Chapitre 20-2

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J'endiguai de justesse le mouvement de recul que mon instinct de conservation m'avait dicté dans toute sa sagesse et soutins son regard sans flancher.

— Quoi que tu puisses être, tu es forcément moins dangereux que les deux tigres féroces qui voulaient nous bouffer, non ? Donc moi ça me va ! lui balançai-je en le tutoyant volontairement pour donner plus de poids à ma remarque légère et tenter de détendre l'atmosphère.

Son air surprit était cocasse et je faillis pouffer de rire comme une gamine tellement j'étais sur les nerfs.

— Tu n'as donc aucune jugeote, ni aucun instinct de survie ? gronda-t-il d'un ton énervé à quelques centimètres de mon visage. Quand des êtres comme nous te disent de te méfier, du devrais avoir peur, ou au moins les écouter !

— Oh mais j'ai peur ! rétorquai-je sur le même ton excédé. Je me suis même terrifiée ! Mais cela servirait à quoi que je me roule en boule en pleurant ? A rien ! Donc j'essaie de ne pas trop réfléchir et je me fie à mon instinct qui ne m'a pas trop mal conseillé jusqu'à maintenant, puisque je suis toujours en vie !

Quelque chose passa dans son regard. De la curiosité, du respect, autre chose, je n'aurais su le dire avec précision mais j'avais éveillé son intérêt. Restait à savoir si c'était une bonne chose ou non.

— Mais à l'instant présent, c'est surtout mon bon sens qui parle, repris-je d'une voix un peu moins agressive. Depuis le début tu cherches à me protéger, contrairement à la plupart des membres de ton clan. Alors quoi que tu sois, je ne pense pas que tu représentes une menace pour moi.

— Tu ne sais pas de quoi tu parles ! s'exclama-t-il d'un ton douloureux.

— Évidemment que non puisque tu ne m'expliques rien ! Tu as peur de quoi exactement ? Que je fuis en courant ? Je pense que, dans l'immédiat, tu es tranquille de ce côté ! m'énervai-je en désignant le grenier poussiéreux dans lequel nous nous trouvions d'un grand geste du bras.

Il ne me répondit pas et se contenta de me foudroyer d'un regard noir qui aurait eu plus d'impact s'il ne s'était pas mis à grimacer en appuyant sur sa blessure.

— C'est idiot, laisse-moi regarder ! dis-je en m'avançant d'un pas vers lui.

— ça nous avancera à quoi ? Tu n'es pas médecin que je sache ! De plus, avec tes yeux d'humaines, tu n'y verras rien !

— Tu comptes donc rester là à grimacer en perdant ton sang ?

— Cela devrait s'arrêter dans quelques minutes.

— C'est déjà ce que tu avais dit tout à l'heure et ça n'a pas l'air de s'arranger.

— Tu ne lâches jamais l'affaire ? me demanda-t-il dans un grondement menaçant.

— Pas quand je pense avoir raison, ajoutai-je en m'avançant vers lui.

J'avais beau fanfaronner, en réalité je n'en menais pas large. Il avait raison sur plusieurs points, je n'y connaissais rien en premier secours, je n'y voyais pas à deux mètres et en plus...il n'était pas humain ! Enfin, pas complètement. Mais je savais aussi que nous serions bloqués ici tant qu'il saignerait et j'avais moins peur de lui qu'envie de sortir de ce trou à rat !

C'est donc une main tremblante que j'approchai avec hésitation de lui, craignant quand même un peu sa réaction. Il me fixa intensément quelques secondes puis dans un soupir mi- agacé, mi- résigné, fit un pas supplémentaire en direction de la lucarne et laissa retomber son bras le long de son flanc. Je pris ça comme un consentement et une invitation à m'approcher, ce que je fis. Avec des gestes peu assurés je me saisis d'un pan de son vêtement et tentai de le relever pour accéder à sa blessure. Le petit soupir de douleur qu'il poussa, associé à la crispation involontaire de tout son corps, me fit stopper net mon geste.

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant