Chapitre 44-1

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Nous restâmes tous les trois figés, à nous fixer bêtement sans réellement nous voir, ne sachant pas vraiment comment réagir. Même Lin, si prompte à rire et à se moquer de tout, semblait avoir perdue ses mots.

— On ne peut pas le laisser faire ça, affirma soudain Cooper dans un murmure concentré.

— Et tu comptes l'en empêcher comment, le louveteau ? le railla aussitôt Lin mais sans son sourire habituel. Tu te crois vraiment de taille à t'opposer à lui ? C'est ton Alpha, tu lui dois une obéissance absolue sous peine de te prendre une bonne raclée !

— C'est vrai ce qu'elle dit ? me demanda Cooper, le teint légèrement plus pâle me sembla-t-il.

— En théorie, oui, mais ce n'est pas vraiment le moment de parler de ça ! m'énervai-je alors que je reprenais soudain mes esprits et me précipitais sur la porte à la suite de Nicolas.

J'entendis les autres me suivre mais ne pris même pas le temps de les en dissuader. Je courrai dans les couloirs laissant mon instinct me guider vers l'escalier sombre menant au sous-sol. Je dévalai les marches comme dans un rêve et déboulai à l'instant où Nicolas allait entrer dans la cellule où était enfermé Storm, une arme à la main.

— Tu ne peux pas faire ça ! m'écriai-je à la grande surprise de tous les métamorphes présents.

— Rose, exhala Nicolas dans un soupir triste et résigné, tu sais que c'est mon devoir.

— Laisse-lui au moins une chance de changer d'avis ! arguai-je en posant ma main sur son bras pour qu'il se retourne vers moi et me regarde enfin.

— Il n'est plus lui-même, Rose. Regarde-le !

Son ton peiné et son regard hanté me firent lever les yeux vers l'inspecteur. Il était debout mais tenait à peine sur ses jambes. Accroché aux barreaux comme un noyé, ses yeux rouges nous fixaient d'un regard haineux et fou tandis qu'un filet de bave coulait lentement de sa bouche.

— Pourquoi ? Pourquoi est-il comme ça ? demanda Cooper d'une voix essoufflé en débouchant à son tour des escaliers, une Lin furieuse sur les talons.

— J'ai essayé de le retenir, se défendit-elle lorsque Nicolas et Akshay, la foudroyèrent du regard. Mais c'est qu'il est fort pour un gringalet ! Et je n'allais quand même pas l'assommer à nouveau !

— Si, tu aurais dû ! gronda Nicolas d'une voix dont toute patience avait disparue. Maintenant, fais-le remonter là-haut et fais en sorte qu'il y reste.

— Et si je ne veux pas ? s'opposa Cooper d'une voix légèrement tremblante.

— Crois-moi sur parole, tu ne veux pas me défier en ce moment ! le menaça-t-il d'une voix inquiétante en se retournant lentement vers lui. Ce que j'ai à faire est déjà bien assez difficile sans que j'ai besoin de spectateurs. C'est aussi valable pour toi, Rose.

Un rire malveillant et moqueur s'éleva de la gauche de la pièce. Ivory, dont j'avais presque oublié la présence, était toujours enchainé aux pieds d'Akshay et se contorsionnait pour pouvoir profiter du spectacle, un horrible sourire sur les lèvres. En moins d'une seconde Akshay le fit taire efficacement d'un formidable coup de pied dans la tête qui aurait, à coup sûr, tuer n'importe qui de normal. Mais Ivory était tout sauf normal et malgré un regard un peu flou, se remit à rire de plus belle.

— Aidez-moi ! dit soudain Storm d'une voix grave et rauque, ses yeux rougeoyant fixés sur Nicolas.

— C'est toujours ce que vous voulez ? lui demanda-t-il en lui montrant l'arme de poing qu'il tenait dans sa main droite.

Il commença à hocher la tête avec un effort visible, lorsqu'il se prit soudain la tête dans les mains dans un grognement de souffrance, avant de souffler un « non » à peine audible. Je retins mon souffle, croyant avoir mal entendu, lorsque le rire d'Ivory s'éleva de nouveau, réveillant tous mes instincts de louve.

— Akshay ! Ce salaud l'influence. Utilise toute la force nécessaire mais mets-le-moi K.O, maintenant !

— Avec un immense plaisir ! Mais si je le tus par inadvertance, je ne veux pas entendre de reproche ! lui répondit-il avec un grand sourire carnassier, alors qu'il commençait à battre le loup-garou comme plâtre, avec un plaisir évident.

Soudain, comme si quelqu'un venait d'appuyer sur un bouton, Storm se redressa. Même s'il faisait toujours peine à voir, son regard était plus clair et son visage moins crispé par la douleur, la colère et la peur.

— Il est mort ? arriva-t-il à demander d'une voix méconnaissable.

— Juste inconscient pour le moment, mais je peux arranger ça très vite ! lui répondit Akshay.

— Je l'entendais murmurer dans ma tête, chuchota l'inspecteur à Nicolas. C'est un monstre, pourquoi le gardez-vous en vie ?

— Pour la paix, lui répondit Nicolas dans un petit rire pathétique. Si nous le livrons aux humains en gage de notre bonne fois, je pense qu'ils accepteront le traité sans discuter.

— Alors tuez-moi ! lui répondit l'inspecteur d'une voix résolue.

— Non ! m'exclamai-je. Ce n'est pas si horrible d'être un loup-garou ! Vous avez hésité il y a deux secondes, vous voulez vivre j'en suis certaine. Votre loup veut vivre.

— Justement, c'est cette force, cette chose en moi qui me pousse à rester en vie et elle le fait pour les mauvaises raisons ! Le pouvoir, la force, la violence...le meurtre. S'il reste en vie, je ne pourrais jamais me défaire de son emprise et ce... cette chose, c'est le mal incarné. Je ne veux pas devenir sa marionnette.

— Pourquoi vous ne le livrez pas aux humains comme prévu, mais au lieu de le leur livrer, vous l'exécuter devant eux ? Vous feriez un exemple, montreriez aux humains que les métamorphes sont impitoyables lorsqu'on les trahit...d'une pierre trois coups ! dit Lin, son petit sourire suffisant et moqueur de retour sur ses lèvres.

Si je n'avais pas été de nature si réservé, je lui aurais sauté au cou ! C'était une idée de génie et vu les regards que s'échangeaient Nicolas et Akshay, ils semblaient du même avis que moi. Bien qu'il faille sans doute y mettre quelques formes, si nous ne voulions pas passer pour des monstres brutaux assoiffés de sang, me dis-je en réfléchissant au problème.

— Je sais que je vous ai fait une promesse et si c'est toujours votre souhait, je la respecterai, dit Nicolas à Storm d'un ton solennel en le regardant droit dans les yeux. Mais le meurtre de sang-froid étant loin d'être l'un de mes passe-temps préféré, prenez le temps de réfléchir. Si l'on vous promet de tuer Ivory dans quelques jours, êtes-vous prêt à attendre jusque-là pour prendre votre décision ?

— Mais s'il cherche encore à me contrôler, à m'utiliser contre vous ? Tant qu'il est en vie, je suis dangereux et peut-être même après...comment savoir ?

— Justement, il est trop tôt pour se précipiter. On vous gardera enfermé et sous bonne garde tant que cette ordure respirera et je lui ferais cracher tout ce qu'il sait sur les liens qui vous lie à lui avant de l'exécuter, lui promis Nicolas d'une voix emplit de promesse douloureuse.

Je vis le doute emplir le regard de l'inspecteur qui finit malgré tout par hocher lentement la tête, avant de s'assoir lourdement sur le sol de bêton, l'air perdu et harassé. Sans réfléchir je m'avançai et me jetai dans les bras de Nicolas, qui surpris, en lâcha son arme sur le sol avant de m'enlacer tendrement en fourrant sa tête dans mon cou dans un long soupir de soulagement.

C'est alors que, sans aucun signe avant-coureur, Cooper se précipita sur l'arme, s'en saisit et dans le même mouvement, tira sur Nicolas. 

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant