Chapitre 40-2

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— Quelle idée exactement avez-vous en tête ? Car me faire crapahuter dans des bois inconnus, dans le noir, entouré d'individus hostiles et nyctalopes, ne me parait pas être l'idée du siècle bizarrement ! Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué et contrairement à vous, je n'ai plus vingt ans !

— Vous n'êtes certainement pas le plus vieux de l'assemblée, croyez-moi ! ne pus-je m'empêcher de marmonner en regardant brusquement mes pieds.

De toute évidence trop fort même pour des oreilles humaines, puisque les deux hommes se retournèrent aussitôt vers moi. Storm, me fixant d'un regard surpris et perplexe tandis que celui de Nicolas était juste agacé et légèrement désapprobateur.

— Bon, pour la faire courte, je suis un peu plus vieux que j'en ai l'air ! balança Nicolas à Storm, tout en récupérant des grenades qu'ils tandis à l'inspecteur. Balancer ça sur les méchants, c'est dans vos cordes ?

— ça doit être comme le vélo, maugréa l'inspecteur en se saisissant précautionneusement des explosifs qu'il finit par poser à terre près de la roue arrière de la voiture.

— Je ne vais pas vous lâcher seul dans les bois où vous envoyer à l'abattoir ! le rassura-t-il alors qu'il continuait à fourrager dans le coffre. Vous allez nous suivre sur une certaine distance, lorsque je vous ferais signe, vous vous arrêterez et vous dissimulerez dans les bois. Attendez que nous soyons entrés à l'intérieur du bâtiment et déclenchez votre chrono...vous avez une montre ?

— Oui, j'ai une montre, se contenta de répondre Storm.

— Vous attendrez exactement vingt minutes et vous balancerez les grenades le plus loin possible du bâtiment pour faire diversion. Vous n'aurez que quelques secondes pour vous enfuir mais ce sera suffisant ! La vue et l'ouïe des métamorphes seront momentanément perturbées par les explosions. Revenez à la voiture et conduisez jusqu'à la prochaine ville...on vous y rejoindra.

— Pourquoi vingt minutes ?

De toutes les questions qui se bousculaient dans ma tête, celle que posa l'inspecteur d'une voix presque résignée, n'aurait franchement pas été mon premier choix.

— Parce que c'est le temps qu'il me faudra pour évaluer la situation et tenter de les raisonner.

— Les raisonner...vraiment ? Vous me prenez pour un débutant ou quoi ! s'énerva soudain Storm en s'avançant de quelques pas vers Nicolas. Votre plan ce n'est rien d'autre qu'une foutu mission suicide !

— Même si elle est infime j'ai une chance de les convaincre, lui répondit Nicolas d'un ton calme et neutre qui m'étonna face à l'agressivité de l'inspecteur. Je ne pensais pas que mon bien être vous tenait à cœur ? ajouta-t-il d'un ton sibyllin en réduisant encore l'écart qui les séparait.

— Vous ! Que vous vous fassiez tuer, je m'en fou totalement ! Mais je refuse que vous entrainiez Rose là-dedans !

— Ah voilà, nous y sommes enfin ! J'attendais cette phrase depuis des heures. Vous dévoilez enfin votre jeu. Vous n'en avez rien à faire d'éviter une guerre, vous n'êtes là que pour la protéger de moi, c'est bien cela ?

J'étais tellement surprise par le changement abrupt de direction de la conversation que je restai pétrifiée, la bouche ouverte avec l'air certainement aussi intelligent qu'une carpe hors de l'eau.

— Ne vous donnez pas tant d'importance Monsieur le grand méchant loup ! Je suis là, car les évènements m'y ont poussé et que je sais aussi que vous êtes certainement notre meilleure chance d'éviter un désastre. Mais je sais également que j'ai une responsabilité envers ces jeunes.

— Celle de les protéger de moi, c'est ça ? gronda Nicolas, ses yeux commençant à lancer de dangereux éclairs dorés.

— Sans lui, nous serions tous les deux mort, intervins-je en m'approchant des deux hommes.

Je posai doucement ma main sur le bras de Nicolas, pour lui montrer que j'étais de son côté et que je le soutenais dans ses décisions, qui pour moi, étaient les bonnes.

— J'apprécie votre implication, mais si vous le faite pour moi, pour me protéger, c'est inutile. J'ai une nouvelle famille à présent, Nicolas et les personnes détenues contre leur volonté là-bas dans ce bunker, en font aussi partie. Alors, je vais tenter d'aller les sauver, que vous nous aidiez ou non, ajoutai-je d'un ton doux mais sans réplique tandis que la main de Nicolas cherchait la mienne.

Je vis quelque chose, une lueur, passer dans le regard de l'inspecteur lorsque ses yeux se posèrent sur nos mains à présent entrelacés.

— C'est tout ce que je voulais savoir jeune Rose. Je voulais être certain que c'était bien votre choix et pas un effet secondaire de la...transformation. Je ne suis ni votre ennemi, ni votre rival, ajouta-t-il à Nicolas dans un petit rire bref ? J'ai largement passé l'âge !

— Si cela avait été le cas, vous seriez déjà mort ! ajouta Nicolas si bas que l'inspecteur, fort heureusement, ne l'entendit pas.

— Vous pouvez compter sur moi. Mais qu'en est-il de Cooper ? S'il se réveil pendant que je suis seul avec lui ?

— Il devrait être plus calme à son réveil. Par précaution, servez-vous de ça, ajouta Nicolas en agitant des menottes sous le nez de l'inspecteur. Mais uniquement lorsque vous serez partis d'ici et relativement à l'abri, il doit pouvoir se défendre le cas échéant.

L'inspecteur s'en saisit d'un air circonspect mais ne dit rien. Les minutes suivantes se déroulèrent dans un silence nerveux, entrecoupé par le son de nos préparatifs. Je sentais le stress, la peur et la tension monter en moi à mesure de notre départ imminent.

— On va laisser Cooper là, tout seul ? demandai-je discrètement à Nicolas qui me tendait une arme que je refusai vivement d'un signe de tête.

— Nous n'avons pas le choix. Il n'est pas réveillé, ses blessures étaient sérieuse, son corps a besoin de temps pour régénérer. Il devrait encore tenir trente minutes, le temps que l'inspecteur revienne.

— Tu crois qu'il va s'en sortir ?

— Qui ça ? Storm ? Oui, ce que je lui demande de faire ne présente pas de danger pour quelqu'un comme lui. Normalement, il ne devrait pas y avoir de problème. Rose, prend cette arme, tu pourrais en avoir besoin.

— Pour quoi faire ? Ils vont nous fouiller de toute façon, non ? En plus je ne sais pas m'en servir et tu n'as pas le temps de m'expliquer, alors...

— Ce n'est pas compliqué, me répondit-il aussitôt. Tu enlèves la sécurité ici, tu vises et tu tires ! Maintenant, ne discutes pas et prend-le.

Devant son ton autoritaire et surtout son air inquiet, je finis par me saisir de l'arme à contrecœur, réalisant qu'il n'était pas du tout certain que tout allait bien se passer. De toute manière quel autre choix avions nous ?

Quelques minutes plus tard, nous nous engageâmes dans les bois, Storm sur nos talons et Cooper toujours endormi sur la banquette arrière. Le reverrions-nous ? Aurait-il l'occasion de s'habituer à sa nouvelle nature et nous de le lui apprendre ? Où allions tous mourir bêtement, tout ça pour sauver des humains qui n'en avait rien à faire de nous ! Toutes ses interrogations tournaient toujours en boucle dans ma tête lorsque Nicolas fit signe à Storm de s'arrêter, alors que nous continuions notre progression sans aucun soucis de discrétion.

Nous n'avions pas fait dix pas supplémentaires que trois silhouettes tombèrent soudain du ciel, sautant des arbres nous surplombants et braquant aussitôt leurs armes sur nos têtes.

— Laissez tomber vos armes au sol et avancez sans discuter, sinon vous êtes morts. 

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant