Chapitre 43-1

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— Rose, ce n'est vraiment pas le moment de t'inquiéter de ces choses-là...

— Parce qu'il y a un bon moment pour ça ? lui rétorquai-je du tac au tac, d'une voix angoissée et peinée.

Je savais qu'il avait raison, bien sûr, mais je ne parvenais pas à penser à autre chose. Les interrogations, la peur, l'angoisse, tournaient en boucle dans mon esprit bouleversé et je n'arrivais pas à imaginer une fin heureuse à toute cette histoire.

— Plus tard, lorsque l'urgence sera passée, je te promets que l'on prendra le temps de discuter. Je répondrai à toutes tes questions et ça ira. Tu es la seule à douter ici, tu le sais ?

Son sourire doux et son ton léger apaisèrent momentanément mon angoisse et je me surpris même à lui sourire timidement en retour. J'espérai de tout cœur qu'il avait raison, mais ne pouvais m'empêcher de douter.

— Rose, j'ai raison ! m'affirma-t-il en emprisonnant mes mains dans les siennes. Et je vais te le prouver, viens ! ajouta-t-il en se levant pour m'entraîner à sa suite.

Un peu surprise par ce brusque revirement je le suivi, surprise et je dois bien l'avouer, un peu curieuse. Nous n'allâmes pas loin puisque nous nous arrêtâmes quelques minutes plus tard devant la porte de l'infirmerie.

— Qu'est-ce qu'on fait là ? Il y a un problème ?

— Un problème tout à fait dans des cordes. J'ai besoin que tu entres là-dedans et que tu calmes Cooper.

— Quoi ! Pourquoi moi ?

— Parce qu'il te connait, que tu viens de passer par la même épreuve que lui et que...cela va te prouver que tu es à ta place et que tu n'as aucune raison de t'inquiéter, ajouta-t-il d'une voix douce en effleurant mes lèvres d'un baiser, comme pour me convaincre.

— Comment cela pourrait-il...

— Arrête de réfléchir et agis ! m'intima-t-il soudain en ouvrant la porte, avant de me pousser légèrement dans le dos pour me faire entrer, avant de refermer aussitôt le battant derrière moi.

Non mais il blaguait là ! À peine deux secondes auparavant, il m'embrassait et voilà qu'il me jetait dans le grand bain !

Cooper, qui faisait les cents pas dans la pièce comme un lion en cage, s'arrêta aussitôt qu'il entendit la porte s'ouvrir. Il s'apprêtait de toute évidence à se ruer sur la porte mais stoppa son geste agressif dès qu'il s'aperçût que c'était moi. Nous nous observâmes durant quelques secondes, ne sachant pas trop quoi dire, surtout de mon côté ! Comment annoncer à quelqu'un qu'il est devenu contre son gré un monstre de cauchemar, n'existant jusqu'à présent que dans les romans ? Et bien, on galère ! Merci beaucoup Nico, persiflai-je pour moi-même, bien décidé à lui faire comprendre ce que je pensais de son idée débile la prochaine fois que je le croiserai.

— Il m'a fait quoi ? me demanda-t-il enfin d'un ton résigné que je ne m'attendais pas à entendre sortir de sa bouche.

— Il t'a sauvé la vie, lui répondis-je en m'avançant de quelques pas vers lui, mains bien en évidence pour ne pas qu'il panique.

Je ne savais pas vraiment pourquoi je faisais cela, mais je sentais que c'était la bonne attitude à adopter. Le mouvement de recul et le coup d'œil anxieux qu'il braqua sur moi me confirma que suivre mon instinct était la bonne chose à faire.

— Je sais, c'est ce que l'on n'arrête pas de me répéter, mais à quel prix ?

— Vous...tu sais ce qu'il est ? lui demandai-je en allant m'assoir sur le lit, l'incitant d'un léger signe de tête à faire de même.

— Pas un métamorphe apparemment, puisque la mutation ne peut se transmettre que génétiquement. Pourtant je me sens...différent...plus vivant...plus libre...plus...

— Plus, c'est le mot qui convient, m'empressai-je de le couper en apercevant une lueur jaunâtre envahir momentanément ses iris. Mais tu ne dois pas te laisser submerger par tes nouveaux sens et tes nouvelles perceptions, elles vont se développer petit à petit.

— Pourquoi c'est toi que l'on m'envoi ? Où est-il ? Pourquoi ne m'affronte-t-il pas en face.

— Parce qu'il ne veut pas te faire de mal, compris-je au moment où je lui répondais. Tu es effrayé, perdu et en colère, tu risquerais d'avoir une mauvaise réaction en le voyant maintenant.

— Parce qu'il m'a attaqué sauvagement ? Cet...cet animal...son visage était...et ses dents ! Il, il m'a attaqué, il m'a mordu et...

— Cooper, regarde-moi ! Touche ton cou, tu n'as plus rien, tu le sens ?

La panique dilatait toujours ses pupilles quand il passa une main tremblante sur l'endroit où les crocs de Nicolas avaient transpercé sa chair.

— Cooper, tu es devenu un loup garou, comme Nicolas et moi ! lui dis-je sans plus prendre de gants.

Il n'y avait pas de bonne façon d'annoncer ce genre de nouvelle, alors autant y aller franco ! D'autant plus, qu'au fond de lui, il le savait déjà. Je le compris à la lueur de résignation dans son regard. Il avait juste besoin d'entendre l'impossible pour qu'il devienne réel. Ce n'était pas pour cela que c'était plus facile à accepter, constatai-je lorsque la colère remplaça la peur en quelques secondes.

— Il t'a attaqué aussi ?

— Il l'a fait pour me sauver, tout comme pour toi. La seule différence, c'est qu'il a eu le temps de m'expliquer et d'avoir mon accord.

— Tu as donné ton accord pour subir...ça ! s'exclama-t-il visiblement effaré par ma réponse.

— C'est mieux que d'être mort, non ? lui rétorquai-je sèchement en me relevant d'un mouvement brusque. J'ai accepté car je ne voulais pas mourir bêtement d'une septicémie à a peine vingt-cinq ans et...je ne le regrette pas.

Ce n'est que lorsque les mots sortirent de ma bouche que je sus qu'ils étaient vrais. J'étais déboussolée et effrayée mais je ne regrettais rien. Un sentiment d'accomplissement et de sérénité m'envahit soudain. Ce ne serait peut-être pas facile, mais j'y arriverai, je trouverai ma place, il le fallait, je lui devais bien ça réalisai-je soudain en levant un regard nouveau et déterminé vers Cooper.

— J'ai réagis comme toi, au début, mais c'était par instinct et parce que Nicolas était devant moi. Toi, tu n'as pas d'excuse ! Si tu dois en vouloir à quelqu'un, c'est à l'inspecteur Storm et à moi que tu dois t'en prendre.

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— Il ne voulait pas te transformer. En fait, avant nous deux, il s'était toujours refuser à le faire...

— C'est vrai, intervint Nicolas en pénétrant dans la pièce. Je l'ai fait parce qu'ils me l'ont demandé et aussi...parce que tu m'as sauvé la vie dans ce labo. Tu étais en train de mourir sous nos yeux et on ne pouvait rien faire pour te sauver. Ils ont pris la décision à ce moment-là, maintenant, je te donne l'occasion d'exercer ton libre arbitre. Si tu ne veux pas vivre comme cela, je le comprendrai.

— Si c'est le cas, qu'est-ce que cela implique ?

— Un choix. Soit tu acceptes cette nouvelle vie que nous t'offrons, sois tu la refuses, lui expliqua-t-il d'une voix solennel en s'approchant prudemment de quelques pas.

Voyant que Cooper ne réagissait pas, il continua à s'approcher et sortant une arme de derrière son dos, la posa en douceur sur le lit, crosse en direction de Cooper.

— La vie, quasiment éternelle, ou la mort ? Si tu veux mettre fin à tes jours, je ne t'en empêcherai pas car ce sera ton choix, mais je ne prendrai pas la décision à ta place. Maintenant, c'est à toi de décider, lui dit-il en se positionnant lentement devant moi, son regard aiguisé braqué sur le jeune loup perdu qui lui faisait face. 

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant