Chapitre 10-2

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Cela devint évident à l'instant où il écarta les mèches de devant son visage d'un geste agacé. C'était l'homme qui s'était agenouillé près de moi dans ma chambre. J'eus un mouvement de recul involontaire, qui fut de toute façon réduit à néant par le lit se trouvant toujours derrière moi.

— N'ayez pas peur. Je ne vous veux aucun mal...au contraire, commença-t-il d'une voix grave teintée d'un léger agacement, ses deux mains placées devant lui en un geste apaisant mais maladroit. Je vous ai apporté à manger.

—Vous êtes...

Je m'interrompis brusquement. À bien y regarder, je n'étais plus absolument certaine que ce soit lui. Il lui ressemblait beaucoup mais ses yeux tiraient légèrement sur le vert et il me semblait plus jeune comme...inachevé. Il essayait de toute évidence de jouer les gros durs, mais il semblait trop jeune ou quelque part trop insouciant pour ça. Même s'il s'efforçait de le cacher.

— Non, ce n'est pas moi qui vous ai amené ici, c'est mon demi-frère, confirma-t-il mon analyse d'une voix assurée mais démentie par sa posture tout sauf à l'aise. Moi c'est Daniel...

— Qu'est-ce que je fais ici ? le coupai-je pendant que j'avais le courage de m'exprimer. Vous ne pouvez pas me garder ici. Je veux rentrer chez moi, dis-je d'une voix un peu moins tremblante tandis que je commençai à me relever en prenant appui sur le sol.

— Moi je ne suis là que pour vous apporter ce plateau. C'est mon demi-frère qui se chargera des explications. Après tout, vous êtes son problème à présent, déclara-t-il d'une voix de plus en plus ferme, tout en appuyant exagérément sur le "son".

Puis il quitta la pièce si vite que je n'eus même pas le temps d'ouvrir la bouche pour demander ce que cela voulait dire exactement. J'entendis de nouveau la clé tourner dans la serrure et le stress remonta en flèche.

Je me sentais prise au piège. Je n'avais aucun moyen de quitter cette chambre pour le moment et cela me rendait limite claustrophobe. Je ne m'approchai même pas du plateau malgré ma faim. Pourtant ce que je pouvais apercevoir d'ici semblait appétissant, mais il était hors de question que je touche à quoi que ce soit tant que je n'en saurai pas plus sur cet endroit. Pour ce que j'en savais, il n'était pas impossible qu'ils aient encore glissé des somnifères dans la nourriture...ou pire.

Je me dirigeai donc vers la seule autre porte de la pièce et qui, vu son emplacement, ne pouvait être qu'un dressing ou une salle de bain. Mais par acquis de conscience, je me devais d'aller vérifier. Effectivement, c'était une salle de bain magnifique et superbement décorée à l'instar de la chambre. Je refermai la porte sans même y pénétrer et retournai m'assoir sur le lit pour attendre...n'ayant pas grand-chose d'autre à faire. La lassitude, autant physique et nerveuse que psychologique, commençait à me gagner émoussant mes sens et me faisant presque somnoler.

Je comprenais de mieux en mieux pourquoi les victimes d'enlèvements, même celles qui n'avaient pas été brutalisées par leurs geôliers, avaient besoin d'un psy une fois libérées. On avait beau ne pas m'avoir fait le moindre mal depuis que j'étais dans cette maison, je ne m'en sentais pas moins totalement impuissante et terrifiée. Je n'eus heureusement pas à attendre longtemps, avant que la porte ne s'ouvre de nouveau, cette fois-ci sur l'homme présent dans ma chambre.

J'aurais reconnu son regard n'importe où. Sûrement dû au fait que c'était la dernière chose que j'avais vu avant de m'évanouir. Me remémorer ces instants, me rappela tout ce qu'il s'était passé avant pour en arriver à cette triste conclusion, y compris les bribes de conversations.

— Vous êtes Raakshaksa ? lui demandai-je en bredouillant maladroitement ce que je pensais être son prénom.

S'il fut surpris que je connaisse son nom, il ne le montra pas. Mais ses lèvres s'étirèrent en un petit sourire cynique tandis qu'il s'avançait d'un pas dans la pièce.

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant