines pendouillaient sans plus rien au bout. Comment était-ce possible ? Je lui avais tiré en pleine tête, même en étant mauvaise tireuse, si près cela aurait dû être imparable !

Un cri de douleur étouffé, suivit de plusieurs avertissements paniqués parvinrent enfin à mes oreilles bourdonnantes...mais trop tard ! Au moment où je commençai à me tourner en direction des cris, je sentis une lame glacée se plaquer contre mon cou, tandis que des bras forts et implacables m'immobilisaient par derrière.

— Lâche-là...immédiatement, ordonna Nicolas d'une voix saturée d'une rage froide en lâchant Cooper avant de s'avancer lentement vers nous. Enferme-le avec Storm, ordonna-t-il à Lin, sans se retourner, son regard flamboyant fixé sur moi et le monstre qui me plaquait contre lui.

Ses yeux brillaient d'une lueur orangée implacable, tandis qu'il dépassait le corps inerte d'Akshay, sa blessure à l'épaule parsemant le sol de gouttes écarlates et brillantes sur son passage.

— Tu es rapide pour un jeunot, je dois bien t'accorder ça, persifla Ivory dans mon dos d'une voix mauvaise. Mais tout s'est quand même déroulé comme je l'espérai. J'ai même réussis à tuer le terrible Akshay ! fanfaronna-t-il en s'esclaffant.

— Peut-être mais moi je ne suis pas mort et je ne te laisserai pas lui faire de mal.

La voix de Nicolas était emplit de menaces, mais le regard qu'il braquait sur la lame se trouvant en travers de ma gorge était empreint d'inquiétude, voir de peur. Frayeur qui ne m'avait pas encore atteinte, mais que je sentis enfler et m'envahir d'un coup alors que mon esprit enregistrait enfin tous ce qu'il venait de se passer en quelques secondes. Akshay, ne pouvait pas être mort, c'était impossible ! Comment Ivory avait-il fait pour se libérer si vite et inverser la situation ?

— Hmm...l'odeur de ta peur est entêtante, petite louve, me susurra Ivory à l'oreille me faisant frissonner. Tu réalises enfin, on dirait. Votre protecteur est mort, ton Alpha blessé et le nouveau membre de votre pathétique meute est sous mon contrôle. Je crois que l'on peut affirmer que vous êtes échec et mat ! Maintenant, vous allez me laisser partir d'ici sans faire d'histoire, ou je lui fais un nouveau sourire. Et pour confirmer ses dires, il appuya légèrement sur la lame.

Je sentis l'acier entailler ma peau qui céda sans difficulté envoyant une onde de douleur dans mon corps tandis que du sang se mettait à couler lentement sur ma poitrine.

— Arrête ça tout de suite !

— Sinon quoi ? Tu n'es aucunement en position de me donner des ordres ! aboya-t-il à Nicolas. Écartes-toi et laisse-nous passer, je l'emmène avec moi, ajouta-t-il en me poussant légèrement en avant pour que j'avance vers l'escalier.

Je me mis en marche à contrecœur, cherchant frénétiquement une parade pour ma dégager de son emprise, mais la lame toujours sous mon cou m'en empêchait. J'aperçus du coin de l'œil, le léger signe de tête de Nicolas me disant de ne rien tenter. Je me laissai donc pousser en avant tandis que tout le monde s'écartait sur notre passage. Nous montâmes les marches à une allure d'escargot et lorsque nous débouchâmes dans le couloir, Aaron nous attendait accompagné de plusieurs métamorphes, tous armés.

— Toi, Tigrou, ordonne à tes chatons de lâcher leurs armes tout de suite ou elle sera morte avant de toucher terre.

— Vas-y butte-là ! Qu'est-ce qu'on en a à faire d'elle de toute façon ! le provoqua l'un des métamorphes que je ne connaissais pas et qui me fixait avec un regard hostile.

Personne ne réagit, mis à part Nicolas, que j'entendis gronder d'indignation quelque part derrière moi. La poigne d'Ivory, s'intensifia autour de mon corps, me faisant gémir de douleur, tandis qu'il continuait de nous faire avancer latéralement le long du couloir, le dos plaqué au mur pour éviter toute surprise.

— Ce gringalet parle en votre nom à tous ? demanda-t-il d'un ton moqueur, bien qu'il me sembla un tout petit peu moins assuré, à moins que ce ne soit seulement un effet de mon imagination.

— Tu sais bien que non ! rugit Nicolas en débouchant des escaliers. Toi, tu ne perds rien pour attendre ! menaça-t-il le jeune métamorphe qui blêmit légèrement avant de reprendre contenance. Laisse-là s'en aller et je te promets que l'on te laissera partir.

— Tu me prends vraiment pour un crétin ! Ta parole ne vaut rien ici. Tu n'es qu'un paria au milieu d'eux. Tu aurais mieux fait de nous rejoindre lorsque tu en avais encore l'occasion...maintenant c'est trop tard !

Puis sans aucun signe avant-coureur et avec une vitesse ahurissante, il retira l'arme de sous ma gorge et me jeta sur son épaule avant de partir en courant vers la sortie. Je tentai de me débattre mais il me maintenait d'une poigne de fer et la vitesse hors normes de sa course me ballotait tellement en tous sens que j'en avais presque du mal à respirer. J'entendais la course et les cris des métamorphes et de Nicolas, lancés à notre poursuite, gênés par leur nombre et l'exiguïté du couloir. Lorsque nous débouchâmes à l'air libre dans un fracas de métal malmené, je tentai une nouvelle fois de me libérer, agrippant fermement le vêtement du loup garou pour gagner en force et dégager mes jambes.

Mes efforts restaient vains mais je le senti néanmoins ralentir sa course, m'encourageant à continuer malgré mon épuisement grandissant. Dans un dernier effort, je tentai de replier ma jambe droite et poussai un cri de joie lorsque je senti la main d'Ivory lâcher sa prise sur mon mollet. J'étais sur le point de tenter la même manœuvre avec l'autre jambe, quand une terrible douleur m'électrisa de la tête aux pieds, me faisant hurler.

— Tiens-toi tranquille ou je te découpe ! gronda-t-il en donnant un petit coup à la lame qui me transperçait le mollet.

Je ravalai le cri de souffrance qui essaya de franchir mes lèvres, je ne voulais pas lui faire se plaisir et préférais savourer ma petite victoire. J'étais parvenue à ralentir le ralentir et malgré la douleur et l'harassement qui perturbaient mes sens et ma concentration, je me forçai à garder les yeux ouvert, rivés sur l'ombre fauve et silencieuse qui nous suivait, synonyme d'espoir et de liberté. 

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant