Chapitre 26-1

6.8K 886 195
                                    


Le temps sembla se suspendre, puis avec une telle rapidité que leurs mouvements me parurent flous, Aaron se retrouva devant moi aux côtés de Nicolas, tandis que Thomas tenait Ivory en respect une lame argenté scintillant sous sa gorge.

— Ah, ah, ah, se mit-il à rire, visiblement indifférent à la menace de Thomas. Vous croyez vraiment que je serais venu sans un minimum de précaution ? Vous me prenez vraiment pour un débutant. Si je ne ressors pas d'ici sur mes deux pieds, mon clan attaquera cet endroit et croyez-moi sur parole, loup-garou ou pas, vous ne ferez pas le poids.

— On est peut-être prêts à courir le risque ? gronda Aaron.

— Vous peut-être, mais notre jeune chef de clan...je pense que non !

— Qu'est-ce que vous voulez ? réagit Thomas, en appuyant un peu plus sa lame contre la peau pâle d'Ivory, qui perdit momentanément son sourire.

— Ce que je veux...discuter, tout simplement discuter.

— Discuter ? Vous vous foutez de nous ! s'énerva Nicolas. Pourquoi nous menacer dans ce cas.

— Parce que je pense, non plutôt, je suis à présent certain que vous ne serez pas très...réceptif à ma proposition, lui répondit-il avec un petit sourire sarcastique qui me parut déplacer vu sa position plus que précaire.

— Quelque chose ne va pas, murmura Nicolas à Aaron qui acquiesça discrètement d'un simple signe de tête, faisant écho à mes pensées.

— Vous ne faites pas partie de la meute de Daphnée, lui demanda Thomas d'une voix de plus en plus suspicieuse.

— J'ai bien peur que non, en effet. En vérité, je suis là pour vous convaincre de rejoindre notre coalition.

— Non mais de quoi vous parlez ? s'enquit Nicolas, visiblement aussi largué que moi.

— Il fait partit du groupement Terra, cracha Aaron avec un dégout et une colère évidente à la face d'Ivory qui ne nia pas ses affirmations.

— On sait très bien tous les deux que tu n'utiliseras pas cette lame contre moi, dit Ivory à Thomas qui n'avait pas bouger d'un pouce. Lâche-moi que l'on puisse...

— Hors de question ! lui rétorqua ce dernier, une détermination farouche dans le regard. Qu'est-ce que c'est que ça...Terra ?

— C'est un groupement très ancien, réunissant les clans de métamorphes qui pensent que les humains sont de trop sur cette planète ! répondit Aaron à la place d'Ivory, d'une voix sourde et profondément écœurée. Dès qu'il est apparu que la grande révélation était imminente, ils sont sortis de leur trou à rat plus vite que des cafards. Ils sont venus me soudoyer à peine une heure après votre départ, ajouta-t-il à notre intention.

— Vu votre ton, je me doute de votre réponse, mais vous avez tort ! Les humains sont déjà en train de s'unir contre nous. Ils sont plus bien plus nombreux que nous ne le sommes...nous ne ferons pas le poids...

— Thomas, tuez-le ! lui ordonna Aaron alors qu'il se ruait vers les deux hommes au moment où Ivory basculait brusquement en arrière déséquilibrant Thomas et l'entrainant au sol avec lui.

Avant que je n'aie le temps de me rendre compte de ce qu'il se passait, Ivory était debout, le poignard de thomas à la main. Il s'apprêtait à le frapper, quand Aaron se jeta sur lui pour lui prendre son arme. Malgré la stature imposante de son adversaire, il s'en débarrassa sans aucune difficulté, envoyant le métamorphe valdinguer à l'autre bout de la pièce. Puis en quelques secondes il fut sur nous. Nicolas me repoussa en arrière pour me protéger mais ce geste lui couta de précieuse seconde qu'Ivory mit immédiatement à profit. D'un geste puissant et vicieux, il planta violemment la lame dans l'épaule de Nicolas, qui gémit de douleur sous l'impact, tandis qu'il lui chuchotait, « tu te crois vraiment seul ? » avant de tourner les talons pour s'enfuir.

À l'entente de cette plainte, quelque chose explosa en moi, une rage que je ne pensais pas posséder. Dans un cri inhumain, je me jetai sur la chose qui venait de blesser mon alpha. C'était peut-être un mâle de cavernes mais c'était mon clan, ma famille désormais et personne n'avait le droit de s'en prendre aux miens.

Certainement surpris par mon geste, il ne réagit pas assez vite et j'eu le temps de lui asséner un violent coup de poing en plein visage avant qu'il ne riposte en m'attrapant par les cheveux.

— Mais c'est que tu as du punch toi, dis-donc ! Si tu n'étais pas si jeune je t'aurais emmené avec moi, me susurra-t-il à l'oreille. Oh et puis après tout...pourquoi pas, ajouta-t-il en m'entraînant à reculons derrière lui.

Je me débattis, ruant en tous sens pour qu'il me lâche. J'étais tellement enragée que je ne sentais même pas la douleur. Nicolas qui se rendis compte de ce qu'il se passait mais était trop loin pour réagir à temps me lança un regard à la fois épouvanté et déterminé. D'une main sûre, il se saisit du manche du poignard toujours planté dans sa chair et dans le même mouvement flou, il l'arracha avant de lancer vers Ivory. L'arme l'atteignit à la main avant de retomber sur le sol dans un tintement et il me lâcha dans un cri de rage inarticulé. Avant que les trois métamorphes n'aient le temps de fondre de nouveau sur lui, il ouvrit la porte et se précipita dans le couloir.

— Courrez-lui après ! ordonna Thomas à Akshay qui venait d'apparaitre dans le couloir, très certainement en réaction aux bruits de lutte, avant de sortir en trombe à sa suite.

— Rose, ça va ? me demanda Nicolas d'une voix étrange en se précipitant vers moi, une main pressée contre sa blessure qui pissait le sang.

— Il faut te soigner, ça à l'air grave, lui dis-je en posant mes mains sur le sol pour me relever.

Ce n'est qu'à cette instant que je pris pleinement conscience des tremblements qui agitaient tout mon corps et m'empêchaient même de trouver la force suffisante pour me redresser sans aide.

— La lame n'était pas en argent, ça va aller, me dit-il en s'agenouillant près de moi. Il ne t'a pas blessé ?

— Non...non, lui répondis-je en regardant bêtement mon corps, sans vraiment le voir. Je...je ne sais plus vraiment ce qu'il s'est passée, lui avouai-je complètement déboussolée maintenant que l'adrénaline refluait et que ce qui m'avait poussé à agir était de nouveau en sommeil.

— Merci, me dit-il en m'attirant contre lui dans une étreinte maladroite.

Curieusement, cette fois-ci, son geste ne me fit pas réagir. Ce n'était qu'une étreinte de réconfort. Sentir sa chaleur traverser le tissu de mon vêtement et se répandre à la surface de ma peau me fit un bien fou. Et c'est dans ce cocon protecteur que j'attendis que mon corps s'apaise et que mes tremblements se calment. Ce n'est qu'au bout de quelques minutes que je me rendis compte que Thomas était revenu et que lui et Aaron nous observaient d'un regard curieux.

— Vous ne l'avez pas eu ? demanda inutilement Nicolas, la réponse étant évidente devant le visage courroucé et fermé de Thomas.

— Non ! ragea-t-il en donnant bien inutilement un coup de pied dans une chaise, qui alla se fracasser au sol dans un vacarme assourdissant. Pourquoi vous ne m'avez pas prévenu ? demanda-t-il en tournant un regard accusateur vers Aaron.

— Mais parce que je ne me doutais pas une seconde qu'ils viendraient vous voir ! s'exclama-t-il. Ne le prenez pas mal, mais vous êtes un clan mineur qui a à peine une semaine d'existence officiel, je ne pensais même pas qu'ils vous connaissaient.

— Vous avez raison, tout cela n'a pas de sens ! Pourquoi venir nous demander de s'allier à eux, nous n'avons aucun pouvoir...

— C'est à cause de moi...de nous maintenant, intervint Nicolas en me faisant un petit sourire triste tandis qu'il levait son visage harassé vers les deux métamorphes toujours debout. À cause de ce que nous sommes. C'est pour cela qu'ils sont d'abord allés voir Aaron. Je suppose qu'ils n'ont pas trop insisté lorsque tu as refusé ?

— Non, en effet ! Mais cela m'a fait assez peur pour que je cherche un autre abri provisoire pour le clan. Ils nous ont suivi, tu crois ?

— Non, je pense que c'est nous qu'ils ont suivi. Ils devaient avoir des sentinelles planquées dans les bois, au cas-où.

— Admettons, mais cela n'explique toujours pas pourquoi ni comment ils ont pu être au courant de ta...vraie nature ?

— Ivory vient de me dire que...je n'étais pas seul, lâcha Nicolas, un soupçon de peur et de surprise émaillant sa voix fatiguée

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant